Star Trek Discovery : Critique 4.13 Coming Home
STAR TREK DISCOVERY
Date de diffusion : 18/03/2022
Plateforme de diffusion : Pluto TV
Épisode : 4.13 Coming Home
Réalisateur : Olatunde Osunsanmi
Scénariste : Michelle Paradise
Interprètes : Sonequa Martin-Green, Doug Jones, Anthony Rapp, Wilson Cruz, Blu del Barrio et David Ajala
LA CRITIQUE FM
Question du jour. Que doit-on attendre du final d’une saison d’une série aussi emblématique que Star Trek. Et bien, j’aurais tendance à dire des surprises et des événements inattendus, une résolution qui nous emporte vers l’infini et au-delà. Malheureusement, encore une fois, ce n’est pas le cas. Tout ce qui devait arriver est arrivé, point de surprises dans ce final de cette saison 4.
Star Trek Discovery a toujours pris pour fondement la primauté de l’émotion sur la raison et ce final de saison, qui aurait pu être le final de la série, met cette thématique encore plus haute que d’habitude.
Si vous n’avez pas encore regardé cet épisode, par pitié, n’oubliez pas de mettre des serpillières en dessous de votre écran plat. Car les yeux humides de l’intégralité du cast sur cet épisode risque d’inonder votre appartement.
Autre question du jour. Je me demande encore comment on peut justifier d’avoir avec les 10-C une communication aussi facile, aussi fluide. Tout ça me paraît hautement impossible alors qu’elle est si différente de nous. Quelle est la probabilité de tomber sur une espèce extraterrestre totalement et à 100% compatible avec le débordement de sentiments à la Burnham ? Quasi nulle...
Il y a quand même une surprise, le retour inespéré de Tilly. Naaaan je déconne ! En fait la seule surprise, c’est l’identité de la présidente de la Terre.
Alors oui, pour le peuple américain et certainement une grande partie du monde anglo-saxon, je pense que Stacey Abrams est une figure connue et qu’il y a une vraie signification à la voir interpréter ce rôle. Mais pour 95% de la population terrienne qui serait amenée à regarder Star Trek Discovery, il faut bien dire qu’elle n’évoque pas grand chose.
Ce n’est pas première fois que Star Trek fait appel à des personnalités connues. On se rappellera la présence de Stephen Hawking dans un épisode de La nouvelle génération. Ce qui au niveau de la franchise avait une signification bien plus universelle...
Quoiqu’il en soit, qu’on aime ou qu’on déteste, Star Trek Discovery reste désormais fidèle à ses fondamentaux pour le pire et le meilleur, même si pour certains, c’est acté définitivement, c’est pour le pire et le pire.
NOTE SAISON 4
LA CRITIQUE YR
Dans la mesure où Discovery 04x12 Species Ten-C concentrait l’ambition thématique et le rhème de la quatrième saison – aussi bancal et embryonnaire qu’ils aient été – Discovery 04x13 Coming Home ne présente aucune surprise dialectique ni défi cognitif, étant donné la prévisibilité d’une diégèse dont l’utilitarisme ne pourrait être davantage transparent.
En y sacrifiant au passage le moteur sporique (donc la possibilité de retour instantané dans l’espace de la Fédération), l’USS Discovery réussit à s’arracher à l’orbe énergétique (qui le retenait) afin de stopper le vaisseau-Transformer avant qu’il ne s’empare de la source d’énergie et donc ne provoque en cascade l’effondrement de l’hyperfield, l’extermination de l’espèce 10-C, et la mise en péril de la Terre & Ni’Var. De leur côté, Book et Reno réussissent à franchir les champs de force grâce au collier du chat Grudge (!!!) et neutralisent Tarka (malgré son bouclier personnel). Mais celui-ci avait préalablement verrouillé la navigation au moyen d’une clef fractale récursive. Jett sera alors renvoyée à bord de l’USS Discovery par Booker, restant quant à lui sur son navire et animé par une insondable culpabilité sacrificielle...
Pour dévier la trajectoire et endommager la navigation du vaisseau-Transformer, la générale terrienne Ndoye le percutera au moyen d’une navette – telle une kamikaze (mais elle sera téléportée par Owosekun une fraction de seconde avant l’explosion). Cleveland ne réussira en revanche pas à être rapatrié sur l’USS Discovery suite à une téléportation incomplète, et Tarka mourra dans l’explosion du vaisseau-Transformer projeté contre l’hyperfield (avec l’espoir de rejoindre son Nexus, alias Kayalise, et son ami/amant Oros).
Une tentative de communication télépathique de T’Rina (il était temps d’y songer !) révélera que les 10-C forment une société tellement harmonieuse et fusionnelle qu’ils se considèrent "un". Iceux ne pouvaient "donc" envisager d’eux-mêmes que l’équipage de l’USS Discovery ne soient comme les 10-C, c’est-à-dire solidaire ou complice des renégats du vaisseau-Transformer. L’intervention de Burnham et Ndoye les convaincra du contraire, et partant, de la multiplicité des humanoïdes.
La communication reprendra donc là où elle fut interrompu dans Discovery 04x12 Species Ten-C. Cette fois, douze représentants partiront dans l’aéronef ovoïde qui les conduira dans une bulle atmosphérique protectrice déployée sur un éperon rocheux suspendu au cœur de l’une des géantes gazeuses… pour un face à face en live avec les créatures 10-C lovecraftiennes (s’apparentant à de gigantesques carpes pourvues de tentacules et d’un large front émettant de multiples signaux lumineux).
Très vite, Burnham et la présidente Rillak les convaincront du préjudice infligé par leur DMA (les 10-C avaient juste manqué de s’assurer qu’il n’y avait pas de vie sensient là où ils la déployaient), puis s’émouvant des larmes généreuses de Burnham (du fait en raison de la disparition de son "un" personnel), ils "ressusciteront" – telles des divinités – Booker (en réalité, les 10-C avaient intercepté le flux de téléportation interrompu sans trop comprendre de quoi il s’agissait). Après avoir repris ses esprits, ce dernier assènera une vibrante plaidoirie 100% New Age et écologiste sur l’interconnexion entre toutes les vies de l’univers et la pollution spatiale infligée par DMA, achevant de persuader les 10-C d’abandonner définitivement leur entreprise de collecte d’énergie pour alimenter la protection murale illusoire de leur hyperfield.
Avec la satisfaction du devoir accompli et le soulagement de savoir leurs planètes sauvées, l’équipage de l’USS Discovery regagne alors l’espace de l’UFP via à un trou de ver ouvert pour l’occasion par l’espèce 10-C, après que celle-ci a désactivé l’hyperfield et s’est engagée à "nettoyer" les dégâts infligés par les DMA dans la Voie Lactée.
Ni’Var et la Terre auront échappé de peu à la destruction (leur bouclier planétaire les protégeant momentanément des chutes de débris avant-coureurs). L’amiral Vance était venu en personne pour superviser lui-même l’évacuation, quoique secondé par l’indispensable Tilly. Autant dire que les retrouvailles finales entre Michael et Sylvia seront aussi lacrymales et humides qu’entre Michael et Cleveland après sa fausse mort… et que durant tout le premier contact avec l’espèce 10-C. Book sera finalement condamné par l’UFP à des travaux d’intérêt général et envoyé vers Europa pour assister des délocalisés, tandis que Rillak proposera à Mary-Sue le commandement de l’USS Voyager (en guise de réussite du test du Kobayashi Maru upgradé auquel elle avait en quelque sorte échoué en début de saison)…
Comme à la fin de chacune des trois saisons précédentes, l’épisode s’achèvera par le traditionnel monologue "édifiant" de Burnham vantant la beauté des connexions et des réseaux sociaux, entrecoupées de scènes feel good exhibitionnistes au sein des monades tendrement réunies.
L’épilogue offrira aux trekkers le retour de la Terre (co-fondatrice de l’UFP) au bercail, dont la présidente n’est autre que Stacey Abrams en personne, figure emblématique s’il en est de l’US Democratic Party et de l’activisme afro-américain.
Alors, les trekkies, heureux ?
Mais il n’est même pas nécessaire de sortir la loupe ou le tamis pour constater que toute la construction narrative se borne à un alignement de "what the fuck", de "ta gueule c’est magique", de nawaks, de bullshits... tant l’empressement externaliste des showrunners à délivrer leur leçon de moraline a dévoré toute velléité de worldbuilding et de rigueur internaliste.
Mais en dresser la liste exhaustive est un exercice aussi peu sexy que l’arrêté comptable qui précède le dépôt de bilan...
Commençons par les hors-d’œuvre (en "bullet points") :
La "station spirale" de Fedefleet (à la fois siège de la Fédération + QG de Starfleet) est devenue une plateforme baladeuse, nomade, et même opérationnelle. Outre l’incongruité du symbole, il y aurait de quoi gloser sur la confusion entre la politique et le militaire, une ambiguïté qui trouve son origine dans la première perpétration anti-trekkienne d’Alex Kurtzman, à savoir ST 2009, où l’UFP elle-même était déjà retconée et redéfinie comme "a peacekeeping armada" !
L’amiral Vance a donc décidé de placer Fedefleet en orbite de la Terre pour aider à évacuer ! Mais euh... pourquoi la Terre plutôt que Ni’Var... alors que Ni’Var est membre de l’UFP tandis que la Terre ne l’est pas (à ce stade) ? En outre, pourquoi la Terre ne prend-elle pas en charge sa propre évacuation puisque depuis Discovery 03x03 People Of Earth, elle n’a cessé de revendiquer de façon martiale son isolationnisme et son autosuffisance ?
Sera surtout mise à l’honneur l’implication démonstrative et proactive de Tilly à chaque étape de l’opération... jusqu’à la surérogation du sacrifice final où l’amiral et Sylvia resteront seuls à bord de Fedefleet pour couvrir la fuite des exilés. L’exhibition est sans appel : sans Tilly-du-23ème siècle, Vance-du-32ème siècle ne s’en sortait pas (Sylvia connait par exemple mieux que le chef d’état-major les vaisseaux de Starfleet à l’exemple de l’USS Mitchell évacuant l’intégralité de la colonie de Titan).
Tilly se prend pour une bad ass, et elle embringue dans l’évacuation de la Terre sa promotion de cadets croisés dans Discovery 04x04 All Is Possible, en particulier l’Orion Harral et le Tellarite Taahz Gorev… mais paradoxalement ces derniers ne font rien d’utile si ce n’est le chœur antique et des moulinets avec leurs bras.
Le rôle effectif que la station Fedefleet joue dans l’évacuation reste difficile à cerner. Les vaisseaux de Starfleet sont suffisamment avancés pour gérer eux-mêmes en réseau ad hoc leurs coordinations opérationnelles, ils n’ont donc aucunement besoin d’un hub ou d’un nod. De plus, l’idée du "covering fire" au bénéfice des vaisseaux d’évacuation en partance fait l’effet d’une mouche du coche, puisqu’ils ne sont exposés qu’à des débris spatiaux que leur armement propre est largement capable de détruire ou de refouler. Et pourquoi la station se place-t-elle devant et non derrière le bouclier planétaire (une exposition inutile alors que ledit bouclier peut-être configuré pour laisser passer les tirs de protection/couvertures alliés) ? Finalement, la station Fedefleet ne serait utile que si elle mettait à profit son vaste volume pour évacuer elle-même davantage de réfugiés. Sauf que justement, elle n’en accueille aucun, et c’est même son propre personnel qui prendra la fuite dans les autres vaisseaux… laissant en outre Fedefleet (et son chef d’état-major) partager le sort potentiellement létal de la Terre qui n’est même plus membre de l’UFP ce moment-là (pas formidable pour l’avenir de la Fédération si Burnham & co n’avaient pas réussi leur premier contact avec les 10-C).
Au mieux 450 000 évacués/exilés pour la Terre et pas davantage pour Ni’Var (sur plusieurs milliards d’habitants probables), c’est absolument dérisoire au regard des moyens dont est supposée disposer Starfleet du 32ème siècle depuis la "guérison" du Burn : auto-téléportation instantanée en impulsion peut-être même en distorsion (au 24ème siècle il était possible de téléporter des centaines de personnes à la fois, alors au 32ème…), voyages en distorsion quasi-instantanée (comme n’ont cessé de le montrer les épisodes des troisième et quatrième saisons)... Une rotation bien organisée avec la planète habitable non exposée la plus proche (par exemple Alpha Centuri) aurait dû permettre d’évacuer industriellement les Terriens en dépit de l’urgence, et les chiffres auraient dû au minimum s’élever à plusieurs millions…
De plus, sauf à parler sans cesse de la colonie de Titan, aucune référence n’est faite aux autres colonies terriennes du système solaire (comme New Berlin, Utopia Planitia…) pourtant quasiment aussi nombreuses que dans l’univers de The Expanse et fatalement autant exposées à la DMA que la Terre (si Ni’Var/Vulcain à 16 AL l’était aussi).
Dans l’hyperfield, Stamets met le marché suivant entre les mains de Burnham : pour se donner une chance de stopper Tarka afin de sauver les négociations avec les 10-C, il faut sortir de force de l’orbe. Or lorsque l’USS Discovery emploie usuellement le spore drive, l’énergie déchargée est convertie en quantité de mouvement qui propulse le navire dans réseau mycélien. Mais en restant immobile, cette énergie emmagasinée se déchargerait dans l’orbe et le désagrégerait. Mais en retour, le spore drive brulerait (et ne serait réparable qu’en station), ce qui placerait l’USS Discovery à des décennies de la Fédération à distorsion maximale. Cette justification est crédible seulement en apparence, mais en réalité, elle est incohérente à plusieurs titres. Puisque Discovery 04x10 The Galactic Barrier avait établi (en contredisant au passage la première saison) qu’il n’y a pas de réseau mycélien hors de la Voie Lactée (sans quoi l’USS Discovery aurait pu "jumper" depuis longtemps hors de l’orbe), cela signifie que la source d’énergie est endogène (I.e. contenue dans le vaisseau faute de réseau mycélien). Elle aurait donc pu être déchargée hors du vaisseau autrement, sans transiter par le spore drive et donc sans l’endommager. Par ailleurs, dès le 29ème siècle, Starfleet avait les moyens d’aller instantanément n’importe où (et n’importe quand) dans l’univers (cf. ST VOY 05x25 Relativity). Alors pourquoi le 32ème siècle serait-il soudain revenu à la durée des voyages à distorsion du 24ème, d’autant plus que les saisons 3 et 4 de Discovery n’ont cessé de mettre en scène des voyages spatiaux instantanés (même hors spore drive) ? Pis, dès le 23ème siècle, la Galactic Barrier était à la portée de l’USS Enterprise sans nécessiter des décennies de voyages depuis l’espace de l’UFP (cf. ST TOS 01x01 Where No Man Has Gone Before et ST TOS 02x21 By Any Other Name). Bien sûr, aussitôt que Burnham accepte (après quelques hésitations) de payer le "prix" imposé par Stamets, on devine aussi sec que ce sont les 10-C qui fourniront le ticket de retour (le série Discovery étant incapable d’avoir l’audace d’achever sa quatrième saison à la façon d’un nouveau ST VOY, indépendamment de l’anachronisme).
Paniquant devant les conséquences possibles de l’assaut lancé par Tarka à seulement quatre heures de l’apocalypse terrienne et vulcaine, dont l’effet déjà perceptible est l’interruption brutale du canal de communication "mathématico-phéromonal", la présidente T’Rina prend l’initiative d’établir un contact télépathique avec les 10-C. Si le premier réflexe du spectateur est d’être soulagé à l’idée que les scénaristes y aient quand même pensé (mieux vaut tard que jamais), l’enchaînement des événements ne réduit hélas pas rétrospectivement l’incohérence profonde dénoncée dans l’épisode Discovery 04x12 Species Ten-C. D’autant plus que Saru fait remarquer qu’établir un lien télépathique avec une espèce inconnue est dangereux de bien des manières difficiles à anticiper. Or justement, c’est bien la raison pour laquelle il eût fallu envisager un premier contact télépathique dès le départ (lorsqu’il y avait encore des dizaines d’heures avant la deadline), et surtout en s’en donnant les moyens, c’est-à-dire en ayant emmené sur le Discovery une équipe de télépathes expérimentés et pluri-espèces (les meilleurs éléments que comptent l’UFP, disposant e.g. comme les Betazoides de capacité de télépathie distante (et non postulant un contact physique comme le mind meld vulcain). Certes, DIS n’étant pas un retcon près, T’Rina se contentera de tendre la main devant un hublot de la cafeteria, et hop, établira le contact avec les lovecraftiens en une seconde… ce qui redéfinit mine de rien le cadre d’application et le modus operandi de la fusion mentale vulcaine. Et si celle-ci s’avère éprouvante pour la Vulcaine (au point de la faire défaillir mentalement et engendrer une épistaxis) du fait de la structure mentale très exotique des 10-C (formant un collectif quand bien même non borg ou plus exactement un unitarisme), cela ne réduit aucunement la légitimité de ce mode de "communication", surtout que les violentes émotions éprouvées par les 10-C (terreur, colère, désarroi) auraient justement été évitées en amont. Confirmant au centuple que pour une mission diplomatique et de "first contact" aussi vitale pour l’UFP et aussi centrale pour la saison entière, l’impréparation et l’inconséquence de Starfleet et de l’UFP sont ici crasses… à l’image de l’épisode et de la série elle-même. Est-ce que les showrunners – dont la "connaissance" de Star Trek se borne de toute évidence aux wikis en ligne – ont-ils seulement conscience que dès le 24ème siècle de ST TNG, les télépathes étaient la pierre angulaire de toutes les premiers contacts non conventionnels et non verbaux ? Connaissent-ils par exemple l’efficacité d’un Tam Elbrun dans l’exceptionnel épisode ST TNG 03x20 Tin Man pour établir un premier contact avec un vaisseau vivant (Gomtuu) qui n’était pas moins cyclopéen ni moins indéchiffrable pour les humanoïdes non télépathes que l’espèce 10-C ?! Alors quid de cette équipée grandiloquente du 32ème siècle au seuil de l’anéantissement... mais qui n’est même pas fichue de disposer des ressources standards des missions de routine du 24ème siècle ?! Le "syndrome idiocratie" dans tous ses états, aussi bien côté personnages que côté scénaristes…
L’objectif de Tarka est de s’emparer – grâce à un "gravimetric beam" (≠ "tractor beam") émis par le vaisseau-Transformer – de la source d’alimentation enfermée dans un alliage de silicium-ellanium (comme pour le contrôleur de la DMA) et alimentant non seulement l’hyperfield mais également la DMA à travers un "casement breach" (dénomination du trou de ver artificiel créé par l’espèce 10-C pour "miner" la Voie Lactée). Afin d’intimider de façon manipulatoire les spectateurs, l’épisode Discovery 04x12 Species Ten-C n’aura cessé de vendre la prétendue supériorité écrasante des 10-C (au point de comparer les humanoïdes à des "singes équipés de pierres") et de faire un usage très impropre de l’échelle de Kardachev (évaluant l’espèce 10-C à 2 ou 3, alors que c’est précisément le score de la Fédération). Mais dans Discovery 04x13 Coming Home, force est de constater qu’hormis la maîtrise de trous de ver artificiels pour siphonner la boronite à distance (afin d’alimenter le gigantesque bouclier de leur système stellaire), l’écart d’évolution avec l’UFP se mesure tout au plus en puissance énergétique (pas même globale cumulée mais seulement locale) et non en degré ou en nature. Paradoxalement, les humanoïdes prennent même le dessus à bien des reprises : le vaisseau-Transformer est tellement réactif et dynamique qu’il échappe systématiquement aux orbes envoyés par les 10-C pour le recapturer ; puis Tarka se rapproche du "casement breach" pour lancer un "gravimetric beam" à destination de la source d’énergie (une opération qui dure quand même quinze minutes, inexplicablement long au demeurant), mais les 10-C cessent la poursuite prétendument par peur de se rapprocher du flux de plasma… alors que les orbes sont pourtant des mécanismes inanimés commandables à distance comme des drones)… Et du coup, plutôt que d’intervenir sur la technologie qu’ils ont eux-mêmes créés et afin de s’auto-préserver eux-mêmes (car ne pouvant ignorer que le vol de Tarka provoquerait leur extermination), les 10-C se réfugient dans la terreur passive et stérile (comme le révèle le "mind meld" initié par T’Rina). Du coup, ce sont les humanoïdes – prétendument très "inférieurs" – qui neutralisent le vaisseau-Transformer, réussissant donc là où les aliens réputés très "supérieurs" auront été incapable. Et il serait possible d’en dire autant pour la langue des 10-C que les humanoïdes "inférieurs" réussissent à décrypter – certes moyennant de nombreuses triches conceptuelles et complexités non assumées d’un épisode à l’autre (cf. plus bas) – alors qu’il n’y a pas eu la moindre velléité de réciprocité de la part des lovecraftiens "supérieurs". Dès lors, il est permis de douter de la "hiérarchie évolutionniste" que la quatrième saison entière de DIS et notamment ses ultimes épisodes ont tenté de promouvoir. Cela ressemble à s’y méprendre à un enfumage (ou à un effet d’annonce) destiné à exacerber artificiellement les enjeux, mais qui ne survit pas au principe de réalité…
Le collier électronique de Grudge permet à Booker et à Reno de traverser le champ de force (de la "prison" improvisée sur la passerelle du vaisseau-Transformer) et même le bouclier répulsif (individuel de Tarka) au motif que la chatte de Clevelant n’aimait pas les hologrammes et qu’un perturbateur holographique avait été bricolé dessus. Cela offrira à l’épisode son "comic relief" (lorsqu’une chatière apparaîtra dans le champ de force), mais l’argument reste un peu léger pour prétendre passer à travers des systèmes de sécurité qui ne sont pas de nature holographique. Soit une forme de retcon des technologies trekkiennes.
Lorsque Book comprend qu’il ni lui ni même l’ingénieure Reno ne réussiront à reprendre le contrôle de la navigation (et des communication) du vaisseau-Transformer à seulement quelques minutes du "casement breach", il récupère son combadge-téléporteur (que lui avait confisqué Tarka, gisant désormais inanimé au sol) pour le donner à Jett, tant pour lui sauver la vie que pour qu’elle mette au parfum l’équipage du Discovery. Quant à Cleveland, il se résout à se rester à bord du son vaisseau jusqu’à la fin, tel un authentique capitaine coulant avec son navire, qui plus avec l’espoir de ranimer Tarka et le convaincre de lui rendre le contrôle du vaisseau avant la catastrophe, et suffisamment rongé par la culpabilité de s’être retrouvé associé à ce "savant fou" pour laisser avec fatalisme Burnham prendre les décisions les plus extrêmes le concernant. Cette forme de "rédemption" qui ne dit pas son nom pourrait constituer le seul moment satisfaisant de l’épisode (quoique classiquement hollywoodien). Sauf que s’il est si simple d’employer un auto-téléporteur pour se téléporter du vaisseau-Transformer vers l’USS Discovery, et ce à travers tout le système stellaire des 10-C à l’intérieur de l’hyperfield, et même possiblement à travers l’orbe ("casement breach" (car encore impossible pour Book de deviner que Burnham s’en était émancipée) ou en pleine distorsion (pour le vaisseau destinataire comme dans ST 2009)…. alors l’inverse devrait être vrai, et l’USS Discovery aurait déjà dû téléporter (avant même de se débarrasser de l’orbe) une équipe d’assaut à bord du vaisseau-Transformer (qui est équipé d’un "pattern interrupter" contre les téléportations sortantes non consenties mais pas les téléportations entrantes). Evidemment, si l’épisode avait été un minimum logique envers ses hypothèses de départ, rien de ce qui a été relaté et mis en scène ne l’aurait été, du moins ainsi.
Pour le scientifique réputé le plus brillant, le plus intelligent, et le plus cynique de l’UFP, Ruon Tarka fait décidément pitié par sa façon de s’accrocher au mythe naïf et enfantin de Kayalise. De toute évidence, la quatrième saison de Discovery a tenté de recycler (dans une version longue et mélodramatique) le Dr Soran en quête de Nexus dans ST Generation. Sauf que le Nexus était une réalité tangible à propos de laquelle les témoignages objectifs ne manquaient pas (Guinan en tête). Mais ici, il s’agit uniquement du paradis de la croyance spirituelle du peuple de l’ami/amant Oros, dont l’existence n’est aucunement démontrée sur un plan scientifique. Tout le narratif tire-larme sur les souffrances passées de Tarka (notamment via Jett Reno qui s’y met après Culber et Booker) ont pour fonction d’enfumer un profilage psychologique très bancal. Quand bien même la machine inventée conjointement par Oros et Tarka durant leur commune captivité permettrait de voyager à travers les multivers, cela n’impliquerait pour autant aucunement la possibilité d’atteindre Kayalise (si tant est que ce Jannah aka paradis d’Allah existe), et l’infinitude des multivers rend très improbable la possibilité d’y retrouver Oros (si tant est qu’il se soit bien échappé par ce biais du camp de travail de l’Emerald Chain). Et pourtant, au mépris de toute logique, Tarka s’accroche à ce mythe anti-scientifique au point de trahir répétitivement la confiance de Book (auquel il déclare pourtant tenir) et exposer à des génocides aussi bien les 10-C que la Terre et Ni’Var… et ce dans le but de s’emparer d’une source d’énergie pharamineuse dont Oros n’a pourtant pas eu besoin. En outre, comment se fait-il que Ruon ignore l’une des principales applications du spore drive (dont il avait pourtant la charge de l’adaptation au Starfleet du 32ème siècle), à savoir la possibilité de voyager entre les multivers (cf. Mirror-Lorca et la première saison de Discovery). Par contre, il suffira que Book se mette à parler à Tarka comme à un môme (à la fin de Discovery 04x13 Coming Home) pour que ce dernier renonce à sa lubie génocidaire (mais trop tard bien sûr vu qu’il ne dispose plus du temps nécessaire pour déverrouiller le cryptage de la navigation), troquant à la place une espérance en son téléporteur multidimensionnel sans source d’énergie, autant dire en une mort simple. Par-delà le sentiment de profond gâchis de caractérisation, c’est surtout une pesante sensation de gratuité que laisse derrière lui Ruon Tarka, un personnage-fonction qui avait un potentiel mais dont les scénaristes n’ont rien fait de cohérent ni même d’intéressant. Il était pourtant servi par un excellent acteur, Shawn Doyle, ayant fait des merveilles dans The Expanse…
Il y a de quoi s’étonner que Burnham ne réclame pas la clémence de l’UFP pour Book et que ce soit sa nouvelle meilleure copine, la présidente Rillak, qui plaide l’indulgence ! En réalité, le chéri de Michael non seulement ne méritait pas la condamnation aux travaux d’intérêt général (aucune base légale à cette condamnation, au pire, il aurait dû être gracié par la présidente), mais il méritait même d’être décoré. Pour mémoire, outre d’avoir en amont des circonstances atténuantes pour être le dernier survivant d’un monde exterminé (Kwejian et d’avoir été l’interprète de presque la moitié des électeurs (à deux doigts de recueillir la majorité si Burnham avait été moins éloquente) de la super-Fédération sans existence légale de Discovery 04x07 But To Connect, Cleveland n’est pas membre de l’UFP, il n’est pas officier de Starfleet, il n’a pas volé le prototype de spore drive (c’est Tarka), il a négocié l’isolynium hors des territoires de la Fédération (donc rien d’illégal), Burnham avait autorité a négocier avec Book un accord légalement engageant et suspensif sur la subordination de l’offensive à la diplomatie, seul Ruon a construit et fait usage de l’arme isolytique dans le dos et contre le gré de Book, l’opposition de Book aux plans de Tarka lui a valu d’être emprisonné aux côtés de l’irréprochable Reno, il s’est ensuite sacrifié pour sauver la vie de Jett et tenter de stopper Ruon. Enfin, récupéré d’une téléportation inachevée par les 10-C, il a porté la négociation à niveau systémique (bien au-delà de ce que réclamaient timidement Burnham et Rillak) en obtenant cash des 10-C l’abandon définitif de la DMA et de l’hyperfield, ainsi que la désintoxication des zones traversées par le collecteur de boronite. Lorsqu’on sait que dans le même temps, la générale terrienne Ndoye n’a aucunement été inquiétée, au motif qu’elle s’est spontanément dénoncée puis qu’elle a tenté de corriger (par la collision de la navette) ce qu’elle avait elle-même provoqué, à savoir trahir froidement alors qu’elle portait l’uniforme (se rendant complice de Tarka et non de Book) en éjectant le plasma d’une nacelle de l’USS Discovery (qui aura permis à Ruon de compromettre gravement les négociations avec les 10-C), cela renvoie à un deux poids deux mesures flagrant entre Booker et Ndoye. Serait-ce le symptôme de la misandrie rampante et croissante de la série ? Toujours est-il qu’il est également possible d’y voir une survivance de cette Fédération dystopique de la première saison de Discovery qui avait condamné à la détention criminelle à perpétuité Michael Burnham pour avoir tenté d’empêcher une guerre...
Lorsque la DMA se retire gracieusement du voisinage terrien (et avec elle se ferme le trou de ver qui la reliait à l’hyperfield de l’espèce 10-C), comment se fait-il que les débris rocheux et les astéroïdes qui continuaient par inertie à entrer en collision avec le bouclier terrestre... changent soudain de trajectoire et repartent poliment en sens inverse... comme s’ils dansaient le moonwalk. En l’absence de puits gravitationnel (trou noir, éventuellement trou de ver...) ou de rayon tracteur, le phénomène reste inexplicable (mais il ne suscite pourtant aucun étonnement ni chez Vance ni chez Tilly).
Qu’il se soit agi de courage d’auteur ou de restriction budgétaire, Discovery 04x12 Species Ten-C s’était imposé un format de bottle show, ne laissant dès lors rien paraître (ou presque) de l’écosystème de l’hyperfield, comme pour davantage en appeler à l’imaginaire des spectateurs. Mais au titre de final de la saison, Discovery 04x13 Coming Home ne pouvait pas afficher la même austérité, et il a donc levé le voile sur l’intérieur de la forteresse. Est-ce surprenant que l’étoile interne de l’hyperfield exhibe les mêmes anneaux de Dyson que l’étoile originelle des 10-C (cf. Discovery 04x11 Rosetta. Du coup, il est bien dommage que ce concept scientifique majeur développé par Freeman Dyson (et inspiré par Olaf Stapledon) n’ait pas été mis à l’honneur fût-ce qu’une fois dans la saison (à l’instar de la Sphère de Dyson dans ST TNG 06x04 Relics). Pour une fois que Discovery aurait pu avoir quelque chose à dire, elle rate lamentablement le coche...
Lorsqu’il tente de faire passer les sensations de tension et l’urgence, Olatunde Osunsanmi devient assez médiocre à la réalisation. Avec sa façon de mal imiter (ce qui revient à parodier involontairement) la "shaky camera" de JJ Abrams, pourtant déjà en elle-même polémique, Osunsanmi réussit juste à faire passer en comparaison le réalisateur des deux premiers films Kelvin pour un maître de la lisibilité et de l’expressivité cinématographique. Il est possible qu’Olatunde ait tenté d’expérimenter un style propre, mais à l’écran, les mouvements de caméra aléatoires et inélégants (bouger pour bouger mais sans une once de signifiance) ainsi que les mauvais voire les faux raccords sont indignes de la "production value" et du budget de la série.
Passons maintenant aux plats de résistance...
Ah comme il est pratique que la primauté biz-émotionnelle et les horizons shamallow soient communs entre la néo-Fédération burnhamienne et l’espèce 10-C exterminatrice-de-mondes-sans-le-savoir ! Soit la mort de toute realpolitik et le triomphe du "wishful thinking".
Donc, ouf, la tragédie génocidaire résultait juste d’une négligence de scan (ben oui, les 10-C n’avaient pas imaginé qu’il pouvait y avoir de la vie sur les autres planètes !), même si en retour cela implique une totale dissonance (à la limite du gag) entre d’une part le degré exceptionnel d’évolution atteint & de technologies employées, et d’autre part l’absence totale de connaissance, de clairvoyance & de responsabilité.
Non contente d’être déjà la grande favorite aux Razzie Awards du pire navet de SF, Discovery s’illustre maintenant dans la catégorie de la chute narrative la plus gonflée et la plus arnaqueuse jamais produite : « Désolé, on n’a pas fait exprès de vous exterminer. Promis, on ne recommencera pas. » Et voilà, tout est pardonné, tout rentre dans l’ordre, tout le monde est content, la vie est belle, et les 10-C ramènent même les héros chez eux en "trou de ver express". Si c’est pas de l’écriture de cador ça ?
Dans le même style Jackass, les 10-C sont capable d’intercepter (ou copier ?) des flux de téléportation... pour ensuite ramener à la vie les êtres vivants. Mais à part ça, ils ne savent absolument pas ce qu’est la téléportation ! Logique.
En somme, les 10-C sont des aliens omnipotents... mais en même temps idiocratiques tant ils sont eux-mêmes gouvernés par leur pathos et émerveillés par le culte de leur propre nombril. Ils peuvent tout... mais ne savent rien ! Quand une idiocratie en rencontre une autre...
Ainsi donc, il aura été question de l’extermination d’un monde (Kwejian), Ni’Var (Vulcain) et Terre ont été à deux doigts de subir le même sort (on se demande comment il ne pouvait s’agir que d’une seule DMA vu l’éloignement entre les deux systèmes solaires), Tarka fut un rip-off en version mélo de Soran en quête de Nexus (mais avec pour objectif cette fois carrément l’Au-delà des croyants !), le pénultième épisode a même flirté avec la folle ambition SF d’un premier contact insurmontable et d’une expression linguistique indéchiffrable. Évidemment, Discovery se garde bien d’en assumer les implications d’un épisode à l’autre, étant matériellement incapable de maintenir une quelconque continuité. Et donc, patatras, avec Discovery 04x13 Coming Home, le naturel foutage-de-gueule revient au galop : les problématiques linguistiques à la Arthur C Clarke ou Stanisław Lem sont évacués d’un revers de main et passent à la trappe. D’un proto-Lincos à la Dr Hans Freudenthal (imposant une forme de communication essentialiste à travers l’arithmétique et les mathématiques + 16 émotions et pas une de plus), on bascule direct dans la traduction littérale d’un discours du maire de Champignac (subtilités et sophismes inclus) !
En effet, sans explication aucune, les protagonistes et les 10-C communiquent désormais avec presque la même aisance, la même rapidité et le même degré de précision que via des traducteurs universels ! D’ailleurs, la sphère plantée sur un lutrin que Saru utilise pour traduire, transmettre, et recevoir est ni plus ni moins une interface automatique de communication, somme toute un UT 2.0, plus volumineux que l’UT 1.0 et développé en seulement quelques heures par Stamets, Zora, et Hirai. Alors tout ça pour ça ? On repassera pour l’ambition du sujet et la révolution copernicienne promise dans l’épisode précédent (avec la convocation ronflante de l’échelle de Kardachev et autres références des sciences conjecturales et de la SF)...
Mais qu’importe n’est-ce pas, puisqu’il ne subsiste dans ce final qu’une marée intarissable de bons sentiments, où l’idéalisme roddenberrien est confondu avec un feel good publicitaire, où l’humanisme est devenu le New Age de La Belle verte (ou d’Avatar), où l’universalisme a été remplacé par le wokisme, où l’utopie trekkienne a cédé la place à l’agenda politique de l’US Democratic Party tendance AOC (Alexandria Ocasio-Cortez).
Or lorsque le péril et les antagonistes de la saison ont été formatés sur mesure pour épouser la dea ex machina Mary-Sue Burnham, sa pompeuse leçon de morale conclusive n’a pas davantage de pertinence et de validité qu’un diallèle ou qu’une hagiographie religieuse.
Le syndrome VIP – connivent et consanguin – est lui aussi à son comble : Michael est dorénavant la BFF de la présidente de la Fédération (Rillak), Sylvia est devenue la BFF du chef d’état-major de Starfleet (Vance), et Saru est maintenant le galant officiel de la présidente de Ni’Var (T’Rina) ! Mais dans le règne d’Ouroboros, quoi de plus naturel après tout que des messies sortis du Moyen-Âge soient venus apporter les lumières kurtzmaniennes à une Fédération du 32ème siècle (en état de mort cérébrale après le Burn puis face à la DMA)... et soient également venus "évangéliser" l’espèce 10-C (malgré l’anathème simiesque du Dr Hirai juste pour faire style).
Le fin mot de la péroraison doctement délivrée par l’archange Michael est que « nous sommes tous connectés et nous pouvons surmonter n’importe quel défi tant que nous le faisons ensemble ». À méditer d’urgence. Alléluia.
Ou comment l’idéalisme avant-gardiste de Gene Roddenberry s’est fait bananer, désormais mué en moteur de bonne conscience poisseuse. Entre le manifeste d’une évidence et l’imposition de la doxa, ce voyage dans le futur et dans l’espace lointain fait un criant surplace. Il n’apporte rien et ne dit rien que le spectateur branchouille ne sache déjà, et n’importe quelle série sise dans le monde contemporain apportera davantage que ce #FakeTrek qui prétend emmener si loin pour finalement ne conduire nulle part.
Nouvelle devise "faketrekkienne" : « Le réseau social : l’ultime frontière. Voici les voyages de l’USS Discovery. Sa mission de cinq ans : connecter tous les mondes étranges, rechercher de nouveaux liens pour créer encore plus d’interrelationnel et d’entre-soi. Allez vaillamment où tous les politiciens US et les influenceurs médiatiques sont déjà allés... »
Moyennant la réitération du même schéma que dans les trois saisons précédentes :
on sort de derrière les fagots une menace galactique-de-la-mort-qui-tue plus abracadabrantesque à chaque fois,
on enchaîne en flux tendu de vaines péripéties jusques à atteindre une masse critique d’absurdités nonsensiques,
les personnages tous cheatés passent leur temps à se contempler eux-mêmes et à se tripoter les émotions (stock de kleenex à prévoir !),
évidemment la "Niagara" Mary-Sue "sauve le jour" par contrat (individuellement ou synergiquement avec ses "disciples" selon les cas) grâce à un micro-univers de poche formaté sur mesure pour agréer l’héroïne messianique et le "wishful thinking"...
enfin, l’archange Michael inflige aux spectateurs une puante leçon de choses qui s’apparente toujours davantage à un discours électoral de campagne présidentielle US-centré et auréolé d’images pieuses.
Moyennant aussi un wokisme :
qui rime avec misandrie (les figures du pouvoir politique sont systématiquement des femmes dans toutes les sociétés discoveriennes),
mais qui propage en parallèle les pires stéréotypes sexistes (dissimulant en réalité un mépris de classe) sur la gent féminine (il n’y a quasiment que les belles dames que chialent dans presque chaque scène...),
et qui sur-représente démagogiquement les communautés étatsuniennes pratiquant le plus intense lobbying token...
tout en sous-représentant sans complexe les autres phénotypes pourtant parfois majoritaires sur Terre (e.g. très peu d’Asiatiques, d’Amérindiens, de Latinos, de Dravidiens dans le cast et bien sûr le moins possible de "mâles caucasiens").
Bref, un tract militant désavouant l’universalité trekkienne, et se loupant même dans sa prétention woke... devenant dès lors le vernis tartuffe d’un femwashing (et d’un pinkwashing).
Donc un fail aussi bien sur le terrain trekkien… que wokien.
Par contre, une éclatante "réussite" sur les terrains de l’enfonçage de portes ouvertes, du "cochage" de toutes les cases de la "check list" politiquement correcte, de l’adoubement conscientisé, de la somme des poncifs les plus consensuels, et de la prétention à avoir réinventé Star Trek en "mieux" (comme d’autres s’imaginent avoir réinventé la roue sous la forme carrée).
Lorsque Rick Berman accueillait il y a trente ans Stephen Hawking dans son propre rôle pour universaliser le paradigme SF de Star Trek à travers une mise en abyme vertigineuse... Secret Hideout préempte toujours davantage l’écume des temps contemporains, entre vogues et névroses. Le caméo pas du tout innocent de Stacey Abrams inféode ainsi Discovery à une politisation contextuelle et utilitariste, c’est-à-dire à l’échiquier politique de son époque et de son pays de production. Avec pour préjudice corollaire d’être excluant et clivant envers les spectateurs dans leur plus large extension, tout en affligeant la série d’une date de péremption.
La proverbiale montagne peut donc accoucher de la souris... sous un tonnerre d’applaudissements (enregistrés).
Et comme les auteurs n’ont pas l’auto-triomphe modeste, la victoire de la "team Burnham" du Burnhamshow dans le Burnhmaverse (par la proclamation de la version "fortune cookie" de Star Trek) est suivie d’un clip vidéo sursaturé de glucose à en choper le diabète, de pathos dégoulinant, d’éjaculations lacrymales, de sourires niaiseux, et d’autosatisfaction narcissique qui transforment l’expérience de visionnage, déjà pénible, en pur calvaire. Au motif que le fil rouge s’est soldé par un happy end (mais qui en aurait douté ?) "grâce" aux WTF et aux TGCM en flux tendu (i.e. en trichant sans le moindre scrupule avec les lois physiques et en trahissant sans la moindre vergogne les lois naturelles), les showrunners cèdent à l’incontinence de transformer la victoire en opéra grandiloquent dédié à la gloriole des personnages et de leurs interactions. L’épisode déroule alors une interminable litanie de propagande gerbante (quatorze longues minutes quand même !) où les héros sont tellement pleins d’eux-mêmes et jubilent tellement d’être "moi-je" que la séquence en devient obscène, telle une orgie masturbatoire.
Le #FakeTrek (alias Star Trek 2.0) sous la houlette d’Alex Kurtzman, ce sont les "Teletubbies de l’espace", mais épris d’eux-mêmes et de leur réseautage jusqu’à l’onanisme, et au service d’un agenda politique bienpensant.
Le plus désarmant peut-être est que, derrière le cynisme limitless à l’endroit de l’ère roddenberro-bermanienne, il y a probablement une once de "sincérité" dans cet exercice de teen soap égocentré, de guimauve faussement progressiste, et de variétoche tautologique.
Mais de là à rédimer – même infinitésimalement – une pareille nullité de construction et un tel simplisme d’écriture dont ne voudraient pas les auteurs de fanfics et les rôlistes ? Chacun en décidera dans son for intérieur...
BANDE ANNONCE