Star Trek - Short Treks : Review 2.04 Ephraim and Dot + 2.05 The Girl Who Made The Stars

Date : 18 / 12 / 2019 à 13h30
Sources :

Unification


EPHRAIM AND DOT

Avec ce premier Short Treks animé, il faut surtout prendre ce dessin animé comme faisant partie d’une tradition de court-métrages qui prenaient place devant les films au cinéma. C’est en fait une sorte de Tom et Jerry spatial avec des courses-poursuites à l’extérieur ou à l’intérieur de l’Enterprise.

C’est un épisode très fun qui offre une vision beaucoup plus sympathique du Tardigrade de Discovery qu’on verrait bien en peluche si un marketing à la Disney était à l’œuvre sur la franchise.

Cet épisode est surtout un bon prétexte pour redécouvrir beaucoup d’événements de la série originale et des films. Le tardigrade utilise ses facultés pour voyager dans le réseau mycélien en même temps qu’il fait des sauts dans le temps ce qui permet justement d’admirer les événements de l’histoire de l’Enterprise NCC-1701 et NCC-1701 refité (et non NCC-1701-A contrairement à ce qui apparaît à l’écran).

Bref un épisode idéal à monter à vos jeunes enfants pour les initier et les intéresser à l’œuvre créé par Gene Roddenberry.

FM

Lorsque le Star Trek roddenberro-bermanien s’était essayé au dessin animé, c’était pour se tourner d’emblée vers une forme d’expression adulte (Star Trek The Animated Series), en dépit des préjugés amalgamants de son temps (1973-74), précédant ainsi de plusieurs décennies la norme des Simpsons, South Park, et autres Family Guy. Il est donc assez symptomatique que le Star Trek kurtzmanien opte en 2019 pour une animation d’un style et d’un ton résolument infantile…

Enfin soit. C’est du kids entertainment, prenons-le donc comme tel.

En faisant des "héros" antagonistes de Short Treks 02x04 Ephraim And Dot un tardigrade mycélien (sorti de l’antiscience-pour-rire de la saison 1 de Discovery) versus un petit robot de maintenance DOT-7 de l’USS Enterprise NCC-1701 de Kirk (introduit également dans le retcon Discovery), Short Treks tente – oui tente – de rendre hommage à l’esprit barré de Tex Avery, peu ou prou à la façon de l’inénarrable Farscape 03x16 Revenging Angel.
Mais si Michael Giacchino réussit à insuffler une vraie dynamique cartoonesque old school (de Tom and Jerry à Bugs Bunny en passant par Road Runner and Wile E. Coyote) qui emportera donc sans difficulté le spectateur dans un roller coaster spatial, il repose malgré tout sur des arguments narratifs difficiles à déchiffrer, y compris à travers le prisme du dixième degré d’un anime-à-ne-surtout-pas-prendre-au-sérieux.

Même en mode régressif-udulescent-gloubi-boulga-osef, difficile d’articuler ce documenteur – nommé The Tardigrade In Space – avec la continuité trekkienne qu’il prétend pourtant revisiter avec force démonstrativité…
En effet, les improbables tardigrades de type Ripper rencontrés dans DIS 01x05 Choose Your Pain sont supposés emprunter le non moins improbable mycelial network grâce à leur osmose génétique avec les prototaxites stellaviatori. Cela n’impliquait donc en aucune façon une quelconque capacité naturelle à voyager en distorsion, et encore moins dans le temps ! D’autant plus que même si l’on assume la réalité des événements de Discovery, cela n’autorise pas à ignorer la déclaration de Data (embarquant tout le savoir de la Fédération en 2366) dans TNG 03x20 Tin Man quant à l’impossibilité de voyager à distorsion autrement que par des moyens artificiels (du moins avant la rencontre avec Gomtuu).

Dans Short Treks 02x04 Ephraim And Dot, le gentil tardigrade Ephraim dépose sa couvée dans l’USS Enterprise, durant TOS 01x24 Space Seed (2267), peu après les premiers échanges de Kirk et McCoy avec un Khan alité, fraichement ranimé de son long séjour dans le SS Botany Bay.
Mais après une avalanche de péripéties comiques et de gags visuels l’opposant au robot-mignon DOT-7, Ephraim croise les Tribules de TOS 02x13 The Trouble With Tribbles (2268)... donc au prix d’un soudain bon d’un an dans le futur, avant d’entrevoir et d’entrentendre en toile de fond Sulu se prenant pour D’Artagnan sous l’emprise de la polywater intoxication dans TOS 01x06 The Naked Time (2266), moyennant donc un inexplicable rembobinage de deux ans !!!
Euh... WTF ?!! Les auteurs mélangent les pages de l’herbier, s’embrouillent dans les épisodes, et se prennent les pieds dans le tapis... Car même en supposant que ce super-tardigrade soit un voyageur temporel, quel sens cela aurait-il pour lui de visiter le vaisseau plus d’un an avant d’y avoir déposé ses œufs (au risque d’altérer sa ponte "future") ?
Après que DOT-7 réussit à expulser Ephraim du vaisseau, ponctué d’un sarcastique "life long and prosper" (davantage d’humour qu’un Vulcain !), s’ensuivent d’incessantes courses-poursuites en distorsion de l’USS Enterprise qui conduiront le tardigrade à croiser la mythologique main d’Apollon dans TOS 02x04 Who Mourns For Adonais ? (2267), le planet killer dans TOS 02x06 The Doomsday Machine (2267), le piège tholien dans TOS 03x09 The Tholian Web (2268), le simulacre excalibien d’Abraham Lincoln dans TOS 03x22 The Savage Curtain (2269)... et seize ans plus tard (ouais direct !) les attaques de l’USS Enterprise refitée par l’USS Reliant dans ST II The Wrath Of Khan (2285) puis par le Bird-of-Prey du Klingon Kruge ST III The Search For Spock (2285)... avant sa mythique autodestruction en orbite de la planète Genesis !
Mais ce requiem vaudra au petit robot-cerbère DOT-7 de sauver par pur bonté d’âme (évidemment) la progéniture à peine éclose (les bébés tardigrades sont si mimis !) du malheureux Ephraim épuisé par ses deux décades non-stop de traque.
Tout est donc bien qui finit bien... au royaume de Nickelodeon.

Ce balayage au pas de course de tout le timeframe du vaisseau classique de James T Kirk – qui aurait presque pu être sous-titré "vie et mort de l’Enterprise" – se conjugue par un name/image dropping outrancier et un medley enfiévré dont le défilement à géométrie temporelle très variable et à l’échantillonnage défiant toute probabilité (uniquement les moments de TOS les plus cultes dans la culture populaire) tient d’une offrande sacrificielle au fan service le plus putassier.
En somme, l’exhibition kéké de la pire cuistrerie abramso-kurtzmanienne qui indexe le degré de trekkisme des productions sur le nombre d’Easter eggs alignés – réputés être autant de gages de connivences à l’endroit des trekkers les plus suivistes.
Tout en multipliant les contresens et les gaffes... à l’instar de la confusion grossière entre le NCC-1701 refité (qui se meurt dans Star Trek III The Search For Spock) et le NCC-1701-A (qui sort des chantiers astronautiques seulement à la fin de Star Trek IV The Voyage Home).
Sauf que le narrateur du faux docu The Tardigrade In Space n’est autre que Kirk Thatcher ayant jadis interprété le punk de la célèbre scène de bus du film dédié aux baleines à bosse !
Du coup, comment interpréter ce clin d’œil (un peu plus subtil que les autres) ? La coquille visuelle du NCC-1701-A serait-elle volontaire, comme pour bien entériner une timeline distincte ?!

Même si le relativisme demeure l’un des fondements de la SF trekkienne, où les combats les plus modestes ne se mesureraient pas forcément à la même échelle de temps que les faits historiques les plus ambitieux… est-il possible pour une simple partie de fun d’avaler :
- que vingt-deux longues années d’aventures épiques du NCC-1701 aient seulement représenté un éphémère "terrain de jeu" (quand bien même elliptique) pour un tardigrade discoverien ?
- Que durant une même scène connexe à bord de l’USS Enterprise, Ephraim ait successivement été témoin (avec le plus grand naturel s’il vous plait) d’événements se déroulant en 2267, en 2268, puis en 2266 (avant même son arrivée) ?
- Qu’aucune des innombrables intrusions de cet alien n’ait jamais été signalée par le DOT-7 au personnel de sécurité et/ou de commandement ?
- Qu’un être capable de voyager aussi aisément dans l’espace et apparemment aussi dans le temps en soit réduit à courser l’Enterprise-Jerry tel un Tom spatial ?
- Que soit ignorées les innombrables trajets en impulsion et les longues périodes de stationnement du navire, notamment dans les spatiodocks ?
- Qu’une forme de vie aussi spatiotemporellement évoluée (voire omnipotente) dépende d’un vaisseau humanoïde pour pondre ?
- Que durant le refit intégral de l’USS Enterprise en 2270 (entre la fin de la série originale et le début ST The Motion Picture), nul technicien (biologique ou robotique) n’ait trouvé à bord les œufs d’Ephraim (alors que cette espèce discoverienne de tardigrade est loin d’être microscopique) ? (...)
En outre, abandonner à l’autodestruction (et plus généralement exploiter/asservir) des sujets robotiques révélant une aussi grande autodétermination et une aussi généreuse sentience que DOT-7 n’expose-t-elle pas l’UFP à de graves manquements éthiques ?

Oui, décidément, pour cette séance de montagnes russes très slapsticks, où l’absurde le dispute au nawak, abandonnez votre temps de cerveau disponible et laissez toute intelligibilité au vestiaire...

Et pourtant, fort paradoxalement, c’est le plus délibérément invraisemblable des épisodes kurtzmaniens qui s’avère à ce jour le moins irrespectueux de Star Trek TOS !!!
Faut-il y voir un symbole gorgé d’ironie mauvaise ?
Car en dépit de cette stylisation animée (vintage ou moche selon les goûts) d’un univers live à la base, avec Short Treks 02x04 Ephraim And Dot, c’est bien la toute première fois depuis 2009 (et donc a fortiori depuis 2017) que l’on retrouve (durant de trop brefs instants) les designs (passerelle, Jefferies tubes, salle des machines...), les ambiances, les dialogues, et mêmes les voix de TOS… tandis que Discovery n’avait cessé de relifter, rebooter, et transgresser sans retenue tout ce qui faisait l’identité artistique et contextuelle de la série originale !

Alors est-ce un acte manqué révélant le besoin inconscient de davantage respecter le Star Trek qui fut, voire même un "pieux appel" à travers la sandbox de l’animation pour une meilleure intégration intradiégétique ?
Ou bien à l’inverse, est-ce l’expression d’un complexe branchouille (et insultant) envers la chronologie historique qui ne peut désormais plus exister que dans l’écosystème d’un cartoon-à-ne-surtout-pas-prendre-au-sérieux ?
Ou encore, plus trivialement, est-ce une incapacité pathologique de l’univers discoverien à être cohérent envers ses propres incohérences ?

En cherchant à soumettre rétroactivement la timeline de la série originale aux partis pris ultra-fumeux de Discovery (réseau mycélien, tardigrades multidimensionnels, magie en lieu et place des sciences…), Short Treks 02x04 Ephraim And Dot accouche d’une ligne temporelle chimérique, plus vraiment celle de DIS, mais pas encore celle de TOS.

Un cartoon sympa (3,5/5). Mais un anti-Star Trek schizo (1,5/5).

YR

THE GIRL WHO MADE THE STARS

Le second épisode est très différent visuellement du premier, bien que réalisé par la même société de production. Moins cartoon et plus réaliste visuellement, celui-ci montre Michael enfant et sa relation avec son père.

Celle-ci a beaucoup de mal à dormir lumière éteinte et comme tout parent qui se respecte, c’est en racontant une histoire que cela est sensé donner confiance à Michael. Certaines mauvaises langues pourraient même dire qu’à force de lui faire penser qu’elle peut être une super-héroïne, cela a pu développer chez elle certaines caractéristiques "énervantes"...

Si dans les histoires de notre vingt et unième siècle, un parent aurait invoqué des esprits ou la magie, le père de Michael évoque bien entendu un extraterrestre. Logique....

Pour autant, cela reste un conte pour enfants. À vous de voir si vous êtes réceptif ou pas à ce type d’histoire. Cela n’a pas été totalement mon cas.

FM

Avec Short Treks 02x05 The Girl Who Made The Stars, le degré de canonicité augmente assurément de plusieurs crans, car avec le "sérieux" d’un épisode live, ce minisode déroule un fragment de l’enfance de Michael Burnham. Et parce qu’il convoque la pédagogie initiatique des contes (de Joseph Campbell à Vladimir Propp), il est supposé témoigner de la formation de la psyché de l’héroïne en titre de Discovery.

Eh bien, le témoignage est effectivement édifiant !

Car derrière la poésie strictement visuelle de l’animation, ce pseudo-mythe – sis il y a mille siècles en Afrique et que Mike Burnham relate à sa fille pour tenter de la guérir de ses angoisses nocturnes – n’est en rien vecteur de sens ! Ni moral, ni allégorique, ni métaphysique, ni scientifique.
En décidant d’ignorer la night beast (un gigantesque serpent), la petite fille africaine à laquelle s’identifie Michael ne fait pas montre de courage, mais d’inconscience. Puis en lui échappant par un vulgaire sprint, elle ne manifeste pas de vaillance, mais d’un instinct de survie (voire de ludisme d’après le ton général). En se dirigeant comme une phalène vers la lumière (en réalité un extraterrestre non humanoïde ayant atterri avec son vaisseau), la gamine ne fait pas preuve de discernement, mais de sujétion...
Finalement, la Grasshopper Mary Sue ne sera confrontée à aucune forme d’épreuve, de parcours, ou d’initiation la faisant se remettre en question et évoluer... Parce que, comme d’habitude dans le Burnham-verse – y compris ici par proxy –, tout lui tombe tout cuit dans le bec ! D’entrée de jeu, l’alien la dépeint comme "plus brillante que toute la lumière de la galaxie" (ben voyons, la surenchère devient toujours plus incontinente à chaque numéro, les superlatifs vont finir par manquer...), et lui offre en cadeau un "boite magique"... qui déploiera par la suite devant son village médusé le firmament (car il parait qu’en ce temps-là, il n’y avait pas encore d’étoiles dans le ciel) ! Après un tel exploit, elle deviendra bien entendu exploratrice et reine (c’était en effet le minimum).
En somme, à moins de chercher à enseigner aux enfants que les points iridescents de la voûte céleste ne sont que des guirlandes décoratives, ce faux conte en arrive à imputer symboliquement à la lumière-des-lumières prédestinée Mary-Sue-par-procuration la genèse du cosmos lui-même !!! Rien que ça ! Le complexe de Dieu hantait déjà les coulisses de la seconde saison de DIS, voilà que ce Short Treks nous explique que c’était dans l’ADN métapsychique de l’héroïne.

Short Treks 02x05 The Girl Who Made The Stars ne manque pas d’esthétique graphique et il est construit en métalepse (une fiction dans la fiction). Mais sa prétention initiatique est totalement vide de signifiance et de portée, même à l’aimable attention des mioches en très bas âge.
Pire, l’épisode est susceptible de dévoyer le paradigme initiatique en insufflant vanité et messianisme...
Il constitue surtout une désagréable piqûre de rappel quant à l’un des pires travers de Discovery : l’électivité cosmique de super-Mary Sue... qui s’étend depuis le berceau jusqu’aux contes fabriqués sur mesure pour sa glorification personnelle à travers tous les univers mentaux.

Fatalement, un traitement animé plus sérieux et prétentieux appelle un jugement à l’avenant, au contraire d’un opus délibérément décalé et cartoonesque comme le précédent.
Mais c’est surtout l’inévitable exercice de comparaison qui sera fatal.
Métalepse pour métalepse, des VOY 05x05 One Upon A Time et VOY 06x25 The Haunting Of Deck Twelve renvoient Short Treks 02x05 The Girl Who Made The Stars dans les tréfonds de la non-existence.
Et sur les univers sombres, il suffit par exemple de songer à Doctor Who 31x13 The Big Bang (une SF pourtant très light), au Pays roux de Florence Magnin, au Pays sans étoile de Pierre Christin (et indirectement à TOS 03x10 For The World Is Hollow And I Have Touched The Sky)… pour constater que ce thème fort chargé n’appartient pas forcément au registre de la fantasy et qu’il n’implique pas obligatoirement de massacrer les fondamentaux scientifiques.

Parler aux enfants est très estimable. Mais à condition de ne pas les confondre avec des demeurés.

Short Treks fait office de salle d’attente entre deux saisons pour justifier les abonnements à CBS All Access. Mais cette filler serie aura eu malgré elle le "mérite" de révéler en creux – et présentement par apagogie – à quel point l’univers bancal de Discovery s’avère moins indigeste sans sa Mary Sue.
De quoi appréhender plus que jamais une overdose aigüe de Burnham-centrisme dans la saison 3…

1/5 au lieu de 0, juste pour la forme.

YR

ÉPISODE

- Episode : 2.04 - 2.05
- Titre  : Ephraim and Dot - The Girl Who Made The Stars
- Date de première diffusion : 12 décembre 2019 (CBS All Access)
- Réalisateur  : Michael Giacchino (2.04) - Olatunde Osunsanmi (2.05)
- Scénariste : Chris Silvestri & Anthony Maranville (2.04) - Brandon Schultz (2.05)

BANDE ANNONCE







 Charte des commentaires 


Star Trek Strange New Worlds : Critique 2.10 Hegemony
Star Trek Strange New Worlds : Critique 2.09 Subspace (...)
Star Trek Strange New Worlds : Critique 2.08 Under the Cloak of (...)
Star Trek Strange New Worlds : Critique 2.07 Those Old (...)
Star Trek Strange New Worlds : Critique 2.06 Lost in (...)
For All Mankind : Un renouvellement stratosphérique pour la série (...)
Captain America - Brave New World : Un film Marvel 10 fois plus (...)
The Walking Dead - The Ones Who Live : Critique 1.05 (...)
Chucky : Critique 3.06 Panic Room
Star Trek : Le baiser entre Kirk et Uhura, et le passage à vide (...)
Le Déserteur : La critique
Le Clan des suricates : Le prochain Happy Feet de Warner Bros (...)
Dr. Odyssey : Don Johnson consulte sur ABC
Nous les Contactés : la critique
Fallout - Le Jeu de Rôle : La critique de L’Hiver (...)