L’homme de l’année : La critique du tome 1

Date : 07 / 03 / 2013 à 20h05

Par : Christophe Dasse

Sources :

Source : Unification France

L’homme de l’année
1917 – Le Soldat Inconnu

• Éditeur : Édition Delcourt
• Scénario : Fred Duval & Jean-Pierre Pécau
• Dessin & Couleur : Mr Fab
• Sortie le : 16 janvier 2013
• Collection : L’homme de l’année
• Nbre de page : xxx
• Format : xxx
• ISBN : 978-2-7560-2918-4
• Prix : 14 € 95

L’histoire :
Citadelle de Verdun, 10 novembre 1920. Le soldat Auguste Thin fait le tour des huit cercueils. Il tourne une première fois très vite, sans s’arrêter, puis au second tour, brusquement, il dépose son bouquet sur le troisième cercueil de la rangée de gauche. Un murmure s’élève, soulageant les cœurs : « C’est fini, il a choisi. » Le soldat inconnu qui sera inhumé sous l’Arc de Triomphe quelques semaines plus tard est officiellement un corps de militaire français impossible à identifier. Pourtant, sous la pluie parisienne, un officier français se souvient…

Le concept :
L’Histoire les a passés sous silence.
Certains étaient des héros, d’autres des salauds, mais tous ont été au cœur d’événements qui ont marqué notre mémoire collective. Remontez le cours de l’Histoire dans les pas de ces anonymes qui ont incarné leur époque, autant d’Hommes de l’année que vous n’oublierez pas de sitôt !

Décryptage :
L’homme de l’année est une nouvelle série de BD one-shot qui formeront une collection d’ouvrages que Fred Blanchard, le directeur de collection défini comme suit : « À l’image des personnages évoqués dans L’Homme de l’année, vous qui lisez ces lignes avez rendez-vous avec l’Histoire. L’Histoire avec un grand H, vécue par des anonymes. L’Histoire telle que nous aurions pu la vivre, vous et moi. »

Ce premier tome 1917 – Le soldat inconnu nous plonge en plein dans la grande guerre du 20^ème siècle, celle de 1914 à 1918. L’histoire débute en 1920 alors qu’est choisi à Verdun le cercueil de celui qui sera inhumé sous l’Arc de Triomphe, le fameux soldat inconnu, celui qui représentera tous ces soldats tombés, trop nombreux, pour la France et qui seront célébrés tous les ans le 11 novembre. Puis retour en arrière, c’est en Afrique, en Côte d’Ivoire en 1910 que l’on retrouve Boubacar N’dore, notre héros qui traversera toute l’histoire, en pleine période coloniale, qui pour épargner son frère va prendre sa place au sein de l’armée française. On va ainsi suivre le parcours militaire de Bouba dans un premier temps en Afrique avant d’aller combattre en métropole, à grimper les échelons de l’armée africaine.

Mais cela n’empêchera pas d’être traité comme un moins que rien par ses officiers qui n’ont aucune considération pour les gens qui leurs servent de chair à canon. Il va connaître les horreurs de la guerre des tranchés, les mauvaises conditions du front, la boue, la maladie, les privations, les combats sans merci, les châtiments, la boucherie de Verdun. En plus d’être une leçon d’histoire sur les horreurs de la guerre et du colonialisme c’est aussi une leçon de vie. Elle nous plonge dans une belle histoire d’amitié improbable qui va naitre entre l’officier blanc Joseph et Boubacar (qui travaillait jadis pour Joseph dans sa plantation), entre le blanc colonialiste et l’indigène. Mais le récit pointe surtout du doigt le carnage fait dans la population indigène amenée en Europe pour mourir dans la boue des champs de bataille. En plus d’être arrachés contre leur gré de leurs villages, ils vont souffrir du racisme des autres soldats et principalement des officiers.

Il est justement mis en avant le contraste entre les officiers décideurs au chaud qui ne manquent de rien dans leur camp retranché et ceux qu’ils envoient mourir, les soldats en première ligne qui meurent de maladies et du froid avant de mourir sous le feu de l’ennemi.

L’histoire très belle au final, montre les quelques années de vie de Boubacar, éloigné de son pays natal, de sa famille, prisonnier en quelque sorte de l’armée française qu’il est contraint de servir, de suivre et pour qui il doit combattre dans les plus grandes batailles et surtout les plus grandes boucheries qu’ont pu connaître les soldats. Toutes ces aventures sont narrées par les auteurs avec un réalisme incroyable tant au niveau du récit qu’au niveau du dessin qui est aussi d’une précision et d’une qualité étonnantes. A l’instar de cette couverture qui est sublime, les dessins à l’intérieur le sont tout autant, sachant montrer avec autant de talent les horreurs de la guerre et des tranchés, que la splendeur de l’Afrique. Mr Fab s’avère être un dessinateur de très grand talent. Ils nous transportent véritablement dans les tranchées aux côtés de ces soldats qui servent un pays qui n’est pas toujours le leur.

Même si l’histoire a déjà été racontée dans de nombreux films ou de nombreuses bandes dessinées, elle reste ici très originale et plus spécialement dans ces 2 pieds de nez finaux. C’est un concept intéressant de montrer ces anonymes qui font l’Histoire, ceux qui sont auprès de ceux qui resteront dans l’Histoire. Mais l’Histoire est sélective et ne peut se souvenir de tous. Très souvent le destin (aidé parfois) donne un coup de pouce comme le montrent les deux destins qui attendent notre héros mort pour la France. On referme ce tome avec une véritable tendresse pour ces 2 personnages et pour le destin incroyable de Boubacar. Paix à son âme...