Un épisode culte : X-Files - La Meute

Date : 31 / 03 / 2024 à 08h00
Sources :

Unification


LA MEUTE

- Type : Épouvante
- Titre Original : Home
- Série : X-Files
- 1ère aux USA : Fox (11/10/1996)
- 1ère en France : M6 (13/09/1997)
- Épisode : S04.E02
- Scénario : Glen Morgan, James Wong
- Réalisation : Kim Manners
- Musique : Mark Snow
- Interprètes : David Duchovny, Gillian Anderson, Tucker Smallwood, Chris Nelson Norris, Adrian Hughes, John Trottier, Karin Konoval, Sebastian Spence

Dans cette rubrique, je vous propose une expérience à mes côtés, à savoir, une explication, scène après scène, d’épisodes culte des meilleures séries de ces 70 dernières années.

Les précédents épisodes de cette rubrique :
- La Quatrième Dimension - L’œil de l’admirateur (S02.E06).
- X-Files - Aux Frontières du Réel - Le Shérif a les dents longues (S05.E12).
- X-Files - Aux Frontières du Réel - Prométhée post-moderne (S05.E5).

Continuons avec X-Files - Aux Frontières du Réel, cette série culte parmi les séries culte comporte aisément une douzaine d’épisodes dont je pourrais parler ici. Et j’en traiterai d’ailleurs d’autres dans cette rubrique.
Alors que j’ai jusqu’ici traité d’épisodes décalés, voir parodiques, j’ai choisi de vous parler aujourd’hui d’un épisode d’une violence telle qu’il choqua bon nombre des téléspectateurs et en fit l’épisode le plus controversé de la série.

Bien que l’analyse qui suit puisse être lue immédiatement, il serait dommage de ne pas visionner l’épisode en question avant de découvrir les remarques que j’aurais pu en faire, afin, bien entendu, de ne pas vous gâcher le plaisir de regarder ces fabuleux épisodes, mais aussi pour pouvoir confronter vos réactions aux miennes, et ainsi profiter pleinement de l’étude ci-dessous.

ÉTUDE SCÈNE PAR SCÈNE

Une maison délabrée, inquiétante, sous la pluie et l’orage, une faux au premier plan, et une musique à l’avenant. Un cri de douleur, tout est en gros plan, des silhouettes inquiétantes et difformes autour d’un lit, des yeux horrifiés, des instruments tranchants dans un bol, chaque moment est zébré par la lumière des éclairs, des bruits grouillants, des couinements, on coupe un cordon ombilical, quelque chose vient de naître.

Les silhouettes inquiétantes sortent dehors sous la pluie, en procession. On creuse un trou dans la boue, un superbe plan oblique, montre une scène incroyablement noire, secouée par les éléments, l’un des hommes semble pleurer, pendant qu’un autre semble le réconforter, alors qu’un troisième, au premier plan continue de creuser avec une pelle.
Ils ont enterré ce qui vient de naître.

En deux minutes, cet épisode d’X-Files vient de montrer la meilleure scène d’introduction d’un épisode de série. Dantesque, elle marquera à jamais.

- GÉNÉRIQUE.

Un après-midi ensoleillé, des gamins jouent au baseball dans un champ boueux près de la maison. En tapant au sol pour s’encrer, le batteur déterre une petite main ensanglantée, laissant échapper la balle, qui est ramassée par Mulder (on imagine, après le rapport de l’incident), l’enquête peut commencer.
Consciencieuse, Scully note tous les éléments de là où on a trouvé le petit corps.
Au loin, des silhouettes troubles surveillent depuis la maison délabrée.

Mulder joue avec la balle pendant que Scully donne son premier avis.
On assiste là à un des nombreux exemples de la différence entre l’approche de Scully et Mulder. Scully est méticuleuse, et se borne à inspecter les faits afin de ne pas se fourvoyer dans des conjectures. Mulder est plus sensitif (il sent et touche la balle, se rappelant son enfance), il a sans doute déjà une idée, et suit son instinct, il aimerait vivre à la campagne. Scully, jamais avare de pic, lance : Pour y vivre ou pour y mourir ?

Le shérif arrive alors en voiture et se présente.
Mulder se tourne vers la maison : Qui habite ici ? humant l’air et sentant l’atmosphère, il sait que c’est là-bas que l’on a des chances de trouver les meilleurs indices, alors que Scully, accroupie près du trou, ne pouvait que manquer cet élément.
On apprend que la maison appartient aux frères Peacock, que les parents ont été gravement blessés dans un accident, mais on ne sait pas grand-chose de plus. Personne n’a l’air de vouloir les approcher. Ils ont l’air humain...

La petite victime est conservée sous une couverture, directement dans le frigo du bureau du shérif et l’autopsie dois se faire dans les toutes petites toilettes, au-dessus du lave-mains.
Le nouveau-né semble atteint de toutes les difformités possibles.

À l’extérieur, le bon air retrouvé (des enfants jouent dans le parc), Mulder dit à Scully qu’elle devrait trouver un Superman à l’ADN parfait pour pondre un sous-groupe de Scully. Il la touche amicalement dans le dos. Pourtant, c’est un exemple de plus de tension sexuelle entre les deux protagonistes, qui évoluera tout au long de la série.

Pour une fois, c’est Scully qui pousse à continuer l’enquête, parce qu’elle est touchée personnellement (son désir d’enfanter et son incompréhension de la situation humaine d’une mère, finalement plus que sa simple curiosité scientifique). Scully, je crois qu’il y a une mère qui sommeille en toi...

Les deux agents se décident enfin à aller rendre visite aux Peacock. Alors qu’ils approchent de leur maison, on remarque encore plus ce que j’aurais pu souligner depuis le début. Beaucoup de prises de vue sont effectuées en contre-plongées et en oblique, rendant la moindre scène distordue, et comme vue du sol. À l’image du bébé.
Nous sommes ramenés à cet être, monstrueux et sans défense.

Devant la porte à la vitre salle, une tête de cochon tranchée gît, des mouches tournent partout dans la crasse.
Les agents du FBI entrent, et fouillent la maison dans la pénombre. Ils trouvent la pelle. Sous le lit, un regard aux yeux écarquillés les surveille.

Le soir même, depuis la chambre de motel des agents, Scully fait son rapport au shérif, pendant que Mulder tente de trafiquer l’antenne de la télé pour capter un programme. Une fois de plus, on retrouve le sérieux de Scully et la décontraction apparente de Mulder. Décidément, la relation de ce duo est vraiment parfaitement écrite, appuyant le réel au-delà du fantastique.

En parallèle, les frères Peacock, que l’on voit toujours en silhouette sombre, font difficilement démarrer leur vieille voiture qui n’a visiblement pas servi depuis longtemps (ils doivent siphonner de l’essence, une poule s’envoile du siège du passager...)

Ils semblent se diriger vers l’un de nos enquêteurs, une Scully endormie, un Mulder qui a calé sa porte avec le dossier d’une chaise, ou la maison de la famille du shérif.
Entassés à l’avant de leur vieille voiture, les frères tracent la route, en écoutant un vieux slow à la radio, Wonderful ! Wonderful !

Sur la télé de Mulder, un programme animalier parlant de meute est visible à travers la neige de la mauvaise captation.

Le shérif entend un bruit, voit la voiture garée devant chez lui et semble comprendre immédiatement, demandant à sa femme de se cacher sous le lit, pendant qu’il descend au rez-de-chaussée, dans le noir. Le vieux slow joue toujours, et il voit des silhouettes malhabiles devant sa porte. Ils entrent.

Ce moment fait référence à une scène un peu plus tôt, quand le shérif précisait que dans sa ville personne ne fermait la porte. Maintenant, les loups sont dans la bergerie.

Ils pénètrent dans la chambre, et on assiste au combat depuis l’angle de vue de la femme, sous le lit. Le mari se fait massacrer, puis la femme, dénichée par l’odorat de l’un des monstres. Pendant que les murs tremblent, au rythme des coups des assaillants, le vieux slow joue toujours.

Le lendemain, l’adjoint du shérif qui a trouvé les corps, fume une cigarette en tremblotant sous le porche alors que les agents du FBI arrivent.

Le fait le plus étrange, c’est que les principaux suspects s’en sont pris au shérif, alors qu’ils ne devaient pas être au courant qu’un mandat d’arrêt contre eux était en marche. Scully et Mulder en ont parlé dans la maison des Peacock, mais ils pensaient être seuls.

C’est alors que l’on revient sur le regard sous le lit, qui semble donner des ordres aux trois frères difformes.

Les agents du FBI surveillent la maison aux jumelles, et Scully tombe sur la profil de l’un des fils. C’est la première fois qu’on en voit un, en plein jour. Mais si la menace est éloignée par la distance, elle semble plus proche que jamais, surtout quand l’adjoint décide de lancer l’assaut à eux trois.

Il se lance en premier, son approche est lente et précautionneuse, mais quand il ouvre la porte, un piège se déclanche et le tue, engendrant une sorte de frénésie chez les frères. Les agents du FBI ne peuvent qu’assister à l’horrible scène et échanger leurs impressions sur l’instinct de meute du groupe de meurtriers.

Leur plan est de faire s’enfuir les cochons de l’enclos, afin de faire sortir les frères Peacock.

S’en suit une petite scène rigolote, qui fait un peu baisser la pression, quand Scully tente un mot d’ordre emprunté du film Babe, pour faire avancer les cochons.
Les frères courts après les cochons laissant le champ libre aux agents pour pénétrer dans la maison, en évitant un piège barbare.

La tension est insoutenable quand Mulder découvre un indice Oh non...
C’est en fait un vieux journal annonçant la mort d’Elvis... tout à coup, un bruit capte à nouveau leur attention.

Cela peut paraître facile, mais les auteurs de la série X-Files sont des maîtres du rythme, et cette seule scène en est un exemple flagrant. On nous fait vivre des sensations comme montés sur une montagne russe.

Ils découvrent des photos des membres de la famille, tous atteints d’une difformité. La référence est ici tirée de Lovecraft et des mutations des profonds dans Le Cauchemar d’Innsmouth.

Alors que l’on commence à comprendre l’histoire qui se cache derrière cet héritage incestueux de difformités multipliées par la consanguinité, Mulder remarque des marques sur le sol près du lit et découvre une femme ligotée sur une planche, sous le lit, implorant qu’on la laisse tranquille.

C’est ici que tout s’accélère, dans une des scènes les plus marquantes, toutes séries confondues, sous les yeux médusés de Scully, alors que l’on tire la femme hurlant, ligotée et amputée des quatre membres. Scully se resaisie et reconnaît Madame Peacock, qui tourne son visage et révèle un visage complètement défiguré.

Pendant que Mulder surveille dehors pour voir si les cris n’ont pas alerté les 3 fils, Scully implore la mère d’accepter de sortir. Cette dernière explique qu’elle doit veiller sur ses enfants, et que visiblement Scully n’a jamais eut de descendance, autrement elle comprendrait.
Le fait de réunir les deux personnages féminins, l’un défendant sa famille, l’autre voulant en construire une, est à nouveau un très bel élément scénaristique, qui rappelle au réel, une situation absolument horrible.

Les 3 fils pénètrent alors dans la maison, un corps-à-corps avec Mulder s’ensuit, Scully tire à plusieurs reprises, sans que l’on sache si elle atteint vraiment sa cible, mais les agresseurs en ressortent apparemment invulnérables, comme dans tout bon slasher.

Dans le chaos qui s’en suit, Mulder abat finalement un des frères, Scully précipite un autre dans un de ses propres pièges, mais le plus âgé des frères semble avoir pris sa mère et s’être enfuis.

La scène de fin montre la vieille Cadillac de la famille s’éloignant, baignée de la musique du vieux slow.
Il faut que l’on reprenne la route, que l’on fonde une nouvelle famille... dans un tout nouveau foyer.

LE MOT DE LA FIN

On doit le formidable scénario de cet épisode à Glen Morgan et James Wong, à qui l’on devait déjà l’excellent épisode Projet Arctique (Ice) (S1.E8), lorgnant du côté de The Thing de John Carpenter.

Ils avaient quitté la série au cours de la deuxième saison afin de se concentrer sur la production de leur propre série, Space 2063, qui fut vite annulée. C’est donc ici leur retour dans X-files (on leur devra aussi Destination finale 1 et 3).

Cette fois-ci, le duo s’attaque donc à Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper et à La colline a des yeux de Wes Craven.

Car bien entendu, sans l’instrument tonitruant, il s’agit bien de cela, et de la dégénérescence de toute une famille.

Mais la fiction n’est pas leur seule inspiration.

En effet, ils confièrent que le documentaire Brother’s Keeper de 1992, présentant un homme ayant tué son frère pendant un acte sexuel, et une anecdote racontée par Charlie Chaplin étaient tout aussi fondateurs. Celle-ci, tirée de ses souvenirs de voyage, racontait la fois où le fils d’une famille, amputé des 4 membres, avait été tiré de sous le lit, pour lui être présenté.

Pour mettre tout cela en image, on fit appel à Kim Manners, qui réalisa pas moins de 52 épisodes d’X-Files, mais aussi de Drôles de Dames, Automan, Matt Houston, Simon et Simon, Rick Hunter, 21 Jump Street, Mission Impossible 20 ans après, Alerte à Malibu, Empire et Supernatural, ou encore l’épisode de Star Trek : The Next Generation, Quand la branche casse (When The Bough Breaks) (S1.E17).

L’épisode présente, à n’en pas douter, une satire de la vie au sein du foyer Américain (d’où le titre original, Home), et du système communautaire. La famille Peacock, des monstres chez eux, ne sont pas intégrés à la vie qui les entoure, ils doivent se replier sur eux-mêmes pour survivre.

Dans l’ensemble de la série, cet épisode est le premier à être précédé d’un avertissement aux téléspectateurs pour violence, et le seul à être interdit aux moins de 17 ans.

Il est sans nul doute le plus dérangeant, et du même se soumettre à la censure, en ce qui concerne les cris du bébé dans la scène d’ouverture. On les remplaça par des borborygmes, afin que l’on comprenne que ce que l’on enterrait n’était pas vraiment humain.
Mais il est aussi le premier épisode de la montée du désir d’enfantement de Scully, un sujet prégnant dans tout le milieu de la série.
Comme si, une affaire aussi horrible pouvait aussi engendrer le beau.

La vérité est ailleurs...

GÉNÉRIQUE ET EXTRAITS










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