Doctor Who : Se retirer pour ne pas fâcher l’administration Trump ?
Maintenant que Disney+ s’est officiellement retiré de Doctor Who, les raisons de la sortie du TARDIS de la BBC semblent rimer avec la politique "Make America Great Again" de Donald Trump, mais pas que...
Dana Walden était à Londres en début de mois, mais on peut affirmer sans risque de se tromper que le renouvellement de Doctor Who ne figurait pas parmi ses priorités de Disney. Des sources auraient indiqué que la directrice des divertissements était peu enthousiaste à l’égard de la série de science-fiction depuis plus d’un an.
Ce qui était conçu comme un plan pour "Marveliser" la franchise n’a pas donné les résultats escomptés. Au contraire, le partenariat s’est éteint discrètement, Disney n’ayant même pas publié de communiqué pour annoncer son divorce d’avec la BBC et quitter le TARDIS conjugal. Alors, qu’est-ce qui a condamné l’accord Doctor Who, et que nous réserve l’avenir ?
Selon plusieurs sources proches de Doctor Who, l’accord avec Disney a échoué pour diverses raisons, notamment des inquiétudes quant à l’incapacité de la série avec Ncuti Gatwa à s’imposer auprès de son public déjà conquis et en raison de son budget conséquent. D’autres soupçonnent que la crainte d’une réaction négative de la part des milieux progressistes pourrait être un facteur déterminant, Doctor Who ayant privilégié une narration plus diversifiée sous la direction du showrunner Russell T. Davies.
"Il était assez évident dès le départ que ce projet n’était pas viable à long terme", aurait déclaré un ancien cadre de Disney. "Tout le monde avait le sentiment que la série ne rencontrait pas le succès escompté [sur Disney+] pour assurer sa pérennité." Une autre source proche de l’équipe de Doctor Who aurait également expliqué : "C’était prévisible depuis longtemps. Il y avait un manque total d’enthousiasme chez Disney."
Annoncé en octobre 2022, en pleine guerre du streaming, et quelques semaines seulement avant le retour de Bob Iger à la tête de l’entreprise et la réduction drastique des dépenses, l’accord de co-production de Doctor Who aurait très vite été un regret pour Disney, même si à l’époque, ce pacte était considéré comme "sans précédent, unissant "deux géants du divertissement". Résultat, les épisodes des deux dernières saisons de Doctor Who auraient coûté la bagatelle de 150 millions de dollars au minimum (200 millions au maximum).
Un ancien employé de Disney souligne le manque de moyens marketing déployés pour la marque – loin de la puissance de marques comme Marvel ou Star Wars – créant ainsi un cercle vicieux : il est devenu plus difficile pour Doctor Who de percer auprès du public américain : "On n’en parlait certainement pas comme d’un grand succès."
Un cadre de BBC Studios, propriétaire de Doctor Who et responsable des ventes internationales, affirme qu’on "n’a jamais eu l’impression que Disney investissait beaucoup" dans cette série de science-fiction culte, diffusée sur les écrans britanniques depuis plus de 60 ans. Des sources chez Disney auraient contesté cette version, l’une d’elles déclarant qu’un important effort marketing avait été consacré à la série.
Pas de public aux States, c’est un fait. Mais les chiffres n’ont pas été bons non plus au Royaume-Uni. La deuxième saison a rassemblé en moyenne 3,8 millions de téléspectateurs britanniques. Cela représente une baisse d’un million par rapport à la saison précédente, la première avec Gatwa et produite par Bad Wolf, de Jane Tranter. Les deux saisons de Gatwa ont enregistré des audiences inférieures à celles de la dernière saison de Jodie Whittaker en 2021, une période qui n’était déjà pas considérée comme l’âge d’or de Doctor Who.
D’après Tony Jordan, qui dirige la Doctor Who Appreciation Society, les fans de Doctor Who trouvent les saisons de Gatwa inégales : "Il y a eu d’excellents épisodes dans les deux saisons, mais les deux épisodes finaux n’ont pas été particulièrement appréciés. Le manque d’épisodes a rendu difficile pour le public de faire la connaissance de Ncuti et de ses compagnons et de réellement développer leurs intrigues."
Il semble également que Gatwa n’ait jamais pris conscience de sa responsabilité en tant que Seigneur du Temps : "Ce rôle ne se résume pas à jouer la comédie", explique une source. "Il faut être un ambassadeur de la franchise et incarner le Docteur de cette génération. Matt Smith et David Tennant en comprenaient parfaitement la responsabilité."
Une autre source affirme que Doctor Who est devenu "trop progressiste pour l’Amérique de Trump", et que cela a pesé dans la décision de Disney. Sous la direction de Davies, la série a notamment intégré l’actrice transgenre Yasmin Finney, présenté Jinkx Monsoon dans le rôle d’une méchante, et a été le théâtre d’un baiser gay historique entre Gatwa et Jonathan Groff – des événements qui ont suscité des réactions négatives de la part de certains téléspectateurs. Aux States, Disney cherche beaucoup à minimiser la colère des partisans de Trump. Il n’y a qu’à voir comment le conglomérat a traité Jimmy Fallon ces dernières semaines, quand ce dernier a ouvertement critiqué l’administration en place à la Maison-Blanche dans son Show sur ABC. Et pourtant, célébrer la différence a toujours fait partie intégrante de l’ADN de Doctor Who.
Quant au final ambigu de la dernière saison - la régénération de Gatwa en Billie Piper, Jordan suppose que cette situation est temporaire et que Davies profitera de l’épisode spécial de Noël 2026 pour résoudre certaines intrigues. Par la suite, Jordan pense qu’un nouveau souffle pourrait être nécessaire : "Rien ne dit que Russell restera showrunner à partir de 2027. Il est peut-être temps qu’un nouveau showrunner prenne les rênes."
Une source de chez la BBC estime que l’indifférence de Disney envers Doctor Who pourrait bien être une aubaine : "Aux États-Unis, Doctor Who n’est pas vraiment associée à Disney, si ce n’est pour la diffusion des deux dernières saisons sur Disney+. On parle d’une série qui a connu de nombreux retours et a été diffusée sur de nombreuses plate-formes."
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