Anatomie d’une Chute : Rencontre avec la réalisatrice Justine Triet

Date : 22 / 08 / 2023 à 09h00
Sources :

Unification


À l’occasion de la sortie du film, Anatomie d’une Chute, Unification a pu rencontrer sa réalisatrice, Justine Triet, lors d’une table ronde en juillet. Elle nous a parlé de son film qui a obtenu la Palme d’Or. L’acteur Milo Machado Graner nous a fait la surprise d’être présent lors de cette rencontre.

L’origine du film

Justine Triet voulait faire un film de procès, mais ne savait pas par quel angle l’aborder. Elle voulait aussi reparler du couple, mais différemment de ses précédents films. Elle a décidé de mettre l’enfant au centre de la machine judiciaire, de le faire assister à tout le procès et d’une certaine manière d’y participer. Elle avait vu beaucoup de films de procès, mais pas sur la relation d’une mère et de son fils. Cet enfant se retrouve dans une situation pas faite pour un enfant et sa vie privée est jetée en pâture. Il doit se débrouiller avec tout ça, tout en étant malvoyant avec toutes ces émotions d’une extrême intensité et d’une extrême violence. Le film travaille sur l’intime, l’intime qui se déverse sur la sphère publique.

La réalisatrice ne voulait pas faire un film de procès classique, mais analyser ce couple et la relation avec l’enfant.

Le travail avec Milo Machado Graner

Pour rechercher l’acteur, il a d’abord été fait un casting de non-voyants pendant quatre mois qui a mené l’équipe dans plusieurs pays européens. Malheureusement, aucun enfant n’a été retenu. Le casting a alors été ouvert aux voyants et ils ont trouvé Milo Machado Graner. Ensuite, Justine et Milo se sont beaucoup vus. Cynthia Arra a beaucoup travaillé avec Milo en amont du tournage. Cynthia est quelqu’un de très proche de Justine. Elle l’aide beaucoup, car la fonction de réalisatrice est très chronophage. Avoir un coach d’acteur pour un film est encore peu répandu en France. Cynthia a encadré Milo sur le jeu en le coachant notamment sur la partie malvoyance. Il y avait une répétition par semaine. Il y a eu tout un travail aussi sur la recherche de l’état de deuil, de comment le trouver, le ressentir. Cynthia a fait beaucoup de recherches, notamment à travers les films de Jacques Doillon et en particulier Ponette. Pour la réalisatrice, les enfants arrivent à projeter. Ils ont tout en eux. Il suffit d’aller le chercher pour le mettre à l’écran. Le jeune acteur a appris le piano pour le rôle, il s’est avéré très doué dans la discipline. Il a donc pu arriver sur le plateau très préparé.

Milo n’a pas compris tous les tenants du film lorsqu’il était en tournage. Il pensait juste qu’il jouait un fils qui doute de sa mère. Il a été très étonné du résultat.

Le chien

Le chien était la mascotte du tournage. Justine Triet n’a jamais filmé autant un animal comme un personnage. Elle l’a filmé à hauteur de chien et pas seulement comme un faire-valoir de l’homme. C’est à la fois le fantôme de Samuel, mais aussi la prolongation de Milo qui est malvoyant. Le chien a certainement été témoin de ce que l’on ne saura jamais. En tant que spectateur, c’est celui qui ne peut pas parler, mais qui a ce regard et qui observe. Le chien est au centre du film. Certaines scènes ont été filmées en utilisant son point de vue.

Pour se dégager des autres films de procès, l’écriture a été particulièrement travaillée pour ne pas tomber dans les scènes habituelles.

En amont du tournage, Milo a travaillé avec le chien et sa dresseuse Laura Martin. Le chien est un véritable acteur, même ses regards sont parlants. Il fait partie d’une petite structure sérieuse avec un rapport beaucoup plus artisanal.

Le langage et la compréhension

Le film tourne autour du langage. Justine a fait un film sur le langage et ses incompréhensions. La langue est le terrain de rencontre des deux personnages du couple, une Allemande et un Français qui se parlent en anglais. Le langage est l’endroit où on essaye de réparer, d’essayer de se comprendre, de trouver un terrain d’entente.

Le film est voulu comme un long questionnaire. Dès la première scène, certains spectateurs sont perdus. Les 2h30 qui suivent vont essayer de faire comprendre qui est ce couple, qui sont les personnes qui composent ce couple. Le tribunal est un endroit où l’on s’approprie les vies, on délire sur les vies quand on n’a pas assez d’éléments. C’est extrêmement violent pour le personnage de Sandra et celui de Milo.

La réalisatrice pense que ce qui est passionnant et terrifiant dans la justice, c’est qu’on pense que c’est un endroit où la vérité va surgir et où en fait, il se juxtapose deux vérités, celle de l’accusé et celle de la défense. Il n’y a pas de vérité, mais des décisions de justice.

Le film se fonde sur du manque. Le couple a une blessure qu’aucun des deux n’a jamais digérée. C’est un film qui a été fait pour que l’on ne sache pas tout.

Sandra Hüller, une actrice hors pair

Sandra Hüller voulait savoir si son personnage était coupable ou innocent. La réalisatrice n’a jamais voulu lui dire. Elle lui a seulement donné l’indication de jouer comme une innocente ce qui a énervé l’actrice. C’était très important que l’actrice ne fasse pas d’effet de style et ne sache pas réellement.

La réalisatrice a vécu sur ce film son meilleur tournage : « Sandra était exceptionnelle. Dès la première prise, elle exprimait les états nécessaires. Toute l’équipe était bouche bée. Milo avait une intelligence et une vivacité incroyable. C’était très agréable de tourner avec lui ce qui n’est pas toujours évident avec les enfants. Il y avait un collectif d’équipe très soudé. »

Avec Sandra, il y avait un mot d’ordre : éviter la performance d’actrice. Elle a une telle maîtrise. Elle a une extrême technique. Elle peut pleurer par exemple sur commande. Elle maîtrise parfaitement ses émotions. Il faut dépasser cela pour pas que cela devienne plus naturel.

Le film ouvre l’idée « peut-on être responsable sans être coupable ». La réalisatrice pense que le film est plus intéressant si le spectateur ne sait pas réellement ce qu’il s’est passé.


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