Game of Thrones : Analyse critique de la saison 8
Avec le mois de décembre vient le temps des bilans annuels. Et tandis que 2019 s’achève, il peut être intéressant de revisiter le séisme provoqué par la huitième et dernière saison d’une des séries les plus suivies et commentées de l’histoire de la télévision.
Misaël Rasolofo avait couvert de ses excellentes critiques chaque épisode de la huitième année de Game Of Thrones, mais l’objectif de cette analyse approfondie (100% spoilers garantie) sera de prendre la mesure de la pomme de discorde, de ce qui a pu décevoir et indigner une majorité de fans fidèles et de connaisseurs de la dark fantasy littéraire de G.R.R. Martin.
C’est peu dire que d’affirmer que la saison 8 de GOT a divisé. Ses créateurs David Benioff & Dave Weiss ont déclaré qu’ils avaient espoir que le final de la série puisse rejoindre l’héritage culturel d’un Breaking Bad. Mais à la place, ce final (et la saison dans son ensemble) aura rejoint Lost ou Dexter au purgatoire des pires gâchis de l’histoire de la télévision.
Ce bilan va s’efforcer de proposer une analyse de cet échec cinglant en s’intéressant tout particulièrement à Daenerys Targaryen, probablement la victime principale de David Benioff & Dave Weiss.
Dans cet article, l’analyse sera mélangée au ressenti. Cette démarche est voulue, pour mettre d’un côté ce qu’il est possible de relever comme éléments factuels dans la narration ou dans la mise en scène, et de l’autre côté les effets de cette narration sur le fan de la saga. À travers cet exemple, sans le généraliser à l’excès, l’objectif est de tenter de mettre en lumière les raisons du clivage provoqué par cette dernière saison.
Un chant de glace et de feu
Comment définir A Song Of Ice And Fire / Game Of Thrones ? Quelles sont les qualités qui ont attiré des millions de lecteurs et spectateurs vers cette œuvre ?
Difficile de répondre pour des millions d’âmes, et leur pluralité de sensibilités et de motivations. Malgré tout, des tendances statistiques se dégagent à travers les innombrables témoignages et les nombreuses études qui ont émergés ces dernières années. Le P.G.C.D. de l’irrésistible vecteur d’attraction vers l’odyssée de G.R.R. Martin tient de l’immersion dans une œuvre complexe, toute en nuances, qui prend son temps pour développer des thèmes, un contexte, des structures, des psychologies épaisses, une mythologie riche.
Autant de forces, d’atouts, de qualités… dont l’absence se fait cruellement sentir au cours de cette ultime saison.
Les deux premiers épisodes sont pourtant satisfaisants, justement parce qu’ils sont les seuls à avoir cette "saveur" si particulière indissociable de Thrones. Les personnages ont le temps d’exister, il y a des interactions, ça véhicule du sens, à l’image de l’arrivée de Jaime à Winterfell. Bref, les auteurs prennent le temps de faire vivre l’univers et les personnages. Il y a quelques ficelles et quelques raccourcis (à l’image du sauvetage de Yara) mais rien de fondamentalement scandaleux.
Quant au troisième épisode, The Long Night, il est convaincant au premier visionnage. Et malgré de grosses lacunes, d’autant plus visibles à la lumière de ce qui va suivre, ça reste un gros morceau de dark fantasy absolument réjouissant.
C’est donc véritablement à partir de l’épisode 4, The Last Of The Stark, que la saison sombre dans une médiocrité sans précédent (un peu comme si l’arc infâme de Jaime à Dorne en saison 5 s’étendait sur trois épisodes entiers). Les défauts qui pouvaient pointer leur nez dans l’écriture de la série depuis la cinquième saison deviennent tout simplement la norme. L’histoire avance en dépit du bon sens, l’idiotie des personnages permet de justifier toutes les aberrations d’écriture (et R’Hllor sait qu’il y en a un paquet), les personnages ne sont plus que des fonctions servant à faire avancer le récit coûte que coûte, peu importe que ce soit cohérent psychologiquement ou pas. Ce sont des P.N.J. de jeu vidéo. On ne prend plus le temps de réfléchir, on ne prend plus le temps de se parler. Cela devient une course où il faut boucler en trois épisodes un contenu de trois saisons...
Un chant thématique
C’est donc évidemment l’arc de la Mad Queen qui va cristalliser toutes les aberrations de cette huitième saison. Comme toute œuvre de fantasy au long cours, la notion de "voyage" est centrale dans le parcours des protagonistes (cf. Joseph Campbell et ceux qui ont approfondit son concept). Un voyage tant littéral que métaphorique, l’idée étant qu’au bout de la quête, les personnages savent enfin qui ils sont.
Pour Campbell, il y a trois chemins possibles, le village, les terres arides, le voyage.
Le premier, c’est de rester dans sa communauté où l’on est bien intégré. Les deux derniers sont pour ceux qui ne conviennent pas au village ou ne s’y sentent pas à l’aise.
Les terres arides sont une image pour la rébellion, la marginalité ou l’illégalité. C’est une tentative d’épanouissement par le rejet et la fuite du village et cela finit souvent par des situations peu agréables (addiction, abandon, isolement). Et souvent par engendrer la situation la plus redoutée par le protagoniste.
Le chemin du voyage est celui où le protagoniste suit son cœur, une vision et un appel à trouver sa voie et à fonder ou refonder quelque chose. C’est le chemin de ceux qui aspirent à changer le monde. Par les défis et découvertes faites tout au long du chemin physique, ils développent les qualités de courage, de discernement, de distance envers ce que l’on pensait comme absolu, de sagesse, de résilience.
Qui est donc Daenerys Targaryen ? Selon la série : une folledingue, assoiffée de pouvoir qui se laisse consumer par cette soif et qui s’avère in fine être le plus grand criminel de l’histoire de Westeros. Un monstre au-delà de toute rédemption qui durant d’interminables minutes aura volontairement massacré des hommes, des femmes, des enfants, des bébés, sans la moindre justification crédible... La série va jusqu’à affirmer qu’elle a toujours été ce monstre, mais qu’on ne l’a tout simplement pas réalisé. Et au cas où, si le retcon insultant de Tyrion n’était pas suffisant, Arya viendra affirmer haut et fort que oui, Daenerys est bien une meurtrière après avoir rasée une ville entière (merci, Captain Obvious).
Mais est-ce que cette réponse fait véritablement sens ?
Non, si les auteurs se sont sentis à ce point obligés de prendre le spectateur par la main, à croire que le risque de malentendu était immense. Au-delà de ses titres : la Reine, la mère des Dragons, la briseuse de chaines… Daenerys est avant tout... Dany ! Une jeune femme portée par un idéalisme inné la poussant à se battre pour les moins fortunés (on peut citer l’épisode 01x08 The Pointy End où une Dany qui n’a encore aucun pouvoir véritable – en dehors d’être l’épouse de Khal Drogo – vient au secours de victimes de viols remettant en cause cet aspect de la culture des Dothrakis et tentant de la changer de l’intérieur), une jeune femme déterminée à avoir un impact positif sur le monde (son refus de quitter Essos avant de l’avoir nettoyé de l’esclavage, même lorsque les esclavagistes lui proposent un soutien pour rejoindre Westeros dans l’épisode 03x07 The Bear And The Maiden Fair. Mais également, certes, une jeune femme qui recherche le pouvoir, ce qui entre parfois en conflit avec son idéalisme (l’un des exemples les plus marquants étant peut être l’épisode 05x05 Kill The Boy ou elle laisse ses dragons dévorer des membres des grandes familles de Meereen sans être certaine qu’ils soient coupables directement de ce qu’elle leur reproche). Que sa soif de pouvoir finisse par consumer son idéalisme, pourquoi pas, ce n’est pas une histoire en soi particulièrement intéressante, mais pourquoi pas. Le problème est que les auteurs ont été incapables de crédibiliser cette transformation. Ce changement de paradigme qui anime le personnage. Quitte à se répéter, eux-mêmes semblent naviguer à vue.
Comme cela a été décrit plus haut, Dany finit donc par atterrir dans les terres arides alors que son arc était celui du voyage. Ce retournement possède le double défaut d’être à fois totalement prévisible tant la mise en scène surjoue ce basculement, et totalement abrupte tant aucune étape du changement vers le rejet des valeurs acquises, vers la fuite des leçons apprises, ne sont montrées. Le pire des deux mondes en somme.
Ainsi, dans les coulisses de l’épisode 5, The Bells, D&D vont nous expliquer que la raison pour laquelle Daenerys détruit King’s Landing est que l’effet cumulé du son des cloches et de la vision du Donjon Rouge, la pousse à ce que cela devienne "personnel" !
Aucune idée de ce que ça veut dire exactement !? Est-ce qu’elle juge soudain que les paysans de King’s Landing sont personnellement responsables de la chute de sa famille, de son exil et de toutes ses souffrances qui en ont découlées ?
Peut-être, mais cela ne sera jamais clarifié, et de toute façon dans l’épisode suivant ses motivations changent... Soudain, elle est animée par une idéologie douteuse où briser la roue passerait forcément par le massacre de masses (le génocide, ça lui prend comme une envie de pisser, mais c’est okay, elle est une Targ et donc elle est folle, ça explique tout). Idéologie théoriquement en accord avec ce que l’on peut attendre d’un personnage des terres arides.
Sauf que bien sûr, ça n’explique rien. Le spectateur est simplement mis face à un fait accompli. La narration a justement pour but de raconter comment cet état de fait est la conséquence d’un enchainement de causalités, comment l’on passe d’un paradigme à un autre. Et pour qu’un tel changement fasse sens, il faut autre chose qu’une poignée de minutes où l’on nous amène un peu de jalousie, les morts de proches comme un de ses dragons (disparition bien artificielle), de son protecteur et d’une amie. Car il ne s’agit là que d’une évolution psychologique, et non d’une évolution organique, c’est-à-dire portée par l’ajustement des désirs et croyances face aux réalités rencontrées.
On pourrait dire que Daenerys est le Dark Lord, et la destruction du Trône de Fer par Drogon est symboliquement l’équivalent de la destruction de l’Anneau Unique. Sauf que thématiquement, ça n’a aucun sens. Après la destruction de l’Anneau Unique dans The Lord Of The Rings, on ne voit pas soudain un autre anneau être forgé. Le sens thématique ici aurait été la fin de la monarchie et la mise en place d’une démocratie.
Sauf que non, on a un autre Roi (Anneau), la notion de démocratie est moquée, et le Royaume est fracturé. Quel est donc le message ? À quoi correspond la quête de Daenerys ?
Eh bien en gros : « vous pouvez être animé des meilleures intentions du monde, être une balise d’espoir dans un océan de désespoir, vous finirez quoi qu’il arrive par échouer ; votre père était cinglé, quoi que vous fassiez, vous ne vaudrez jamais mieux ; vous finirez même pas faire pire en ayant simplement osé tenter de vous soustraire à votre destinée, déjà écrite de toute éternité ».
La malédiction des dieux et le fatum sont plus forts que tout, et l’humanité leur perpétuelle victime sacrificielle. En d’autres termes, le libre arbitre est une illusion et un mensonge, le déterminisme est la seule Loi, et malheur à qui tentera de la défier.
Était-ce vraiment le "message" que les passionnés de cet univers attendaient et méritaient ? Était-ce en fait la finalité et la sémantique que G.R.R. Martin avait à cœur et à l’esprit en développant sa geste ?
Un chant psychologique
C’est d’autant plus insultant que, psychologiquement, la soif de pouvoir de Dany et son obsession pour le trône s’explique – en bonne partie – par le fait qu’elle ne peut pas avoir d’enfant (la malédiction/prophétie de Mirri, ignorée durant une bonne partie de la série, mais qui sera pour la première fois abordée dans l’épisode 07x07 The Dragon And the Wolf, un rattrapage aux branches bien tardif de la part de D&D). Elle est la dernière Targaryen et après sa mort, sa famille disparaitra complètement. S’emparer du Trône, briser la roue, c’est bien sûr motivé par son idéalisme, sa volonté d’améliorer la vie des habitants de Westeros, mais aussi par le désir de restaurer une dernière fois la grandeur des Targaryen, afin que le Mad King Aerys ne soit pas le chapitre final de l’histoire de sa famille.
Si la tragédie de sa chute faisait sens, le fait qu’elle marque un chapitre final encore plus sanglant et déshonorable pour sa famille que son père, cela pourrait être puissant. Le problème est que là-aussi, cela n’a aucun sens.
Au-delà de la portée thématique abordée précédemment, la réaction de Dany est pour le moins surprenante lorsqu’elle découvre que Jon Snow et Aegon VI Targaryen ne sont qu’une seule et même personne. Soudain la pérennité de l’héritage familial ne compte plus ! Nan nan, elle ne pense qu’à sa petite personne et va jusqu’à supplier Jon de garder le secret sur son identité (dans l’épisode 08x04 The Last Of The Starks), anathématisant de facto la dynastie familiale et condamnant son défunt frère (Rhaegar) à ne rester qu’un immonde violeur dans l’histoire de Westeros. Ce n’est pas la Daenerys que le spectateurs a appris à connaitre au cours des sept premières saisons de la série, et ce n’est certainement pas la Daenerys des romans. C’est un tout autre personnage fabriqué pour les besoins expéditifs de la dernière saison de la série.
Eh bien, les incohérences de ce genre pullulent et ne servent qu’à une seule chose : faciliter la chute de Daenerys envers et contre tout ! On pourrait parler de Varys :
qui décide soudain que sa reine est folle parce qu’elle déprime un peu lors d’une fête (épisode 4 et 5 de cette saison 8) ;
qui décide soudain que le meilleur roi possible est celui qui n’est pas intéressé par le Trône alors qu’il affirmait le contraire en saison 7 à propos de Robert (cf. 07x02 Stormborn) ;
qui recrute les Tyrell et les Martell (durant la saison 6) en promettant du Feu & du Sang, mais qui décide soudain (un peu en saison 7 et beaucoup en saison 8) qu’un Targ qui utilise le Feu & le Sang n’est pas un souverain fiable...
qui d’un côté estime que Jon est le roi idéal, mais de l’autre réfute la possibilité d’un mariage avec Daenerys parce qu’il ne serait pas capable de lui tenir tête.
Et cette liste des non-sens et aberrations entourant Varys n’est pas exhaustive... Pour la simple et bonne raison que c’est un personnage différent suivant l’épisode ou la saison ! Il n’y a aucune consistance… et cela sans même se référer aux romans en ce qui le concerne.
Sa justification sur la folie héréditaire de Dany est particulièrement gratinée. Les Targ ne sont pas prédestinés à la folie, il s’agit essentiellement d’une propagande religieuse des Septons visant à condamner l’inceste entre frère/sœur, une pratique de consanguinité que les Targ n’ont jamais abandonnés (malgré certains souverains qui ont essayé dans l’histoire de la dynastie). En 300 ans, il n’y a eu que trois Targs réellement "fous". Il y en a eu de nombreux cruels, idiots ou incapables (à l’image d’un Viserys). Mais véritablement fou à lier ? Aerion, Baelor et bien entendu Aerys, le père de Dany qui n’est pas né fou, mais l’est progressivement devenu au fil des ans et après avoir passé des mois à être torturé, après sa capture à Duskendale. Pourtant la série tente de nous vendre qu’un Targ sur deux serait fou comme une sorte de loi universelle. Ben oui, cela devient tout de suite plus simple de justifier ainsi que Dany est devenue si abjecte et si méprisable… plutôt que de proposer une véritable progression psychologique vraisemblable.
L’état d’esprit de Dany est particulièrement intéressant à analyser. On peut affirmer qu’elle n’a jamais rechigné à utiliser la violence et en particulier ses dragons pour assoir son pouvoir. Quitte à revenir (plus ou moins) sur sa parole au passage. C’est ainsi qu’elle obtient ses immaculés. Et on pourrait y voir un passage qui préfigure le massacre de King’s Landing. À la nuance près qu’elle n’a jamais utilisée la violence sur des innocents (et on peut même dire que c’est dans la défense des innocents qu’elle perpétrera ses pires crimes). Elle est peut-être cruelle envers ceux qui l’ont attaquée personnellement (Viserys, Mirri, Doreah, Xaro) et impitoyable envers ses opposants politiques, mais ça n’en fait pas pour autant une psychopathe à tendance génocidaire. Elle aura, dans les romans, pas mal de remords concernant Viserys notamment, ce qui est ironique puisque c’est sa mort que D&D utilisent pour justifier sa folie naissante.
Quant à sa jalousie envers Jon/Aegon qui pourrait l’amener à adopter un tel état d’esprit, ça paraît difficile à avaler (d’autant plus qu’après le massacre de King’s Landing, cette justification-là disparait complétement). Mais admettons. Elle a passé des années à fantasmer un retour triomphal sur sa terre natale, où elle serait accueillie à bras ouverts comme une grande libératrice. Similaire à son statut à Essos ou elle est vénérée telle une déesse par une bonne partie de la population (la combinaison du "miracle" de la renaissance des dragons, de sa campagne visant à éradiquer l’esclavage et de la propagande des Prêtres Rouges). À la place, elle reçoit un accueil glacial. Et malgré le sacrifice de ses armées et de ses proches, ça ne change guère… tandis qu’il y a cet autre Targ qui inspire respect, loyauté, admiration et amour.
Alors certes, elle avait de quoi devenir amère. Surtout si elle devait constater le rejet du Sud, et pas seulement celui des Nordiens (qui est connu pour être un peuple profondément insulaire). Un rejet du Sud que la série ne prend même pas le temps de développer (se limitant juste au père Tarly qui est xénophobe). Alors que Cersei qui alimente une campagne de calomnie à l’encontre de Dany dans les rues de King’s Landing, et Varys qui rapporte la chose à sa Reine (il aura servi à quelque chose au moins), là, ça ne coutait pas grand-chose. Dans les romans, Dany n’a pas encore tourné le regard vers Westeros que déjà on lui taille une réputation insultante (par exemple son lien avec les Dothrakis est exploité pour affirmer qu’elle a des relations sexuelles avec des chevaux). Mais dans la saison 7 (l’épisode Stormborn), on aura seulement droit à une unique scène avec Cersei qui met en avant les actes violents de Dany à Meereen pour peindre un portrait négatif auprès de ses seigneurs. Ce qui est loin d’être suffisant. Mais visiblement, ça semble l’être pour D&D !
Bref, qu’une Dany esseulée, perdant petit à petit tous ses alliés (tandis que Jon/Aegon gagne en popularité y compris au Sud), voyant ses plus proches conseillers qui complotent (pour mettre le Targ le plus populaire sur le Trône), soit amenée à prendre des mesures extrêmes, pourquoi pas ? Que celle-ci décide alors de rappeler qu’elle est la Targaryen qui chevauche un dragon, ce n’est pas spécialement choquant. Après tout, comme le disait Aemon « un Targaryen seul au monde est une terrible chose ». Et donc que King’s Landing découvre à quel point cela peut être terrible, cela fait sens.
En revanche, tomber dans le génocide des paysans après que la ville a rendu les armes, là c’est narrativement et psychologiquement injustifiable, de quoi décrocher complètement !
C’est d’autant plus dommage que la jalousie est un parallèle intéressant entre Dany et son père. Ce sera bien la jalousie d’Aerys envers sa Main, Tywin Lannister, qui aura conduit à son emprisonnement, sa torture et à terme sa descente dans la folie.
Dany est un personnage complexe, une créature mélancolique, en conflit avec son "dragon intérieur" (dans les romans quoique trop peu montré dans la série). Ça n’a jamais été un Darth Sidious qui, du jour au lendemain, se découvre des envies de génocide. Qu’elle puisse perdre ce combat contre son dragon intérieur, on peut tout à fait le concevoir. Ainsi, dans les romans, elle contemple souvent sa nature profonde. Il y a d’un côté son désir d’enracinement, et de l’autre la prise de conscience progressive et difficile qu’effectivement "un dragon ne plante pas d’arbres". Daenerys se pose souvent la question de savoir "qui pourrait bien aimer un dragon ?". Il s’agit là d’une des réalités psychologiques les plus intéressantes des Targaryen, la folie chez eux n’est pas héréditaire, mais ils ont beaucoup de mal à s’intégrer. Ils se considèrent réellement comme des dragons sous forme humaine, et du coup, ils développent tous ce complexe de supériorité, d’autant plus grand chez Dany en raison de son parcours mythique/légendaire (un complexe de supériorité que l’on retrouve également chez le Jon des romans).
Une des devises des Targ est qu’il sont "au-dessus des lois des hommes et des dieux". Ils n’ont ainsi de compte à rendre ni à l’un, ni à l’autre. La plus grande peur de Dany est probablement de se perdre dans son dragon, de s’y abandonner totalement. Au point, par exemple, de désespérément se convaincre qu’elle est follement amoureuse de Daario. Elle envisage même un temps de tout plaquer pour lui et de se construire une existence discrète à ses côtés. Mais dans ces moments d’introspections et de lucidité, elle se sent terriblement seule, y compris en compagnie de Naharis.
Dany qui perd le combat contre son dragon intérieur, au point de tout lui céder, le tout porté par une caractérisation à la hauteur et un enchainement de péripéties crédibles et vraisemblables, ce serait une tragédie à laquelle il serait possible d’adhérer. Même si ce n’est pas la destination la plus souhaitable ou pertinente pour le personnage (la corruption du pouvoir est un cliché pour le moins éculé), ce ne serait pas forcément inintéressant. Un changement de paradigme campbellien ou une hybridation entre ses deux chemins pourrait être ambitieux et rafraichissant. Mais il faut avoir le talent de son ambition. Car utiliser la folie comme alibi aussi simpliste qu’incohérent pour justifier le fait que le personnage commette le pire crime de l’histoire de Westeros, la condamner à pire que son père ou Cersei en balayant d’un revers de main toute forme de complexité, c’est insultant et profondément révoltant !
Et cela remet en lumière le talent et l’ambition de D&D. Bien des critiques qui leur sont tombées dessus résultaient de leur (in)capacité à proposer une histoire de qualité, dès lors qu’ils ne pouvaient plus s’appuyer sur les romans. Et ici, on voit à quel point le problème est profond. En adaptant la série, ils ont dû faire de nombreux choix. Et c’est en découvrant la fin de leur narration que l’on peut juger de ces choix. N’avoir jamais montré la dualité de Daenerys, son dragon intérieur… tout en voulant quand même l’utiliser pour justifier leur retournement… conduit à une forme de triche, et frise la trahison absolue de l’œuvre.
La question est donc davantage de savoir comment ils ont, depuis tant de saison, maltraité un matériel d’origine, plutôt que de l’utiliser. Steven Moffat disait que, pour adapter, il faut beaucoup trahir, pour à la fin, bien retrouver l’origine. Prendre des distances, simplifier, amalgamer, changer totalement des personnages, ce n’est pas un problème en soi. La série n’a pas à être un copié-collé des romans (chose de toute façon impossible car ce n’est pas le même médium). Mais ici, ce sont des choix qui n’amènent que de la trahison sans jamais retrouver l’origine.
Un chant politique et moral porté par des personnages
L’absence de structure est un trait saillant de cette huitième saison.
L’une des plus importantes institutions de l’univers de Martin est le mariage. Il est à la base de la très grande majorité des alliances politiques, commerciales, militaires de Westeros. Rien, absolument rien ne permet de justifier l’absence d’un mariage entre Daenerys Targaryen & Jon Snow (en dehors du fait que le développement de l’intrigue n’avait pas le temps ou ne voulait pas aborder cette question).
Alors oui, la question est vaguement abordée par Davos dans l’épisode 1 de cette saison 8, mais c’est très insuffisant. Il n’est absolument pas crédible qu’une reine telle que Dany puisse entretenir une liaison avec son gouverneur, et que ça reste à l’état de simple liaison. Elle est amoureuse de Jon, l’épouser n’a que des avantages. Elle n’arriverait pas au Nord comme en terrain conquis ; en s’engageant auprès de Jon, elle garantirait aux nobles d’avoir toujours à cœur leurs intérêts et ceux du Nord, avec l’assurance que le sang Stark finisse sur le Trône. Que ce soit par la progéniture entre Jon et Dany, ou par celle de Sansa ou d’Arya (dans la mesure où elles sont les héritières de Jon). Dans un système monarchique, régler la question cruciale de la succession n’est pas rien.
Autre élément lié au mariage dont le traitement fut particulièrement incohérent : la question de l’inceste.
Comme tous les autres aspects narratifs de la saison, on assiste-là à une trahison de l’univers du show et de ses personnages dans le seul et unique but de simplifier l’écriture (ou de complaire au public contemporain). D’un seul coup, les personnages ont une vue "moderne" sur l’inceste qui n’a aucun sens dans le contexte alter-médiéval de la série. Jon n’a absolument aucune raison de ne plus désirer Dany au motif qu’elle est sa tante. On ne va pas revenir sur l’arbre familial des Targ, mais même du côté des Stark, il y a de nombreux exemples de mariages entre cousins/cousines ou oncles/nièces... Les grands-parents maternels de Jon (les parents de Lyanna) étaient cousin/cousine. Dès lors, avoir Varys qui réfute la possibilité d’une union entre Dany & Aegon, sous prétexte que le Nord n’accepterait pas de telles pratiques, dans le genre "je manipule le spectateur et je prends le connaisseur des romans pour un amnésique", on peut difficilement faire mieux...
Surtout qu’il y a au moins un exemple dans l’histoire de Westeros et de la dynastie des Targaryen d’un mariage entre deux monarques qui se partagent le pouvoir de façon parfaitement fonctionnelle. À savoir l’union entre Jaehaerys et sa sœur Alyssane. Ils sont considérés comme les deux plus grands souverains qu’aient connus les Sept Royaumes et leur règne fut le plus long et prospère de l’Histoire (Davos qui parle d’une première pour Jon/Dany devait sûrement souffrir d’amnésie). Alyssane n’était pas du tout une "femme au foyer", elle était très impliquée et influente. Elle aura notamment réussi à gagner l’admiration du Nord, ce qui pour une Targ n’est pas rien !
Un thème central de l’œuvre (tant des romans que de la série, mais sans doute plus prégnant ou mieux exprimé dans les romans) est que les mariages arrangés (outil politique central permettant aux nobles de conserver voire d’étendre leur pouvoir) sont nocifs et ont des conséquences désastreuses. Les plus récents étant Rhaegar qui, après son union forcée avec Elia Martell, trouve l’amour, ce qui aura pour conséquence la rébellion de Robert. Puis en découlera l’union entre Robert et Cersei, qui aura pour conséquence la Guerre des Cinq Rois.
Thématiquement, qu’une union voulue et désirée entre Jon & Dany aide à rétablir la situation, à briser la roue, cela aurait été bien plus pertinent que tout ce que peut proposer la saison 8 (mais pas assez cynique, faut croire).
Le "pire" étant que si l’on se base sur l’échange entre Sansa et Tyrion dans l’épisode 4 de cette saison 8, le plan sur le long terme – si Jon n’avait pas découvert la vérité sur ses origines – était que Dany et lui continuent à vivre leur petite amourette plus ou moins discrètement à King’s Landing, tandis qu’à Winterfell, Sansa aurait la charge du Nord pour le compte de la couronne !
Depuis la saison 5, la qualité des intrigues politiques a piqué du nez, mais là, on touche vraiment le fond. Sachant que le basculement de Dany a, en partie, cette dimension politique, et que, comme le reste, ça ne tient pas la route une seule seconde, voilà qui constitue un vrai souci.
C’est d’ailleurs involontairement comique que la "politicienne de génie" Sansa (mais bien sûr…) passe son temps à chercher des poux à Dany, alors qu’elle a un boulevard pour s’assurer que son enfant finisse sur le Trône de Fer, et à terme, assure au Nord son indépendance. Sauf que bien évidemment, entretenir une relation conflictuelle aussi gratuite qu’artificielle est plus facile qu’écrire des personnages qui réfléchissent.
Pour rester sur Sansa au cours de cette saison, elle est basiquement devenue Cersei 2.0. Un personnage hautement antipathique qui affiche constamment une moue déplaisante et hautaine et qui ne pense qu’à sa petite personne. En saisons 6 et 7, elle apparaissait comme une manipulatrice malavisée, mais sincère dans ses intentions (libérer le Nord du Joug des Bolton, puis le protéger de la menace de Cersei). Désormais, ce personnage tout en nuances a disparu. La raison est simple : si les Stark avaient fait preuve d’un minimum de respect et de bienveillance envers Dany, son arc aurait été plus difficile à écrire. Raison également pour laquelle Arya fait soudainement preuve d’autant d’ouverture d’esprit que Joffrey en saison 1 vis-à-vis des étrangers...
Là-encore, sur le sens du voyage et de la quête, après huit ans d’investissement, nous nous retrouvons avec des Stark qui, au fina,l ne valent pas mieux que les Lannister de la première saison. Peut-être est-ce le message que veut faire passer G.R.R. Martin, à savoir que les enfants de Ned Stark ont été tellement "bousillés" que, sans même qu’ils s’en rendent compte, leurs actions le feraient se retourner dans sa tombe.
Reste que, tout comme pour Dany, le changement est bien trop abrupt pour qu’il soit significatif. À la place, il ne reste qu’une gigantesque hypocrisie...
Jon, quant à lui, est devenu un véritable "paillasson". Et cela même à supposer que l’on ait fait son deuil de son alter égo des romans pour accepter cette version aussi peu inspirante soit-elle. Mais bon sang, cette ombre audiovisuelle de Jon laisse absolument tout le monde lui marcher dessus !
Comment est-il encore possible de s’intéresser à un tel personnage, de s’intéresser à sa romance avec Daenerys (uniquement trois scènes en tête à tête durant trois épisodes) ? C’est bien simple, après son beau discours ouvrant le quatrième épisode, il cesse totalement d’exister !
Et il s’agit clairement d’un choix d’écriture volontaire de D&D, par vulgaire paresse. En effet, si Jon s’était comporté comme un amant ou même simplement comme un membre de famille concerné, la chute en ligne droite de Dany aurait demandé un minimum d’effort et de subtilité.
Mais avec un Jon se comportant envers sa reine tel un simple sujet, c’est tout de suite plus facile… Dès lors, pas besoin de se prendre la tête pour isoler Daenerys, pas besoin d’écrire de véritables dialogues où ils auraient communiqués un minimum... Et pourtant, ils en avaient des choses à se dire. Dany sur son désir de trouver une famille et une demeure où elle se sent à sa place (la fameuse Red Door des romans dont l’absence totale de la série a de quoi laisser pantois). Jon sur Aemon Targaryen (qu’il évoquera seulement avec Tyrion) et sur son désir de s’intégrer à une famille dont il s’est toujours senti exclu. Et passons sur les multiples parallèles de leurs histoires respectives... Quelle farce !
Les spectateurs devraient être dévastés lorsque Jon plante un couteau dans le cœur… que Dany lui offre sur un plateau. Mais ils n’éprouveront que consternation. En effet, comment se sentir concerné devant une Daenerys complètement "désillusionnelle" et un Jon qui ne cherche même pas à trouver un compromis avec elle, qui l’a déjà condamnée…
C’est à se demander si Jon a jamais été réellement amoureux de Dany durant cette saison 8. Et avec le recul, il n’est pas n’est non plus certain qu’il l’ait vraiment aimée en saison 7. Il a assurément ressenti du désir, mais ça pourrait bien se limiter à cela.
Du coup, comme Arya et Sansa, Jon donne l’impression d’avoir utilisé Dany pour son propre compte, et que la soutenir face à Cersei est davantage un fardeau qu’autre chose (il le dit, il n’a déjà qu’une envie : se barrer au Nord avec Tormund).
On ne cesse de nous dire que Dany n’est pas raisonnable, qu’elle est incontrôlable ou presque… Pourtant, regardons son parcours depuis son arrivée à Westeros. Elle demande à Jon de plier le genou, il refuse ; en retour elle lui permet d’exploiter le Verredragon qui se trouve sur son île. Elle veut attaquer King’s Landing, Jon lui dit que ce serait contre-productif ; elle l’écoute et attaque l’armée des Lannister à la place. Jon veut quitter Dragonstone, elle fait preuve d’un minimum d’autorité en mode "je suis la reine, t’as pas la permission", Jon pose le pied sur la table en mode "je suis roi, pas besoin de ta permission"… et elle cède. Jon commet une énorme erreur stratégique face à Cersei… et Dany lui pardonne immédiatement et fait même preuve de gratitude. Pour le voyage vers Winterfell, Jon parvient à la convaincre qu’elle devrait l’accompagner parce qu’il a des envies de galipettes...
Sérieusement, est-ce que cela ressemble à la description que donnent Varys et Sansa de leur relation, d’une Dany qui plie Jon à sa volonté ? Le degré de malhonnêteté intellectuelle que D&D ont infusé dans leur écriture bat ici tous les record !
Car Dany n’a eu de cesse de soutenir Jon, d’être à son écoute ; elle a sacrifié ses dragons et ses armées pour lui… Mais en échange, il ne lui a rien donné, il ne pouvait même pas attendre qu’elle ait conquis le Trône avant de se décharger de son secret sur ses sœurs ! Le spectateur est-il alors censé trouver tragique qu’il lui plante un couteau en plein cœur après une discussion de deux minutes avec Tyrion ? Cela apparait juste comme la conclusion logique de son arc : un égoïste manipulateur qui a exploité l’amour d’une femme fragile pour servir ses propres intérêts... Ce n’était certainement pas l’intention de D&D, mais ils ont été tellement incompétents que cela revient à imposer cette seule lecture.
C’est d’autant plus navrant que dans le sixième épisode de la saison 2, The Old Gods And The New, Jon est incapable de tuer Ygritte, une inconnue qu’il vient juste de rencontrer. Et il en sera tout aussi incapable dans le neuvième épisode de la saison 4, The Watchers On The Wall, alors que non seulement elle combat dans une armée ennemie, mais elle a également pillé et massacré plusieurs villages (comme Dany, elle a donc du sang sur les mains).
Donc, de deux choses l’une : soit effectivement Jon était réellement amoureux d’Ygritte et ne ressentait rien de tel pour Dany ; soit c’est devenu un autre personnage.
Alors, certes, on pourra toujours répliquer que Ygritte n’avait pas de dragon, qu’elle ne menaçait pas de génocider l’intégralité de Planetos. Sauf qu’il a déjà été établi plus haut que tout cela était stupide et mal fichu. Mais surtout : « un dragon, cela se tue ». Dany aurait alors été bien à la peine de génocider tous les planetosiens…
En outre, n’oublions pas le superbe sacrifice héroïque de Jorah, absolument déchirant dans l’épisode 3 de cette saison 8, mais qui est rendu complètement vain deux épisodes et demi plus tard. En soi, la mort de Jorah est la seule étape du parcours de Dany vers son statut maudit de Reine des cendres qui fasse sens, le seul qui soit un minimum satisfaisant. Reste qu’en raison de cette narration extrêmement précipitée, le propos perd considérablement de sa force. À une ou deux saisons d’écart, ce serait acceptable (Martin comme HBO voulaient au moins dix saisons). Mais là, c’est du sabotage pur et simple. Car Jorah n’est plus que le protecteur d’une future criminelle. Il apparait donc comme, non pas un preux chevalier, amoureux d’une reine, mais comme un aveugle. Et Dany apparait comme crachant sur la tombe de cet homme mort en la sauvant, tant Jorah aurait condamné cet acte criminel que constitue la destruction de King’s Landing.
En fait, dans la saison 8 de GOT, il n’y a plus aucun personnage, seulement des véhicules pour du drame artificiel et des twists tout aussi artificiels. Et cette artificialité ne sert qu’à rendre les personnages absolument amoraux voire immoraux. De l’idéalisme qui se dégageait d’eux, de l’empathie et de l’admiration que suscitaient des protagonistes ayant autant souffert en demeurant pourtant toujours dignes et "debout"… il ne subsiste désormais plus que mépris et antipathie envers eux. Et ce, en deux épisodes et demi ! Quelque part, c’est très fort.
Jon et Tyrion ne se posent même pas la question de savoir quelles seront les conséquences de la mort de Daenerys pour les millions d’esclaves libérés d’Essos. Il apparaît probable que les esclavagistes se frottent les mains à l’idée de remettre l’ancien système en place. Ils ne se posent pas davantage la question de savoir quelle sera la réaction de Drogon à la mort de sa mère. En représailles, il pourrait tout à fait réduire le continent en cendre... Mais heureusement pour eux, Drogon a parfaitement saisi la nature métaphorique de la mort de Dany et se contente de détruire le Trône (merci aux scénaristes d’avoir inventé le dragon crachant… des métaphores !).
La comparaison est difficile tant les dégâts causés par ces choix narratifs simplistes sont innombrables, mais Tyrion représente peut être l’un des plus gros massacres qui soit. Il a été réduit au rang de gentil-nain-qui-fait-des-blagues, tel l’idiot du village ou le fou du roi. En tant que Main de Daenerys, il n’aura pas une seule fois été capable de lui donner un conseil pertinent. Pas une seule de ses décisions politiques ou stratégiques n’aura aidé Daenerys. Ses multiples échecs n’auront eu qu’un seul but : assurer la chute de Daenerys. Et pour cela, il a fallu totalement sacrifier le personnage qui n’est plus que l’ombre de lui-même. Quant au Tyrion des romans, un peu comme Jon, c’est un tout autre personnage : un gars qui assassine son amante (pas de légitime défense au contraire de la série), qui viole des prostituées, qui veut voir tout Westeros cramer, et qui fantasme à mort sur le fait de violer et tuer sa sœur... Si Tyrion dans la série est devenu la voix de la raison (en imposant à Dany de se conformer à un standard moral totalement inique et, encore une fois, incohérent), dans les romans, aucune chance que ce soit le cas. Il y a beaucoup plus de risques au contraire qu’il attise les pires pulsions de Daenerys...
À la place, on se retrouve avec un personnage profondément stupide, qui a cru pouvoir concilier sa loyauté envers sa reine et sa loyauté envers sa famille et qui finit par perdre les deux.
Et Tyrion met en exergue la caractère profondément hasardeux sur le long-terme des choix d’adaptations de D&D. À la fin de la quatrième saison, ils ont décidés d’ignorer une partie essentielle de son histoire réelle : sa femme, Tysha, n’était pas une prostituée, il s’agissait d’un mensonge de Tywin qui désirait que Tyrion apprenne une "leçon". Un mensonge que Jaime aura été forcé d’entretenir durant des années. La confession de Jaime cimente le désir de vengeance de Tyrion et la haine qu’il éprouve pour sa famille et crédibilise considérablement la mise à mort de Tywin. Dans la série, le patriarche des Lannister apparait soudain un peu stupide de provoquer Tyrion en traitant Shae de "putain" sachant que son fils le menace d’une arbalète, que Tywin a couché avec Shae, que Tyrion en a conscience et qu’il l’a tué. Dans le roman, il s’agit de Tysha que Tywin traite de "putain" et on comprend aisément pourquoi Tyrion réagit aussi violemment. D’autant qu’il ne s’agit pas d’une "provocation" de Tywin dans ce contexte, mais simplement de son point de vue sur cette femme de "basse extraction" qui a eu l’audace de séduire et épouser un Lannister.
En ignorant tout cela, D&D ont fait de Tyrion un personnage bien plus lisse, tourmenté par un dilemme parodiquement "cliché", c’est-à-dire où il est "vulgairement" tiraillé entre sa famille d’un côté, et Dany de l’autre. On se rend donc compte avec le recul que, dès la saison 4, Tyrion fut "sacrifié" sur l’autel de l’appauvrissement, afin de rendre la chute de Daenerys plus simple (la loyauté de sa Main est divisée, elle en paie donc le prix).
En parlant de twist, il faut bien s’attarder sur le cas de Bran. D’un point de vue archétypal, Bran serait l’équivalent de Frodon : il a exploré les terres du big bad dans l’espoir de le détruire, il a été "touché" par le mal et est revenu profondément changé de sa quête. En faire le roi, au-delà de l’absurdité thématique déjà évoquée, en terme de logique narrative, c’est un peu comme si à la fin de The Lord Of The Rings, Frodon se retrouvait roi du Gondor...
Ah, c’est sûr que c’est surprenant ! Mais est-ce pertinent ? L’arc de Bran n’a rien à voir avec le fait de gouverner. Depuis la septième saison, on nous a même manipulés intellectuellement afin de préserver ce twist, Bran affirmant à plus d’une reprise qu’il est le Three Eyed Raven et qu’il ne peut pas être le Seigneur de Winterfell (par contre, être roi, visiblement aucun souci) ! D&D sont là-aussi carrément malhonnêtes et se fichent du monde, le spectateur n’étant pas sujet à des amnésies comme Dany oubliant Euron...
Quant à la stupidité des personnages… Comment expliquer que nul ne songe à mettre à profit les pouvoirs de Bran pour donner un salutaire coup de main dans la guerre contre Cersei ?! Or Tyrion a, dans l’épisode 2 de cette saison 8, une longue conversation avec Bran où il lui raconte toute son histoire personnelle ! Une preuve de plus que Tyrion n’est pas un vrai personnage (il aurait forcément pensé à utiliser les dons de Bran en pareille situation) mais bien un simple véhicule (en d’autres termes, cette scène n’existe que pour justifier le discours final embarrassant de Tyrion lorsqu’il proclame Bran roi).
Le mode de gouvernance que les showrunners proposent à la fin de la série paraît difficilement viable. Malgré la destruction symbolique du Trône de Fer, les puissants et ambitieux seigneurs de Westeros ne vont pas décider, comme ça, d’un coup, de renoncer à grimper l’échelle du pouvoir !
L’élection de Bran se déroule étonnement sans accroc, mais il est certain que les prochains scrutins verront la naissance de nombreux conflits de successions au sein d’une société qui ne possède aucune culture démocratique (un apprentissage aussi long qu’incertain). Au moins, la monarchie avait le mérite d’apporter une certaine stabilité institutionnelle et structurelle.
Et puis, il y a le précédent du Nord – qui réclame et obtient son indépendance. Il est donc certain qu’à terme, les Fer-Nés (qui ont menés plus d’une rébellion contre la couronne par le passé) et surtout Dorne (qui a toujours refusé de se soumettre, même lorsque les Targaryen avaient leurs Dragons) suivront à un moment ou à un autre l’exemple de Sansa...
Bref, en dépit de ce qu’affirme Tyrion, la roue est très loin d’être brisée, on l’a juste repeinte et relancée. Un crachat de plus sur l’héritage de Daenerys Targaryen.
Un héritage également malmené par l’étrange parallèle que D&D veulent tracer entre Daenerys et Cersei. Il y a parfois une certaine similitude entre leurs parcours respectifs. D’une part, elles sont toutes deux des femmes qui tentent de s’imposer dans une société profondément inégalitaire et patriarcale. D’autre part, elles ont, l’une comme l’autre, trois enfants : Joffrey, Myrcella et Tommen pour Cersei ; et les dragons, Drogon, Viserion et Rhaegal pour Dany.
Cependant, D&D ont considérablement "adouci" (oui, encore !) le caractère de Cersei. Ainsi, dans les romans, ce sera elle qui ordonnera le massacre sommaire des bâtards de Robert (bébé compris) et non Joffrey. Elle tire également une grande fierté de n’avoir jamais portée d’enfants pour Robert. Le fils mort-né qu’elle eut avec ce dernier et qu’elle évoque dans l’épisode 01x02 The Kingsroad est une pure création de D&D, servant à humaniser sans trop d’efforts Cersei et à créer un parallèle avec Dany et la perte de Rhaego.
Il est évident que la Cersei des romans ne sera pas l’antagoniste finale de Daenerys ; il est également évident que Tyrion ne cherchera pas à signer une trêve ni une alliance avec elle. Du coup, D&D ont dû broder à l’extrême autour de son personnage, sans pour autant lui donner quoi que ce soit de significatif à faire. Elle passe la saison devant une fenêtre à boire du vin et à regarder vers l’horizon... Et comme elle n’a pas les "épaules" pour être un(e) antagoniste crédible, D&D ont dû briser les règles de l’univers de la série pour porter à l’écran ce conflit.
Il y a tellement de raccourcis et d’incohérences autour de la mort de Rhaegal et de la capture de Missandei qu’il serait fastidieux de les lister tous ; Mais la "justification" de D&D vaut "son pesant d’or" et résume à elle seule la philosophie qui semble avoir présidé à l’écriture de cette saison 8 : « Daenerys a en quelque sorte oubliée l’existence d’Euron et de sa flotte » !
Voilà, les personnages seraient donc imbéciles, voire totalement demeurés. Pas besoin alors d’écrire des intrigues complexes ou de mettre en place des campagnes militaires cohérentes et réfléchies…
C’est d’autant plus impardonnable que, si D&D avaient respectés la nature du personnage d’Euron (un pirate s’entourant de sorciers et ayant étudié les anciens mystères de Planetos et la magie), l’utilisation de la magie (justement) aurait pu permettre de justifier certains raccourcis. On est passé d’un personnage – chez G.R.R. Martin – dont la motivation première était d’accéder à la transcendance afin de devenir un dieu… à un personnage libidineux qui ne désire qu’une chose : coucher avec la reine ! Rarement on aura vu exemple aussi éloquent d’écriture (ou de choix d’adaptation) qui tire un personnage vers le bas.
Récemment, D&D ont confié à la presse avoir volontairement réduit à son expression la plus basique tout ce qui touche à la magie parce qu’ils voulaient « s’assurer de pouvoir toucher les mères au foyer et les joueurs de NFL » (sic) ! Avec la huitième saison et notamment Euron qui est un simple pirate, le public a désormais tout le loisir de prendre la pleine mesure des conséquences négatives sur le temps long de ce choix d’écriture. La campagne militaire difficile de Dany aurait été nettement plus justifiée si la magie n’avait pas désertée Westeros.
Oui mais voilà, dans le système de pensée des showrunners de GOT, les mères au foyer et les sportifs seraient incapables d’être réceptifs à la fantasy, car réputée n’être – comme la SF – qu’un délire de nerds. Dont acte.
Il est plutôt piquant qu’une posture narrative motivée par le mépris, les amalgames et les idées reçues se soit finalement retournée contre ses auteurs. Une forme de justice immanente à défaut de magie.
Il est évident que le rôle bricolé de Cersei n’est là que pour indiquer aux spectateurs qu’elle n’a jamais été la vraie "Mad Queen", ce titre infamant revenant "depuis toujours" à Daenerys. Un choix qui ne rend pourtant service à aucun des deux personnages. La mort de Cersei en particulier est proprement pathétique ! Comment concilier cela avec cette femme prête à empoisonner son propre fils parce que l’ennemi est à la porte ?!
L’intention est évidemment de créer (bien artificiellement) de l’empathie pour Cersei lors de ses ultimes instants et de condamner un peu plus Daenerys… Malheureusement, elle apparaît surtout comme une irresponsable et une inconséquente, qui pleurniche et s’effondre parce qu’elle a joué avec le feu et réveillé le dragon...
Le cycle de romans de G.R.R. Martin et (dans une moindre mesure) les sept premières saisons de leur adaptation télévisuelle composaient un chant politique, avec une morale pas si négative… à condition de faire l’effort de la rechercher dans l’extrême complexité des personnages et de leurs actions.
À l’inverse, la saison 8 (dé)compose un chant impolitique, totalement amoral, et porté par des "personnages potemkine".
Un chant de conjonctures et de mystères abandonnés
La seule chose qui donnerait un minimum de sens et de logique au twist sur l’identité du nouveau roi, ce serait de faire de Bran le bad guy de l’histoire. Il y a d’ailleurs de nombreux indices dans les romans qui pointent vers le fait que le Three Eyed Crow (Raven dans la série) n’est pas une force entièrement positive. Il manipule clairement Bran (il a effacé les souvenirs de Jaime qui le pousse du haut de la Tour). Les visions qu’il envoie à Bran sont bien plus dérangeantes/malsaines. Il est fortement sous-entendu qu’il a croisé le chemin d’Euron, qu’il est responsable de la folie de ce dernier et de ses désirs d’Apocalypse Lovecraftienne. De plus, Melissandre à une vision indiquant qu’il pourrait être un agent du Great Other, voire le Great Other lui-même.
Que dans les romans, il soit la vraie menace et qu’il joue un rôle central dans la chute de Daenerys en manipulant tout le monde (le Tyrion des bouquins est justement une cible parfaite au vu de sa haine dévorante envers Westeros). Ce serait terrible et foutrement tragique, mais au moins ça ferait sens.
Il y a quelque chose de fascinant à imaginer Westeros devenir une sorte de cauchemar orwellien, avec un roi omniscient qui prive son peuple de toute forme de libre arbitre. Un roi capable de déjouer le moindre complot avant même qu’ils ne prennent forme, capable de punir les criminels avant même qu’ils aient commis leurs crimes…. Un "Big Brother" médiéval et surnaturel.
Dans la série on en est réduit à des conjonctures frustrantes.
Est-ce que le Night King était véritablement le big bad ? Son but n’était-il pas finalement de détruire le 3YR en raison de la menace qu’il représente ? Était-ce là le sens des "messages" qu’il a laissés tout au long de la série ? Une tentative de communiquer ? Peut-être, peut-être pas, on n’en sait rien, parce que D&D ont décidés de ne répondre à aucun mystère, en réalité de ne même pas se poser de question.
La voix qu’a entendue Varys dans les flammes au moment de sa castration ?
Pas de réponse ! Sans doute parce que lié au complot Blackfire qui fut évincé du show.
Absolument tout ce qui touche aux WW ?
Pas de réponse !
Les multiples prophéties, que ce soit celles adaptées à l’écran ou celles qui sont restées à l’état de littérature ?
Pas de réponse ! Ou alors ça demanderait aux spectateurs pas mal de gymnastique intellectuelle pour inventer leurs propres réponses.
(…)
On voit ici que dans cette dernière saison, le choix fut de ne rien approfondir des mystères laissés en suspens. Bien sûr, on ne demande pas toutes les réponses. Mais ce choix révèle une volonté de tout réduire aux personnages, au détriment de l’univers. Encore une fois, cela sape ses structures internes et donc l’affadit fortement.
Un (triste) chant de conclusion
Cette dernière saison est celle qui devait terminer les voyages, donner un sens à ce qu’ils ont vécu. On pourrait laisser Daenerys et finir sur le cas Jaime, mais là ce n’est même plus tirer sur l’ambulance, c’est l’exposer à grands coups de bazooka ! Visiblement pour D&D, la rédemption de Jaime, c’était de finir là où il a commencé, dans les bras de sa sœur jumelle. Pire, on pisse carrément sur un personnage qui a accepté des décennies de calomnies parce qu’il a voulu protéger les habitants de King’s Landing. Comment on pourrait revoir et prendre au sérieux sa magnifique confession à Brienne dans l’épisode 5 de la saison 3, Kissed By Fire, lorsqu’on doit désormais accepter qu’il n’était pas sincère ?!
Et donc que doit on retirer de son arc ? Que visiblement, selon D&D la rédemption n’est pas possible. Bien sûr, tu peux réaliser une bonne action ici ou là, mais fondamentalement, enfoiré un jour, enfoiré toujours.
Tout aussi problématique comme "message", celui de la femme et des minorités.
L’œuvre de Martin a toujours donnée l’impression de mettre en avant les minorités (sociales, ethniques et sexuelles) et de refuser de les traiter de façon caricaturale.
Bon, ce n’est pas comme si, avant cette huitième saison, GOT n’avait pas eu ses maladresses (on pourrait évoquer Loras/Renly, uniquement - ou presque - traités sous l’angle des "gays de service"…). Mais fondamentalement, la série arrivait à rendre justice aux intentions de Martin.
En saison 8 – que ce soit involontaire ou pas – ce n’est plus du tout le cas ! Ainsi, sur la place de la femme dans une société profondément patriarcale/inégalitaire envers la femme, on nous explique, en gros, que les femmes sont trop émotives et instables pour gouverner (Daenerys et Cersei) ou alors pour accéder au pouvoir elles doivent être des manipulatrices à la moralité douteuse (Sansa). La série va jusqu’à carrément nous montrer que la femme qui a accès à l’équivalent médiéval d’une force de frappe nucléaire va forcément dans un accès de colère/d’émotion appuyer sur le bouton rouge. Tout en insistant que le seul homme à avoir été dans une telle position – Jon, avec Rhaegal – aurait été capable de se contrôler, lui.
On remarquera qu’à la fin de la série, le conseil chargé de gouverner les six royaumes est entièrement composé d’hommes, blancs qui plus est. Alors certes, l’infirmité de Bran ou de Tyrion est censé faire passer la pilule (on imagine). Mais sachant que pour Bran, le personnage apparait sous un jour très négatif/manipulateur, difficile d’y voir quoi que ce soit de positif. Sans oublier Lord "je tue des bébés si le prix me convient" Bronn qui devient l’une des personnes les plus puissantes et influentes du pays à grands coups de menaces d’arbalètes (à gerber).
Quant à la place des minorités ethniques : les Westerosies ne se préoccupent pas une seule seconde du sort des anciens esclaves d’Essos, ne se préoccupent pas du fait que les Dothrakis vont repartir terroriser la grande mer Dothrak. Et d’un point de vue symbolique, l’homme de couleur qu’est Grey-Worm finit la série en tant que criminel de guerre…
On a non seulement tué Daenerys, mais absolument tous les axes de son combat révolutionnaire sont annulés : les puissants continuent de dicter leur destin aux plus faibles, les esclaves vont retrouver leurs chaines, les Dothrakis dont elle avait en partie "pacifié" la culture vont probablement revenir aux bonnes vieilles habitudes de pillages et de viols. Cela pose d’ailleurs la question de la condition qu’elle avait subordonné à l’indépendance des Iles-de-Fer (la fin du pillage et du viol). Sachant que pour une raison ou une autre Yara ne réclame pas l’indépendance, est-ce que les Fer-Nés vont à nouveau piller et violer ? D&D n’y répondent pas ! Se sont-ils seulement posé la question ?
Suggérer en creux un statu quo en guise de conclusion est au mieux une dérobade, au pire un joker.
Faut bien reconnaître que se moquer d’Edmure était tellement plus important et porteur...
George R.R. Martin a affirmé par le passé que Daenerys Targaryen n’était pas folle, que dans son cas "la pièce avait atterrie du bon côté", elle était une "bonne" Targaryen. Au vu du traitement de sa disgrâce par D&D, on est obligé de reconnaître que, soit Martin a menti, soit la fin de la série est une invention de D&D, soit (plus probablement) ils ont tant simplifié l’histoire de Martin que sa signification et sa finalité a été trahi à l’extrême.
On sent bien dans l’écriture du duo une tendance unilatérale à condamner le personnage, à effacer la moindre nuance morale, et à s’assurer que le personnage soit purement et simplement "le grand méchant". Au vu de la réception (pour le moins clivante), on peut dire qu’il s’agit là d’un échec flagrant.
Il est symptomatique que de nombreuses fanfictions aient fait leur apparition depuis la fin de la série où par exemple Dany est ressuscitée et où les Stark sont les véritables méchants de l’histoire. Or de telles interprétations ont été permises par le traitement paroxystiquement insatisfaisant de cette saison 8, alors que cela n’était pas le cas à la fin de la saison précédente.
Plus significatif encore, une pétition aura rapidement vu le jour mettant en avant le fait que, sans les romans, D&D ont été incapables de livrer une conclusion digne de ce nom. Plus d’un million et demi de signatures auront soutenues cette pétition ! Mais si pas mal de médias ont tôt fait d’en parler uniquement pour calomnier les fans (abusivement présentés d’éternels insatisfaits), elle aura surtout été la manifestation d’un profond désarroi. Un désarroi auquel il est aujourd’hui légitime de s’identifier. Et sur lequel cette longue analyse s’est efforcée de mettre des mots.
Qui aurait jamais cru que GOT et son message final soient aussi puants, nihilistes et misanthropes (personne n’est épargné, Dany, Jon, les Lannister, les Stark...) ?
Une telle proposition est-elle vraiment intéressante, enrichissante, nourrissante, structurante pour le spectateur ?
Est-elle gratifiante pour les fans, a fortiori ces innombrables fidèles qui se sont investis, qui ont espéré, qui ont suspendu leur temps télévisuel au rythme des saisons de la série, qui y ont parfois consacré une décennie de leur existence ?
Que reste-t-il désormais de toutes ces attentes, de toutes ces promesses, de toutes ces espérances ?
Un très amère (res)sentiment aux confins de l’abus de confiance, de l’arnaque, du sabotage, de la trahison, et même... du dol.
Thierry Cerdan-Picard, l’auteur de ce bilan critique, tient à y associer Yves Raducka et Nicolas Matou pour leurs précieuses contributions.
SAISON
Episodes : 8.01 + 8.02 + 8.03 + 8.04 + 8.05 + 8.06
Titres : Winterfell + A Knight Of The Seven Kingdoms + The Long Night + The Last Of The Starks + The Bells + The Iron Throne
Dates de première diffusion : du 14/04/2019 au 19/05/2019 (HBO) - du 15/04/2019 au 20/05/2019 (OCS)
Réalisateurs : David Nutter + David Nutter + Miguel Sapochnik + David Nutter + Miguel Sapochnik + David Benioff & D. B. Weiss
Scénaristes : Dave Hill + Bryan Cogman + David Benioff & D. B. Weiss + David Benioff & D. B. Weiss + David Benioff & D. B. Weiss + David Benioff & D. B. Weiss
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