Westworld : Review 3.01 Parce Domine

Date : 15 / 03 / 2020 à 13h45
Sources :

Unification


La deuxième saison de Westworld aura sans doute perdu pas mal de monde en cours de route, en mettant en place une narration extrêmement complexe pour exposer des idées, certes brillantes, mais qui auraient pu être amenées de manière beaucoup plus simple. Il est d’ailleurs conseillé, vu le nombre très important de protagonistes et leur évolution très marquée arrivé en fin de saison, de bien se remettre à jour au niveau des enjeux avant d’entamer ce nouvel épisode.

Un épisode qui allait forcément donner le ton de cette nouvelle saison et, peut-être, déjà nous rassurer ou, au contraire, nous laisser sceptique sur différents points. Comme attendu, il est difficile de ne pas voir dans cette introduction une sorte de reboot créatif, comme d’autres séries majeures (impossible de ne pas penser à Lost ou Battlestar Galactica) l’ont déjà fait intelligemment avant elle. Ainsi, même s’il y a bien entendu une véritable continuité thématique, cet entame de saison se déroule principalement en dehors des fameux parcs et introduit de nouveaux personnages, dont Caleb, un ouvrier marqué par un traumatisme. Joué par Aaron Paul, qui bénéficie d’un énorme capital sympathie vis à vis du public, on lui imagine déjà une évolution marquée tout au long de cette saison.

Avec cet épisode, on retrouve aussi la plupart des personnages auxquels on s’est attaché, avec de nouvelles épreuves à surmonter et de nouvelles motivations. On est dans la continuité de ce qui avait été annoncé dans le final de la saison précédente avec pas mal d’interrogations sur l’identité réelle des robots, ce qui complexifie forcément l’analyse qu’on peut avoir sur ce qui se passe.

Visuellement, la série reste toujours aussi chatoyante, avec une mise en scène léchée, des décors grandioses et des effets spéciaux impeccables permettant de nous immerger avec crédibilité dans un monde réel futuriste. On est loin de l’exotisme de ce qui avait été montré dans les deux premières saisons et beaucoup trouveront ce qui est montré un peu trop conforme aux standards déjà vus dans d’autres œuvres de science-fiction. C’est d’ailleurs ce qu’on peut surtout reprocher à ce premier épisode, très efficace, mené tambour battant avec des scènes d’actions palpitantes, mais manquant du supplément d’âme qui ont fait de Westworld une série si unique : ce qu’on gagne ici en accessibilité, on le perd sans aucun doute en terme d’originalité. On se retrouve en effet avec un récit d’espionnage, certes impeccable, mais aux rebondissements et coups de théâtre en rien novateurs.

On retiendra surtout de cet épisode, sa capacité à nous fasciner à travers le féroce instinct de survie des robots, les rendant à bien des égards bien plus humains que nous. Il y a aussi le dénouement lors duquel deux êtres brisés finissent, sans grande surprise, par se retrouver : l’émotion est telle qu’on a sacrément envie de découvrir la suite. Une suite qu’on espère moins conventionnelle et portée par un équilibre narratif délicat permettant de toucher tous les publics. Il n’y a que de cette manière que Westworld continuera à garder son pouvoir de fascination toujours intact. On ne peut que souhaiter bon courage aux scénaristes d’accomplir cet exploit !

AN

La relative discrétion régnant autour du lancement de la troisième saison de Westworld est symptomatique de la disgrâce subie par un show qui n’a pas su capitaliser sur l’immense aura dont il bénéficiait.

Successeur désigné de Game of Thrones, Westworld a perdu sa base " grand public " avec une seconde saison poussant jusqu’au bout les artifices narratifs qui avaient pourtant fait la force, la singularité et la popularité de l’intrigue de la première saison. D’aucuns disaient que les showrunners complexifiaient un brin artificiellement une histoire d’évasion somme toute assez simple à suivre.

En faisant fi de cette complexité d’apparat, force est de constater que la saison précédente – bien que bavard, prétentieuse et un peu froid – menait à son terme, de façon magistrale, la réflexion majeure de la série : l’avènement d’une conscience intelligente et pensante. Pour mener à bien cette réflexion très contemporaine sur l’intelligence artificielle, le couple Lisa Joy et Jonathan Nolan entremêlait le cogito cartésien et l’expérience des sens de Hume avec le nihilisme et la fragilité de la conscience de Nietzsche.

Toutefois, une fois que la réflexion majeure est menée à son terme, que les personnages arrivent d’une certaine façon au bout de leur logique narrative et Westworld mis à terre, et déstructuré, un constat s’imposait : les deux saisons de Westworld se complètent et se suffisent à elle-même.

La grande problématique de cette troisième saison se pose donc : Que reste-t-il d’intéressant à dire, à raconter dans Westworld qui n’a pas déjà été exploré dans les saisons précédentes ? De la réponse donnée par les showrunners au travers des épisodes de cette saison, dépendra l’intérêt véritable de la série.

D’emblée, Westworld évite le syndrome " Red John " du Mentalist puisqu’un fil conducteur suffisamment fort porte encore la série : le soulèvement des machines. Et en s’inscrivant dans l’épopée racontant ce soulèvement, tout porte à croire que la nouvelle saison introduit un nouveau cycle. D’ailleurs, la première heure de la saison porte les marques de profondes ruptures avec les saisons précédentes tant dans la forme que dans le fond.

Dans la forme, Westworld semble a priori se détacher de son style pompeux, très posé et lent pour adopter le dynamisme, le schéma narratif plus classique mais aussi l’esthétique des thrillers d’anticipation comme Minority report ou I Robot. Retrouver un style de narration et une identité plus « mainstream » démontre clairement la volonté des showrunners d’élargir la base de spectateurs.

Quand au fond, le début d’un nouveau cycle vient avec son lot de nouveaux personnages, de nouveaux enjeux et d’un nouveau background. Exit les magnifiques paysages fantasmés de l’ouest américain pour laisser la place à un nouveau terrain de jeu : Les villes humaines futuristes. Westworld est mort, vive Futurworld.

Si la première heure reste laconique sur les nouveaux enjeux, elle lève le voile sur les personnages, dont principalement celui d’Aaron Paul, qui retrouve ici le second rôle majeur de sa carrière après l’inoubliable Jessie Pinkman de Breaking Bad. L’acteur aura fort à faire pour tirer son épingle du jeu face à la présence très charismatique d’acteurs déjà bien implantés dans le show comme Evan Rachel Wood. Il reste à espérer que le personnage d’Aaron Paul puisse bénéficier d’une écriture lui permettant d’apporter la chaleur humaine et l’épaisseur qui avait un brin manqué à certains protagonistes de la saison précédente.

Au sein de ce premier épisode, la rupture est surtout marquée par le renversement du paradigme sur lequel reposait la série. Il n’est plus question d’un monde de robots où s’invitent et se déversent les pires penchants des humains. Désormais, ce sont bel et bien les robots qui s’infiltrent dans le monde futuriste et pacifié des humains pour leur rendre ce qu’ils ont déchainé dans les parcs Westworld.

Pour l’instant, l’intrigue semble prometteuse bien que l’épisode ne livre pas grand-chose des véritables manœuvres et objectifs des principaux protagonistes.

A noter en dernier lieu, que dans Westworld, le doute est permis quant à la réalité qui est donnée à voir comme le rappelle la scène post-générique de l’épisode 10 de la dernière saison.

MR

ÉPISODE

- Episode : 3.01
- Titre : Parce Domine
- Date de première diffusion : 15 mars (HBO) - 16 mars 2020 (OCS)
- Réalisateur : Jonathan Nolan
- Scénariste : Lisa Joy & Jonathan Nolan

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