Fils de Garches : La critique

 Durée du film : 1 h 26
 Titre original : Fils de Garches
 Date de sortie : 23/03/2022
 Réalisateur : Remi Gendarme - Cerquetti
 Scénaristes : Remi Gendarme - Cerquetti, Morgane Wszelaki.

Rémi est né atteint d’amyotrophie spinale infantile, une maladie sévère, progressive, pour laquelle il n’existe pas de remède. La colonne vertébrale de Rémi est déformée, ses muscles atrophiés, il ne sera jamais un enfant comme les autres et passera son enfance entre la maison et l’hôpital. Cet hôpital, c’est celui de Garches où une équipe de chirurgiens orthopédiques va faire tout son possible pour qu’il puisse avoir un semblant de vie ’normale’. Entre opérations, moulages et ajustages d’orthèses, l’enfant ne connaît comme norme que celle de justement, ne pas être dans la ’norme’. Il souffre, physiquement, moralement, comme ses autres petits camarades qui font ce pénible chemin en même temps que lui. Près de 30 ans plus tard, Rémi décide de raconter son histoire et celle de ses compagnons de galère.

Pour faire ce documentaire, Rémi a fait installer sur sa chaise roulante une caméra et un moniteur qui lui permettent de filmer les personnes qu’il interviewe, ou d’obtenir un point de vue subjectif lors de ses visites à l’hôpital de Garches. On plonge avec lui dans ses souvenirs, ces bâtiments froids, ces couloirs sombres, cette angoisse de l’enfant qui est confronté à un monde qui n’est pas fait pour lui et qui prétend pourtant l’aider à y trouver sa place.

Rémi a probablement voulu que l’on comprenne sa détresse de petit garçon que la vie maltraite et certains plans sont longs, lancinants, chaotiques, à l’instar de ces moments qu’il passe à l’hôpital pour subir des traitements lourds et douloureux qui ne seront jamais suffisants pour qu’il puisse être considéré autrement que comme un handicapé. Techniquement, le film est carré et la narration est prenante. Rémi ne cherche pas à nous enfoncer dans le pathos, il raconte son histoire et celle de ses amis, c’est tout. Mais il sait laisser l’émotion s’installer, juste ce qu’il faut, quand il faut.

Il a aussi souhaité donner une dimension artistique à son film, mais pas dans le genre ’je réalise mon premier film, alors il faut que je fasse preuve d’originalité !’, ce n’est pas le style du personnage qui fait preuve d’une grande lucidité. Rémi a demandé au musicien David Chiesa d’improviser la musique du film sur sa contrebasse. Un instrument probablement pas pris au hasard : quelle immense colonne vertébrale ! David Chiesa torture sa contrebasse comme Rémi et ses amis ont été torturés toutes ces années et les sons qu’il en sort nous glacent souvent le sang. On imagine alors ces gamins étirés, moulés, opérés, redressés et pourtant toujours coincés dans leur fauteuil roulant. Une image qui restera gravée dans notre esprit grâce à la scène finale, une performance de l’artiste contemporain Kamil Guenatri qui offre son corps déformé et décharné au public qui n’a pas d’autre choix que de réaliser comme la ’normalité’ est douce...

Rémi n’a peut-être pas voulu me triturer le cœur, mais il a quand-même réussi à le faire. Un documentaire dur et touchant à la fois.

« Fils de Garches est l’histoire d’un mauvais souvenir. Des passages réguliers à l’hôpital lorsque j’étais enfant ont marqué ma vie et celle des enfants qui avaient mon handicap. Tordre un petit peu pour essayer de me remettre droit. C’est donc une histoire de mémoire et de corps différents. Les mauvais souvenirs de l’orthopédie, la vraie, la rigoureuse. Ce film est le récit de ces enfants qui sont nés dans les années 80 avec un corps bizarre et des envies... comme celles de tous.
C’est l’histoire de deux voyages. L’un pour rencontrer d’anciens enfants que je n’ai qu’à peine croisés. Le second, c’est une plongée. Retourner dans ce lieu plein de fantômes pour tenter de le décrire, d’y voir un peu clair dans ce que je ne comprenais qu’à peine... »

 Photographie : Emanuel Rojas, Remi Gendarme - Cerquetti
 Montage : Francine Lemaitre
 Musique : David Chiesa
 Producteurs : Marie-Odile Gazin, Julie Nguyen Van Qui, Marilou Gautier, Yann Legay
 Distributeur : The Kingdom

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