Parole de Kamikaze : La critique

L’idée d’écraser volontairement son avion sur des ennemis ne vient pas des japonais mais des allemands. C’est en 1943 qu’Hanna Reitsch, l’une des rares femmes pilote d’essai allemand, tenta de mettre sur pied un groupe de pilotes quasi-suicide, elle-même étant volontaire. Mais Hitler fut horrifié par cette idée de sacrifier des jeunes pilotes allemand et interdit d’aller plus loin.

En 1944, le Japon décida d’ordonner à ses pilotes et par la suite à des volontaires, souvent jeunes soldats, de se jeter délibérément sur des navires et sous-marins ennemis pour les couler, ce que l’empereur HiroHito avalisa. Les kamikazes étaient nés.

Parole de Kamikaze revient sur les souvenirs de la fin de la deuxième guerre mondiale de Fujio Hayashi, notamment la section suicide qu’il a intégré en tant que volontaire à 21 ans.
Cette brigade avait pour objectif de former de jeunes soldats sur les Ohka (fleur de cerisier en japonais), des petits appareils sans moteur largués avec un pilote et une bombe sur une cible ennemi.

L’adhésion de jeunes gens à une mission surprise peut paraître étonnante, mais la culture du sacrifice est intégrée dans la société japonaise, surtout à une époque de puissant embrigadement militaire. De plus le suicide est une manière noble de mourir au Japon, celle qui permet d’affirmer ses idées, parfois extrémistes, ou le moyen de ne pas perdre la face.

L’œuvre, ponctué de silence pour laisser le temps à Fujio Hayashi de réfléchir à la question et d’y répondre est parfois trop contemplatif. Ce qui passe bien dans un film a moins d’impact dans un documentaire. Par exemple la scène de la chanson allemande, si elle est très belle et poétique, perd progressivement de sa force alors que les minutes s’égrainent.

La mise en scène est focalisée sur le protagoniste principal qui raconte ses souvenirs. Les changements de décors et de lieux permettent d’apporter un certain dynamisme mais un montage trop plat en gâche quelque peu l’effet.

Masa Sawada, le réalisateur, a choisi délibérément de se focaliser uniquement sur le témoignage de Fujio Hayashi et de ne pas intégrer d’images (à l’exception de la photo de la brigade) ou de films d’archives. Ce choix paraît vraiment très sobre par rapport à la production actuelle des documentaires d’histoire. Ne pas avoir non plus donné d’éléments chiffrés sur la deuxième guerre mondiale et un peu dommage, d’autant que cette parole d’un des derniers kamikazes encore en vie est précieuse.

On apprend de nombreuses choses, certaines surprenantes, mais en l’absence d’une connaissance des kamikazes préalable, on peut passer un peu à côté de ce phénomène, d’autant que les pilotes d’Ohka n’étaient qu’une partie des kamikazes japonais.

Toujours est-il que les dires de Fujio Hayashi permettent d’apprendre l’état d’esprit de ces jeunes gens qui allaient à la mort pour leur pays et leur empereur. Un empereur à qui le narrateur ne pardonne pas de n’avoir jamais parlé ni rendu hommage publiquement aux kamikazes qui ont donné leurs vies pour le Japon.

Parole de Kamikaze est un documentaire intéressant et parfois poignant. Si les souvenirs d’hommes et de femmes qui ont vécus la deuxième guerre mondiale doivent être recueillis avant que les dernières voix ne s’éteignent, une réalisation un peu moins sobre et des éléments complémentaires permettant de situer les propos de Fujio Hayashi dans un contexte pas toujours présent dans les mémoires auraient été les bienvenus.

Un documentaire qui devrait intéresser les amateurs d’histoire et de témoignages filmés.

A 21 ans, Fujio Hayashi s’est porté volontaire pour la toute première opération kamikaze menée par l’armée impériale japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale. Toute sa vie, il ne cessera de penser à ces dix-huit mois de guerre qui le hantent.
En recueillant ce témoignage, Masa Sawada et Bertrand Bonello tracent le destin d’une personnalité hors du commun.

 Durée du film : 1 h 14
 Titre original : Parole de Kamikaze
 Date de sortie : 03/06/2015
 Réalisateur : Masa Sawada
 Interprètes : Fujio Hayashi, Masa Sawada, Bertrand Bonello
 Photographie : Josée Deshaies
 Montage : Junko Watanabe, Hiroto Ogi
 Producteur : Masa Sawada, Anne Pernod-Sawada pour Comme des Cinémas
 Distributeur : Haut et Court

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