Sin City - J’ai tué pour elle : La master class de Frank Miller et Robert Rodriguez

Frank Miller et Robert Rodriguez ont donné une master class à l’issue de l’avant-première de Sin City 2. En voici la retranscription.

25 ans avant la création de Sin City vous faisiez de la bande dessinée mainstream. Puis vous avez fait Daredevil et The Dark Knight Return. Le travail avec les majors, le contrôle des copyrights, quel est votre rapport avec la BD ?

Frank Miller : l’histoire est simple. J’adore les histoires criminelles. J’ai pendant longtemps évité les comics qui parlaient d’histoire d’amour. Dans les années 70 je voulais faire quelque chose de différent. Quelque chose de différent que l’on ne voit pas à Hollywood. Je voulais essayer de mettre aussi des femmes magnifiques dans mes œuvres. En fait j’ai créé Sin City avec à l’esprit le fait que ce serait un comics impossible à adapter au cinéma. J’étais très sérieux avec cette idée-là !
Un jour on m’a proposé de faire de mes livres un film. J’ai été très tenté et heureux, puis j’ai accepté.

Nous avons maintenant de grandes possibilités techniques qui sont utilisées dans les films de super-héros. Cela permet des adaptations de ces derniers sur grand écran. Comment réussir une novélisation à partir d’un film issu d’une bande dessinée ?

Robert Rodriguez : nous avons accès à des effets spéciaux de plus en plus performants. L’histoire a été écrite de façon très imagée avec une vision complète sur l’ensemble du film. Quand j’ai découvert les Sin City, j’ai acheté 3 exemplaires de chaque livre. J’avais besoin d’en faire un film. Quand j’ai eu la possibilité de réaliser Sin City, je voulais faire un film pas seulement avec un aspect visuel qui sorte de l’ordinaire mais aussi avec une véritable histoire.
On a filmé le film principalement sur des écrans verts. Maintenant Sin City le film ressemble vraiment à Sin City l’œuvre et pas simplement à un film classique. C’est beaucoup plus excitant. C’est un cinéma technique.
Adapter un livre en film, c’est un véritable test pour le studio qui le produit et pour le travail à faire dessus. Le travail sur le script est vraiment excitant. Le studio nous laisse libre dans la gestion du film et de la musique, ce que ne font pas forcément les studios hollywoodiens lorsqu’ils adaptent des romans graphiques ou des comics.

Frank Miller : ça a été fantastique d’être le coréalisateur du film.
Je continue de faire de la bande dessinée. Robert Rodriguez est un magicien de la technique. Je peux faire des films, mais je ne travaillerais jamais pour Hollywood. « Qui a besoin d’Hollywood ! »
Je travaille avec Robert Rodriguez pour explorer l’univers de Sin City.

Frank Miller, vous avez réalisé votre film en dehors des grands studios et vous en avez écrit le scénario. Mais à part l’intrigue du début et de la fin du film, le reste est identique à votre roman graphique de 200 pages. La bande dessinée serait-elle à mi-chemin entre le roman et le film ?

Frank Miller : la sculpture, les comic-books, les films sont des choses similaires. Tous ces supports tournent autour de l’émotion. Les films issus des romans graphiques racontent des histoires. Le premier jour, l’un des acteurs m’a demandé : « pourquoi me tuer ? Robert Rodriguez a beaucoup travaillé avec les acteurs. Il était très investi. Il a travaillé très profondément sur tous les personnages pour qu’ils soient les plus intéressants possibles.

Comment est-il possible d’adapter ce genre de BD sur grand écran. Est-ce facile, difficile ?

Robert Rodriguez : nous avions le matériel. La plus grande difficulté était de le matérialiser. Toutes les lignes de dialogues ont été utilisées. Puis il y a eu le montage. Cela a été très difficile de choisir quoi garder et quoi abandonner.

La scène d’Eva dans la piscine : est-elle différente de celle de votre roman ?

Robert Rodriguez : cette scène était vraiment frappante dans le livre. Hollywood l’aurait entièrement changé pour en faire quelque chose de différent en mieux ou en pire. C’est le système qui veut cela.
J’ai adapté le scénario moi-même et j’ai trouvé que la scène était parfaite telle qu’elle était décrite dans le livre.

Frank Miller : c’était une opportunité de travailler dessus. On a du faire preuve de créativité pour l’adapter.

Y aura-t-il un troisième film ? Et si oui, quel en sera l’histoire ?

Robert Rodriguez : j’adorerais qu’il y ait un troisième film. Nous avons besoin que les gens nous supportent pour pouvoir le faire.

Frank Miller : nous avons plusieurs idées pour le scénario que nous adorerions partager avec vous. Mais nous tenons à garder la surprise.

D’habitude, il y a un enchaînement des suites rapidement. Pourquoi avoir attendu 9 ans avant de faire ce deuxième film ?

Robert Rodriguez : nous avons décidé de faire le film le 1^er novembre et en décembre nous avions le script, ce qui est très rapide. Le studio Miramax nous a soutenus pour le premier film. Nous avons créé une nouvelle entreprise en 2007 et avons perdu le contact avec la licence.
Pour le deuxième film nous avons travaillé sur une nouvelle histoire, le casting, le financement du projet, ce qui n’a pas été rapide.

Frank Miller : nous avons continué. Le premier film a été difficile à vendre. Cela dépend des personnages et de leur devenir dans le film.

Les méthodes actuelles sont révolutionnaires et font fortement diminuer les délais d’animation. Cela peut-il vous aider à l’adaptation de la BD Métal Hurlant que vous avez dit vouloir adapter sur grand écran ?
Robert Rodriguez : je suis un grand fan de cette BD. J’adorerais l’adapter en film.

Comment avez-vous réussi à réunir un casting aussi fantastique ?
Robert Rodriguez : nous avons tourné à Austin qui est un lieu très créatif. Là-bas, il n’y a pas de studio. Les acteurs peuvent vraiment jouer comme ils le veulent.

Frank Miller : C’est un endroit très beau et très puissant.

Est-ce que les acteurs ressemblent à ceux de la BD ? Avez-vous rajouté un épisode au film par rapport à la BD ?
Robert Rodriguez : nous avons regardé attentivement la BD et casté des personnes qui leurs ressemblait. Nous avons trouvé des acteurs ressemblant à ceux qu’avait en tête Frank Miller. Nous avons pris des acteurs qui avaient une ressemblance physique avec leurs personnages. Mais nous avons aussi pris les meilleurs acteurs dans les rôles même si ils ressemblaient moins à leur protagoniste. Nous avons parfois changé les dialogues les concernant.

Frank Miller : J’ai toujours mis dans mes œuvres de femmes magnifiques que nous ne pouvons pas voir. Mais si on prend des femmes comme Jessica Alba, j’étais très étonné de découvrir que des femmes pareilles existaient vraiment dans la vie réelle !
L’ouverture et la scène finale ne sont pas dans le livre.

On voit souvent des demoiselles en détresse dans le premier film. Le rôle est inversé avec des demoiselles pas forcément en détresse dans le deuxième volet.
Robert Rodriguez : on ne peut pas vraiment considérer que les femmes du film sont des demoiselles en détresse. Par exemple Eva Green n’est vraiment pas une victime.

Quentin Tarentino était crédité dans la réalisation du premier film. Est-il aussi intervenu dans le deuxième film ?

Robert Rodriguez : nous avons tourné beaucoup de séquences avec Frank Miller en utilisant un écran vert magique. Nous voulions montrer un film qui était au delà de l’action pure. Quentin Tarentino n’a pas participé au deuxième film.

Frank Miller : je n’ai jamais eu autant de plaisir à travailler aussi durement.

Frank Miller, Ben Affleck sera dans le prochain Batman après avoir massacré Daredevil. Avez-vous vu ce film et qu’en avez-vous pensé ?

Frank Miller : Je n’ai ni vu Daredevil ni Batman donc je ne sais qu’en penser. On peut s’attacher au personnage et ne pas voir ce qu’on en fait. J’adore travailler sur les histoires concernant ces personnages.

Sin City 2 : j’ai tué pour elle est un film très sympathique qui est une excellente adaptation du comics de même nom. Un film incontournable pour tous les amateurs de l’œuvre de papier et du premier film. Vous pouvez en retrouver la critique ICI.

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