Japan Expo 2012 : Retour sur les 30 ans de Macross
Après une conférence le samedi dans laquelle Haruhiko Mikimoto est revenu sur sa carrière, c’est le lendemain que s’est tenu une deuxième conférence consacrée plus spécifiquement aux trente ans de la saga Macross. Toujours accompagné de son éditeur Takashi Watanabe, M. Mikimoto s’est présenté sur scène. C’est encore avec Yvan West Laurence en maître de cérémonie qu’a commencé la (hélas trop courte) rétrospective sur la saga.
Il faut savoir que la période de la fin des années 70 et du début des années 80 a eu le même impact pour les fans de dessins animés en France comme du Japon. Deux dessins animés ont changé la donne au Japon : Space Battleship Yamato et Mobile Suit Gundam qui ont fait entrer l’animation dans l’âge adulte là où les animés n’étaient considérés que comme des produits pour enfants. En France, si l’on fait abstraction de Goldorak qui peut être pris comme l’équivalent de ce que donna Mazinger Z voire Tetsujin 28 au Japon, deux autres séries ont produit le même effet Yamato/Gundam. Il s’agissait d’Albator (Captain Harlock) en 1978 et Macross/Robotech en 1986.
Au Japon, c’est au cours de la fin des années 70, lorsque messieurs Mikimoto et Watanabe étaient étudiants qu’ils ont découverts ces dessins animés et sont entrés dans le monde de l’animation, quelques années plus tard. « Nos parents nous critiquaient et ne voyaient pas d’un bon œil que des étudiants s’intéressent à l’animation et au lieu de nous en éloigner, on s’est retrouvé passionné par le sujet. »
Comme dit précédemment, Haruhiko Mikimoto et Shôji Kawamori se sont rencontrés quand ils étaient étudiants à la même université. Ils s’étaient créé un cercle de Chambaras (films de sabre) au cours duquel il leur arrivait de passer l’après midi à s’amuser à faire s’envoler des fusées artisanales.
Du coté de M. Watanabe, il était déjà rédacteur à Animage et avait suivi le boom de Gundam. « À l’époque nous nous demandions quel serait le prochain animé à faire sensation. Au sein du Studio Nue, on avait une sorte de Think Tank de fans de Gundam et de Yamato qui étaient justement en train de réfléchir à la question. J’ai rencontré M. Mikimoto à l’époque car nous avions l’occasion de nous rendre au studio. Moi, pour le travail, lui, pour rendre visite à des amis qui y travaillaient. »
Finalement, le concept de Macross est venu lorsqu’il a été choisi de mélanger Yamato et Gundam. On retrouve en effet un grand vaisseau spatial (comme dans Yamato) et des robots géants (comme dans Gundam). Le fait que tout ça se transforme a été le petit truc en plus. Sur certain croquis originaux, le SDF1 Macross ressemblait même à un mélange entre le Yamato et le White Base de Gundam. Par ailleurs le concept de robots/armure de combat que l’on retrouve dans de nombreux animés tire son origine des scaphandres armés du roman Etoiles, Garde à vous (Starship Troopers) de Robert A. Heinlein.
« Au studio Nue, déclare Mikimoto, ils avaient eu une idée de série vers le milieu des années 70. Ils en étaient encore au stade de projet quand Star Wars est sorti dans les salles. Il se trouvait que le film avait beaucoup de points commun avec ce projet. L’équipe s’est retrouvée très embarrassée et ne souhaitait pas continuer par peur d’être accusée de plagiat. Les personnes derrière Macross étaient des personnes qui avaient la volonté de vouloir faire quelques chose d’original quoi qu’on en pense. On avait beaucoup de personnes qui avaient travaillé sur Gundam et/ou Yamato qui se sont retrouvé sur Macross. Il y a donc bien eu une forme de base inspirée de ces œuvres dont ils ont voulu explorer une utilisation différente. Le résultat final a donné ce que l’on connaît : les Valkyries avec ce mélange entre le F-14 Tomcat et le robot de combat, la présence d’une chanteuse dont la voix perturbe les extra-terrestres et la présence d’intrigues sentimentales qui n’avaient pas trop leur place jusqu’ici dans ce genre assez violent. »
Rappelons un peu l’histoire de Macross :
Au cours de la Troisième Guerre Mondiale, un engin extra terrestre s’écrase sur Terre. L’humanité réalise qu’elle n’est pas seule dans l’Univers et que les conflits humains sont insignifiants face aux dangers inconnus venus de l’espace. Après la Guerre, suite à l’Unification du monde l’humanité restaure pendant de longues années l’épave du gigantesque vaisseau qui s’est écrasé sur une île du Pacifique Sud rebaptisée « Macross ». Une ville entière se construit autour du chantier. Le jour de l’inauguration, des vaisseaux extraterrestres arrivent en reconnaissance. Leur présence déclenche un système d’auto-défense sur le SDF-1 qui transforme rapidement la ville en champs de bataille. Pour tenter de détourner l’attention de l’assaillant, le capitaine du Macross ordonne une téléportation du vaisseau. Le système est cependant défaillant et le vaisseau, la ville et quelques bateaux qui mouillaient au large se retrouvent transportés en orbite autour de Pluton. Le SDF-1, son équipage, et les civils secourus doivent retourner sur Terre alors que les forces Zentradi se dressent régulièrement sur leur route. Cette race de géants extra-terrestres dont la civilisation est exclusivement tournée vers la guerre devient peu à peu perturbée par le contact avec les terriens (qu’ils appellent Miclones). Il leur est inconcevable qu’il existe des civils non combattants ou pire encore, des pacifistes. Il sont particulièrement troublés par les chansons de l’idol Lynn Minmay qui éveillent en eux des sentiments de bien être au point que plusieurs membres de l’armée Zentradi iront jusqu’à se retourner contre leurs supérieurs qui souhaitent éliminer ce qu’ils ne comprennent pas.
A l’époque, la Tatsunoko avait engagé une jeune chanteuse peu connue mais très prolifique qui avait déjà un grand nombre de chansons à son répertoire : Mari Iijima. Elle incarnait Minmay à la voix et au chant. Les musiques de la série, elles, furent composée par Kentaro Haneda qui signa également la même année les partitions d’un autre dessin animé devenu culte : Cobra. Au fil des épisodes, de nouvelles chansons se sont greffées au répertoire de Minmay pour le plaisir des fans japonais. Le titre « Cinderella » faisait par ailleurs déjà partie du répertoire d’Iijima avant d’être utilisée dans la série. Le rôle fit de Mari Iijima une star qui, 30 ans après, fait encore des tournées internationales pour des concerts où se ruent les fans de Macross du monde entier.
En 1984, sort en sallesMacross : Do you remember love ?, film d’animation reprenant la trame de la série avec quelques variations. Le film sera un carton au box office cet été là. (Un autre film d’animation culte sortira à la même période : Nausicaa de la Vallée du Vent qui aura un succès similaire.)
Quelques années plus tard sortira une suite à Macross sous la forme d’une série d’O.A.V nommée Macross II : Lovers Again. Malgré ses indéniables qualités, Macross II n’a pas fait l’unanimité parmi les fans et a même été supprimé de la chronologie officielle. Haruhiko Mikimoto s’était pourtant très impliqué dans la création des personnages. « C’est difficile d’expliquer précisément ce qui s’est passé. Même si l’univers est le même, l’équipe qui a travaillé dessus était totalement différente et ils ont apporté leur propre vision sur l’univers qui a pu déplaire à beaucoup. »
Shôji Kawamori n’a pas souhaité s’investir dans cette série à ce moment là. Peu motivé par l’idée d’une séquelle, la divergence de Macross II l’incitera a s’impliquer davantage dans les futures productions : Macross Plus, Macross 7, Macross Zero et Macross Frontier. Si grâce à l’éditeur Manga Vidéo la France a pu découvrir Macross II et Macross Plus, le reste des séries reste encore inédit chez nous.
Par manque de temps, la conférence ne pourra malheureusement pas couvrir en détail Macross Zero et Macross Frontier. Le peu de temps qui reste sera consacré à un segment assez spécial de la saga : Macross 7.
Si le "character design" de Macross 7 est signé Kenichiro Katsura, c’est Haruhiko Mikimoto qui a créé les personnages en amont. Macross 7 (Seven) comprend tout ce qui a fait l’attrait de Macross : des chansons, des robots Valkyries et un triangle amoureux. L’histoire tourne autour de Basara Nekki, chanteur d’un groupe de rock nommé Fire Bomber qui est également pilote de Valkyrie. Pacifiste convaincu, son appareil ne contient aucun armement létal : seulement de l’équipement capable de transmettre sa musique à travers l’espace. On retrouve par ailleurs trois personnages de la série d’origine qui ont subi un relatif vieillissement (l’histoire se déroule 33 ans après la fin de Macross) : Max Genius devenu amiral de la flotte Macross 7, sa femme Milia (séparée mais non divorcée) devenue maire de la ville City 7 et Exedol, l’ancien chef d’état major Zentradi qui effectue la même fonction au sein de l’UN Spacy. La fille cadette de Max et Milia, Milene, tient le premier rôle féminin et assure également une partie du chant en tant que bassiste de Fire Bomber. « J’ai donné naissance aux personnages sur les drafts, mais c’est Mr Katsura qui a fignolé tout ça et il a fait un très bon travail. Le projet lui même était très différent de ce qu’on peut voir aujourd’hui. Même si M. kawamori était aux commandes, une autre personne a eu son importance, il s’agit de M. Tetsuro Amino qui a réalisé la série. Le but était de faire une série avec un trait plus simple et plus enfantin. La coupe de cheveux en pétard de Basara dans la lignée de Dragon Ball est un vestige de ce projet initial. Amino a choisi d’orienter la série vers un côté un peu plus réaliste et c’est là que Katsura a pris le relai et a modifié mes designs pour coller à la vision d’Amino. La particularité de Basara, c’est qu’il ne combat pas ; ce qui est assez original dans un dessin animé de robots. Quand il prend place dans sa Valkyrie, c’est pour chanter. C’est cet élément qui a donné à la série son cachet particulier. »
Mais vient déjà l’heure de mettre fin à la conférence. Peut être auront nous l’occasion de développer un peu plus les élément manquant pour les 40 ans de Macross.
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