Le secret de la chambre noire : La critique

Date : 22 / 02 / 2017 à 07h45

Sources :

Le secret de la chambre noire est un film du grand réalisateur japonais Kiyoshi Kurosawa tourné en France entièrement en français, une première dans la filmographie du cinéaste.

Ce dernier, fasciné par les daguerréotypes qu’il a découverts lors d’une exposition, a eu l’idée de cette histoire mettant en scène un photographe réalisant des photos en utilisant du matériel ancien pour produire des daguerréotypes parfois grandeur nature.

Il a ajouté une fascination extrême du personnage principal pour sa fille qui va être la source du drame de la famille alors qu’un jeune apprenti essaye d’aider cette dernière à s’émanciper.

Le réalisateur centre son histoire sur un lieu quasiment unique, une très grande maison en partie délabrée et isolée dans une banlieue cossue, et sur 6 personnages dont le trio principal compose par le maître, sa fille et son apprenti.

Kurosawa se débarrasse vite des nouvelles technologies comme l’ordinateur, absent de la maison, et le téléphone portable dont le jeune homme ne prend plus la peine de recharger la batterie, pris dans une atmosphère de plus en plus délétère isolant progressivement les trois protagonistes du reste du monde. Ce choix renforce le huis clos que chacun subit et l’impression que les personnages vivent hors du monde.

Les amateurs de Kiyoshi Kurosawa connaissent la fascination qu’exercent les fantômes sur ce dernier. Son film précédent Vers l’autre rive présentait une histoire de revenants s’éloignant des canons classiques du revenant vengeur où maléfique. Avec Le secret de la chambre noire, le réalisateur poursuit dans cette lignée en introduisant la femme du photographe hantant les lieux et chagrinant encore plus un homme désespéré de ne pas avoir pu empêcher la mort tragique de sa bien-aimée.

Kurosawa exerce une magnifique direction d’acteurs. Ces derniers s’insérant parfaitement dans les thématiques récurrentes du réalisateur.

Olivier Gourmet est superbe en homme imposant et obsédé. Il réussit à faire planer une certaine angoisse sur le récit grâce à sa seule présence.

Tahar Rahim fait un très convaincant personnage principal que la caméra suit de bout en bout. Le comédien est aussi à l’aise dans ses répliques qu’au milieu des nombreux silences parsemant sa prestation.

Quant à Constance Rousseau, elle est incroyable en jeune femme tendant d’échapper à son père et de vivre sa propre vie. L’actrice livre une composition d’une grande ambiguïté, forte et poignante, qui restera longtemps dans les mémoires.

La photographie d’Alexis Kavyrchine est impeccable et le travail du son est particulièrement soigné. On retrouve aussi le visuel splendide des œuvres de Kurosawa, tandis que ce dernier fait preuve d’une parfaite maîtrise, ne laissant jamais aucune imperfection dans ses plans et cadrages.

Le secret de la chambre noire est une histoire d’amour tragique et merveilleuse qui envoûte très rapidement et dont la fin somptueuse est d’une immense poésie mélancolique qui va droit au cœur. Kiyoshi Kurosawa laisse aux spectateurs plusieurs interprétations possibles de son dernier long métrage et chacune d’entre elles est solide et intéressante.

Avec une réalisation millimétrée, des acteurs impressionnants, une histoire simple et universelle et une atmosphère inimitable, on ne voit pas le temps passer et les amateurs de ce genre d’œuvre risquent de se faire happer dès les premières secondes d’un film hypnotisant.

Touchant et poignant.

SYNOPSIS

Stéphane, ancien photographe de mode, vit seul avec sa fille qu’il retient auprès de lui dans leur propriété de banlieue. Chaque jour, elle devient son modèle pour de longues séances de pose devant l’objectif, toujours plus éprouvantes. Quand Jean, un nouvel assistant novice, pénètre dans cet univers obscur et dangereux, il réalise peu à peu qu’il va devoir sauver Marie de cette emprise toxique.

BANDE ANNONCE

FICHE TECHNIQUE

Durée du film : 2 h 11
Titre original : Le secret de la chambre noire
Date de sortie : 08/03/2017
Réalisateur : Kiyoshi Kurosawa
Scénariste : Kiyoshi Kurosawa
Interprètes : Tahar Rahim, Constance Rousseau, Olivier Gourmet, Mathieu Amalric, Malik Zidi, Valérie Sibilia
Photographie : Alexis Kavyrchine
Montage : Véronique Lange
Musique : Grégoire Hetzel
Costumes : Elisabeth Mehu
Décors : Pascale Consigny, Sébastien Danos
Producteur : Jérôme Dopffer, Michiko Yoshitake pour FILM-IN-EVOLUTION, Les Productions Balthazar
Distributeur : Version Originale / Condor