Star Trek Discovery : Review 2.11 Perpetual Infinity
Difficile après Red Angel de jauger indépendamment Perpetual Infinity, tant il est la suite logique de l’épisode précédent. Si les évènements et rebondissements dépeints il y a une semaine vous ont plus, il n’y a aucune raison que cet épisode vous déçoive. Pour les autres, c’est une autre affaire, même s’il y a des nuances à apporter.
Sur Maman Burnham, on peut dire que cela reste l’élément le plus soap opéra de l’histoire. C’est d’ailleurs l’épisode où Sonequa Martin-Green bat le record de longévité de sa larme à l’œil. C’est bien simple, Michael reste au bord du nervous-breakdown dans l’intégralité de ses scènes. Et pour une fois à raison, car cela remet en cause sa vie, son histoire, ses certitudes… Et la réaction de sa mère à son égard n’arrange rien. Sonja Sohn qui interprète Gabrielle Burnham y est excellente et reflète bien le trauma de cette femme qui refuse que Michael garde un espoir de pouvoir la récupérer.
C’est aussi l’occasion de réaffirmer le caractère ambivalent de l’ex impératrice terrienne par sa rencontre avec la vraie mère de Michael et par sa lutte contre Leland-Contrôle. On peut penser ce qu’on veut des choix scénaristiques concernant Philippa Georgiou, mais c’est toujours un atout d’avoir un personnage qui n’est ni totalement bon ni totalement mauvais et donc capable du meilleur comme du pire.
Sur la section 31, qui semble en vérité devenir la vraie thématique de cette seconde partie de saison de Discovery, je reste circonspect. Et d’abord sur son avancée technologique qui est, épisode après épisode, la réponse obligatoire pour faire avancer l’intrigue. Un petit transmetteur de la taille d’un bouton et hop, on peut capter pépouze tout ou partie des connaissances de la Sphère.
L’équipage du Discovery n’est pas non plus épargné par ces facilités. Plouf plouf, on trouve en une seconde et trois dixièmes comment séparer Maman Burnham de sa malédiction temporelle et renvoyer, dans un futur lointain, la combinaison et la base de données de la sphère hors de portée de l’I.A. du contrôle. J’ai d’ailleurs failli m’étrangler de rire à la réplique de Spock « J’aime la science ». Les scientifiques apprécieront l’ironie…
Restent pour moi quatre questions ou mystères. Le premier concerne Leland. Je suis sûr que quelqu’un va arriver à me prouver par A+B que c’est normal. Mais comment passe t’on d’un Leland à terre avec l’œil crevé dans l’épisode précèdent à un Leland attaché et à l’œil à peine rougis cette semaine ?
Second mystère : si Maman Burnham n’est pas à l’origine des 7 signaux, qui l’est et comment Spock a-t-il pu savoir ?
Troisième mystère qui est plus une interrogation. Le contrôle a un soi-disant besoin des connaissances de la sphère pour arriver à s’éveiller à la conscience. C’est moi, où le contrôle me semble déjà bien assez éveillé comme ça ?
Quatrième et dernier mystère : le mode opératoire pour prendre possession de Leland. De plus en plus, je trouve que cela a un relent Borg dans la manière de faire, de le contaminer, dans les effets sur sa peau... Est-ce que la production de Discovery cherche à perturber les vieux trekkers que nous pouvons être, et à nous induire en erreur ? Où réellement, il y a-t-il un lien qui sera découvert avec une révélation dont Discovery a le secret ? Si c’est le cas, je pense que cela va encore faire un débat tonitruant !
Globalement, l’épisode de cette semaine m’a semblé plus plaisant que le précédent et certainement parce qu’il laisse les interprètes déployer leurs émotions. Il ne reste que trois épisodes à diffuser, hâte de voir comment toutes ces histoires vont se terminer.
FM
Faisant immédiatement suite à DIS 02x10 The Red Angel, DIS 02x11 Perpetual Infinity appelle naturellement une critique elle aussi contigüe à la précédente.
Interprétée par une actrice chère au cœur de nombreux sériephiles (Sonja Sohn, alias la détective Shakima Greggs dans le chef d’œuvre The Wire), la Dr Gabrielle Burnham sera naturellement au centre de l’épisode qui vient.
Tandis que Michael est inconsciente à l’infirmerie de l’USS Discovery, l’épisode débute par un flash-back relatant le drame de l’attaque de la base Doctari Alpha par les Klingons lorsque la famille Burnham y stationnait, officiellement pour permettre l’enfant prodigue d’assister à l’explosion d’une supernova (GRB déjà signalé), en réalité pour expérimenter la combinaison (ou armure) temporelle (un premier saut expérimental étant prévu pour très bientôt). Mais fort classiquement, la féérie familiale (où Michael révélait déjà un intérêt pour la science) vire au cauchemar, lorsqu’après l’atterrissage d’un menaçant vaisseau klingon, les parents demandent à leur fille de se cacher et de rester muette quoi qu’il leur arrive – père et mère étant prêts à se sacrifier pour leur progéniture.
Cette reconstitution – fidèle ou non – du passé n’est pas en soi de mauvaise facture…
Mais il est tout de même permis de s’étonner que les Klingons n’aient rencontré aucune résistance sur cette base scientifique de l’UFP (aucun service de sécurité alors que des expériences temporelles hautement stratégiques y sont menées sous les auspices de la Section 31...).
Il est en outre curieux que ce flashback de Michael intègre des passages avec la combinaison temporelle, sauf s’il s’agit d’extrapolations rétroactives (suite aux révélations de Leland dans l’épisode précédent), ou encore de souvenirs réels mais occultés.
Le Dr Culber ramène Michael à la réalité pour lui apprendre que – contre tout attente – elle n’avait pas rêvé avant de tomber en pâmoison. L’impensable s’est produit : c’est bien sa mère qui est venu la "ressusciter" dans sa combinaison angélique !
Le médecin s’embarque alors dans une explication particulièrement capillotractée pour tenter d’accréditer son erreur d’analyse (et aussi celle de Tilly) dans l’épisode précédent, à savoir qu’il existerait de fortes similarités d’ADN mitochondrial entre une mère et sa fille, d’où la superposition de "signatures". Sauf que similarité n’implique pas identité, l’ADN mitochondrial étant toujours conduit à muter d’une génération à l’autre. En outre, la signature bioneurale dont DIS 02x10 The Red Angel faisait si grand cas est une information bien distincte de l’ADN (mitochondrial ou non), or il s’avère finalement un indicateur bien moins fiable que de vulgaires empreintes digitales ! Ironiquement, mais probablement involontairement, les showrunners de DIS réussissent à déconstruire et ridiculiser eux-mêmes d’un épisode sur l’autres les arguments scientifiques sur lesquels ils bâtissent leurs intrigues…
Bien qu’elle ne soit pas remise de sa "résurrection", tandis que sa mère est encore endormie sous le champ de confinement, Michael exige de la voir immédiatement. Et forcément, refrain, elle se met à pleurer…
Mary-Sue larmoiera dans presque chaque scène, exactement comme dans l’épisode précédent et dans de nombreux autres avant. Après tout, c’est le Burnham whiny crybaby show.
Le contraste est saisissant lorsqu’on songe par exemple à Jean-Luc Picard... qui versera des larmes seulement à trois reprises sur quinze ans. Et la plupart des héroïnes de TNG, pourtant si féminines, n’en ont jamais versé une seule. Pourtant les événements n’y étaient pas moins dramatiques. Hélas la retenue et la pudeur bermaniennes ne sont plus qu’un lointain souvenir…
Spock se joint au groupe et déclare qu’il trouve sa sœur adoptive fidèle à elle-même (exact).
Par ailleurs, pour avoir examiné l’exosquelette de la combinaison du Red Angel, Stamets y a trouvé pas moins de 841 journaux de missions (que Tilly a téléchargés) !
En attendant que Gabrielle se réveille, Michael va donc pouvoir feuilleter voracement les enregistrements vidéos du long périple solitaire de sa mère...
En parallèle, Leland reprend conscience, mais il se découvre ligoté dans son propre vaisseau, enfermé dans une pièce scellée où nul ne peut l’entendre, totalement à la merci de Contrôle… qui vient le visiter sous forme d’hologrammes personnifiant successivement (à la manière des Prophets de DS9) Burnham, puis Pike, puis Saru, puis Leland lui-même.
Comment a-t-il pu se retrouver là, prisonnier sur le vaisseau dont il est le capitaine, sans que nul subordonné ne s’en rende compte ? Et alors qu’il gisait au sol à la fin de l’épisode précédent, l’œil gauche transpercé (façon Locutus), comment Leland a-t-il été relevé et attaché, l’œil simplement un peu irrité... alors que Contrôle ne dispose encore d’aucune matérialité ? Plus généralement, comment et par qui toutes ces modifications à bord du vaisseau de Leland ont-elles été effectuées (Contrôle ne dispose pourtant pas d’une armée de drones contrairement aux Borgs), qui plus est au nez et à la barbe de l’équipage ? Les synthesizers du 23ème siècle ne peuvent répliquer que des matières simples et des objets non mécanisés...
Étonnamment pour une I.A. dont le seul objectif est d’exterminer tous les êtres vivants et de devenir maître de l’univers (comme c’est original), Contrôle est particulièrement bavard. A-t-il besoin de se justifier… ou cherche-t-il à narguer sa future victime ? Toujours est-il qu’il s’emploie consciencieusement à répondre à toutes les questions de son prisonnier, puis à exposer pédagogiquement ses objectifs sadiques et mégalos…
Certes, Leland tente bien de le décourager (« Combien de temps croyez-vous que ça tiendra ? » (…) « On a identifié le faux amiral Patar ! » (…)). Mais bien entendu, rien n’y fera. Contrôle explique que Patar fut éliminé tant il lui était simple de simuler une Vulcaine (quel cliché). Par la suite, Airiam l’a aidé (la façon exacte demeure ambigüe)…
Contrôle : « Mais la chair, c’est tout de même autre chose, et une nuance humaine continue à m’échapper. Il me faut un corps, un visage pour opérer plus librement. Vous ! »
Leland : « Jamais. Je suis maître de moi-même. »
Contrôle : « Vous êtes un homme qui a démontré par tous ses actes être prêt à considérer diverses vérités à la fois, ça vous permet de faire des choix moralement discutables. Et en évitant la destructrice culpabilité humaine, vous croyez davantage en la fin qu’en les moyens, ce profil me sera utile. »
Leland : « Vous perdrez. »
Contrôle : « Tout lutte est vaine. Vous avez rejoint la Section 31 pour mettre l’univers à genoux, y maintenir l’ordre coûte que coûte. Vous évolution, notre évolution n’est pas une trahison de ce credo, mais son aboutissement même. »
Sans davantage tergiverser, Contrôle inocule des myriades de nanites via plusieurs tubulures qui se plantent dans l’arrière du crâne… tandis que le hurlement de Leland glace le sang.
Générique.
Cette introduction se veut spectaculaire, mais elle réussit à l’être surtout par tout ce qu’elle révèle sur la Section 31 de DIS. Aux antipodes de ces patriotes intègres de DS9 qui étaient prêts à sacrifier dans la douleur et le secret leur idéalisme pour permettre à la Fédération de survivre dans un univers ne partageant pas son utopie, Leland était venu à la Section 31 par soif de pouvoir et par volonté sadique de soumettre l’univers ! C’est d’autant plus édifiant sur l’état de dévoiement de la société discoverienne lorsque l’on sait que ce n’est même pas là l’ambition des agents contemporains de la CIA et du FSB. À la façon d’une péroraison, Contrôle (avec ses visées génocidaires) se définit lui-même comme l’enfant naturel de la Section 31 ! Tout est dit, mais tout est trahi.
Lorsque Control assènera son motto « Struggle is pointless » (en français « Tout lutte est vaine »), cela résonnera tel l’écho d’une autre formule qui teinte à l’oreille des trekkers (« Resistance is futile »). Faut-il n’y voir qu’un clin d’œil pauvre et stérile comme les aime le Star Trek kurtzmanien depuis 2009, ou doit-on en déduire une parenté causale entre Contrôle et les Borgs ? Cette seconde hypothèse serait particulièrement casse-gueule en internaliste, mais surtout décevante narrativement par son caractère outrageusement anthropocentriste. Avec les Borgs du Quadrant Delta, il s’agissait de périls sans rapport avec la Terre et l’humanité, il n’y aurait pas pire gâchis que de les sacrifier sur l’autel du géocentrisme (à la façon du Prometheus de Ridley Scott). Sauf lorsqu’on s’appelle David Mack et que l’on a composé la superbe trilogie Star Trek Destiny, un vrai hit de l’univers étendu... et dont pourrait – à nouveau – s’inspirer Discovery... mais pour accoucher du The Brood de David Cronenberg.
Burnham entame le visionnage des enregistrements de sa mère, récupérés dans sa combinaison. Le premier log reprend (bien commodément) le flashback à l’endroit précis où Michael l’avait interrompu dans le teaser. Juste avant l’assaut des Klingons, la Dr Burnham s’empare de la combinaison temporelle expérimentale, avec l’intention de reculer d’une heure pour empêcher ces événements tragiques de se produire et de s’abattre sur sa famille. Mais rien ne se passe comme prévu. Elle se retrouve finalement dans l’espace… 950 ans dans le futur, à un endroit inconnu de l’univers !
Fin du premier mission log devant une Michael subjuguée...
Aucune explication ne sera fournie dans la suite de l’épisode sur les raisons de cette "dérive" spatio-temporelle (ni sur la façon dont Gabrielle a réussi à trouver refuge sur une planète de classe M). Si ce n’est que Gabrielle cherchera plus volontiers des signifiances mystiques ou cosmogoniques... qu’un défaut technologique de conception (bien curieux pour une scientifique).
En outre, félicitations (cf. DIS 02x10 The Red Angel) à la Section 31 pour avoir conclu que les Klingons avaient détruit la combinaison. Aucune caméra sur Doctari Alpha ? Et puisque les agents Klingons ont été témoins de la disparition de Gabrielle dans sa combinaison temporelle, l’Empire klingon aurait logiquement dû intensifier ses recherches plutôt que de les abandonner...
S’enchaînent alors les mission logs : 009, puis 027, puis 039, puis 042…
Les petits drones volants qui se détachent de la combinaison temporelle ont entre autres la fonction d’enregistreurs vidéo… d’où les angles de vue déportés dans les logs (est-ce un principe qui s’inspire des Kinos de SG Universe ?).
Dans ses premiers voyages temporels, la Dr Burnham tente évidemment de retrouver Mike et Michael, mais en vain car elle ne peut pas rester de façon permanente à une époque… étant donné que "l’ancre" la ramène 950 ans dans le futur, quels que soient le nombre de sauts temporels. Et dans ce 32ème siècle, il n’y a plus aucune vie nulle part selon Gabrielle ! Des détonations d’antimatière au travers de la galaxie indiquent que Contrôle a tout annihilé partout. Y compris Vulcan, Andoria, Tellar Prime, Deneva… et la Terre. La Terre où justement elle aura mis le pied durant l’une des "mission" pour le faire le constat d’un paysage lunaire et stérile !
D’ores et déjà, ces éléments cohérents en apparence… réussissent à "semer le trouble dans la logique".
Tout d’abord, la Dr Burnham prétend ne pouvoir se stabiliser nulle part (un problème sur lequel elle reviendra dans la suite de l’épisode notamment pour faire de Spock son unique vecteur de communication). Et pourtant, elle n’aura aucune difficulté à marcher sur la Terre ravagée du futur...
Ensuite, comment Gabrielle sait-elle d’emblée que Contrôle est responsable de cette extermination d’ampleur galactique ? Le Contrôle du 32ème siècle doit être bien différent de celui du 23ème siècle, et comment a-t-elle fait pour l’observer en action sans être inquiétée ?
Ensuite, comment la Dr Burnham sait-elle qu’il n’y a plus aucune vie nulle part ? À force de se décliner épisode après épisode en micro-univers de poche, DIS semble a perdu de vue le gigantisme d’une galaxie ! Plus d’un siècle après, au début de TNG, Starfleet n’aura exploré que 11% de la Voie Lactée, après plus de trois siècles d’efforts continus et fort de toutes les ressources d’une centaine de mondes. Mais à elle toute seule et avec sa combinaison expérimentale, Gabrielle prétend avoir fait le tour de la Voie Lactée pour délivrer son funeste constat ?! Est-ce une blague destinée à tourner en ridicule 40 ans de Star Trek ?! Et quid des innombrables espèces incomparablement plus avancées (y compris cyber) sur l’échelle de l’évolution, croisées dans TOS et dans les séries ultérieures ? Aucune n’a eu les moyens de tenir tête au Contrôle de la Section 31 ? Vraiment ?
Tout ça est un peu rapide, un peu superficiel, et à dire vrai un peu insultant envers l’existant… quand bien même l’objectif serait de nous vendre un retcon des Borgs ou une hybridation Borg-Terminator…
Le 32ème siècle ravagé où a débarqué la Dr Burnham réussit même à être ultérieur à celui du service spatio-temporel de l’agent Daniels (31ème siècle) d’ENT, mais néanmoins antérieur à Short Treks 01x02 Calypso (en 3257 où par contre toute vie sentient n’a pas disparu de l’univers comme en témoigne le soldat humain Craft). Ce dernier épisode représente-t-il une conclusion paradoxalement "heureuse" pour la série, où l’apocalypse galactique aura été évitée tandis que l’I.A. de l’USS Discovery aurait atteint la sentience par la face sud et non par le face nord de Contrôle ?
Sylvia détecte une instabilité gravimétrique anormale sur le planétoïde Essof IV. Saru y voit alors l’illustration de la troisième loi de Newton (principe d’action-réaction)… Aussitôt, Tilly la ramène à une satisfaction boursouflée d’elle-même en glosant sur ce qu’elle considère être sa seconde loi préférée (alors que c’est un truisme niveau collège). Les vannes de l’incontinence narcissique sont alors ouvertes. Heureusement, ce "moment Tilly" est brutalement interrompu par Saru qui en a visiblement aussi peu à foutre que le spectateur de la première loi préférée de Sylvia !
Il en ressort que la Dr Burnham et sa combinaison sont indéfectiblement reliées à un point dans le futur. Le champ de confinement la retient, mais "l’élastique du temps" tire de plus en plus fort pour la ramener. « Du tir à la corde contre l’univers » dira Pike en blaguant (un peu d’autodérision à la O’Neill, ça aide toujours à faire passer le non-sens)…
Mais l’heure est grave, car l’univers aura gagné dans une ou deux heures…
Culber reçoit alors l’ordre de réveiller dare-dare Gabrielle sous sa bulle…
Leland, désormais contrôlé par Contrôle (lol), annonce à ses deux âmes damnées, Ash Tyler et Mirror-Georgiou, que les paramètres de la mission ont changé, vu que le piège était originellement destiné à Michael (et non à sa mère)… tandis qu’il prétend avoir vu de ses yeux le cadavre de Gabrielle sur Doctari Alpha !
Difficile désormais d’accorder un quelconque crédit aux propos tenus par le faux Leland, même s’il n’est finalement pas impossible qu’il ait bien vu (?) le cadavre du Dr Burnham… de la même façon qu’il a vu (?) la combinaison temporelle détruite par les Klingons. Soit toute l’expertise branquignolesque de la Section 31 by Discovery.
Tandis que Mirror-Georgiou interprète au départ la réaction excessive de son capitaine comme le mécontentement de voir l’amirale Cornwell placer la voyageuse temporelle sous la supervision de l’USS Discovery, Contrôle-Leland développe toute une argumentation tendancieuse dans le but de convaincre ses deux sidekicks de s’emparer pour lui (donc pour Contrôle) des archives de la Sphère. Il déclare ainsi suspecter Gabrielle d’être une clone ou un imposteur au service de l’I.A., en rappelant que le téléchargement des données permettrait à Contrôle s’achever sa pleine conscience et c’est alors ainsi que tout débuterait (ironique lorsqu’on sait qui parle). Anticipant les objections, Control-Leland ajoute qu’il sait que ses deux lieutenants ont un faible pour Michael, mais que son objectif est justement de la protéger elle aussi, tout en se refusant à une perspective subjective étant donné la gravité des enjeux.
Tyler oppose une faible résistance (« J’ai foi en l’équipage du Discovery »), à quoi Contrôle-Leland réplique « La foi n’est pas de la stratégie ».
Quant à Mirror-Georgiou, elle abonde dans le sens de Control-Leland (« Si c’est un cheval de Troie, le Discovery ne sera pas à même de se défendre. »)
Et pourtant, une analyse attentive montre que nul n’aurait dû adhérer à une stratégie aussi incohérente et suspecte. Car il n’est pas consistant de soupçonner de complicité avec Contrôle celle qui n’a été capturée que par l’improbable convergence de deux accidents (suite à une erreur d’ordre biologique mais aussi suite à une erreur de logique temporelle), et qui n’a désormais de cesse d’être simplement relâchée pour repartir (donc sans vouloir ni pouvoir s’emparer des données de la Sphère). Incroyable que nul ne soit sensible à ces biais cognitifs doublés de fautes professionnelles même à l’aune de la Section 31.
En sus, vu le degré de compromission et d’interpénétration de la Section 31 par Contrôle (risque notamment de backdoors), un vaisseau de la Section 31 est bien le dernier à constituer un sanctuaire ou une zone de quarantaine fiable pour des données aussi convoitées que celles de la Sphère.
Enfin, si disposer d’un exemplaire des archives de la Sphère (sur l’USS Discovery) représente un danger, en disposer de deux double les risques de les voir tomber entre les mains de Contrôle. Or l’opération de captation des données (dont Contrôle-Leland charge d’abord Tyler puis Mirror-Georgiou) tient probablement davantage de la copie que du déplacement (car l’USS Discovery risquerait bien davantage de détecter le second cas du fait de la perte de données corollaires). Invalidant donc de facto tout cette démarche, du moins sur une base prophylactique ou sécuritaire…
Certes, Mirror-Georgiou s’étonne de trouver en Leland un niveau de "détermination" inhabituel. Première ombre de suspicion de sa part, malgré tout bien trop embryonnaire pour déboucher sur quoi que soit de concret. On se serait attendu à davantage d’instinct et de paranoïa venant de l’ex-impératrice Terran...
Burnham continue de visionner les journaux de bord de sa mère sur l’écran holographique translucide de ses quartiers. Et là, Gabrielle révèle que, quels que soient le lieu et l’époque où elle se projette, la combinaison la ramène sans cesse au 32ème siècle à 50 000 AL… où elle a établi sa home base. En l’absence de technologie préexistante à cet endroit, Contrôle n’est pas supposé pourvoir la trouver. Ce qui implique donc que le Contrôle du futur indexe ses attaques sur le degré technologique, en somme comme les Borgs.
Gabrielle rend justice à ce que déclarait Einstein : « le temps dépend de l’observateur et de l’action ». Sauf qu’elle ne fait pas ici référence à la relativité restreinte, mais simplement à la subjectivité de perception (une belle illustration du degré d’incompréhension de DIS envers des sciences réduites à des habits de ville).
La Dr Burnham révèle alors avoir conduit des humains depuis la Terre vers "sa" planète – qu’ils appellent Terralysium (surprise cf. DIS 02x02 New Eden et où ils prospèrent – uniquement pour prouver la fluidité du temps, c’est-à-dire que le futur et le passé pouvaient être modifiés. Pour sa petite expérience temporelle, espérons toutefois que la Dr Burnham n’ait pas pratiqué une abduction sauvage en déracinant des humains qui auraient pu survivre sur Terre (et croiser par ex. Zefram Cochrane), mais qu’elle ait sauvé et exilé sur Terralysium des humains qui auraient sinon trépassé durant la WW3.
À ce stade de sa chronologie personnelle, Gabrielle espérait encore pouvoir retrouver sa fille…
In media res, l’épisode passe directement au mission log 799 (est-ce à dire que Burnham a tout écouté en moins de deux heures, ce qui serait peu crédible ?) : « Quoi que je fasse, Contrôle arrive toujours à capter les données de la Sphère. J’ai même essayé de la détruire, mais impossible. J’ai appris à ma fille de ne jamais désespérer, mais si je n’arrive pas à changer cette seule chose… Tout ce à quoi je peux penser maintenant, c’est rompre le lien gravitationnel pour que cette sphère croise le Discovery. En espérant que ce dernier réussisse à protéger les données. »
« Tu nous as envoyé les données, c’est à cause de toi » soliloque Michael.
Pas la peine de chercher à comprendre cette "rupture de lien gravitationnel" ayant fait se rencontrer la Sphère et l’USS Discovery…
Comment ces altérations en chaîne n’affectent-elles jamais la causalité du voyage initial de Gabriel dans le futur ? L’effet papillon est totalement ignoré, tout comme le cumul quantique. Cette légèreté de traitement fait mal au regard de la cohérence temporelle atteinte non seulement par le Star Trek bermanien, mais aussi par des œuvres passées comme e.g. The Outer Limits 02x01 A Stitch In Time ou contemporaines tels Travelers et 12 Monkeys.
De surcroît, voyage dans le temps n’implique pas voyage spatial instantané dans tout l’univers. Mais visiblement, la combinaison du Red Angel développée par la Section 31 vingt ans avant DIS offrait la même puissance de saut instantané n’importe où dans l’espace que le spore drive ! Et après, certains s’obstinent à clamer que DIS prend place dans la même timeline et dans le même univers que TOS-TNG-DS9-VOY…
Spock rend visite à Michael dans ses quartiers, présumant que les rapports de mission furent probablement aussi instructifs que difficile à "encaisser".
La Dr Culber a réussi à accélérer la reprise de conscience du Dr Burnham.
Sur la passerelle de l’USS Discovery où Burnham et Spock débarquent en force, Culber annonce que les niveaux de tachyons sont devenus normaux, mais que Gabrielle demande à rencontrer le capitaine et seulement lui. Ce qui provoque évidemment une Interminable polémique avec Michael, qui emploiera tout l’éventail tactique possible (de la rationalité à l’émotion, en passant par la supplication et le chantage) pour être autorisée à accompagner Pike et revoir sa très chère mère n°1 (dont elle ignorait pourtant la très improbable survie quelques heures avant). Toutes les lamentables démonstrations d’affect et d’égo y passeront (« mais c’est ma mère »), elle parlementera avec Culber (le messager), avec Pike (l’invité), et avec Spock (le confident). Tantôt Mary-Sue fera la moue, tantôt elle prétendra que ce n’est pas un caprice (car elle ne serait pas puérile assure-t-elle, c’est juste parce qu’elle "connaît sa maman mieux que tout le monde"). Elle suppliera, au moyen d’un tendre "please" avec tant de larmes aux yeux qu’on s’y noierait. Finalement, elle ira bouder dans ses quartiers…
Culber – pensant probablement à son propre cas – tentera de rationaliser un peu les choses en soumettant à Michael l’éventualité que sa mère ait peut-être changé… depuis 20 ans (voire davantage en temps subjectif pour elle). Ben tiens, on le serait à moins : après avoir expérimenté un truc inédit dans l’Histoire de l’humanité, et avec toutes les épreuves endurées ensuite (dans la solitude, confrontée à un futur de cauchemar, et face aux tourbillons temporels impliquant de connaître le "destin" de ceux qui vous sont chers et possiblement à jamais perdus…).
Mais en fin de compte, c’est la première fois que Pike (et même d’ailleurs quiconque dans Starfleet) réussira à se faire obéir de Michael. Le capitaine restera infléchissable jusqu’au bout, avec pour objectif de gagner la confiance de la Dr Burnham.
Malgré tout, Mary-Sue suivra par procuration la rencontre en vidéo depuis ses quartiers – DIS cultivant un esprit télé-réalité, chaque mission au sol étant télédiffusée à bord du vaisseau…
Le temps est compté. Le champ de confinement réclame de plus en plus d’énergie et lorsque les réserves seront à sec, il cèdera tandis que Gabrielle sera ramenée brutalement au 32ème siècle.
Téléporté au sol sur Essof IV, Pike ne peut franchir le mini-dôme énergétique, mais il est libre de s’approcher et de s’entretenir avec la Dr Burnham. Dès son apparition, Gabrielle lui montre ostensiblement qu’elle sait absolument tout de lui : capitaine temporaire de l’USS Discovery, mais appelé à retrouver bientôt le commandement de son vaisseau USS Enterprise (effectivement, c’est confirmé par les annonces de Kurtzman). Elle ajoute alors : « mieux vaut ne pas trop en dire sur votre futur, car vous ne l’aimerez pas ». Soit une nouvelle allusion au destin handicapé de Pike dans TOS (la seconde saison de DIS en est truffée)… même s’il y a de quoi s’interroger sur la compatibilité entre TOS 01x15+01x16 The Menagerie et l’inéluctable fin de la vie dans la galaxie selon DIS 01x15+01x16 The Menagerie.
Michael suit cette rencontre au sommet en direct live depuis ses quartiers sur l’USS Discovery.
Gabrielle : « Parlons du fait que je suis venu sauver ma fille, et vous m’avez dupée. »
Pike : « Michael a risqué sa vie pour vous faire venir ici. Nous comprenons la menace sur toute vie sentiente. »
Gabrielle : « Vous ne comprenez rien. Tant qu’il est possible que Control ait accès aux données de la Sphère, tout mourra, toujours. J’ai mis la Sphère sur votre chemin pour que vous protégiez les données, mais même cela a échoué. Vous devez me laisser continuer. »
Pike : « On veut vous aider. Que signifient les signaux ? »
Gabrielle (nerveusement) : « Je ne sais rien à propos des signaux. »
Pike : « Dans le ciel, sept signaux sont apparus en même temps dans toute la galaxie… »
Gabrielle (violemment) : « J’ai dit que je ne sais rien à propos d’eux. »
Gabrielle : « Vous voulez aider : effacez les archives de la Sphère. Sans ces données, l’I.A. ne peut évoluer. »
Pike : « Nous protégeons ces archives. »
Gabrielle : « Vous ne comprenez pas ? Le temps est une entité vivante, doté d’une gravité, d’une volonté, il rapproche les archives de l’I.A., je l’ai vu de mes yeux. »
Pike : « Et vous pensez qu’effacer l’archive empêchera l’évolution de l’I.A. ? »
Gabrielle : « Oui, mais si vous ratez ça, je n’aurai d’autre choix que d’essayer encore et encore. Vous devez me relâcher. »
Pike : « Je ne peux faire ça, désolé Docteure. »
Gabrielle : « Vous être un spectre pour moi, capitaine Pike. Parmi des centaines de trillions d’autres dans cette galaxie-cimetière. Alors… Tant que vous n’accepterez pas de faire ce que je vous dis exactement de la façon dont je vous le dis, nous n’avons plus rien à nous dire. »
L’empressement de Gabrielle à nier d’emblée toute connaissance de (et sur) ces signaux red bursts est suspecte, elle aurait au moins dû passer par un étonnement (si Pike venait de lui apprendre), ou par une convergence interrogative (si elle fut au courant sans en connaître la cause). Mais elle aura surtout été pressée de couper court à tout échange sur ce sujet, comme si elle avait quelque chose à cacher, voire une certaine mauvaise foi en la matière.
Plus généralement, la Dr Burnham témoigne d’emblée d’une arrogance caractérisée, par sa prétention à tout connaître sur les destins de tout le monde à la façon d’une divinité, à être la démiurge des timelines, l’ultime espoir de l’univers. Et pourtant, ironiquement, elle s’est fait capturer par des hommes du passé… qui ne connaissaient quasiment rien à la mécanique temporelle…
Dès lors, il est peu crédible que Gabrielle n’ait pas eu connaissance de ces sept signaux intergalactiques, ne fut-ce que par les effets produits sur Starfleet, sur la mission de recherche qui a justement permis à l’USS Discovery de se rendre à Terralysium (inaccessible sans spore drive) et sauver la planète d’une destruction, puis de rencontrer la Sphere.
Maintenant, dans le cas improbable où la Dr Burnham ne saurait rien et n’y serait pour rien, faut-il interpréter les red bursts comme de super-Red Angels, l’expression de quelque divinité réelle derrière la fausse divinité désormais démystifiée par la série ?
Le plus dérangeant peut-être est la façon dont Gabrielle prête une intelligence, une volonté, une intention, une vie au Temps lui-même, telle une personnification déiste ou païenne. Des lois physiques, des systèmes complexes aux principes actifs encore indéterminés (tels les supervolcans ou les réseaux) peuvent incidemment émuler l’imprévisibilité des formes de vie. Mais de là à y voir vraiment une forme de vie qui, par l’omnipotence de sa nature, s’apparenterait à une divinité… c’est un pas qu’il est épistémologiquement bien aventureux de franchir en SF. Alex Kurtzman recycle ici un early draft (abandonné) pour le reboot Star Trek 2009, où le temps (altéré par Nero et Spock) aurait dévoilé une conscience ou sensience jusqu’à devenir un épigone de la Force de Star Wars...
Et quid des nombreux "gardiens du futur" rencontrés au gré des séries Star Trek originelles (Daniels, Braxton, Ducane…) ? Pourquoi ont-ils permis cette extermination galactique qui n’appartenait pourtant pas à la timeline originelle ?
Par ailleurs, prétendre répétitivement que l’accès à la pleine sentience de Contrôle ne dépendrait que de son appropriation des archives de la Sphère, cela contredit largement ce que DIS a montré jusqu’à maintenant. Puisque sans la Sphère, Contrôle n’a cessé de faire le démonstration criminelle à la fois de son autodétermination et de son évolution, notamment en assassinant tout le QG de la Section 31, en fabriquant des pièces à convictions holographiques bidonnées ayant trompé tous les cadors de Starfleet, en développant des nanites capables de s’emparer de corps humains (Leland) à la façon des Borgs, et finalement en trompant et en manipulant comme le feraient des humanoïdes aussi psychologues que sournois. À ce stade, il n’y a guère besoin de Sphère pour que Contrôle soit devenu une entité sentiente et une menace globale majeure façon Skynet.
Du coup, qu’est-ce qui a provoqué en premier lieu le "basculement » de Contrôle ?
La faille temporelle via Airiam ? Mais si c’est une boucle causale (genre Predestination des Spierig Brothers), alors Gabrielle aurait pu intervenir e.g. pour sauver Airiam de l’accident de navette qui a engendré son augmentation cybernétique... et donc sa vulnérabilité à une contamination du futur. Auquel cas, exit la transformation initiale de Contrôle…
Mais si l’évolution préalable de Contrôle est imputable à une causalité endogène, c’est la cause première que la Dr Burnham aurait dû cibler en priorité, et non la cause secondaire (à savoir les archives de la sphère). Mais Gabrielle, pourtant scientifique de son état, et totalisant un nombre impressionnant d’heures de vol et d’incursion temporelles, ne considère à aucun moment la multiplicité des causes, présidant pourtant à tout événement dans un univers réaliste.
De deux (ou trois) choses l’une :
Soit Gabrielle est plongée dans une Guerre temporelle (de type Temporal Cold War dans ENT) contre une I.A. tentant d’assurer sa propre genèse originelle dans le passé (boucle causale façon All You Zombies de Robert A Heinlein) et ayant exterminé toutes les formes de vie les plus avancées de la galaxie (incluant les Borgs du Quadrant Delta et tous les gods-like rencontrés dans TOS), alors dans ce cas, si des Q ou des Daniels ont échoué, il est invraisemblable que la mère de Michael soit encore en mesure d’y faire face avec sa combinaison expérimentale bricolée.
Soit Gabrielle est simplement une voyageuse du temps égarée, et relocalisée dans un "belvédère temporel" qui lui offre une vue d’ensemble sur plus d’un millénaire de causalité non dynamique… et dans ce cas, il est difficilement compréhensible qu’elle ne se soit pas chirurgicalement attaquée à une causalité première (à savoir e.g. empêcher Contrôle d’exister en premier lieu).
Mais si d’aventure le Temps est "Dieu" (!?), et que celui-ci veut vraiment exterminer toute forme de vie, le combat serait aussi inégal que sans objet.
Par ailleurs, il est bien curieux que les altérations temporelles provoquées par la Dr Burnham n’aient jamais affecté les événements initiaux sur Doctari Alpha voire sa propre existence dans le futur…
Il faut ajouter à ce tableau déchiré une obstination à vouloir intervenir seule depuis le futur alors qu’apparemment des centaines de tentatives furent impuissantes à changer l’issue fatale. Désormais, Gabrielle a l’opportunité de pouvoir communiquer directement, constructivement, et se refaire aider. Option qu’elle disqualifie pourtant d’emblée… impatiente qu’elle est de retourner à la solitude de sa mission impossible.
En outre, ce que la Red Angel révèle sur elle-même n’explique non seulement rien (ou presque) de ce qui été préalablement montré dans la série DIS, mais cela induit même des incohérences supplémentaires…
Gabrielle a beau être coincée dans le futur et multiplier les interventions à d’autres époquse, elle est seule, sans renfort ni industrie, et elle ne possède aucune technologie qu’elle ne possédait déjà vingt ans avant, lors de sa fuite temporelle en catastrophe à l’arrivée des Klingons. Sa combinaison ne devrait donc pas disposer d’un "rayon de résurrection" instantané. Pas plus que d’une technologie capable de neutraliser d’un seul coup toutes les ressources énergétiques des Ba’uls sur Kaminar (à supposer qu’elle en soit à l’origine).
Et comment la Dr Burnham en sait-elle autant sur les destins individuels de tout le monde ? Sans infrastructure derrière, avec un contact limité avec chaque époque, et une espérance de vie non extensible à l’infini, cela ne devrait pas être possible…
Néanmoins, ledit caractère "limité" des contacts sera à géométrie variable selon les scènes et les besoins des scénaristes, comme l’épisode le montrera (malgré lui).
À bord de l’USS Discovery, pour Saru, détruire les archives de la sphère reviendrait à brûler la bibliothèque d’Alexandrie ou la Bibliotheca Corviniana. Parallèle pertinent. L’officier kelpien rappelle alors que le savoir est d’une valeur inestimable, et le protéger appartient à la mission première de Starfleet…
Néanmoins, il existe des priorités impérieuses, qui conduiront Pike à se conformer à la demande du Dr Burnham.
En parallèle, Tyler fourbit son outil high tech estampillé Section 31 : il tient en effet dans ses mains, derrière son dos, un minuscule "mouchard", mais capable de drainer à distance et sans fil (ondes EM ? subespace ? quantique ? magie ?) tout le contenu sécurisé et cyclopéen des archives de la Sphère rouge. Le plus invraisemblable est qu’outre d’avoir été témoin de l’incohérence de la stratégie de Contrôle-Leland (cf. plus haut), et en dépit de sa loyauté répétée à Burnham et à l’équipage de l’USS Discovery, Ash s’obstine à vouloir exécuter ce plan… alors que la solution de Gabrielle (que Pike et Michael tentent de mettre en application) est incomparablement plus radicale et moins suspecte, tout en attestant de la fiabilité des motivations du Dr Burnham (si elle était au service de Contrôle, elle ne pourrait exhorter à la destruction des archives).
Et pourtant, au lieu de soutenir le projet d’effacement des archives (qui devrait ipso facto faire disparaître la menace Contrôle selon Gabrielle), Tyler persiste à questionner l’éventuel agenda caché du Dr Burnham ! On est en plein nawak intellectuel : si l’objectif est d’endiguer un péril galactique, cette stratégie est bien plus cohérente et efficiente que de copier les données pour le seul compte de Leland ! D’autant plus qu’une copie n’implique pas forcément la disparition de l’original…
Tyler y perd à ce moment-là toute crédibilité, a fortiori dans une "dialectique Section 31" où la fin est supposée justifier les moyens, tandis que la radicalité d’une méthode devrait crédibiliser les intentions de son auteur.
Sans surprise, l’effacement aurait constitué une résolution trop rapide (c’est encore la première moitié de l’épisode). Il apparaît que les archives bloquent elles-mêmes la procédure de suppression. Héritières de la sentience de la Sphère, les données révèlent elles-mêmes un instinct de survie (tout est décidément vivant comme dans Labyrinth de Jim Henson). Lesdites archives auront créé un pare-feu au moyen d’un xéno-cryptage dérivé d’anciennes base de données linguistiques. Impossible à craquer selon Michael sans disposer des clés linguistiques utilisant la langue d’une civilisation disparue il y a des milliers de siècles.
Pike donnera l’ordre de persévérer... mais ni lui ni un seul équipier de Starfleet n’y verra une situation de first contact, l’émergence d’une nouvelle forme de vie, autorisant peut-être un dialogue constructif voire une coopération trekkienne comme il était d’usage en pareil cas dans TOS ou TNG ! Ne fut-ce que pour donner une chance à l’humanisme...
Et quitte à ce que les objectifs terminaux restent inchangés (au nom de la menace galactique, etc.), la question aurait dû au minimum être soulevée. Sans quoi Discovery ne mérite tout simplement pas de son label Star Trek ! Même à l’acmé de sa plongée cauchemardesque dans le Delphic Expanse durant la saison 3 d’ENT, même en plain désespoir, alors que la Terre était sur les rives de l’anéantissement, avant même la fondation de l’UFP et la promulgation de la Directive première… Jonathan Archer ne renonçait jamais à l’humanisme trekkien (en devenir) !
Mais ce temps que les moins de vingt ans… est désormais bien lointain...
Les dialogues ont beau être nombreux dans DIS, ils passent toujours à côté des questions de fond, éthiques et philosophiques. Si l’UFP discoverienne a engendré Contrôle qui n’a d’autre but que d’anéantir toute forme de vie dans l’univers (pourquoi d’ailleurs ?), un sérieux examen de conscience s’impose... sans quoi la dystopie kurtzmanienne pourrait bien mériter son sort.
Consultation du journal de mission n°271 de Gabrielle par Spock : « Spock me comprend. J’ai sauté dans son enfance pour lui dire que Michael allait mourir dans la forêt. Je n’arrive à communiquer avec personne d’autre. La combinaison de sa logique et de ses émotions humaines donne à Spock une balance psychologique pour comprendre mon existence. Sa dyslexie lui permet de supporter les effets de la dysplasie temporelle. À travers le temps, Spock est peut-être le seul à pouvoir m’aider. »
Michael (qui apparaît soudain derrière) : « L’tak Terai. »
Spock : « J’ai passé toute mon enfance à tenter de masquer mes faiblesses humaines. »
Michael : « Ça n’a jamais été une faiblesse. Ça t’a donné les moyens de traiter les visions du futur. Tu as aidé le Discovery à changer de cap, Et ça m’a rendu ma maman. Ça nous permettra peut-être de sauver le futur. »
Spock : « Je t’ai mal jugé en te croyant incapable de gérer tes propres émotions. »
Michael : « C’était mesquin… »
Spock : « … injuste. Je ne peux qu’imaginer ce que tu ressens pour ta mère. Tu as des questions par-delà le scope de la mission qui méritent des réponses. Allons parler au capitaine ensemble. »
Il suffisait donc d’adresser un beau compliment sur sa double nature (celle qu’il rejettera et contestera dix ans après dans TOS pour que Spock consolide sa réconciliation avec Burnham (déjà actée dans l’épisode précédent), en manifestant cette fois une marque d’estime et de compassion, en allant même jusqu’à lui offrir un mea maxima culpa. C’est tellement… humain voire… commun.
La dyslexie qui permettrait (selon Gabrielle) de mieux saisir le "langage du temps" est un concept particulièrement hasardeux, mais surtout destiné à promouvoir l’unicité élective de Spock, alors qu’il n’est pourtant pas le seul métis Terrien-Vulcain en in-universe. Et Dr Burnham doit-elle vraiment se féliciter de la méthode ? Sa communication avec Spock lui aurait peut-être valu de rester dans sa prison mentale ad vitam sans l’aide illégale des Talosians.
Par ailleurs, dans son journal, Gabrielle confirme bien la nécessité pour elle de trouver des manières de communiquer avec des ressortissants du passé, ce qui invalide son attitude altière envers Pike...
Ses moyens d’actions semblent être limités… ce que pourtant la suite de l’épisode invalidera à demi-mot, ainsi que sa prétention à avoir modifié en profondeur la timeline des centaines de fois. Quand bien même elle ne pourrait communiquer verbalement, elle possède la capacité (et sans vaisseau en plus) de transposter une église entière (avec tous ses occupants) à l’autre bout de la galaxie... mais jamais elle n’a songé à laisser des messages écrits ou informatiques, tout de même plus tangibles et intelligibles que les visions transmises à Spock (et l’ayant alors rendu à moitié cinglé).
De son côté, Contrôle-Leland continue à "psalmodier" auprès de qui veut l’entendre que la Dr Burnham mettra la main sur les données de la sphère dès qu’elle le pourra, prétendant qu’Ash est la seule chose qui sépare la survie de l’anéantissement. Tyler lui oppose un bien timide contre-argument (une tentative d’effacement par l’USS Discovery sans succès car les données se protègent elle-même…). Bien maigre réplique de sa part, alors qu’il avait non seulement de quoi le moucher quant à l’incohérence de sa stratégie, mais mieux le dénoncer préventivement (au regard des enjeux) sachant que la Section 31 est désormais sur la sellette aux yeux de Starfleet. Alors certes, Ash refuse d’obéir à Contrôle-Leland, mais sans lui opposer d’argument rationnel. Son capitaine possédé n’insiste pas, il va même le féliciter, par stratégie, tant il a conscience ne plus avoir les moyens de se faire obéir aveuglément...
Grâce à l’appui de Spock, Pike autorise Burnham à aller parler à sa mère. Michael a envisagé la possibilité que Gabrielle en sache davantage qu’elle ne le comprend (mais pas qu’elle ne le dit selon la VO) sur les signaux, ou alors que son ignorance prouve qu’ils ont été créés par l’I.A. (par exemple pour tromper Starfleet). Spock suggère une troisième possibilité sans préciser laquelle…
Une belle citation intello vient ponctuer la scène, procédé sur lequel Discovery a pour habitude de s’appuyer périodiquement pour masquer son indigence : « Notre temps est disloqué. Ô funeste sort que d’être né pour le redresser. ».
Burnham identifie aussi sec Hamlet, et y voit un bel esprit d’à-propos, scellant la communion d’esprit retrouvée avec son frère. Sauf que Shakespeare n’entendait pas du tout le temps dans la même acception. Les citations de la série, généralement forcées et pompeuses, oscillent quasi-systématiquement entre Lewis Carol et Shakespeare…
Rencontre entre la mère et la fille.
C’est supposé être un moment de grâce sur lequel l’épisode capitalise, mais entre le surjeu habituel de Martin-Green et la froideur de Sonja Sohn, la scène ne touche pas. À la façon d’une intrigue artificielle qui se conclut de façon non moins artificielle. Visiblement Gabrielle refuse de se laisser attendrir par la présence de sa fille, qu’elle avait pourtant tant appelée de ses vœux durant les premières missions, mais contre laquelle elle s’est de toute évidence endurcie avec les voyages temporels successifs.
Michael : « C’est comme un rêve… »
Gabrielle : « As-tu détruit l’archive ? »
Michael : « Pas réussi. Mais on cherche une solution. »
Gabrielle : « Je le savais. C’est pour ça qu’il fallait me laisser repartir. »
Michael : « S’il te plait. Ça fait 20 ans. Parle-moi. Est-ce que papa ? »
Gabrielle : « Stop. Les gens croient que le temps est fragile. Précieux. Beau. Un joli sablier et tout ça. Mais ce n’est pas le cas. Le temps est sauvage, il gagne toujours. Du coup, tout ça, ça n’a aucun sens. »
Michael : « Au contraire, ça compte. Toi, moi, ici, maintenant, ça compte. »
Gabrielle : « Je sais que tu te demandes comment, après toutes ces années, alors que ta mère te manque depuis 20 ans, tu pourrais la laisser repartir à peine retrouvée. Comment ? Aisément. Aucune de nous n’a le choix. Tu veux qu’on en parle convenablement un jour ? Sors-moi d’ici ? Je dois changer le cours du temps. »
Michael : « Tu as tenté de nous retrouver à travers le temps et l’espace. Tu n’as jamais renoncé à nous. Pourquoi le faire aujourd’hui vis-à-vis de moi ? »
Gabrielle : « Les échecs ne t’ont rien appris ? Mon Dieu, ce que tu peux être têtue. »
Michael (qui pleure) : « Je le tiens de toi. C’est pour ça que tu as tenu bon alors que tu te croyais seule dans tout l’univers. Tu allais retrouver ta famille. Moi. Je me tiens devant toi, maintenant. »
Gabrielle : « J’ignore ce que tu te dis à toi-même depuis toutes ces années. Mais j’ai renoncé à toi il y a longtemps. Il le fallait. Je t’ai vu mourir une centaine de fois. Et je te verrai mourir encore cent fois. Telle est ma vie, ma prison. Je ne peux plus espérer désormais. »
Michael : « Je ne te crois pas. »
Gabrielle : « Seule compte "the bigger picture". Rien d’autre. »
Voici à la base un échange plutôt réaliste, par moment inspiré, presque teinté de Bushidō… Du moins s’il s’en était tenu là, car en effet l’intérêt général doit impérativement primer sur les sentiments personnels à l’échelle d’un fléau cosmique. Mais les auteurs de DIS ont pour habitude de couvrir leurs complaisances émotionnelles et soapy par des introductions ou des alibis réalistes destinés à donner le change… afin de mieux en ignorer les implications ensuite.
Marque d’arrogance supplémentaire, Gabrielle Burnham se prend désormais pour une time lord sortie de l’univers de Doctor Who, déclamant son expérience immémoriale multi-temporelle pour avoir vu mourir ses proches des centaines de fois jusqu’à l’endurcissement (ou l’absurde), au point d’en venir à personnifier le temps tel une entité animiste.
On retrouve ici la grandiloquence inconséquente qui avait caractérisé le premier épisode temporel (et aussi l’un des pires) de la série DIS 01x07 Magic to Make the Sanest Man Go Mad, lorsque Mudd lui-même multipliait les boucles temporelles pour infliger à Mirror-Lorca mille morts différentes afin de satisfaire sa soif de vengeance inextinguible.
En toute occasion, la série confère à la démesure la valeur d’une variable d’ajustement.
Accessoirement, Gabrielle emploie l’interjection "Mon Dieu", très contemporaine, mais généralement absente de la société humaine agnostique des séries Star Trek historiques. Un détail certes, mais qui rappelle que DIS ne manque jamais une occasion de convoquer des marqueurs religieux (essentiellement judéo-chrétiens)...
Quarante-trois minutes avant l’effondrement du champ de confinement (selon Stamets), une puissance sans cesse augmentée s’accompagne en retour d’une traction gravitationnelle (sur la Dr Burnham et sa combinaison) elle-même en hausse.
Tyler propose alors de fournir davantage de puissance, mais Stamets invoque Newton (et sa fameuse troisième loi une nouvelle fois) pour arguer de l’action-réaction. Mais non seulement, appliquer la mécanique newtonnienne à un phénomène qui transcende la mécanique relativiste tient du ridicule (comme de prétendre contrôler une fusion nucléaire avec un trébuchet médiéval), mais son propos est en lui-même incohérent, car si la tension de "l’élastique spatio-temporel" est juste une réaction, une puissance réduite baisserait d’autant la tension, ce qui permettrait de faire perdurer la présence de Gabrielle au 23ème siècle.
Spock : « La Dr Burnham ne pense qu’à une chose, détruire la sphère. »
Pike : « On s’y prendrait mal ? »
Spock : « Le philosophe Lao Tseu disait : l’eau est douce et pourtant fend la roche. Une image très juste. Ce qui semble immuable ne l’est pas. La montagne, la sphère, le temps. Dans notre cas, le temps lui-même renferme peut-être la réponse. »
Burnham : « Cessons de combattre temps, mais allons dans son sens. Plutôt que tenter de détruire la Sphère, envoyons la Sphère dans la rivière du temps elle-même. »
Tyler : « Loin dans l’avenir, elle sera inoffensive. »
La sagesse des koans suffit-elle à résoudre des problèmes de causalité cosmique ?
Sans même invoquer la mécanique quantique de Richard Feynman, l’inhérence sophistique de bien des analogies permet de conférer à une explication (et à des dialogues) une illusion de bon sens et d’intelligibilité… mais qui ne peut qu’être invalide (comme le rasoir d’Occam) pour toute science suffisamment élaborée (le voyage temporel aux premières loges). En lieu et place de données scientifiques bien comprises, on se gargarise de poésie passéiste et impropre...
Outre de confondre désormais verbalement la Sphère elle-même et ses archives devenues sentients, la stratégie proposée par Michael est particulièrement inconséquente. Car à défaut de garder la pleine main sur des données si convoitées par Contrôle, on est prêt à les envoyer vers l’inconnu d’un futur dont on ne sait rien, si ce n’est que c’est de là que provient la principale menace. Les héros d’érigent en grands stratèges d’une science dont ils ignorent tout, et finalement pratiquent la politique de l’autruche (« cachez donc loin de moi ces archives dangereuses que je ne saurais voir, et après nous le déluge »).
La vanité des apprentis sorciers de DIS 02x10 The Red Angel se poursuit donc de plus belle ici : après avoir tenté de piéger un visiteur du futur dans le cadre d’un combat en aveugle auquel les héros ne comprenaient rien (opération n’ayant réussi que suite à une grosse erreur d’évaluation de leur part), et tandis que nul ne se remet en question (à aucun moment, aucun personnage ne se dit que la capture de Red Angel n’a finalement été possible que parce que tout leur raisonnement initial était erroné), voilà que les mêmes Pieds Nickelés sont prêts à envoyer le Graal de la singularité I.A. à une époque où seule ladite I.A. est supposée exister. Et s’il est possible de présumer que cet acte modifiera le futur, il est également permis de craindre le pire, au mieux un simple sursis, au pire un acte qui provoquera ce précisément contre quoi les héros prétendent lutter. Les prophéties autoréalisatrices sont le premier corollaire de tout voyage temporel... mais nul au sein de la ligue des héros ne songe même à ce classique de la littérature SF (un métagenre qui existe pourtant explicitement dans le passé terrien de l’univers de DIS).
Stamets : « J’ai collecté les données de la combinaison du Dr Burnham lorsqu’elle est arrivée. La combinaison du Red Angel possède quasiment une capacité de calcul quantique illimitée. Littéralement un stockage infini. »
Pike : « Vous voulez dire qu’on peut y transférer l’archive de la Sphère, l’envoyer plus loin que le point d’ancrage du Dr Burnham, et laisser le trou de vers l’avaler ? »
Stamets : « Perpétuelle infinité. Contrôle n’aura jamais les données pour évoluer. »
Burnham : « Mais ma mère est liée au futur, comme la combinaison. Que lui arrivera-t-il ? »
Stamets : « Pour le détacher de son espace-temps, il faudrait l’énergie d’une supernova. »
Stamets : « Mais nous avons une autre source énorme d’énergie exotique. »
Burnham : « Les particules de la matière noire. »
Stamets : « On pourrait modifier un amplificateur de téléportation avec cette matière noire. »
Spock : « Oui, on franchira le flux temporel, on verrouillera la Dr Burnham, et on la téléporte ici. Une fois pour toutes. »
Spock : « J’aime la science. »
Ce simple échange réussit à concentrer les pires travers techno-nawak de la série Discovery ! Elle réussit même ici à battre ses propres records d’absurdité, pourtant déjà situés à des altitudes stratosphériques, et qui plus est sur la clef résolutive de l’épisode !
Tout d’abord, capacité de calcul n’est pas synonyme de capacité de stockage. Pas même besoin d’être un informaticien pour savoir ça aujourd’hui.
Ensuite, si les technologies de Starfleet (et/ou de la Section 31) antérieures de 20 ans à DIS (2237) étaient capable de développer des capacités de calcul et de stockage infinies, c’est non seulement une offense aux lois naturelles et physiques (aussi surement que de prétendre avoir inventé le mouvement perpétuel), mais dans ce cas pourquoi toutes les technologies employées à l’ère de TNG, TOS, et même dans le reste de DIS ont-elles des dimensions finies ?
En outre, Gabrielle Burnham – qui a pourtant 841 fois plus d’expérience temporelle que les protagonistes de DIS prétend ne pas pouvoir dépasser l’ancrage spatiotemporel de Terralysium 950 ans dans le futur ? Dès lors, au nom de quel principe sorti de nulle part, les héros prétendent-ils soudain pouvoir envoyer la combinaison au-delà de ce point et même dans la "rivière du temps" (ce qui ne veut d’ailleurs rien dire).
Et voilà qu’ils prétendent soudain pouvoir lever la malédiction du "boomerang temporel" au moyen de la puissance énergétique d’une supernova (rien que ça !)… qu’ils s’avèrent finalement posséder bien commodément dans la soute de l’USS Discovery : la radiation de la matière noire, ce qui là encore ne correspond à rien (et s’il s’agit d’une référence maladroite au rayonnement du corps noir, la simple comparaison avec une supernova tient du gag).
Au passage, il est permis de se demander pourquoi le 32ème siècle est considéré comme "le temps du Dr Burnham" et pourquoi cette dernière y est dorénavant ancrée au même titre que sa combinaison, alors qu’elle provient du 23ème siècle, et que seul un accident (ou un hasard) l’en a initialement éloigné. Et pourquoi à l’inverse, la sonde modifiée dans le futur n’at-elle jamais subi d’ancrage ?
Mais sans explication systémique, les héros de la série ont la prétention de réussir une opération intriquée dans un domaine de compétence relevant du Starfleet du 29ème siècle et au-delà (cf. VOY 05x24 Relativity)... alors que pour mémoire, le voyage temporel n’a pas encore été inventé dans DIS, et le suit de la Section 31 se contente d’exploiter un cristal temporel magique de provenance inconnue.
La solution pragmatique, trekkienne, aurait été d’abord de tenter de communiquer et de s’entendre avec la forme de vie nouvelle née des archives de la Sphère. Mais faute d’y parvenir, il aurait fallu avoir le courage de détruire physiquement les unités de stockage de l’USS Discovery, voire assumer de détruire l’USS Discovery lui-même (c’est notamment à cela que servaient les protocoles d’autodestruction dans les séries Star Trek historiques) – la gravité des enjeux et du péril le justifiant pleinement en la circonstance. Mais non, en fin de compte, le savoir (quand bien même vivant) de la Sphère sera sacrifié en offrande à la divinité Temps ! Ce qui revient implicitement à souscrire à la personnification mythologique ou animiste suggérée par Gabrielle, où la Grande horloge cosmique serait une entité qui réclamerait son dû (en l’occurrence la mémoire de la galaxie)... en contrepartie de l’espérance (au demeurant incertaine) que Chronos abandonne ses projets funestes et son emprise mortifère sur toutes les vies sentients de la Voie Lactée.
À l’entente (ou à la lecture) d’un tel script, il est permis de se demander si les scénaristes ne prennent pas les trekkers pour de parfaits imbéciles. Car cela consiste ni plus ni moins à faire reposer la solution sur de la magie et un mysticisme de fantasy, lâchement maquillés d’un technobabble nonsensique et dissimulant mal une inculture scientifique crasse.
Quant aux quelques spectateurs qui oseraient y opposer un WTF (what the fuck ?), il suffira de leur rétorquer un bon TGCM (ta gueule c’est magique !), symbolisé par le "j’aime la science" de Spock... qui relève du plus décomplexé pied de nez ! L’affaire est ainsi pliée.
Contrôle-Leland : « Ils veulent envoyer la combinaison dans le futur sans la Dr Burnham. Nous devons l’empêcher. »
Mirror-Georgiou : « Vous vous sentez menacé par elle »
Contrôle-Leland : « Et pas vous ? Vous vous croyez supérieure car vous transcendez les univers. Cette femme transcende le temps. Elle a vu comment vous viviez et comment vous mourrez. Elle incarne la puissance, comme vous jadis. »
Mirror-Georgiou : « Venez-en au fait. »
Contrôle-Leland : « L’envoi de ces données dans l’avenir, en supposant que personne ne les trouvera, représente un risque inacceptable pour la mission globale. »
Mirror-Georgiou : « Formulation intéressante. »
Contrôle-Leland : « Une mission que vous devriez comprendre dans votre chair. »
Mirror-Georgiou : « Vous voulez qu’elle parte. »
Contrôle-Leland : « Oui, comme vous. Il n’y a rien qu’elle n’ait pas expérimenté. Il n’y a rien qu’elle n’ait pas, y compris la dévotion de Burnham. Elle vous supplantera, commandant, et elle fera dans toute incarnation. »
Mirror-Georgiou : « Et Tyler ? »
Contrôle-Leland : « Il a des limites. Pas vous. »
Et Contrôle-Leland tend alors à Mirror-Georgiou le gadget de transfert (un minuscule galet noir) qu’il avait donné à Tyler précédemment.
Mirror-Georgiou : « Laissez-moi deviner. Si je place cet objet près de la combinaison, on captera les données à l’insu du Discovery. Une fois que le téléchargement sera complet, cet amplificateur s’autodétruira, détruisant la combinaison temporelle et la Dr Burnham. »
Mirror-Georgiou : « Pour une Terranne, vous devriez être capable d’en voir la logique. »
Contrôle-Leland : « Et si elle est bien celle qu’elle prétend être ? »
Mirror-Georgiou : « Vous restez la seconde femme la plus puissante de l’univers. C’est ce que vous voulez être ? »
Contrôle-Leland (après que Mirror-Georgiou a accepté de prendre la gadget) : « Contactez-moi lorsque vous aurez placé l’objet pour qu’on lance le transfert. »
Et voilà avec quelle prestidigitation émotionnelle, on prétend détourner Mirror-Georgiou de l’évidence. Puisque la série a pris le parti depuis plusieurs épisodes de transformer une méga-Hitler galactique en bonne samaritaine, le minimum aurait été que l’épisode s’en tienne à cette logique. Sauf que pour empêcher Mirror-Georgiou de poser (et/ou se poser) les bonnes questions (forte de son immense expérience) au sujet de la stratégie contreproductive de Leland (qui prétend protéger le futur en s’emparant des données de la Sphère avec une obsession désormais plus que suspecte), il détourne son attention en flattant grossièrement sa mégalomanie, quitte à pousser encore plus loin les outrances de la série à propos de la Section 31… qui deviendrait soudain le trône du pouvoir galactique, promettant à celui l’occuperait (Mirror-Georgiou) la possibilité de jouir du même pouvoir que l’impératrice Terran ! C’est à croire que rien ne distinguerait structurellement l’UFP du Terran Empire dans DIS…
Et à cette occasion, le MacGuffin dont disposait déjà Tyler devient – selon les habitudes de DIS depuis le mycelial network – un couteau suisse multi-usages. Outre de capter à distance toutes les données numériques, il fait également office d’explosif et de missile à tête chercheuse capable de frapper à travers un champ de force…
Mais le plus saisissant est le degré de "psychologie" que révèle Contrôle à travers Leland pour réussir cette manipulation, à se demander ce dont il a encore besoin dans les bases de données de la Sphère. Car l’éveil, le point de singularité, il l’a déjà atteint, et même dépassé… Du coup, en quoi les archives de la Sphère feront la différence ? Pour y puiser une façon plus rapide et efficace de "génocider" toute la galaxie ?
La tentative de parallèle entre Mirror-Georgiou (la reine des multivers) et Gabrielle (la reine du temps) est assez piquante… même si cela s’apparente davantage à un Masters Of The Universe ou à un Guardians Of The Galaxy qu’à un Star Trek.
Lorsque Mirror-Georgiou s’approche du Dr Burnham en captivité, elle réussit à désactiver la surveillance audio/vidéo à l’aide d’une commande sur son brassard (à moins qu’il s’agisse d’une autre propriété du gadget multimodal de Contrôle-Leland…) afin d’entamer une conversation privée avec Gabrielle.
Curieusement, les caméras installées sur les murs sont aussi volumineuses qu’aujourd’hui, à croire que pour le coup, DIS aurait négligé sa vocation de démo pour salon et showroom.
Mais bien entendu, alors que l’USS Discovery est en train de transférer les bases de données de la Sphère dans la combinaison, nul ne remarque immédiatement cette perte de feed. Tout comme nul ne remarque que les données de la Sphère, aussitôt reçues, sont copiées ou transférées ailleurs. Et s’il s’agit bien d’un transfert et non d’une copie, l’absence de détection par l’USS Discovery est d’autant plus invraisemblable que l’opération s’accompagne d’un siphonage de la source.
La conversation qui suit est un bras de fer entre égos démesurés, vaguement décliné au féminin, et relativement cliché.
Gabrielle : « Je vous ai vu vous sacrifier pour elle. Mourir à sa place sans la moindre hésitation. Je vous remercie pour ça. »
Mirror-Georgiou : « Vous me confondez avec mon alter ego de l’univers prime, trop émotive. Je suis Terran. Chez nous, pas de sacrifice. »
Gabrielle : « Je sais exactement qui vous êtes, et de quoi vous êtes capable. »
Mirror-Georgiou : « Je ne me sacrifierai pas pour la galaxie. »
Gabrielle : « Vous seriez surprise de ce qu’on fait par amour. »
Mirror-Georgiou : « Merveille technologique. Simple, élégante. Et pourtant, incroyablement puissante. »
Gabrielle : « Il y a un code d’accès génétique. Elle ne marchera pas pour n’importe qui, dans le cas où vous espèreriez faire un tour. »
Mirror-Georgiou : « Je trouve le frisson ailleurs. Mais le voyage temporel doit être un genre d’élixir, enivrant au point de vous faire oublier toutes les affaires domestiques. Même un enfant peut-être. »
Gabrielle : « Votre mère ne vous a pas appris à regarder sans toucher. »
Mirror-Georgiou : « Elle m’a appris bien des choses dans notre univers. Par-dessus tout, à survivre. »
Sur le vaisseau de la Section 31, Contrôle-Leland n’hésite pas à demander à Tyler de surveiller le transfert de données de la Sphère depuis la surface… alors que ce dernier s’était pourtant opposé à ce plan. Et malgré le fait que cette stratégie présente toutes les caractéristiques d’un détournement (et en aucun cas d’une mesure prophylactique), Tyler obtempère dévotement. Alors qu’il aurait été bien placé pour arrêter ce processus, au minimum prévenir l’USS Discovery (visiblement aveugle et satisfait de l’être).
Gabrielle : « Philippa, faites-moi une promesse. Entre mères. »
Mirror-Georgiou : « Je fais rarement des promesses. »
Gabrielle : « C’est pour ça que vous le demande. Vous l’aimez. Promettez-moi que vous prendrez soin d’elle. »
Mirror-Georgiou : « Peut-être trouverez-vous une façon de le faire vous-mêmes. »
Gabrielle : « Pas tant que l’I.A. existe. Je suis un risque inacceptable pour sa mission globale. »
C’est alors que Mirror-Georgiou établi un parallèle (via un aparté mémoriel) avec ce que Contrôle-Leland lui avait dit – mot pour mot – peu avant. Et il a fallu ce rapprochement pour que ça fasse "tilt" dans son esprit. Un soulagement pour le spectateur. Mais arrivant bien tard. Ce n’est jamais crédibilisant pour une série lorsque les spectateurs ont plusieurs trains d’avance sur les personnages…
Il s’agit en outre d’une manipulation, puisque c’est là une nouvelle façon pour les auteurs de donner une fois de plus un rôle hautement salvateur à l’impératrice génocidaire ! Si encore cette dernière, bien que de provenance miroir, avait fait partie des compagnons de Fire Wolf, son évolution dans le Prime Universe aurait fait sens... Mais Mirror-Georgiou incarnait ce qui pouvait exister de pire dans le pire des univers possibles ! Dès lors, les showrunners mesurent-ils seulement l’absurdité de proposition ? Sauf à vouloir créer une société où tout se vaut et où plus rien n’a d’importance...
Finalement, Burnham et Stamets se téléportent. Quelle lenteur de réaction suite à la perte d’image de surveillance ! Le plus étonnant est que nul ne se demande de quelle façon Mirror-Georgiou a désactivé le flux vidéo… Et pendant ce temps-là, le gadget de Contrôle-Leland continue le transfert (ou la copie)…
Gabrielle approuve le plan de télécharger les données de la Sphère dans sa combinaison, elle le trouve même brillant, du moins tant qu’elle s’imagine partir avec pour devenir la gardienne éternelle de ce savoir interdit. Curieux comment chaque partie en présence (Contrôle-Leland, et maintenant Gabrielle) est désireuse de mettre personnellement la main sur les archives de la Sphère…
Toutefois, dès lors que la Dr Burnham apprendra que l’objectif est d’envoyer la combinaison dans le temps, alors elle désapprouvera ce plan au regard des risques d’échec qu’il comporte (même argument officiel que celui de Contrôle-Leland), mais sans pour autant remettre en question le principe même d’envoyer des données visiblement aussi dangereuses dans le futur (à l’échelle de l’évolution et des civilisation de l’univers, le danger par rapport à Contrôle pourrait l’être pour bien d’autres I.A. émergentes…). Encore une fois, la solution crédible aurait été de détruire cette base de données par une voie matérielle à défaut de pouvoir le faire par une voie logicielle.
Mais tandis que l’enjeu est galactique, les seuls arguments que Burnham oppose à sa mère, c’est la méthode Coué d’un « ça ne ratera pas » et le ressort 100% soapy d’un « je ne te perdrai pas une nouvelle fois » !
Édifiant.
Contactant Tyler sur un canal sécurisé, Mirror-Georgiou apprend que 22% des données ont été transférées.
Mirror-Georgiou : « Nous allons vivre la première mise à l’épreuve de notre relation, M. Tyler. Trahissez-moi, et je survivrai le temps de vous traquer et de vous torturer à mort. Compris ? »
Tyler : « J’ai déjà été tué avant, Georgiou. Avec vous, ce serait juste plus long. »
Il était question ici de stratégie (la découverte de la "corruption" de Leland) et de survie (Contrôle menace toutes les vies de la galaxie, y compris Mirror-Georgiou et sa chère Michael). Mais plutôt que de se limiter à échange en bonne intelligence à caractère professionnel ou du moins articulé autour d’intérêts communs, il aura fallu que Mirror-Georgiou enrobe ça d’outrances comminatoires hors sujet, mais où la criminalité des actes fait désormais place à un style verbal pittoresque.
Stamets : « J’ai équipé les amplificateurs de matière noire. On pourra téléporter la Dr Burnham depuis son espace-temps jusqu’au nôtre. Mais nous n’aurons pas assez de puissance que pour un essai. En théorie, ça devrait marcher. »
Michael : « Cela marchera. »
Stamets : « Puis on coupe le champ de confinement et la combinaison emporte les données à jamais. »
Gabrielle : « Le temps joue contre nous, Michael. »
Michael : « Que ça te plaise ou non, maman, je te sauverai. Je vais te sauver de toi-même. »
Un échange qui démontre – à ceux qui en doutaient encore – que les apprentis-sorciers n’ont aucune certitude que leur opération inédite et à haut risque réussira du premier coup, l’assurance apparente de Michael n’étant motivé que par sa volonté égoïste de garder sa maman à ses côtés.
En outre, toute la partie relative à l’envoie des archives de la Sphère dans le futur est en roue libre. Car aucune forme de contrôle n’est exercée sur ce point précis, et pour toute "rivière du temps" et autre "infini perpétuel", l’opération consiste finalement à envoyer le "savoir interdit" 950 ans dans futur sur Terralysium, c’est-à-dire à la portée du Contrôle futur (puisque les épisodes précédents ont bien suggéré qu’une partie de la menace venait du futur et pas seulement du présent).
Mais nul n’objecte, pas même Gabrielle, du moins sur le terrain rationnel et logique, preuve que ni les auteurs ni les personnages ne se sont posés les vraies questions causales et prophylactiques. Le seul terrain que la Dr Burnhamva investir, c’est celui des émotions, quand bien même de façon un peu manipulatoire, pour toucher, circonvenir, et amadouer sa fille… ce qui est particulièrement pauvre et disqualifiant dans le cas de prétendus officiers hautement qualifiés de Starfleet, et d’une Michael prétendument biberonnée de vulcanité.
Donc la série relance la machine à flashback guimauve dont elle est si coutumière (espérant tirer quelques larmes chez le chaland), mais cette fois de la perspective de Gabrielle… alors qu’il s’agit de stock-shots d’épisodes antérieurs (notamment de la première saison de DIS), suggérant une totale identité de perception avec sa fille.
Gabrielle : « Je me rappelle la robe blanche que tu portais à ta remise de diplôme. »
Michael : « Comment peux-tu savoir ? »
Gabrielle (plus ou moins en pleurs) : « Je t’ai regardée. Ta première téléportation à bord du Shenzhou avec Sarek. Quand tu as finalement appris le salut vulcain avec Spock enfant. Quand tu pleurais seule, rejetée par les autres petits Vulcains. J’étais là quand tu as lu Alice au Pays des merveilles à voix haute pour ton 11ème anniversaire comme si tu le lisais à ton père et à moi. Je t’ai entendue, mon bébé. Je t’ai entendue. Et quand cette créature t’a attaquée sur Vulcain, j’étais là. J’ai été là pour tous ces moments et bien d’autres. Te voir m’a donné de la force, de la détermination. Te voir m’a rappelé pourquoi je me battais, et ce que je voulais sauver. Je me bats pour toi, Michael. Pour te retrouver. Mais je ne peux pas revenir à la maison maintenant, ma chérie. Pas encore. Pas tant que cette chose n’a pas disparu à jamais. »
Michael (entre larme et rire, elle reste sans voix) : « Maman… »
Normalement, tout le monde doit pleurer, là, devant une confession si viscérale, devant tant d’émotions vraies.
Pour une voyageuse temporelle qui prétendait ne pouvoir rester dans aucune époque du passé, on pourra dire que Gabrielle aura été omniprésente et omnisciente ! Elle sait tout de tout le monde, mais surtout de chaque instant de la vie de sa fille, jusqu’à s’être glissée dans son intimité tel un ange gardien (stricto sensu) derrière un écran d’invisibilité. À ajouter donc à la panoplie de tous les équipements délirants dont dispose déjà cette super-combinaison/armure pourtant bêta (mais que Tony Stark envierait) : voyage instantané n’importe où dans le temps et dans l’espace, scans complets et millimétrés de la timeline et de l’espace galactique, puissance de calcul illimitée, capacité de stockage infinie, "rayon de résurrection", création d’oxygène à partir du vide, puissance supérieure à celle des vaisseaux de Starfleet, téléportation de bâtiments entiers à des dizaines de milliers d’années-lumière, et désormais cape d’invisibilité ! Manifestement, la mère de Michael ne doit pas son prénom au hasard : elle était semble-t-il prédestinée à devenir le pendant féminin de l’ange ou archange Gabriel (subtil !). Ce qui permet à Discovery de convoquer une nouvelle fois toute la sémiotique religieuse, dans la mesure où cette scène reproduit littéralement les retrouvailles post-mortem telles qu’en rêvent les croyants abrahamiques dans la Vallée de l’ombre de la mort.
Et soudain, euréka, tout devient clair. La fin du monde (galactique), les paradoxes temporels (pour rire), l’ermite surhumaine (de la quatrième dimension), l’Eva-01 (Shogōkiles), les dialectiques de fantasy, les (petites) idées de SF... tout ça n’avait en fait qu’un seul but : la relation melliflue entre manman et fifille.
Ce n’est que maintenant que Mirror-Georgiou désactive le mouchard que lui a confié Contrôle-Leland, pour interrompre le téléversement. On se demande bien ce qu’elle faisait durant la scène précédente (bah ! elle devait pleurer aussi).
Dès lors, Mirror-Georgiou donne l’ordre à Tyler de découvrir ce que cache le faux Leland.
Ça n’aura pas été long : sans rien dissimuler de sa métamorphose désormais, avec des yeux aussi noirs que sous l’effet de l’huile de la même couleur dans The X Files, des nanites débordant de son visage telle une créature cybernétique, Contrôle-Leland se laisse passivement contempler par Tyler lorsque celui-ci pénètre dans la section du vaisseau où le drame s’était produit à la fin de l’épisode précédent…
S’ensuit la traditionnel baston « good versus evil », mais le Klingon modifié par L’Rell n’est pas de taille à lutter contre l’humain cyber-modifié par Contrôle. Et après que ce second a transpercé le premier au moyen d’une arme blanche (« Vous ne l’emporterez pas » « Leland avait dit la même chose »), il s’apprête visiblement à "l’assimiler" à son tour. Mais il est interrompu dans son "prosélytisme" par l’avertissement du transfert interrompu (pourquoi l’information fut si longue à arriver ?).
Tandis que Contrôle-Leland se téléporte lui-même au sol (pour relancer le transfert de données interrompu), un Tyler agonisant réussira à prévenir in extremis la passerelle de l’USS Discovery, visiblement autant à l’ouest que le personnel du vaisseau de la Section 31 (seuls les VIP tiennent un rôle actif, les autres font partie du mobilier).
Au sol, autour du champ de la cloche énergétique entourant le Red Angel, la scène suivante, émaillée de cris et de hurlements, se passe de tout dialogue… et même de commentaire. Ce n’est pas plus pauvre que les scènes verbeuses, mais c’est plus franc.
Contrôle-Leland "nanitisé", c’est désormais le T-800 modèle 101 voire le T-1000 de la saga Terminator : il démolit tout, il est plus fort que tout le monde, il est invulnérable aux projectiles et même au phaser (se reconstituant aussi sec). Dans cette scène de free fight dont la fonction essentielle est de valoriser l’héroïsme (et les performances à la Bruce Lee de Michelle Yeoh), les incohérences s’enchaînent comme des (petits) pains.
Contrôle-Leland réussit à pénétrer le champ de confinement à l’aide d’un puissant rayon rouge... pour transperce l’armure du Red Angel. Même si l’objectif était peut-être de détuire le cristal temporel, n’est-ce pas une action contradictoire avec la volonté suprême de récupérer les données de la Sphère ?
Un phaseur en mode maximal est un désintégrateur. Des nanites et une grande capacité de régénération ne permettent pas d’y survivre, sauf à disposer de boucliers individuels (comme les Borgs), ce qui n’est visiblement pas le cas du Leland augmenté. Mais qu’importe, le matériau dont est désormais constitué l’as de la Section 31 résiste à la désintégration.
Seule Mirror-Georgiou révèle la capacité physique de faire face à la machine infernale qu’est devenu le faux Leland. Elle subit une série d’assauts violents, mais demeure invulnérable et combattive jusqu’au bout… Est-elle composée du même matériau que Leland 2.0 ?
Durant ce cyber-pancrace télédiffusée sur l’USS Discovery, nul ne fait rien. Ni Pike ni le vaisseau de Section 31 n’envoient un détachement au sol pour tenter de contenir l’enragé. Ils profitent probablement tous du spectacle pop-corn. Et pendant ce temps-là, le téléversement continue. Spock l’a pourtant bien repéré (sur le tard), y compris son avancement, i.e. 37%, puis 45% en accélération… Mais impossible de l’arrêter. Nul ne songe alors à téléporter le micro-relai dans l’espace, à éloigner le vaisseau, à prendre des mesures proactives ? Que nenni !
De même, à aucun moment, ni Pike ni le personnel du vaisseau de la Section 31 ne pense à sortir Leland et son marionnettiste Contrôle de l’équation. Celui-ci aurait pu être par exemple téléporté à l’autre bout du planétoïde (histoire de maintenir le corps de Leland en vie), ou encore dans l’espace, voire en dispersion (à supposer que la récupération/guérison du vrai Leland soit désormais une cause perdue ou que les enjeux justifieraient cette mesure radicale…).
Pire, les téléporteurs sont bien évoqués par le personnel de la passerelle, mais rejetés au motif que la Dr Burnham se retrouverait seule… face à Contrôle-Leland ! Sérieux ? En d’autres termes, on songe aux téléporteurs, oui, mais pas contre celui qui menace l’univers (pourtant téléportable puisque c’est ainsi qu’il est venu) !
Mais à nouveau, comme dans les deux épisodes précédents (avec Airiam, puis avec Spock), lorsque la menace est à son climax, une utilisation efficace et intelligente du téléporteur est zappée par les auteurs et les personnages. Tout comme le téléporteur est incapable de détecter des envahisseurs exogènes (genre des milliards de nanites)... alors qu’il est pourtant supposé décomposer les corps à l’atome près (au-delà même du principe d’indétermination Heisenberg).
C’est par ce type de construction hétérogène, inconséquente, et à géométrie variable que Discovery prodigue ses sensations "fortes", son spectacle, ses larmes, son mélo, et ses twists à répétition.
Contrôle-Leland ayant détruit une partie du système de commande, il n’est plus possible de téléporter Gabrielle hors de son espace-temps. L’unique option est donc de dissiper le champ de confinement. La combinaison est endommagée, le cristal temporel possiblement détruit, et cela ne devrait logiquement plus permettre à Gabrielle de survivre dans l’espace ni de voyager dans le temps, mais qu’importe, puisque les données de la sphère s’y trouvent.
S’ensuivent alors les adieux de Fontainebleau entre la mère et la fille, mouchoirs à la main, mains tendues (sans pouvoir se toucher), grandes déclamations à l’appui : « Je te retrouverai. (…) Je t’aime. »
Pendant que Mirror-Georgiou occupe physiquement Contrôle-Leland, Stamets et Nahn brisent le champ de force au phaser. L’armure du Red Angel (contenant les archives de la Sphère) est la première à être brutalement rapatriée par le "boomerang spatio-temporel" à travers le trou de ver rouge. Suivie de Dr Burnham... qui semble avoir recouvré l’espoir (comment et pourquoi ?) d’utiliser à nouveau sa combinaison et d’entreprendre d’autres voyages temporels.
Puis Michael Burnham ordonne à l’USS Discovery quatre téléportations (elle-même, Stamets, Nhan, Mirror-Georgiou) et la destruction immédiate par torpilles de toute l’installation à la surface d’Essof IV.
La vaste explosion est perceptible depuis l’orbite… mais il s’avère que Leland a lui aussi réussi à se téléporter de son côté sur le vaisseau de la Section 31, avant de prendre la fuite en distorsion non sans avoir masqué sa signature (rendant toute poursuite impossible).
Surprise : une nacelle de sauvetage émet un signal de détresse, Ash Tyler est à bord !
Un peu plus tard, allongée dans ses quartiers et continuant à visionner les journaux de mission de sa mère, Michael reçoit la visite de Spock.
Spock : « Leland a reçu 54 % des données. C’est beaucoup, mais le capitaine a raison. Le combat continue. »
Michael : « Elle a raison. Quel combat, au juste ? Rien ne marche. Sans combinaison, sans cristal, nous serons toujours dépassés. »
Spock : « Sauf son respect, la Dr Burnham a tort. Le présent compte. Le passé n’existe plus. L’avenir n’est pas écrit. Il n’y a que le présent. C’est notre avantage. Nos actes présents, ici et maintenant, peuvent dicter le futur. L’instinct et la logique, réunis. Voilà ce qui aura raison de Contrôle dans ce combat. On y arrivera. Notre prochain choix peut tout changer. »
Spock (devant l’échiquier 3D) : « À toi de jouer, Michael. »
La fin de l’épisode n’est guère plus crédible que ce qui précède :
Derrière leur apparente sagesse, les propos conclusifs de Spock relèvent surtout de la méthode Coué au mépris des implications réelles d’une guerre temporelle… qui ne saurait être allégorisée par un tablier d’échecs… quand bien même tridimensionnel. C’est là une façon manipulatoire pour les showrunners de préparer le terrain à une résolution émanant des seuls héros de série, ce qui n’est guère crédible lorsque des centaines d’altérations de timelines depuis le recul d’un millénaire ont toutes échoué !
Comment Gabrielle prétend-elle pouvoir voyager indemne 950 ans dans le futur et 50 000 années-lumière à travers l’espace sans sa combinaison ?
Et puisque celle-ci est endommagée, le cristal temporel peut-être détruit (?), comment la Dr Burnham (à supposer qu’elle survive) pourrait-elle s’en servir de nouveau alors qu’elle n’est pas équipée dans le futur pour pouvoir la réparer ?
Que reste-t-il du plan originel de Stamets consistant à envoyer l’armure et son contenu téléchargé dans "l’infinité perpétuel" ? Rien en fait, l’épisode ayant progressivement oublié ce ressort… alors que l’épisode lui aura pourtant dédié son titre !
Copier les données de la Sphère n’est pas synonyme de les déplacer, et cela ne résout en rien le blocage de la procédure de suppression logicielle dans les unités de stockage de l’USS Discovery. Si l’I.A. inhérente à cette base de données s’opposait à son effacement, comment ne s’est-elle pas opposée à son déplacement (impliquant informatiquement un effacement aussi) ?
De quelle façon Contrôle-Leland a-t-il réussi à se faire téléporter sur le vaisseau de la Section 31 ? Son personnel continuait-il à lui obéir alors que nul n’ignorait plus qu’il était contrôlé par une I.A. hostile ? Ou bien est-ce Contrôle qui dirige également le vaisseau désormais ?
Comment se fait-il que Pike n’ait pas pris des dispositions pour protéger le vaisseau voisin de l’éventuel retour de son capitaine "infesté" ? Il aurait fallu au minimum en avertir l’équipage, éventuellement l’évacuer, purger les systèmes informatiques, et/ou veiller à ce que ses boucliers restent levés...
De même, pourquoi l’USS Discovery n’a-t-il pas porté secours à Tyler après la transmission de son avertissement vital sur Contrôle-Leland ? Dans l’échange vidéo, Ash était pourtant ouvertement blessé, en train de s’évanouir, potentiellement mourant. Ce n’est visiblement pas Contrôle-Leland qui l’a débarqué, ce qui signifie qu’il a réussi à gagner par ses propres moyens un escape pod. Si cette survie improbable du love interest de Mary-Sue est marquée à la cuisse du soap VIP only, elle révèle par la même occasion le degré d’incurie je-m’en-foutiste du personnel de l’USS Discovery...
Puisque Contrôle-Leland a été téléporté si aisément à la fin, tandis que Pike n’a pas hésité à sacrifier son vieil ami dans l’explosion (pas une seule pensée pour la victime de Contrôle !), pourquoi celui-ci n’a-t-il pas été d’emblée téléporté dans une cellule (ou dans l’espace) par Pike ?
Bah ! Il fallait bien que Star Trek Discontinuity, ce serial encore moins crédible que le Flash Gordon de 1936, puisse se poursuivre encore durant trois épisodes…
Le bilan du précédent épisode s’applique ISO à sa suite immédiate. Le bancal le dispute à l’artificiel ; factuellement rien ne tient la route ; les auteurs se prennent une fois de plus les pieds dans le tapis temporel (ne comprenant presque rien au complexe sujet qu’ils prétendent traiter) ; et la narration pompe toujours paresseusement (et bien maladroitement) sur des têtes de chapitre de l’univers étendu (en particulier les romans de David Mack).
Certains dialogues (notamment avec la Dr Gabriella Burnham) sont en eux-mêmes parfois correctement écrits avec un zest de réalisme… mais pour ne s’avérer hélas que des propulseurs de soap dégueulando et des vecteurs de mélo larmoyants. Car une fois de plus, les arguments SF, la mécanique temporelle, les questionnements existentiels, les actes sacrificiels… sont uniquement des prétextes dédiés aux seuls ressorts familiaux/sentimentaux égocentrés, comme Hollywood en produit à la chaîne. La cohérence en moins.
Seul subsiste l’espoir vague et diffus que la timeline de DIS soit une variable, tandis que le faisceau de multivers engendrés par Gabrielle Burnham formerait une passerelle vers la ligne temporelle d’ENT-TOS-TNG-DS9-VOY.
YR
EPISODE
Episode : 2.11
Titres : Perpetual Infinity
Date de première diffusion : 28/03/2019 (CBS All Access) - 29/03/2019 (Netflix)
Réalisateur : Maja Vrvilo
Scénariste : Alan McElroy & Brandon Schultz
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