Jacky au royaume des filles : La critique

Date : 26 / 01 / 2014 à 16h04
Sources :

Unification


SYNOPSIS

En république démocratique et populaire de Bubunne, les femmes ont le pouvoir, commandent et font la guerre, et les hommes portent le voile et s’occupent de leur foyer. Parmi eux, Jacky, un garçon de vingt ans, a le même fantasme inaccessible que tous les célibataires de son pays : épouser la Colonelle, fille de la dictatrice, et avoir plein de petites filles avec elle. Mais quand la Générale décide enfin d’organiser un grand bal pour trouver un mari à sa fille, les choses empirent pour Jacky : maltraité par sa belle-famille, il voit son rêve peu à peu lui échapper...

NOTRE AVIS

Jacky au royaume des filles, c’est une farce burlesque, une parodie de l’histoire de Cendrillon. Le réalisateur veut critiquer la société patriarcale en inversant les rôles dans son royaume. En effet les femmes sont maitresses du pays et les hommes doivent leur obéir et rester à leur place. La religion, les chevalins, est omniprésente dans l’histoire et ne manque jamais de nous faire rire. L’histoire est brillante, la farce ne tombe jamais dans le vulgaire.

Jacky porte une « voilerie », designée par le réalisateur lui-même, qui ressemble beaucoup à une burqa d’une seule pièce. C’est le cas de tous les hommes quel que soit leur âge. Les femmes, elles, portent toutes des uniformes de type militaire. Jacky, qui est pauvre, rêve d’épouser la Colonelle, fille de la dirigeante de la République Démocratique et Populaire de Bubunne et de devenir son grand couillon. Après tout pourquoi ne pas rêver car Jacky est beau et toutes les femmes veulent l’épouser. Mais le billet d’entrée du bal a un prix prohibitif et le sort semble s’acharner sur lui.

Le réalisateur utilise la farce pour dénoncer les régimes autoritaires, la manipulation mentale, l’impact de la religion, le maintien de la moitié d’une population dans l’esclavagisme et l’illettrisme. Le fait qu’il soit parisien d’origine franco-syrienne donne plus de poids à ses propos car il connaît les situations qu’il dénonce. L’ensemble fonctionne merveilleusement, aidé en cela par des répliques qui font mouche et des acteurs plus que convaincants. Le film est drôle, très drôle et fait réfléchir. En effet la parodie permet parfois de faire passer des messages plus facilement que le documentaire.

Le langage est aussi bien trouvé avec des exclamations comme Bubunne ! qui fusent régulièrement et tout un glossaire parfois très finement trouvé.
Dans ce pays ridicule, avec ses coutumes ridicules et ses personnages ridicules, c’est une charge au vitriol du monde dans lequel on vit qui se dessine. Et si personne ne souhaiterait vivre dans la merveilleuse République Démocratique et Populaire de Bubunne, on peut se poser la question sur un certain nombre de pays finalement pas si éloignés de nous et même regarder ce qui ce passe dans le nôtre.

Il y a quelques scènes mémorables dans le film mais la scène du bal avec tous les prétendants qui agitent leurs laisses dans le but d’attirer le regard de la Colonelle est tout bonnement magnifique.

Quant à la musique c’est Riad Sattouf lui-même qui en est le compositeur. Et cette dernière apporte une plus grande dimension à certaines scènes en nous faisant frémir, rire ou retenir notre souffle. Réalisateur, scénariste, compositeur, aurait-on notre John Carpenter français ?

D’ailleurs si vous avez l’occasion, n’hésitez pas à voir un film de science fiction mexicain de 1948 : le sexe fort (El sexo fuerte) qui traite du même sujet avec beaucoup d’humour. Ce film n’a surement pas inspiré le réalisateur, mais les mécanismes utilisés sont très similaires ; ce qui finalement peut être déprimant lorsqu’on se rend compte que 65 ans plus tard certaines choses n’ont toujours pas changé. Espérons que Jacky aura un impact positif dans la représentation de situations finalement intolérables en ces heures de mondialisation effrénée.
Il faut bien avouer que je ne suis pas allée voir ce film avec beaucoup d’attente, d’autant que j’aime modérément les films français. Mais franchement celui-ci est remarquable et tout en faisant rire nous donne une grande claque. N’hésitez pas à aller le voir.

En ce qui concerne le réalisateur Riad Sattouf, il vient de la bande dessinée et signe ici son deuxième film, tourné à Tbilissi (en Géorgie) après Les beaux gosses. Il signe aussi le scénario du film et on retrouve dans les dialogues et le visuel de certaines scènes toute la richesse du neuvième art. Lorsqu’il s’exprime sur Jacky, il avoue avoir depuis tout petit été fasciné par le conte de Cendrillon. Mais il s’est toujours demandé pourquoi le prince voulait épouser une fille aussi fadasse au contraire de ses sœurs, pourquoi Cendrillon après avoir été maltraitée acceptait de pardonner à sa famille. On lui répondait alors que c’était l’histoire. Des années plus tard, il a voulu mettre en image ce conte en nous racontant l’histoire de Cendrillon version homme.

Si vous voulez en savoir plus sur l’envers du décor du film, vous pouvez retrouver l’entretien avec Riad Sattouf, Anne-Dominique Toussaint (la productrice du film) et Anthony Sonigo (un acteur) sur notre site ici.

BANDE ANNONCE


FICHE TECHNIQUE

- Durée du film : 1 h 30
- Titre original : Jacky au royaume des filles
- Date de sortie : 29/01/2014
- Réalisateur : Riad Sattouf
- Scénariste : Riad Sattouf
- Interprètes : Vincent Lacoste, Charlotte Gainsbourg, Didier Bourdon, Anémone,Valérie Bonneton, Michel Hazanavicius, Noémie Lvovsky, Laure Marsac, Riad Sattouf, Anthony Sonigo
- Photographie : Josée Deshaies
- Montage : Virginie Bruant
- Musique : Yves-Marie Omnes
- Costumes : Oliver Ligen
- Décors : Alain Guffroy
- Producteur : Anne-Dominique Toussaint pour Les Films des Tournelles, Pathé, Orange Studio, France 2 Cinéma, Alvy Productions
- Distributeur : Pathé Distribution

LIENS

- SITE OFFICIEL
- ALLOCINÉ
- IMDB

PORTFOLIO



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