Fantasporto 2025 : Le Palmarès et le bilan

Cette 45e édition du festival Fantasporto était vraiment formidable à faire. Surtout lorsqu’on est un amateur de film japonais qui ont été particulièrement mis à l’honneur cette année.
Le festival vient de clore ses portes en livrant le palmarès que vous pouvez découvrir ci-dessous. Sur les 18 prix attribués, 8 sont remportés par des films japonais. Alors que les grands gagnants sont le très bon Zero de Jean Luc Herbulot qui obtient 2 prix ainsi que Cielo d’Alberto Sciamma qui remporte 3 prix.
Vous pouvez aussi retrouver un avis rapide sur les longs métrages que j’y ai découvert qui étaient très diversifiés et laissaient une belle part à l’horreur.
PALMARÈS
Meilleur film Fantasporto 2025 :
Dollhouse de Shinobu Yaguchi (Japon)
Mention spéciale du Jury :
Cielo de Alberto Sciamma (Royaume-Uni)
Meilleure réalisation :
A Place Called Silence de Sam Quah (Chine)
Meilleur acteur :
Brendan Bradley (Succubus de R.J.Daniel Hanna - États-Unis)
Meilleure actrice :
Judy Ann Santos (Scarecrow de Chito S. Roño - Philippines)
Meilleur scénario :
Yugo Sakamoto (Ghost Killer de Kensuke Sonomura - Japon)
Meilleure photographie/ Effets spéciaux :
Alex Metcalfe - (Cielo de Alberto Sciamma - Royaume Uni)
Prix du public :
Mister K de Tallulah H. Schwalb (Pays-Bas/Norvège/Belgique) ex-aequo avec Cielo de Alberto Sciamma (Royaume-Uni)
Prix de la critique :
Cold Wallet de Cutter Hodierne (États-Unis)
Prix du meilleur film du Jury de la semaine des réalisateurs :
Zero de Jean Luc Herbulot (États-Unis)
Prix spécial du Jury de la semaine des réalisateurs :
Welcome to the Village de Hideo Jôjô (Japon)
Prix du meilleur réalisateur du Jury de la semaine des réalisateurs :
Honeko Akabane’s Bodyguards de Junichi Ishikawa (Japon) ex-aequo avec Zero de Jean Luc Herbulot (États-Unis)
Prix du meilleur acteur du Jury de la semaine des réalisateurs :
Tomoki Kimura (Ranshima Bound de Yoshitaka Kamada - Japon)
Prix de la meilleure actrice du Jury de la semaine des réalisateurs :
Yuri Nakamura (Samurai Detective Onihei : Blood for Blood de Tomohiko Yamashita - Japon)
Prix du meilleur film du Jury Orient Express :
River Returns de Masakasu Kaneko (Japon)
Prix spécial du Jury Orient Express :
Sana : Let me head de Takashi Shimizu (Japon)
Meilleur court métrage :
Happy People de Budavári Balázs (Hongrie)
Mention spéciale du Jury Fantasy pour un court métrage :
Gosto de Te Ver Dormir de Hugo Pinto (Portugal)
Prix spécial Fantasporto 2025 :
HELENA OLIVA - Responsable des relations publiques de Fantasporto depuis 35 ans
A GAME IN THE WOODS
A Game in the Woods de Mike McCutchen donnait vraiment envie sur le papier, même si on devinait que le budget ne devait pas être très élevé. Toutefois, le long métrage fait rapidement déchanter devant une réalisation pas très marquante, une interprétation pas toujours convaincante, et un personnage principal absolument pas charismatique.
On découvre deux jeunes femmes allant dans la cabane du grand-père de l’une d’entre eux et découvrant que les terrains environnants servent de chasse à l’homme grande nature. Elles vont donc y croiser des individus mourants violemment et essayer de se défendre afin de survivre à ce jeu létal.
Si le sang coule à flots, et que certaines situations sont drôles, le long métrage ne fonctionne pas vraiment, surtout quand on la compare à d’autres œuvres similaires qui sont nettement plus réussies.
BABY ASSASSINS : NICE DAYS
Troisième opus après Baby Assassins et Baby Assassins 2 Babies, Baby Assassins : Nice Days de Yugo Sakamoto permet de retrouver avec un immense plaisir le duo de jeunes tueuses à gages que l’on avait découvert précédemment. Cette fois-ci, ces dernières se retrouvent confrontées à un tueur extrêmement méthodique qui est bien décidé à leur voler leur contrat.
Plein d’humour, offrant des séances de bagarres et de cascades particulièrement spectaculaires portées par deux jeunes actrices en grande forme, entourées par des comédiens impeccables, le spectacle en met plein les yeux et fait passer un bon moment dans ce milieu de tueurs à gages où on ne plaisant pas du tout avec le code de l’honneur et les contrats signés.
C’est donc une véritable joie de retrouver ce duo survitaminé sur le grand écran, en espérant le revoir prochainement pour de nouvelles aventures toutes aussi décalées, spectaculaires et déjantées.
CHAINSAWS WERE SINGING
On n’a pas souvent l’occasion de découvrir un film estonien sur grand écran. Alors quand il est vendu comme un mix entre La mélodie du bonheur et Massacre à la tronçonneuse, l’attente est élevée. Et clairement, même si Chainsaws Were Singing de Sander Maran a des défauts, notamment liés à un budget sans doute ridicule, il offre vraiment ce qu’il propose sur le papier et fait passer un très bon moment de divertissement.
En effet, on y découvre un homme amoureux qui part à la recherche de la femme de sa vie, enlevée par un terrible psychopathe massacrant tous les gens qu’il croise. Associé à un étonnant acolyte, ces derniers entraînent le spectateur au cœur d’une spirale de violence, de morts et de rebondissements improbables. Le tout en offrant quelques numéros chantés invraisemblables et bénéficiant de paroles réellement drôles.
DEAD TALENTS SOCIETY
Faire à la fois un film d’horreur, une histoire émotionnelle, une étude psychologique de la société et une réflexion intime sur l’individu paraît une chose bien compliquée. Et pourtant, John Hsu réussit parfaitement cela avec son incroyable Dead Talents Society.
En effet, on y découvre une jeune fille qui, suite à sa mort, doit absolument devenir une légende urbaine pour éviter de disparaître complètement. Elle va alors s’associer à une grande dame de l’horreur et à son équipe pour mettre en place des scénarios horrifiques afin d’effrayer les humains.
L’œuvre est extrêmement drôle et particulièrement brillante. Elle utilise à bon escient de magnifiques effets spéciaux et met en place des situations qui sont à la fois réellement horrifiques et particulièrement drôles. Le spectacle est à tout niveau et les personnages sont particulièrement attachants et impeccablement interprétés. C’est donc un film remarquable qu’il ne faut pas hésiter à aller découvrir. D’autant que celui-ci regorge d’inventivité et d’imagination.
DOLLHOUSE
Le maître de l’horreur, Shinobu Yaguchi, revient avec un très bon Dollhouse mettant à l’honneur une bien inquiétante poupée qui s’immisce au cœur d’une famille ayant perdu son enfant. En effet, suite à un drame, la mère la découvre et va commencer avec elle une étrange relation qui va prendre fin après la naissance d’un nouvel enfant. Mais cette poupée semble avoir sa propre personnalité.
Le réalisateur utilise l’horreur insidieuse pour montrer la manière dont la maison, le foyer d’une famille, peut devenir inquiétante et dangereuse lorsque le surnaturel s’y mêle. Les effets spéciaux sont très bien faits. Alors que la suggestion joue beaucoup sur l’atmosphère du film qui est porté par de formidables acteurs. La mise en scène est formidable et offre quelques passages marquants. Ainsi, si on apprécie l’horreur et le fantastique, l’œuvre est assurément à découvrir.
Shinobu Yaguchi était l’invité d’honneur de cette édition et il a présenté son film, en compagnie de son angoissant personnage principal, devant une salle pleine qui lui a d’ailleurs fait une standing ovation à l’issue de la projection.
Le film a remporté le prix du Meilleur film Fantasporto 2025.
GHOST KILLER
Avec des cascades impressionnantes et l’une des actrices principales de Baby Assassins, Akari Takaishi, l’espoir était grand pour que Ghost Killer de Kensuke Sonomura soit similaire à la série de films mettant à l’honneur des jeunes filles tueuses à gages. Toutefois, si certaines séquences de bagarre en mettent vraiment plein les yeux et si le principe déployé dans le récit est bien trouvé, l’œuvre est nettement moins fun et parfois un peu brouillonne.
Toujours est-il que la découverte des aventures d’une jeune fille qui, après avoir trouvé une balle perdue se retrouve hantée par un tueur à gages partant en quête de vengeance, et plaisant à faire. Ainsi, l’œuvre réussit à passer outre ses moyens limités pour proposer quelques plans impressionnants et un final haletant.
Le film a remporté le prix du Meilleur scénario.
HONEKO AKABANE’S BODYGUARDS
Avec Honeko Akabane’s Bodyguards, Junichi Ishikawa qui avait remporté le Prix spécial du jury l’année dernière pour son précédent film, revient en très grande forme. En effet, avec cette histoire de jeune homme recruté pour devenir le garde du corps d’une jeune fille sans qu’elle s’en rende compte fait plonger le spectateur dans une aventure humoristique impressionnante où les grands moments se succèdent à vive allure.
Les séquences d’action sont parfaitement millimétrées, les comédiens sont tous impeccables et les situations sont tellement décalées que l’on rit beaucoup devant ce qui arrive à l’écran. Mais que l’on ne s’y trompe pas. Il s’agit vraiment d’un excellent film qui fait passer un magnifique moment de divertissement.
D’autant que l’émotion est aussi au rendez-vous et que les techniques utilisées par les nombreux protagonistes sont toutes extrêmement diversifiées, et parfois complètement folkloriques. L’œuvre est donc particulièrement réjouissante fait perdurer longtemps le sourire aux lèvres.
Le film a remporté le Prix du meilleur réalisateur du Jury de la semaine des réalisateurs.
INDERA
Si le film de Woo Ming Jin, Indera évoque l’incident de Memali, un drame qui s’est produit en 1985 en Malaisie ou un village a été envahi par la police, ce qui a fait 14 morts du côté des villageois et 2 parmi les forces de l’ordre, ces événements ne sont que très brièvement entraperçus. En effet, le film se concentre sur un homme à tout faire et sa fille qui vont emménager dans une maison isolée et découvrir que d’étranges choses s’y passent.
Le long métrage bénéficie d’une atmosphère sympathique et parfois envoûtante et intègre de nombreux passages oniriques qui sont souvent horrifiques. Car il s’agit avant tout d’une œuvre dramatique dans laquelle la mort rôde et qui n’épargne aucun de ses protagonistes, y compris les enfants orphelins vivant dans les lieux.
Si le film est un peu long et inégal, il se laisse visionner avec un certain plaisir et offre une belle plongée dans la culture malaisienne. Il faut aussi signaler la remarquable interprétation de la gamine qui incarne brillamment une jeune fille muette.
MISTER K
Le comédien Crispin Glover est un habitué des films singuliers et abscons. Mister K de Tallulah Hazekamp Schwab, où il incarne le personnage principal, en est la dernière très bonne représentation. Il y joue en effet un illusionniste qui va passer une nuit dans un hôtel isolé, avant de découvrir qu’il ne peut plus le quitter. On va ainsi le suivre dans ses pérégrinations, alors que des événements de plus en plus étranges s’y déroulent et impactent progressivement tous les habitants des lieux qui y vivent sans jamais en sortir.
La mise en scène de certaines séquences est vraiment remarquable et quelques passages restent durablement à l’esprit. L’œuvre souffre toutefois de redondances et, passé une première partie magnifique, elle peut perdre le spectateur par la suite avec sa bizarrerie assumée.
Le film a remporté le Prix du public.
MOM
Avec son dernier long métrage, Mom, Adam O’Brien parle formidablement bien de la dépression post-partum. Il se concentre sur une jeune mère qui va se retrouver devant des événements de plus en plus étranges dans la maison où elle s’occupe de son enfant.
Si l’œuvre glisse progressivement dans le fantastique et dans l’horreur, elle peut presque être vue au second degré comme un drame bouleversant concernant le délitement de la psyché d’une femme confrontée à la maternité. Un sujet d’autant plus puissant que la dépression post-partum est la première cause de mortalité des mères dans la première année après leur accouchement.
PRÉDIO VAZIO
Habitué des films d’horreur qui tachent et des scénarios parfois un peu légers, le réalisateur Rodrigo Aragão revient avec Prédio Vazio qui est un peu moins percutant que certains de ses autres longs métrages. On découvre une jeune femme s’introduisant dans un bâtiment à l’allure peut engageant pour y retrouver sa mère disparue. Elle va alors y être confrontée à l’horreur.
L’œuvre utilise très bien les ombres et des décors renforçant le malaise afin d’immerger encore plus profondément le spectateur au cœur d’une maison hantée version immeuble. Certaines scènes sont particulièrement marquantes et les personnages ont tous une grande colère intérieure qui fait parfois des dégâts. Même si le récit est prévisible, il fait passer un bon moment horrifique et ne donne vraiment pas envie de se retrouver à la place des personnages principaux.
RANSHIMA BOUND
Le festival ne propose pas que des œuvres fantastiques, horrifiques ou de science-fiction. Elle s’attache aussi aux longs métrages de certains réalisateurs qui sont passés lors d’éditions précédentes du festival, et y ont parfois été primés.
Avec Ranshima Bound de Yoshitaka Kamada, le réalisateur qui est venu présenter son film en compagnie de son acteur et de son actrice principale, livre un drame social particulièrement touchant.
En effet, un homme découvre par son frère que leur mère est dans le coma. Alors que celui-ci n’a pas vraiment réussi sa vie, il va demander à une prostituée qu’il a sauvée de se faire passer pour sa femme le temps de quelques jours. L’œuvre est une histoire intimiste reposant sur un trio aux relations compliquées qui sont mises en valeur par une très belle réalisation. Il faut d’ailleurs saluer la belle prestation des divers comédiens dans leur rôle souvent taiseux.
Le comédien principal Tomoki Kimura a remporté le Prix du meilleur acteur du Jury de la semaine des réalisateurs.
RIVER RETURNS
River Returns de Masakasu Kaneko et un formidable film mélangeant passé et présent et contant une merveilleuse histoire d’amour. En effet, un jeune garçon entend un étrange son près d’une rivière et va découvrir l’histoire du drame qui s’est joué à cet endroit entre une jeune villageoise et un jeune homme faisant parti du clan des montagnards.
L’œuvre est très touchante et permet d’évoquer la ségrégation des populations de montagnards qui passaient d’un endroit à l’autre pour travailler le bois. À travers cette histoire d’amour compliqué, c’est aussi une belle quête qui est entreprise par le jeune garçon et qui va bouleverser l’avenir de sa famille.
Particulièrement touchant et beau, le récit se laisse suivre avec beaucoup de plaisir, d’autant que l’environnement naturel où se déroule l’intrigue est de toute beauté.
Le film a remporté le Prix du meilleur film du Jury Orient Express.
SANA : LET ME HEAR
Sana : Let me hear de Takashi Shimizu et un film d’horreur japonais plutôt classique qui réussit à faire souffler à un certain vent de fraîcheur sur ce sous-genre reposant sur une école hantée par une lycéenne morte des années précédemment. Toutefois, le long métrage se double d’une partie thriller qui est intéressante et repose sur des comédiens qui sont très bons.
L’atmosphère délétère qui plane sur le récit est amplifié par de très beaux effets spéciaux et par une réalisation qui rend l’horreur encore plus impactante, jusqu’à un final vraiment haletant. Ainsi, si on apprécie ce type de long métrage, il ne faut pas passer à côté, surtout si on a l’occasion de le voir sur grand écran où il est encore plus malaisant.
Le film a remporté le Prix spécial du Jury Orient Express.
THE KILLER GOLDFISH
Découvrir le résumé de The Killer Goldfish de Yukihiko Tsutsumi montrant des poissons rouges tuant leurs propriétaires était très alléchant, surtout lorsqu’on avait l’impression qu’on pouvait se retrouver devant une œuvre telles celles produite par Sushi Typhoon. Toutefois, si la première moitié est vraiment plaisante à regarder et offre parfois du n’importe quoi, la suite l’est nettement, partant dans différents sens.
En effet, on se trouve devant le premier long métrage d’une série dont chacun des opus sera réalisé par l’un des grands noms du cinéma japonais des années 80 et 90. Ce qui permettra de mieux développer cet univers où une mystérieuse rune provenant de l’époque néandertalienne a un grand impact sur certains individus. Il s’agit aussi d’une œuvre originale sur la place de l’humain dans la nature et le vivre-ensemble avec cette dernière. Il faut d’ailleurs bien rester jusqu’à la fin du générique pour découvrir une ultime séquence bien sympathique.
TOUCHED BY ETERNITY
Les films lettons ne sont pas non plus facilement visibles sur grands écrans. Et c’est devant une œuvre plus dramatique que comique que l’on se trouve avec Touched By Eternity de Marcis Lacis. En effet, elle tourne autour d’un homme essayant de devenir immortel qui va se retrouver confronté à des vampires voulant qu’il devienne l’un des leurs.
Le film prend clairement à contre-courant le vampirisme, le montrant sans aucun glamour et surtout présentant l’éternité comme un long moment à passer en s’ennuyant éternellement. Le film a des très bonnes idées et il fait des propositions singulières. Néanmoins, il bénéficie de quelques longueurs et redondances qui sont un peu lassantes.
ZERO
Film après film, le réalisateur Jean Luc Herbulot surprend par sa mise en scène inventive et ses histoires sortant de l’ordinaire. Zero en est le dernier très bon exemple en date avec cette plongée en temps réel sur les traces de deux Américains découvrant qu’ils sont barrés d’explosif et devant accomplir des missions avant la fin du compte à rebours dans la capitale du Sénégal.
Dakar a été très bien utilisée, d’autant que les protagonistes doivent se déplacer d’un point à l’autre. Elle fait d’ailleurs partie intégrante du récit qui est aussi extrêmement intrigant et dont on découvre progressivement le tableau au fur et à mesure de la réalisation des missions par les personnages. L’œuvre est extrêmement bien écrite et fait souvent froid dans le dos. Elle s’achève d’ailleurs sur un final particulièrement marquant qui remet aussi en question l’ensemble des éléments qui ont été présentés au cours du film.
Le film a remporté le Prix du meilleur film du Jury de la semaine des réalisateurs et le Prix du meilleur réalisateur du Jury de la semaine des réalisateurs.
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