Star Trek Discovery : Review 4.05 The Examples
L’exfiltration de Tilly étant consommée, il est temps de passer à autre chose, et en l’occurrence de lever un tout petit peu le voile sur l’anomalie. Pour cela, rien de mieux que d’inviter un nouveau scientifique, aussi imbu de sa personne que peut l’être Stamets. Bref l’émulation par la concurrence.
Pour tout vous dire, quand j’ai vu arriver Ruon Tarka et sa suffisante décontraction, j’ai levé les yeux au ciel tellement j’étais sûr que cela allait fortement me déplaire. Et pourtant, au fil de l’épisode, j’ai commencé à apprécier le jeu de Shawn Doyle (The Expanse) et la façon dont le personnage joue sa partie pour arriver à son but. En plus d’être un scientifique de génie, cela a l’air d’être un fin psychologue.
Ses scènes avec Saru, Stamets et le retour de la géniale Reno interprétée par la non moins formidable Tig Notaro font partie des moments que j’ai préférés de cet épisode. Pas tant sur les explications techniques que je trouve toujours autant tirée par les cheveux que sur le jeu des acteurs. Parce que sur l’origine de l’anomalie, sur les conditions nécessaires à sa création, je dois bien vous avouer que je débranche mon cerveau tant la célèbre suspension consentie de l’incrédulité ne me suffit plus pour supporter tout ça...
Quant à la scène finale avec Book, je suis curieux de voir vers quoi cela va nous mener. Ruon Tarka a certainement un agenda caché... L’anomalie n’étant pas un phénomène naturel, on se demande bien quel est l’ennemi de cette saison. Je trouve très légère la façon dont les "services secrets" de Starfleet, par la voix de l’amiral Vance, décident d’exclure les Q... sauf si les scénaristes de Discovery ont zieuté la seconde saison de Star Trek Picard et que la série détient une clé dont nous n’avons pas encore connaissance.
L’épisode, comme d’habitude avec Disco, contient d’autres histoires, avec en premier lieu, le sauvetage d’une colonie de la Chaîne d’Émeraude menacée directement par l’anomalie. C’est l’occasion pour une fois de revenir à un des fondamentaux de Star Trek, l’étude d’un dilemme moral. Et en l’occurrence, quel doit être le statut en tant que réfugié pour des prisonniers, alors que leur condamnation, selon les lois de la Fédération, n’aurait jamais dû avoir lieu.
Sur cette partie, je trouve les arguments plutôt bien trouvés avec un pathos, bien que toujours présent dans Discovery, a un niveau minimal. J’ai beaucoup aimé la dignité du prisonnier principal superbement interprété par Michael Greyeyes.
Ce qui me gène encore une fois, c’est Michael Burnham qui part en mission. Hou houuuuuuu, c’est le Capitaine, sa mission, c’est de diriger l’évacuation de la colonie, sa place n’est plus de partir autant sur le terrain, surtout sur une partie annexe de sa mission. Serait-il possible qu’une seule fois dans cette série, le reste de l’équipage puisse avoir un rôle à jouer ? Et encore une fois, le nombre de blagounettes dit par le duo Burnham/Book pendant les scènes d’action, ce n’est plus possible...
Ce cinquième épisode permet également de faire un focus sur le docteur Culber et ses difficultés quant à l’aide psychologique qu’il peut apporter à l’équipage. Très bonne prestation de Wilson Cruz face à David Cronenberg.
À noter également la discussion intéressante entre Burham et Zora sur la capacité de l’intelligence artificielle à ressentir les émotions. Rappelons-nous que le Short Trek Calypso reste encore un mystère dans la chronologie de Discovery.
FM
En constante surveillance par l’UFP, l’anomalie gravitationnelle de la matière noire (DMA) disparaît du secteur du Venari où elle se reposait depuis trois épisodes pour réapparaître 4,2 secondes plus tard à 1 000 AL de là, exposant potentiellement la ceinture d’astéroïde de Radvek V, une ancienne colonie de la Chaîne d’émeraude essentiellement habitée par les Akaalis. À charge bien entendu de Burnham et de son équipage de choc d’évacuer les 1 206 occupants dans un délai de seulement quatre heures (au-delà duquel, il sera certes possible de savoir si la DMA va réellement atteindre la colonie mais il ne sera alors plus possible d’en téléporter les habitants en raison des interférences).
Une simple réponse de Zora (l’IA émanant des données de la Sphère sentient vieille de plusieurs centaines de milliers d’années) sur l’absence de précédents connus (quant à la possibilité d’un phénomène d’apparaître et de disparaître dans l’espace) conduit immédiatement tous les protagonistes à la certitude que la DMA a été créé artificiellement ! Et dans les minutes qui suivent, tous les mondes fédérés sont en rumeur...
L’amiral Charles Vance affecte aux recherches de Paul Stamets relatives à la DMA, Ruon Tarka, le plus grand génie scientifique du 32ème siècle, venu paradoxalement de Risa, et déjà en charge de l’adaptation du "spore drive" aux autres vaisseaux de Starfleet. S’ensuivra un concours d’égos (histoire de ne pas être vulgaire) entre les deux scientifiques durant la plus grande partie de l’épisode, avant de se découvrir l’un et l’autre une commune immaturité dans leur incontinence à mener des expériences scientifiques au mépris de toute prudence envers les autres... devant l’arbitrage ludique de Jett Reno, paradoxalement la seule des trois scientifiques pleinement consciente des risques mais qui préfère rester passive pour mieux en rire. Tig Notaro est peut-être une bonne actrice, mais son personnage est décidément réduit à une fonction voire à un gadget.
En l’espace de seulement quatre heures in-universe, l’épisode passera ainsi de l’ignorance complète de l’anomalie gravitationnelle (ne permettant pas même de prédire son comportement et ses trajectoires) à une compréhension intégrale de celle-ci par les personnages ! En revanche, le spectateur devra prudemment laisser son temps de cerveau disponible au vestiaire pour se dispenser de chercher à comprendre les alibis pseudo-scientifiques... penchant bien davantage vers le TGCM que vers le technobabble trekkien.
Tarka reproduira ainsi un contrôleur de DMA miniature à l’échelle de 3,22x10-17. Et pourtant, toute la puissance de l’USS Discovery ne suffira pas à l’alimenter. L’original s’abreuve selon Ruon directement à la sève d’une étoile supermassive.
Mais curieusement, durant une scène conclusive de bar à la fragrance paranoïde sortie de la série Alias, Book en viendra à soupçonner l’inénarrable Tarka, si ce n’est d’être le bad guy (nommé par défaut Ten-C par Vance) qui contrôle la DMA génocidaire, du moins de connaître son identité ! Roulements de tambour et rideau ! Wow !
De son côté, Burnham déléguera l’évacuation des colons rescapés de Radvek V (neufs astéroïdes reliés par de gros câbles, accueillant autant d’écosystèmes sous des dômes, et gravitant autour de deux étoiles) au jeune commandant Rhys au motif (assez singulier) qu’il était reconnaissant depuis son enfance (au 23ème siècle) d’avoir été évacué par Starfleet lors d’un ouragan.
Ce qui permettra à Mary-Sue de s’occuper elle-même avec son chéri du pseudo-dilemme moral que propose l’épisode pour tenter de marcher dans les pas de ST TOS : à savoir l’évacuation des "Examples" (d’où le titre de l’épisode), c’est-à-dire six prisonniers condamnés pour des vétilles et pour l’exemple à perpétuité (en somme comme Burnham par la Fédération dystopique de Kurtzman dans le second épisode de la série), mais abandonnés dans l’indifférence par leurs compatriotes (et le magistrat de la colonie). Un parcours du combattant sera ainsi composé sur mesure pour le couple vedette, avec de multiples champs de force et barrières d’énergie à désactiver dans un délai imparti, et des cohortes de coléoptères robotisés et explosifs (évoquant les Replicators de Stargate SG-1) à affronter... Tout un programme... mais dans un décor évoquant les planètes mortes (de studio en fait) si souvent visitées par Kirk, les belles musiques d’ambiances de la série originale, et la superbe lumière ocre de l’étoile Amargosa dans ST Generations.
Mais invariablement, toute la pseudo-"alchimie" entre Mary-Sue et son jules repose sur des connivences lourdingues (au prétexte de leur errance picaresque commune entre Discovery 03x01 That Hope Is You, Part 1 et 03x02 Far From Home) et des blagounettes de "buddy movies", genre ils sont tellement forts ces cadors qu’ils peuvent se raconter leur vie et plaisanter en flux tendu tout en "sauvant le jour" les doigts dans le nez. On y croit.
Comme toujours dans les productions hollywoodiennes les plus triviales (ou idéologisées), les prisonniers libérés tiendront les héros responsables de toutes les injustices endurées par eux auparavant, et imposeront des conditions contractuelles très strictes pour leur faire la faveur d’être émancipés et évacués.
In fine, l’un d’eux, Felix (interprété par l’acteur amérindien Michael Greyeyes), considérant mériter sa condamnation (du fait d’un meurtre plus ou moins accidentel) refusera mordicus de partir, obligeant l’héroïne à discuter – ou plutôt négocier – le bout de gras dans un monde en passe de disparaître. Une dynamique de contremploi où les contingences pragmatiques (urgences, délais, priorités, causalités) s’effacent gracieusement devant l’introspection narcissique.
De guerre lasse, et parce que la DMA frappait déjà à la porte, Burnham s’alignera sur la volonté expiatoire du pénitent, qu’elle laissera crever sur Radvek V... au grand dam de Cleveland. Et durant une communication radio, la prêtresse Michael entendra l’ultime confession de Félix sur son meurtre, plongé en pleine déréliction et ayant déjà un pied dans la vallée de l’ombre de la mort... avant que la colonie astéroïde ne s’embrase, poussée par l’anomalie gravitationnelle dans l’un des soleils de Radvek V.
À titre posthume, Burnham honorera les dernières volontés du défunt en remettant à la fille de sa victime un orbe lalogi contenant un arbre généalogique (holographique bien sûr comme tout ce qui apparaît dans la série). Il n’est pas nécessaire de préciser que cette dernière, Patri Doxica, était bien entendu déjà sur l’USS Discovery – l’univers kurtzmanien étant minuscule.
Certes, la mort solitaire et résignée du vieil "Indien" en quête de pénitence (et de châtiment) sur la "planète" crypto-TOSienne pourrait éventuellement être poignante... si le traitement n’avait pas été aussi artificiel et convenu, s’il ne résultait pas du medley des répliques-en-kit et des prêts-à-clichés de productions antérieures.
Discovery ou du Dostoïevski pour les nuls.
Mais poursuivant son chemin vers la sainteté voire vers la divinité, Mary-Sue délivrera la grande leçon de l’épisode au magistrat de Radvek V, en tenant un langage non pas trekkien, mais chrétien pour ne pas dire christique (« I need to remind you that wherever you find a new home, you’ll be arriving as a refugee seeking shelter and grace. I hope you find a more just society than the one you had a hand in creating. »).
Un moment proprement évangélique. Alléluia.
Mais c’est surtout un moment qui entérine la mise à mort de tout relativisme et de toute Prime Directive. Car un pareil jugement de Salomon suppose l’existence d’un code moral (voire juridique) universel, donc applicable à l’ensemble des civilisations de l’univers, et transcendant toutes les juridictions endogènes. Un code que son prophète Michael serait chargée de promouvoir ou d’appliquer, et en vertu duquel elle se permet de juger les extraterrestres ou de leur délivrer des paraboles.
Discovery ou la vision étatsunienne du monde.
Quant à l’intelligence artificielle Zora, elle achèvera sa mue, avouant soudain (et sans explication) éprouver des émotions et une expertise psychologique lui permettant de lire dans la psyché humaine comme dans un livre ouvert. Le souvenir traumatique de l’IA Control (la cause même du voyage de l’USS Discovery au 32ème siècle) aurait dû suffisamment interpeller Burnham pour qu’au minimum, elle réunisse son staff et en réfère à Starfleet Command.
Mais rien de tel ! Trop heureuse de s’être trouvée une nouvelle copine (façon Her (2013) de Spike Jonze), Michael se contentera juste d’adouber Zora. Cette voix omnisciente et distante parlant à l’oreille de Mary-Sue est-elle appelée à devenir un épigone féminin de Jésus dans le petit monde de Don Camillo ?
L’épisode sera émaillé comme à l’accoutumée de nombreuses conversations personnelles autocentrées qui, sans être aussi caricaturales ou nombrilistes que celles de Tilly (affectée à Starfleet Academy après la sortie scolaire de DIS 04x04 All Is Possible), d’Adira et de Gray (absent·e·s de l’épisode), n’en seront pas moins fort inintéressantes et soporifiques.
Certes, l’apparition de Kovich réussira à faire quelque peu illusion grâce à la sobriété du jeu de David Cronenberg et à son absence de langage glucidique. Hélas, ce sera une lantern de plus, puisque s’il renvoie avec une implacabilité jouissive Culber à ses états d’âmes égocentriques (et adresse symboliquement ainsi une leçon de maturité à toute la série), ce sera finalement juste pour prescrire au compagnon de Stamets un peu de repos comme l’aurait fait n’importe quel médecin du travail. La montagne accouche d’une souris. Comme toujours quoi.
Pire, en diagnostiquant chez Hugh le même complexe du sauveur que chez Mary-Sue, Kovich transforme analogiquement Culber en Gary-Stu ! Mais ne serait-ce pas finalement aussi le cas de tout l’équipage messianique de l’USS Discovery, élevés au rang d’angelots à la cour de l’archange Michael ?
Dans la rubrique toujours très fournie des incohérences/inconséquences/illogismes/bullshits/manipulations (liste non exhaustive) :
Lorsqu’en début d’épisode, trois vaisseaux de Starfleet et de Ni’Var se positionnent devant "l’œil" de la DMA avant que celle-ci ne s’évanouisse (pour reparaître à 1 000 années-lumière de là), le rapport de proportion s’accorde à une anomalie spatiale de taille "classique"… au contraire de la grandiloquence cosmique évoquant un Big Crunch global à la fin de DIS 04x02 Anomaly.
Stamets puis Zora affirment qu’aucun phénomène spatial naturel ne peut apparaître et disparaître à différents endroits de l’espace. Ce qui conduira les protagonistes à conclure aussi sec (en dix secondes chrono) que le phénomène est artificiel ! Sauf que cette assertion et sa résultante sont invalidées par plusieurs épisodes des séries historiques, à commencer par ST TNG 03x08 The Price et ST VOY 02x25 False Profits où un "wormhole" instable (or statistiquement la plupart le sont) changeait régulièrement de point de sortie (ayant même brutalement sauté du quadrant gamma au quadrant delta). Mais cette ignorance reste bien celle des scénaristes, dont la connaissance de Star Trek se limite à des recherches (superficielles qui plus est) dans les wikis (comme Memory Alpha).
En seulement en une minute d’échanges entre des ressortissants du 23ème siècle qui ne connaissent pas vraiment le millénaire suivant (or la mécanique des trous de ver sera bien davantage maîtrisée à partir du 24ème siècle) et la consultation de la base de données de Zora (vieille de plusieurs centaines de milliers d’années), on déduit en 30 secondes chrono qu’en l’absence de précédent historique (ce qui est au demeurant faux comme évoqué ci-avant), un bad guy provoquerait le phénomène ! Bien voyons ! Entre la prétention de science infuse de has been accusant 930 ans de retard et la propension à tout "manichéiser" façon MCU (comme si Star Trek avait toujours été une ordalie de fantasy entre le Bien et le Mal)… Il faut probablement s’attendre à une nouvelle vengeance kurtzmanienne... Après Nero, Khan 2.0, Krall, T’Kuvma, Control, Osyraa, who’s the next ?
S’il suffisait d’interroger Zora-qui-a-réponse-à-tout pour être convaincu en quelques secondes de l’absence de précédent historique, pourquoi avoir attendu le cinquième épisode pour conclure à une DMA fabriquée ou provoquée artificiellement ? Dès le second épisode, la messe blockbusterienne aurait dû être dite.
Alors que l’artificialité du phénomène vient d’être établie au début de Discovery 04x05 The Examples (au même moment que la mise danger de Radvek V ne laissant que quatre heures de latitude), et alors que cela aurait dû être au départ et par prudence considéré comme une hypothèse de travail, il n’a pas fallu plus de quelques secondes en temps on screen (et à peine d’avantage en in-universe) pour que toute la Fédération soit en émoi et en branle-bas (la présidente Rillak rencontrant même déjà divers dirigeants pour les rassurer). Mais WTF ? Pourquoi avoir prévenu proactivement et avec une telle précipitation la galaxie entière, si ce n’est dans le but de provoquer des paniques inutiles et briser le projet de reconstruction de la Fédération (après le trauma du Burn) ? Cette Fédération idiocratique se comporte comme des Bisounours, sans aucune capacité à confiner les recherches stratégiques et à trier les informations méritant d’être rendues publiques dans le cadre de l’intérêt général…
Au début de l’épisode, on serine qu’il n’est pas possible de prédire la DMA tant le phénomène est totalement inconnu et échappe à toutes les lois physiques… Sauf que dans le même temps, l’équipe de Stamets anticipe avec une redoutable précision chronologique le scénario qui risque de frapper Radvek V ! Donc, on ne sait rien pour faire monter la mayonnaise diégétique, mais on sait quand même lorsque les scénaristes en ont besoin pour raconter leur histoire.
Dans son briefing pré-mission, Charles Vance révèle que la sécurité de la Fédération a identifié plusieurs civilisations susceptibles d’être à l’origine de la DMA : les Métrons, les Nacènes, et les membres survivants de l’empire iconien. Les responsables sont temporairement classés comme l’espèce inconnue Ten-C. Heureusement que c’est l’amiral qui est en charge de cet énoncé, étant donné qu’aucune de ces espèces ne peut être connue de l’équipage de l’USS Discovery. L’exclusion du Continuum Q (avec lequel l’UFP n’a curieusement plus de contacts depuis 600 ans !) de la liste des suspects fait sens, car dans le Star Trek historique (en faisant donc abstraction de la deuxième saison de Picard), non seulement Q n’a jamais exposé des civilisations entières, mais il en a plutôt été le protecteur ou le catalyseur derrière son apparence de juge ou de trickster. Il est en revanche étrange que la short list soit si courte, étant donné la quantité de créatures apparemment omnipotentes (qualifiées souvent de "God-like") rencontrées notamment par Kirk (mais pas seulement). Il est encore plus curieux que Vance ne cite que des espèces connues des spectateurs alors que leur fenêtre historique de visibilité sur le Trekverse se limite seulement à deux siècles (2151-2379), et encore, très parcellaires. C’est comme si en in-universe, la période allant du 25ème au 31ème siècles (avant le Burn) n’était qu’un grand trou, sans Histoire, sans exploration, sans découverte, et sans réelle évolution. Enfin, concernant les Iconians, il est également surprenant que des survivants soient cités alors que cette espèce était supposée éteinte depuis 200 000 ans ! Serait-ce une façon d’assumer dans l’univers canon des éléments de l’univers étendu, en l’occurrence le MMORPG Star Trek Online ?
Le génial Ruon Tarka est supposé développer avec Aurellio (transfuge de l’Emerald Chain dans la troisième saison) la version 32ème siècle du "spore drive" de Stamets. Mais il apparaît que l’exercice se heurte exactement au même problème que dans le Starfleet du 23ème siècle, c’est-à-dire l’impossibilité d’informatiser et d’automatiser la navigation ! Or dans la première saison de Discovery, il fut clairement établi que la cause était un manque de puissance informatique. Faut-il vraiment croire que durant 930 ans de loi de Moore (au minimum) – incluant la puissance redoutable des vaisseaux spatiotemporels de Starfleet du 29ème au 31ème siècles (capables notamment de scanner toutes les timelines alternatives) mais dont Discovery tente d’escamoter l’existence dans son reboot non-assumé – aucun progrès significatif n’a été accompli ? Ou est-ce une façon de vendre Stamets et Booker comme uniques et élus du destin… alors que les altérations génétiques de Paul (hybridé de tardigrade) n’ont rien de non-reproductibles ?
Stamets prétend qu’il a transmis à Tarka via Aurellio des consignes pour ne pas nuire aux JahSepp (ces créatures qui vivent dans le "royaume enchanté" des champignons cosmiques tel des Schtroumpfs). Sauf que la série pratique ici l’enfumage du fausse continuité, car l’équipage de l’USS Discovery avait pris l’engagement formel dans Discovery 02x05 Saints Of Imperfection de ne plus employer le "spore drive" qui cause un tort irrémédiable au réseau mycélien et à ses habitants. Mais tout ça est oublié, Discovery n’étant pas davantage fichue d’être cohérente envers elle-même qu’envers le Trekverse historique…
Quand l’amiral impose autoritairement un expert du 32ème siècle à Paul Stamets, celui-ci s’indigne comme blessé dans son honneur, estimant que son équipe du 23ème siècle suffit bien à résoudre le mystère de la DMA ! Totalement surréaliste, irresponsable et immature ! Cela reviendrait à confier à Léonard de Vinci, après un séjour d’un an au 21ème siècle, la charge de gérer seul les recherches de pointe sur la mécanique quantique et la cosmologie branaire.
De même, faire travailler en parfaite intelligence et sur un pied d’équité Stamets et Tarka sur la DMA relève de la fable la plus niaiseuse. Le génie des inventeurs du passé devient le corpus universitaire élémentaire des générations futures, comme l’avait pertinemment montrée la rencontre entre Zefram Cochrane et Geordi La Forge dans ST First Contact. Dans l’épisode culte ST TNG 06x04 Relics (portant bien son titre), à moins d’un siècle d’écart, les ingénieurs Montgomery Scott et Geordi La Forge étaient trop déphasés pour être capables de travailler ensemble, et il fallut toute la charité du second pour réussir à "employer" le premier. Alors imaginez un écart de presque mille ans ?! Mais les causalités, les évolutions et surtout le caractère cumulatif du savoir scientifique sur le temps long furent toujours complaisamment ignorés par le paradigme kurtzmanien. Ce pli d’anachronisme systémique fut pris en réalité dès ST 2009... lorsqu’un Scotty âgé et accusant presque un siècle de retard inventait le transwarp beam car il fallait déjà que tout l’univers passé, présent et futur gravite autour des seuls personnages du main cast comme dans un variante du pamphlet All You Zombies de Robert A Heinlein (1959).
Qu’aussitôt embarqué à bord de l’USS Discovery, Tarka réussisse à concevoir en une heure son modèle réduit de DMA, cela témoigne d’une aporie conceptuelle dans le déroulé de la saison. Pourquoi Starfleet a-t-il laissé "ramer" dans un bac-à-sable un équipage accusant 930 ans de retard... lorsque dans le même temps, l’élite du 32ème siècle avait une grosse longueur d’avance dans le décryptage du phénomène ? Pourquoi Tarka n’a-t-il pas déjà émulé sa DMA miniature dans son propre labo ou dans un de ceux de la Fédé du 32ème siècle ? Alors que Stamets ne lui était pas vraiment nécessaire, pourquoi a-t-il fallu qu’il vienne faire son expérience comme par hasard sur l’antique USS Discovery, en choisissant qui plus est le pire moment pour ça (durant l’évacuation tendue du réfugiés quelques instants avant l’arrivée de la DMA grandeur nature) ? On a beau introduire enfin un scientifique du 32ème siècle, l’apparent supplément de crédibilité contextuel est annulé par un Discovery-centrisme forcené.
Comparer comme le fait Tarka son sort avec celui de Galilée (dont il écorche d’ailleurs le nom) est une ineptie indigne. La Sacrée congrégation de l’inquisition romaine et universelle de l’Église catholique imposait par la contrainte (voire sous menace de mort) une mise en conformité des conclusions scientifiques avec les textes religieux (mais bien souvent davantage au nom d’Aristote que de la Bible)... alors qu’au pire, les ressortissants de Risa manquaient d’appétence et d’estime pour la recherche scientifique ! La persécution selon une doxa liberticide versus un manque de reconnaissance de l’égo ? L’épisode ne craint décidément pas l’indécence.
Ruon et Paul recourent à une psychologie renversée et à un chantage affectif éhonté pour amadouer et convaincre Saru de lui faire renoncer à son devoir et à ses responsabilités... et cela dans l’unique but d’assouvir des impatiences et des incontinences puériles. Il n’y avait aucune raison impérieuse d’exposer les vies de l’équipage de l’USS Discovery ni celles de plus de mille réfugiés à peine une heure avant l’arrivée de la DMA-de-la-mort afin de réaliser une expérience de labo qui aurait pu tout aussi bien l’être ailleurs ou plus tard. Saru est incompétent, Tarka et Stamets infantiles.
Lorsqu’il est question de particules de haute énergie et de masse critique, un coupe- circuit (dont Saru réclame la fabrication) est une protection en soi illusoire. Malgré tout, elle s’avérera ici utile, permettant au capitaine par intérim d’interrompre d’autorité et de sa main l’expérience... alors que le champ de confinement de la mini-DMA était tombé à 5% et était en passe de s’effondrer, ce qui aurait été fatal pour le vaisseau et ses occupants. Mais Tarka et Stamets n’en avaient cure, et Reno rigolait. Avec zéro sens des responsabilités envers eux-mêmes et leur entourage, prêt à inventer n’importe quel bobard pour embobiner l’instit ou le pion, fulminant comme des garnements contre le rabat-joie qui les a empêchés de jouer (après moi le déluge). Sauf qu’ici, des milliards de vie dépendent de leur expérimentation et de leur capacité à lui survivre. Et ils sont supposés être les plus grandes élites scientifiques respectivement du 23ème et du 32ème siècles ?! Jamais aucun scientifique "génial" du Star Trek historique ne s’était comporté ainsi, et pourtant ce ne sont pas les personnalités originales qui avaient manqué...
La crédibilité la plus élémentaire (a fortiori dans une structure de commandement militaire) aurait impliqué que le lieutenant-commander Stamets passe en cour martiale pour désobéissance caractérisée à un ordre impérieux (de son supérieur Saru) et mise en danger de l’USS Discovery... Mais rien à battre. Le Starfleet d’Alex Kurtzman est une dinette qui encourage le foutage de gueule et la puérilité (sauf bien sûr lorsqu’il s’agit de nourrir l’hagiographie martyrologique de Mary-Sue).
Étant donné la brève fenêtre d’évacuation de Radvek V (dans les quatre heures suivant la détection indispensable), il s’agissait bien d’un cas où l’instantanéité des voyages en "spore drive" rendait l’USS Discovery indispensable. Sauf qu’avant même que le Discovery ne quitte Starfleet HQ, trois vaisseaux de la Fédération étaient déjà arrivés sur site ! Somme tout, "spore drive" ou distorsion classique, l’univers kurtzmanien est toujours aussi lilliputien, et les voyages y sont encore plus rapides que dans le métro.
En outre, si trois vaisseaux de Starfleet étaient déjà à pied d’œuvre, en quoi l’USS Discovery pouvait être utile ? Les équipages du 32ème siècle ne sont-ils même plus capables d’assurer leur service routinier (une simple évac) sans avoir besoin des cadors venus spécialement du 23ème siècle pour leur tenir la chandelle ? Encore une façon de pousser grossièrement Mary Sue...
Il est ridicule que le déplacement de 1 206 personnes soit présenté comme une tâche difficile et nécessitant plusieurs vaisseaux. 800 ans avant, ce chiffre correspondait peu ou prou aux équipages réguliers des Galaxy Class tel l’Enterprise D. Et depuis le 23ème siècle, la taille et la capacité de transport de n’importe quel vaisseau important de Starfleet permettait d’évacuer des milliers de personnes. Le retcon de DIS a même inventé avec l’USS Discovery un vaisseau plus vaste à l’intérieur qu’à l’extérieur, contenant au minimum le gigantisme d’un cube borg (voire de Coruscant) dans ses entrailles (cf. DIS 03x13 That Hope Is You Part 2. Alors 930 ans après, ce type d’évacuation aurait dû n’être qu’une formalité…
L’USS Voyager avait la capacité de téléporter des centaines de personnes en une seule fois (par exemple un équipage klingon entier dans ST VOY 07x14 Prophecy). Alors pourquoi l’opération est-elle segmentée ici en petit groupe de quarante personnes (et même seulement de cinq depuis l’astéroïde-prison) ? Surtout au regard des considérables progrès réalisés dans ce domaine (turbo-téléportation, auto-téléportation, sans parler du "transworp beam" déjà vieux de huit siècles et hérité de ST 2009) ? Hors du perpétuel "show off" holographique totalement stérile, le 32ème siècle kurtzmanien semble être dépourvu d’avancées technologiques tangibles (c’est-à-dire celles qui sont vraiment utiles et qui font une différence sur le terrain), lorsqu’il ne s’agit pas carrément de régressions.
Bien entendu, lorsque l’USS Discovery se matérialise à proximité de Radvek V, immédiatement Mary-Sue distribue les tâches, aucune opération n’ayant été initiée avant elle. Les trois vaisseaux de Starfleet du 32ème siècle, commandés par des officiers aussi gradés qu’elle (mais probablement plus âgés, plus expérimentés, et surtout temporellement indigènes), se tournaient donc gentiment les pouces en attendant l’arrivée de la DMA...
Lorsque Burnham décide au complet mépris des consignes du magistrat de Radvek V d’aller secourir les six "Examples", elle viole effrontément la Prime Directive. Certes, elle n’est ni la première, ni la dernière à le faire pour des raisons éthiques ou discrétionnaires. Sauf qu’ici, le plus important des General Orders n’est même pas invoqué. À croire que dans le Burnham-verse, aussi bien millésime 23 que millésime 32, le sacré-cœur lacrymal et justicier de Michael s’est substitué à la Directive Première – jugée quant à elle tellement obsolète et politiquement incorrecte qu’il n’est même plus nécessaire de la mentionner lorsqu’elle est ignorée ou bafouée (tant il s’agit désormais de la posture par défaut).
Michael récidivera ensuite dans le cas de Felix, et ce n’est qu’aux supplications larmoyantes de ce dernier et à l’imminence de la DMA qu’elle respectera sa volonté de mourir pied nu sur la terre sacrée de son crime. Aucune considération de logos ni d’éthos dans cette décision, mais seulement la politique du pathos. Soit la négation même de l’esprit trekkien.
À l’intérieur du dôme, l’enceinte énergétique autour de la prison ne dépasse pas trois mètres de hauteur. Certes, il n’est pas de système de sécurité du 32ème que Burnham ou Booker ne forcent en quelques secondes (des sécurités visiblement toujours décoratives). Mais il est cependant curieux qu’il n’ait pas été envisagé d’utiliser un engin volant ou anti-gravité pour passer par-dessus. De même, comment se fait-il qu’à l’intérieur d’une enceinte strictement bidimensionnelle (i.e. ne chapeautant pas la prison) plus aucune communication ne soit possible vers l’extérieur (notamment vers l’USS Discovery) ? Si ce blackout résulte de l’emploi d’un brouilleur de communication, pourquoi n’avoir pas tenté de la désactiver de la même façon que l’enceinte énergétique a été forcée par Cleveland ? Évidemment, les scénaristes ne se posent aucune de ces questions, l’objectif étant juste d’isoler de couple vedette glamour pour le vedettiser davantage. Et ainsi, comme à l’accoutumée, l’internalisme est sacrifiée à l’externalisme.
Certes, Book est celui qui devinera que les faux scarabées sont en fait des "mines mobiles" en jetant sur l’un d’eux une pierre (le faisant ainsi exploser), et en amont grâce à ses capacités empathiques envers les vies animales (or impossible pour lui d’établir une communication magique avec ces exo-arthropodes comme il le faisait par exemple pour les "trance worms" au début de la troisième saison). Néanmoins, il est étrange que ce soit Burnham (venue du 23ème siècle) qui doive en premier lieu apprendre à un natif bourlinguant depuis toujours dans ce secteur de la galaxie du 32ème siècle (et en particulier dans les parages de la Chaîne d’émeraude) que ces fouisseurs des sables ont l’apparence de scarabées Narisa indigènes d’Akaali.
Toute la dialectique revendicative des prisonniers que Burnham vient libérer est une intox hollywoodienne, servie depuis des décennies. Si les "Examples" ont enduré d’authentiques dénis de justice, ils devraient se réjouir d’être sauvés et élargis ne fût-ce que temporairement. Mais au lieu de ça, et au mépris autistique de l’urgence de la situation, ils demandent des comptes à Starfleet pour les crimes de l’Emerald Chain, comme si celle-ci était vassale d’une UFP érigée par défaut – avec le plus grand naturel – en Empire galactique.
Chaque consentement d’évacuation est arraché de haute lutte, soit à la façon d’une faveur accordée au libérateur, soit au terme d’une rude négociation subordonnée à une révolution générale au bénéfice des prisonniers. Ce genre de renversement de situation basé sur la fierté de la victime n’existe quasiment pas dans la réalité. C’est un onanisme sorti de la tête d’idéologues. Ceux qui glosent sans fin sur les concurrences victimaires sont en général dans des situations de confort (amphithéâtres d’université, plateaux de télévision...). Au feu, les gens, coupables ou victimes, songent surtout à survivre, collectivement ou individuellement.
Faut-il s’étonner qu’il appartienne aux prisonniers eux-mêmes d’expliquer les modalités de sortie (ou d’évasion) à ceux qui ont réussi à forcer toutes les sécurités pour les libérer ?
Au moment d’évacuer les prisonniers, du fait de la lecture intempestive de la biométrie de Luda, les portes de la prison se referment automatiquement et un nouveau champ d’énergie, interne cette fois, piège tout le groupe. Sur la suggestion de Booker, Burnham réactivera les coléoptères robotiques pour exploiter leur charge explosive afin de faire sauter les vantaux depuis l’extérieur. Puis Mary-Sue désactivera à nouveau ces proto-Replicators et le groupe prendra enfin la fuite. Mais dans le feu de l’action, les scénaristes ont oublié (ou tenté de faire oublier) le champ de force... supposé toujours actif. Or si Burnham avait la possibilité de le désactiver depuis l’intérieur, c’est ce qu’elle aurait dû commencer par faire pour attaquer ensuite elle-même les vantaux au phaser-désintégrateur. Ce dernier aurait dû être davantage efficace contre la porte en nanomatériaux que les explosifs plus traditionnels des coléoptères-tueurs (quant à eux bien plus dangereux car difficiles à contrôler).
Poursuivant le dialogue avec Felix jusqu’à la dernière seconde, d’abord de visu, puis à distance, Burnham exposera avec une grande insouciance son équipage (et les réfugiés) à une issue fatale pour les états d’âme autocentrés d’un seul. Puis avec un voyeurisme consumé, elle assistera à la destruction spectaculaire de Radvek V, laissant la DMA littéralement effleurer l’USS Discovery, comme si trajectoire était connue à l’avance au millimètre près (alors que l’épisode n’avait cessé de vendre l’impossibilité de toute prédiction) et comme si les interférences empêchant toute téléportation étaient assurées de ne jamais affecter le fonctionnement du "spore drive" (presque toujours invulnérable d’ailleurs, i.e. au-dessus des lois du commun et des lois physiques).
Malgré son budget pharaonique, l’épisode commettra une erreur visuelle que même ST TOS ne se serait pas permise en son temps (dans ses effets spéciaux originels non remasterisés). À savoir qu’à la surface de Radvek V pourtant précipitée vers l’un des soleils par la DMA, le ciel laissera toujours apparaître ses deux soleils sans le moindre changement de taille relative ni de magnitude (tel un matte painting figé), l’embrasement se manifestant brutalement par une lumière isotrope. Absurde.
Tout émue par les derniers sacrements accordés au vieil "indien", Burnham ne prendra pas même la peine de scanner l’orbe qu’il lui aura confié, le faisant donc entrer à bord de l’USS Discovery sans la moindre vérification. Ce bijou de famille s’avérera certes bien inoffensif, mais une telle imprudence prophylactique est emblématique d’un processus décisionnel placé sous le seul empire des émotions.
S’il n’est pas possible d’employer les téléporteurs dans la zone d’impact de la DMA (obligeant à lancer une évacuation préventive de Radvek V dans un délai très court), pourquoi n’avoir pas dans tous les cas ajouté le renfort de navettes (qui devraient logiquement être très nombreuses étant donné le gigantisme des hangars du Starfleet kurtzmanien) pour étendre significativement la fenêtre temporelle d’intervention (c’est-à-dire même après l’acquisition de la certitude que l’ex-colonie de l’Emerald Chain ferait partie de ladite zone d’impact) ? C’eût été en outre un backup salutaire (puisqu’il est tout de même question de vie et de mort), qui plus est parfaitement viable puisque Discovery 04x02 Anomaly avait montré que le voisinage de l’anomalie gravitationnelle n’empêchait pas en soi de naviguer physiquement dans l’espace. Mais au travers d’une logorrhée anti-scientifique confuse, l’épisode tente de faire passer une vulgaire impéritie stratégique pour un événement quantique… Ce type de manipulation permet à la série Discovery d’apparaître moins benête qu’elle ne l’est pourtant, du moins à un niveau de lecture très superficiel.
L’emploi de navettes, ou à défaut du vaisseau-transformer de Book, aurait par ailleurs été déterminant pour faciliter l’accès à la prison des "Examples" (survol, forçage ou destruction des barrières énergétiques et des champs de brouillage) et assurer un soutien tactique (étant donné les risques de l’opération). Mais comme pour Airiam dont la vie aurait pu être sauvée dans Discovery 02x09 Project Daedalus en faisant simplement usage du téléporteur, la série fait toujours un usage baissier pour ne pas dire franchement incohérent des technologies contractuellement disponibles, soit pour augmenter artificiellement le suspens, soit pour fabriquer du mélo larmoyant, soit pour glorifier les exploits individuels des (super-)héros. Mais, ce faisant, Discovery sort totalement du réalisme opérationnel et de la vraisemblance immersive pour basculer dans la simulation (dépourvue de vraies conséquences) d’un match sportif ou d’un jeu de rôle, douchant donc répétitivement toute suspension d’incrédulité.
Lorsque Reno formulera une remarque (humoristique of course) sur la tête que ferait Tilly si elle apprenait que l’USS Discovery avait été aspiré par un "wormhole", Saru répliquera avec un air de componction, la larme à l’œil, et un trémolo dans la voix : « elle me manque aussi, commandant » ! Simple illustration parmi tant d’autres de toute cette gélatine mielleuse dans laquelle barbote l’épisode (et la série)...
(...)
Et comme d’hab, le rayon du name dropping de placement est généreusement achalandé : les vaisseaux USS Janeway (ST VOY) et NSS T’Pau (ST TOS 02x05 Amok Time), la "planète du plaisir" Risa (ST ENT, ST TNG et ST DS9), les Akaali (ST ENT 01x09 Civilization), les ambiances de la série originale... Mais du fan-service grossier à l’alibi fautif, il n’y a qu’un pas (par exemple le design des vaisseaux vulcains repiqués sur ceux de ST ENT alors que supposés avoir été abandonnés après la fondation de l’UFP en 2161, une erreur également commise par la seconde saison de Lower Decks). Toujours est-il qu’avec autant de gages de filiation ou d’appartenance alignés si tapageusement, certains spectateurs pourraient même s’imaginer être dans Star Trek...
Conclusion
Aucun doute, Discovery reste Discovery. Les invraisemblances et incohérences sont peu ou prou aussi nombreuses que dans chaque épisode précédent, les "arguments scientifiques" restent le faux nez du "ta gueule c’est magique" ou du nawak pur et simple, la glorification des héros par-delà leur anachronisme demeure toujours aussi émétique, la prestidigitation et le château de cartes sont respectivement les seuls horizons du storytelling et du worldbuilding, le logos rationnel et l’éthos principiel ont capitulé devant un pathos tire-larmes dégoulinant de guimauve violoneuse, les larges sourires schlinguent l’autosatisfaction la plus excluante, les dilemmes moraux ne sont que des leçons de moraline, l’idéologie "US Democratic Party approved" pour l’univers entier s’est imperceptiblement substituée à la Prime Directive, les quelques idées putatives ne sont servies par aucune compétence d’écriture, et le prestigieux label se réduit désormais à un folklore pour nostalgiques ou une attraction pour touristes (expos, pots-pourris, collages, hommages volontaires et parodies involontaires du Star Trek qui fut...).
Et bien sûr, le Burnham-centrisme reste la première loi du Burnham-show dans le Burnham-verse : « moi-je-Michael venue du 23ème siècle me déclare seule compétente au 32ème siècle », « moi-je-Michael m’auto-désigne pour diriger les missions de sauvetage contre la DMA », « moi-je-Michael compose mon "away team" perso avec mon amant à moi », « moi-je-Michael déclare invalides les décisions politiques et juridiques des autres mondes », « moi-je-Michael prêche ma morale à moi et délivre mes leçons de conduite et de métaphysique à l’univers entier ». Plus moitrinaire que ça, tu meurs.
Que Shawn Doyle, un acteur qui fut exceptionnel dans The Expanse sous les traits du très complexe Sadavir Errinwright, devienne dans Discovery 04x05 The Examples à peu près aussi médiocre, surjoué et cliché que l’ensemble du main cast... est une confirmation tragiquement éclatante que le "système Kurtzman" est une usine Tricatel à transformer l’or en plomb... exactement comme dans le cas des scripts discoveriens d’Anne Cofell Saunders ayant pourtant signé jadis le chef d’œuvre Battlestar Galactica 2003 02x10 Pegasus.
Malgré tout, même si le personnage (probablement récurrent) Ruon Tarka manque de crédibilité et d’originalité, il véhicule un comic relief moins affligeant que Sylvia... Les absences de cette dernière ainsi que d’Adira et de Gray pourraient d’ailleurs être considérées comme autant d’arguments à verser au crédit de l’épisode...
Plus généralement, Discovery 04x05 The Examples est moins désagréable à suivre que les opus précédents du fait de l’égotisme un poil atténué des personnages, de quelques dialogues qui réussissent à surprendre (à défaut de convaincre), et de modestes madeleines de Proust disséminées çà et là (essentiellement dans le champ de la forme).
Il faut cependant veiller à ne pas perdre le nord ni le sens de la mesure. Discovery a tellement tiré la "qualité" vers des abysses insondables que le plus infinitésimal sursaut ou ressac pourrait faire l’effet d’une "redécouverte philosophique" illusoire... à la manière d’un trompe l’œil traumatique ou, pire, d’un syndrome de Stockholm résultant d’une expérience de Milgram qui dure depuis trop d’années...
Autant dire que chaque perception subjective d’amélioration (dans le registre du "moins pire") est susceptible de dissimuler, si ce n’est un piège, du moins un piège mieux élaboré, d’ordre aussi bien émotionnel que cognitif.
YR
EPISODE
Episode : 4.05
Titre : The Examples
Date de première diffusion : 17/12/2021 (Pluto TV)
Réalisateur : Lee Rose
Scénariste : Kyle Jarrow
BANDE ANNONCE