Les Sorcières d’Akelarre [DVD / Blu-Ray] : La critique
Les sorcières d’Akelarre est un très bon film de genre espagnol qui revient sur la terrible chasse aux sorcières qui s’est déroulée en 1609.
Le scénario du réalisateur Pablo Agüero et de Katell Guillou s’inspire de plusieurs documents qui ont été écrits sur ce tragique fait divers, notamment du livre du juge Pierre de Rosteguy de Lancre revenant sur cette quête de sorcières sur lequel il se base pour conter son histoire.
On découvre ainsi un petit village de pêcheurs dans lequel arrive le juge qui doit déterminer si certaines jeunes filles qui ont été vues en train de danser dans la nature ne sont pas des sorcières. Ces dernières, capturées sans espoir de ne pas passer au bûcher quoi qu’elles disent, décident de le prendre à son propre jeu et de raconter ce qu’il a envie d’entendre.
Il est surprenant de savoir que le réalisateur a mis presque 10 ans pour concrétiser son projet. Les producteurs approchés lui déclarant que le sujet était ancien et n’avait plus aucun intérêt. Néanmoins, la réalité a rattrapé le film et montre que la thématique est au contraire d’une actualité brûlante. Si vous aimez lire je ne saurais trop vous conseiller le remarquable livre de Mona Chollet, Sorcières qui revient sur cette thématique de la sorcière.
Le film de Pablo Agüero est très bien réalisé. Celui-ci s’inspire de sa propre jeunesse dans un bidonville argentin sans électricité pour éclairer quasiment tout son long métrage à la bougie. Associé à la très belle photographie de Javier Aguirre, cela apporte un très grand cachet à ce qui est montré et renforce le pouvoir parfois hypnotique de certaines séquences.
L’œuvre est particulièrement touchante, d’autant que l’on voit vite que les jeunes filles n’ont aucune porte de sortie. Quoi qu’elles disent, elles sont déjà condamnées par avance. De plus, les tortures auxquelles elles sont soumises afin de dire la vérité, bien que le juge considère qu’elles ne fassent que mentir, sont particulièrement horribles.
Le réalisateur a d’ailleurs décidé de les édulcorer, celles décrites dans les textes officiels étant encore plus barbares et affreuses.
À travers ce groupe de femmes soudées, se dessine la manière dont le pouvoir en place, par le biais de la religion, essaye de manipuler son peuple et de l’éviter d’avoir trop de liberté. En effet, dans ces régions où les pêcheurs sont souvent absents, les femmes ont une liberté qu’elles ont peu ailleurs et cela fait encore plus peur au régime en place qui n’aimerait pas que cette partie de la population ait envie de s’imaginer l’égale des hommes.
L’interprétation est formidable. Les jeunes femmes ont vécu plusieurs mois ensemble dans le même appartement afin de mieux se connaître et cela rend parfaitement. Elles étaient non-professionnelles, bien que certaines se soient fait connaître depuis le long métrage.
Amaia Aberasturi crève littéralement l’écran en meneuse voulant protéger ses amies. Alex Brendemühl est formidable en juge troublé par ces jeunes femmes et voulant à tout prix découvrir les secrets du Sabbat.
La musique de Maite Arrotajauregi et d’Aránzazu Calleja est vraiment sympathique. Elle donne une véritable ampleur au drame qui se joue devant les yeux. Et les scènes de danse sont particulièrement impressionnantes. Les beaux décors de Mikel Serrano et les costumes de Nerea Torrijos donnent vraiment l’impression de se plonger en plein cœur de cette époque sombre.
Les sorcières d’Akelarre est un très bon film, singulier et original qui est une magnifique réflexion sur les femmes et le pouvoir qu’elles peuvent avoir sur les hommes. Avec une histoire s’inspirant d’une réalité tragique, une superbe mise en scène, un travail sur la photographie formidable et des jeunes comédiennes particulièrement convaincantes, il ne faut vraiment pas passer à côté de cet étonnant long métrage de genre qui a un cachet tout à fait particulier.
Envoûtant et touchant.
SYNOPSIS
Pays basque, 1609. Six jeunes femmes sont arrêtées et accusées d’avoir participé à une cérémonie diabolique, le Sabbat. Quoi qu’elles disent, quoi qu’elles fassent, elles seront considérées comme des sorcières. Il ne leur reste plus qu’à le devenir…
BONUS
Les bonus sont vraiment excellents et méritent assurément d’être vus.
On y découvre un long entretien du réalisateur Pablo Agüero qui permet de comprendre comment est né le projet, quelles difficultés il a rencontré pour produire le film et pourquoi il a fait les choix singuliers qui le définissent. On découvre vraiment énormément de choses sur l’histoire vraie de ces femmes et sur la manière dont le tournage a eu lieu. Il faut vraiment regarder cet entretien passionnant afin de comprendre ce qui se joue dans l’envers du décor.
La première scène coupée est une ouverture alternative du film. Alors que la seconde revient sur l’arrivée du juge au village de pêcheurs et la manière dont on informe les habitants qu’ils doivent dénoncer toute personne suspectée d’être une sorcière ou de faire un commerce étrange avec le diable.
À la lueur des bougies, est une anecdote particulièrement intéressante sur la manière dont les deux premiers plans du film ont été tournés.
Enfin, le dernier bonus correspond a un film documentaire que le réalisateur Pablo Agüero a tourné, Mère des Dieux.
Le long métrage est absolument passionnant à découvrir. Le réalisateur est allé à la rencontre de plusieurs femmes vivant dans des endroits isolés et s’étant projetées dans la religion. Ces dernières racontent comment elles ont complètement changé de vie et ont trouvé un nouvel équilibre grâce à leurs croyances.
On découvre chacune d’entre elle dans leur environnement et ces dernières expliquent la sagesse qu’elles ont découverte et la force qu’elles tirent de leurs pratiques.
Chaque portrait de femme est très différent, bien que la violence qu’elles ont subie et la paupérisation qui caractérise leur passé soient des points communs.
Le documentaire brosse de magnifiques portraits de femmes résilientes, mais il est aussi le constat d’une société inégalitaire en Argentine dans laquelle des individus survivent parfois avec pratiquement rien.
La très bonne mise en scène leur laisse une belle latitude pour s’exprimer, même dans leurs silences et dans leurs tâches quotidiennes.
Ne passez pas à côté de cette très belle œuvre. C’est tellement rare d’avoir un deuxième film d’une telle qualité dans les bonus qu’il faut remercier l’éditeur Blaq Out pour son remarquable travail.
- Entretien avec le réalisateur Pablo Agüero (27 minutes)
- Scènes coupées (5 minutes)
- À la lueur des bougies (1 minute)
Mère des Dieux, documentaire de Pablo Agüero (1h27)
BANDE ANNONCE
FICHE TECHNIQUE VIDEO
Disponibilité : DVD / Blu-Ray
Date de sortie : 07/12/2021
Audio : Français, Espagnol, Audiodescription
Sous-titres : Français, Sourds et malentendants
Durée du film : 1 h 32
FICHE TECHNIQUE FILM
Réalisateur : Pablo Agüero
Scénariste : Pablo Agüero, Katell Guillou d’après l’œuvre de Pierre de Lancre
Interprètes : Alex Brendemühl, Amaia Aberasturi, Daniel Fanego, Garazi Urkola, Yune Nogueiras, Jone Laspiur, Irati Saez de Urabain, Lorea Ibarra
Photographie : Javier Aguirre
Montage : Teresa Font
Musique : Maite Arrotajauregi, Aránzazu Calleja
Costumes : Nerea Torrijos
Décors : Mikel Serrano
Producteur : Koldo Zuazua, Fred Prémel, Iker Ganuza pour Sorkin Films, Tita Productions, La Fidèle, Kowalski Films, Lamia Producciones, Tita B Productions
Editeur : Blaq Out
LIENS
PORTFOLIO
(c) 2021 - SORGIN FILMS, A.I.E. KOWALSKI FILMS, S.L. LAMIA PRODUCCIONES AUDIOVISUALES, S.L. GARIZA PRODUKZIOAK, S.L. TITA PRODUCTIONS, S.A.R.L. LA FIDELE PRODUCTION, S.A.R.L., TITA B PRODUCTIONS, S.A.R.L. CAMPO CINE, S.R.L. Tous droits réservés.
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