Star Trek Discovery : Review 2.07 Light and Shadows
À mi-saison, il était temps de retourner sur Vulcain à la recherche de Spock, l’Arlésienne de la saison 2. Alors que le mystère de l’ange rouge reste entier, Michael décide de prendre congé du Discovery pour rendre visite à sa famille vulcaine, bien décidé à questionner sa mère Amanda. Pendant ce temps-là, l’équipage essaye de comprendre le lien de l’ange avec le voyage dans le temps.
Au début du visionnage, mon œil a été attiré par la durée de l’épisode, soit à peine 40 minutes. Mon ressenti négatif des deux derniers épisodes est pour beaucoup dû au fait que l’histoire présentée chaque semaine n’a pas assez de temps pour être développé correctement. Les scènes s’enchaînent sans liant, les personnages semblent ne jamais avoir le temps de réfléchir aux conséquences de leurs actions et, pour ma part, cela enlève toute crédibilité à l’action. Et c’est également le cas cette semaine, même si j’ai plus apprécié les développements de cet épisode.
Et d’abord parce que Spock arrive enfin à l’écran. À la base, je n’ai pas de soucis existentiel sur l’appropriation par un autre acteur d’un personnage iconique. J’ai aimé la proposition de Zachazy Quinto. Je ne demande qu’à aimer celle d’Ethan Peck. On va dire que Light and Shadows ne permet pas franchement de se faire une opinion, le pauvre Spock étant loin de son état normal. On va donc attendre un peu plus pour juger.
On peut par contre jauger sa famille vulcaine totalement dysfonctionnelle. Pas besoin de franchir des années-lumières pour voir des familles où les membres ne peuvent/veulent pas se parler, beaucoup de familles terriennes sont dans la même situation que la famille adoptive de Michael. Ce ne sont pas les différences culturelles entre les deux civilisations qui vont arranger cette situation qui semble tellement irritante pour Sarek, que celui-ci a sa logique qui défaille. On ne me dira pas, étant donné sa position, que celui-ci ne sait pas que la Section 31 de Starfleet est certainement le dernier endroit pour y envoyer son fils.
Et cette petite visite à la section 31 est bien symptomatique du manque de temps qu’a la série pour développer son histoire. Aussitôt arrivé, aussitôt reparti, on se demande bien pourquoi y aller, si ce n’est pour affiner le changement de caractère de Philippa Georgiou toujours dans le but de la transformer en héroïne pour la future série télé. Point positif, le petit combat entre Michael et Philippa pour une fois fort bien chorégraphié.
Reste l’autre fil scénaristique de la semaine, le Discovery qui fait joujou avec une anomalie temporelle en orbite de Kaminar. Soupir quant à l’attitude de cowboy de Pike et ce qui fait que tout le monde dans ce vaisseau n’a qu’un but dans la vie, se mettre en danger sans réfléchir une seconde. J’ai par contre beaucoup aimé visuellement l’ensemble des scènes et particulièrement la sonde qui semble avoir fait un stage chez les sentinelles de Matrix.
L’accroche de l’épisode de la semaine prochaine semble confirmer la piste des Talosiens et le lien qui lie ce peuple à Pike. J’espère juste que les scénaristes ne vont pas se prendre trop les pieds dans le tapis de la continuité trekienne...
FM
La grande frustration laissée par DIS 02x06 The Sounds Of Thunder ne sera hélas pas rédimée par DIS 02x07 Light And Shadows. Car si ce dernier bénéficie bien d’une unité de lieu (l’orbite de Kaminar), il se désintéresse totalement du sort des Ba’uls et des Kelpiens, à dire vrai comme si l’épisode précédent ne s’était jamais produit, ce qui est le comble pour une série vendue comme le fer de lance de la sérialisation.
Au lieu de cela, DIS 02x07 Light And Shadows (correspondant en chronologie de production à l’éviction de Gretchen J Berg et Aaron Harbert au profit de Ted Sullivan et Michelle Paradise) accentue le sentiment de fuite en avant consistant à ne livrer qu’une multitude de bribes suggestives... au risque de passer pour une longue bande-annonce... avec pour seule densité celui l’accumulation pondérale. Ainsi l’épisode ne se déploie pas autour d’une histoire A et B, mais empile une dizaine de fils d’intrigues incomplètes dans un patchwork dispersé.
Alors afin de démêler un peu cet écheveau, il peut être instructif de reconstruire cette narration éclatée autour de deux axes principaux : d’une part l’aventure de Burnham, et d’autre part l’aventure de l’équipage de l’USS Discovery.
Un seul témoignage subjectif de Saru... devient une confirmation objective aux yeux de Burnham : le Red Angel vient du futur, et il porte une exosuite. Une opportunité pour ces diégèses "pseudo-profondes" qu’aime à mettre en exergue Discovery par la voix de Mary-Sue : « les mystères viennent par trois : naissance, vie, mort… ou passé, présent, futur ». Une dialectique trinitaire ?
Après que Burnham a été autorisée par Pike à partir en solo sur Vulcain (nous y reviendrons plus bas), l’USS Discovery demeure en orbite de Kaminar pour étudier les résidus laissés par l’Ange rouge suite à son intervention de deus ex machina dans l’épisode précédent.
Puisque l’analyse oculaire de Saru est désormais devenue une vérité universelle (il est officiellement entériné que le Red Angel est un voyageur du futur en combinaison mécanisée), Starfleet veut maintenant savoir de quel "futur" il vient ! Un étonnant challenge pour une ère qui n’a pas encore inventé le voyage temporel...
Saru annonce que les senseurs du vaisseau ont détecté le même pic de tachyons que l’amiral Cornwell après la mission sur l’astéroïde (dans DIS 02x01 Brother, soit 5 000 particules par micron cube, densité digne de supernova ! Sylvia Tilly en profite pour nous gratifier de son inénarrable humour : « Amazing ! Vous m’interdisez de jurer, mais ous savez ce que me font les viols de causalité ».
Et lorsque Pike demande ce qui peut générer autant de tachyons, Sylvia lui répond : « une technologie qui n’a pas encore été inventée ! ». La série confond visiblement la continuité causale avec le joker de la case manquante (mais mentalement remplie). Donc on assume pour la forme que la technologie n’existe pas encore, mais l’on adopte néanmoins tous les comportements qui résulteraient de son existence. En somme, le respect de la lettre mais pas de l’esprit. Une posture qui révèle à quel point les auteurs n’assument pas les implications de situer DIS avant TOS alors que tous leurs réflexes d’écriture – tels autant d’actes manqués – les portent irrésistiblement vers une période temporelle post-Nemesis. Passant du coup à côté de l’un des plus intéressants défis conceptuels véhiculés par la SF, et a fortiori par un prequel, à savoir la complexe étude psychosociologique de toutes les "premières fois", notamment face aux révolutions coperniciennes et aux technologies de rupture.
Saru tente bien d’envoyer une sonde dans ce qui apparaît être une faille temporelle time rift (comment parviennent-ils à l’identifier d’ailleurs ?), mais les tachyons perturbent les systèmes de contrôle.
Il est dit que l’ordinateur n’aime pas les distorsions temporelles ! Mais en a-t-il déjà fait l’expérience ?
C’est alors que l’on assiste à un "dédoublement" sur la passerelle, ou plus exactement à un "écho temporel", qui pourrait aussi bien être un clin d’œil au phénomène de la temporal chamber dans le Suliban Helix d’ENT 01x01+01x02 Broken Bow… qu’au hiccup dans TNG 01x24 We’ll Always Have Paris.
Ayant été pilote d’essai (sa spécialité originelle) et s’estimant le plus qualifié à bord cette fonction, Pike lancera finalement lui-même la sonde au moyen d’une navette... au plus près de l’anomalie.
Tyler apostrophe alors Pike en le sommant de rendre des comptes sur le départ imprévu et précipité de Burnham (« I wasn’t informed »), jouant de sa qualité d’agent de liaison de la Section 31 pour toutes les affaires relatives à la traque de Spock. Mais Pike lui rétorque « Chairs outranks the badge » (même lorsque celui-ci est noir).
En prenant l’ascenseur (qui traverse de gigantesques espaces vides et mécanisés au point d’évoquer un cube borg) en direction du hangar à navette, quelques échanges s’ensuivent, Pike questionnant Tyler sur ce qui reste en lui du Klingon Voq ayant assassiné le Dr Hugh Culber, avec pour seule réponse : « Désolé, il n’y a aucun moyen de se débarrasser de lui » (contredisant au passage certaines assertions antérieures et certains gages donnés par Ash après sa "réconciliation" avec Michael).
Le capitaine et l’agent de la Section 31 s’embarquent finalement ensemble sur la navette 5. Leur cohabitation s’annonce difficile, mais à n’en point douter, elle sera psychologiquement résolutive et consolidante, tel un écho de l’excellent ENT 01x16 Shuttplod One... mais sans l’introspection ni le huis clos spatial.
On parle sur l’USS Discovery de "fractal scans" (ça veut dire quoi au juste ?). Tandis que la navette s’approche, toujours pas d’effet temporel à 600 km. Tilly parle alors humoristiquement "d’ivresse temporelle" ("time bend"). Mais d’où lui viennent ces connaissances, qui ne peuvent résulter que de l’empirisme ?
Sylvia ne peut s’empêcher d’en rajouter une couche : « Everything’s cooler with "time" in front of it »… flirtant avec l’autoparodie et le trendy… mais qui n’est guère crédible face à une situation inédite devant laquelle les personnages devraient avoir la peur au ventre, au minimum préoccupés et concentrés. Mais le geek-branchouille-qui-ne-prend-jamais-rien-au-sérieux est bien plus vendeur.
Mais un jeu de mot en appelle un autre, venant cette fois de Pike : « Oh getting readings off the rift. … Time rift »
On entre alors dans le vif du sujet : une même transmission de Pike est démultipliée trois fois, ce qui témoigne du début d’une distorsion temporelle. À ce moment-là, Pike détecte un écho de lui-même de son propre futur (puisque n’a pas encore eu lieu) tirant sur Ash dans la navette…
Pike donne alors l’ordre à Tyler d’envoyer immédiatement la sonde et de s’éloigner de l’anomalie. La sonde est envoyée, mais finalement la faille temporelle avale la navette, et l’entrée de la sonde provoque une onde de choc temporelle (quid ?) qui menace même l’USS Discovery.
Les senseurs du vaisseau ne répondent plus, et alors Saru proclame que la nature de la mission a changé, de la recherche au sauvetage (« from research to rescue »). Il ordonne à Tilly de calculer désormais les variations de tachyons manuellement (en quoi serait-ce plus efficace ?). Il ordonne aussi d’étudier le mécanisme – ou plus exactement la dynamique – de l’anomalie afin de détecter les déviations (provoquées par la navette disparue).
Las radiations seront fatales aux passagers de la navette dans 5 heures.
Ce n’est pas « où » mais « quand » qu’il faut les chercher précise Saru, estimant que le temps ne s’écoule pas de façon linéaire dans la faille temporelle. Ce à quoi Tilly ajoute que c’est comme dans un blender (ah l’humour de Disco).
C’est alors que « eurêka » : Saru se souvent de l’épisode DIS 01x07 Magic To Make The Sanest Man Go Mad (avec Harry Mudd et son engin temporel anachronique) où Stamets révélait une forme d’hyperlucidité envers les altérations temporelles... car le DNA du tardigrade le protégerait des distorsions temporelles ! Ressort narratif digne de Marvel (et des X-Men) où chaque super-héros dispose d’un super-pouvoir unique. Donc fatalement, Stamets détectera quelque chose qui échappe aux autres...
Les deux "naufragés du temps" découvrent que le signal qui les avait conduit (dans l’épisode précédent) sur Kaminar a disparu. Dès lors, Pike en déduit qu’ils ne sont plus à leur époque, allant jusqu’à sortir une phrase très conceptuelle (« Traveling through past, present, futur, all at once ») mais qui ne signifie pas grand-chose sauf à disposer d’un savoir sur les voyages temporels et autres anomalie que n’avait même pas l’équipage de l’USS Voyager à la fin de son périple.
Toujours en grand expert, Ash lui répond : « si la faille temporelle se referme, nous ne passerions pas l’éternité ensemble, car l’éternité serait de courte durée ». Mais comment sait-il cela ? Même au 24ème siècle, nul ne savait interpréter avec précision les anomalies temporelles, qui pouvaient d’ailleurs être d’une variété considérable (en genre, en nature, et en effets). Par exemple dans VOY 03x04+03x05 Future’s End, une anomalie qualifiée de la même façon avait simplement pour effet de propulser le voyageur imprudent à d’autres coordonnées spatio-temporelles lorsqu’elle se refermait.
Et pourquoi Pike assume-t-il que l’USS Discovery devrait suivre la navette dans la faille temporelle ?! Pour entraîner l’équipage dans le même piège ?!
C’est alors que Pike a l’idée de lâcher le plasma des nacelles trois fois à cinq minutes d’intervalle, le moteur embrasant alors le carburant...
Ash refuse en premier lieu d’obéir, en répétant tel un refrain que toutes les décisions de Pike sont motivées par sa culpabilité de n’avoir pas participé à la guerre contre les Klingons, ce qui non seulement relève de la plus médiocre des psychologies de comptoir... mais qui en outre est d’autant plus inapproprié dans une situation de péril extrême dans laquelle les personnages ne maîtrisent rien, et où agir est toujours un moindre mal que d’attendre la mort sans rien faire. Pour la première fois, Pike affirmera son autorité en haussant le ton et menaçant Tyler de l’emprisonner à son retour puis de le traduire en cour martiale s’il refusait d’obéir à un ordre direct.
De son côté, Saru attend visiblement de Stamets qu’il calcule une trajectoire en utilisant le réseau mycélien comme constante, ce qui serait un jeu d’enfant grâce à l’ADN du tardigrade ajoute Tilly. Des super-pouvoirs comicsiens, on glisse progressivement dans la facilité de la fantasy… comme presque dans chaque épisode depuis le début de la saison 2. Une impression renforcée par le peu de sérieux avec lequel Tilly traite les sujets prétendument si bien maitrisés par elle. Stamets répond qu’au-delà de l’horizon des événement (un vocabulaire de gater mais guère compatible avec le sens de cette expression dans les sciences réelles) : « time exists all at once ». Là encore, comment le sait-il, puisque le voyage dans le temps n’a pas encore été inventé ? Et si cette affirmation était vraie, ce serait un principe entropique, donc non réversible (comme de récupérer intègre quiconque ayant passé ledit horizon ?). Mais qu’à cela ne tienne, on recycle ici une formule humoristique et allégorique employée par Scotty-Pegg dans Star Trek 2009 lors de son premier emploi de l’équation du transworp beaming révélée par Spock-Nimoy : « The notion of transwarp beaming is like trying to hit a bullet with a smaller bullet, whilst wearing a blindfold, riding a horse. ». Ce qui donne ici : « Les trouver sera semblable à saisir un grain de sable dans un ouragan avec une pince à épiler ». Et aussitôt l’impossibilité posée, aussitôt le problème résolu. Car comme dans les films Kelvin, les pires problèmes sont solutionnés par la seule "martingale du fun".
Lorsque la stratégie de Pike s’avère fonctionner tandis que la navette se rapproche de l’ouverture de la faille temporelle, Tyler vient une nouvelle fois le brocarder avec une immaturité risible (et paranoïde) : « vous rêviez de cette situation désespérée, avec un gros enjeu, une possibilité de survie minimale, et l’occasion de me faire crever avec vous ».
À l’extérieur de l’anomalie temporelle, la passerelle de l’USS Discovery repère les résidus des trois combustions de deutérium. Saru s’étonne : « pourquoi donc bruler en vain du carburant dont on a besoin ». Le lieutenant Gen Rhys lui rétorque : « c’est un truc que tous les pilotes apprennent à l’académie pour se faire repérer des secours ».
Et voilà comment, une fois de plus, Discovery vole sans complexe à TOS une inhérence, quelque chose que la série originale était supposée avoir apporté à la grande Histoire, et qu’un prequel respectueux ne se serait jamais permis de lui piquer… et pire encore, en l’érigeant en système normalisé. À savoir la façon dont la navette commandée par Spock se signale en orbite de Taurus II à l’USS Enterprise sur le départ à la fin de TOS 01x13 Galileo Seven.
Grâce à ces relevés plasmiques, Stamets détermine la trajectoire non pas en 3D mais avec les mêmes coordonnées que dans le mycelial network, ce que Tilly qualifie de 4D (donc le mycelium serait une quatrième dimension ?). L’occasion d’une blagounette puante de plus où Sylvia se targue d’être "nulle en 4D" (comparant les vecteurs 4D sur l’écran à du parmesan !) tandis que l’astromycologue la complimente sur "la perfection de ses maths" (sous-entendu de ses calculs). Que serait un "petit génie" s’il n’était pas avant tout "fun" dans chaque réplique ?
Sur le diagramme affiché de Stamets, il apparaît que le premier embrasement de plasma date d’une semaine, le second d’une heure, et le troisième aura lieu dans huit minutes. Car oui, l’ingénieur l’affirme : dans la faille, le temps n’est pas linéaire, il est complexe, avec des courants fonctionnant comme de l’eau en tourbillon. Une fois de plus, la question qui saute à l’esprit du spectateur, c’est : mais comment savent-ils tout ça sur les mécanismes temporels ? Alors que faute d’avoir encore inventé pareille technologie, ils ne sont pas supposés l’avoir expérimentée (ni même pouvoir en détecter les effets aux instruments) ?! Comment Stamets a-t-il simplement réussi à détecter les coordonnées spatiotemporelles d’un signal qui ne s’était pas encore produit ? Et si vraiment la faille est une superposition indiscernable du passé, du présent, et du futur (tout en même temps quoi) comme l’épisode tente de nous le vendre, comment se fait-il que les trois signaux plasmiques transmis par Pike soient aussi proches du présent ? Etant donné l’étendue du timeframe possible, la probabilité aurait plutôt voulu qu’ils soient localisés à des millions d’années dans le passé ou dans le futur...
Constatant que la navette se dirige vers la sortie, Stamets s’en inquiète ("not good"). Et pourquoi ça ? Dans une distorsion temporelle, le cerveau humain perd la notion d’espace (là encore, comment Stamets le sait-il ?). Mais illumination soudaine : l’ADN de tardigrade immunise contre un tel effet ! Rien de bien nouveau, puisque c’est précisément pour ça que Saru avait fait appel à Stamets en milieu d’épisode…
Devant l’urgence de la dérive de la navette vers la sortie (on ne sait toujours pas pourquoi c’est problématique), et les coordonnées du prochain embrasement (pratique de connaître le futur), Stamets se propose de rejoindre la navette en téléporteur… car son ADN amélioré pourra lui permettre de la piloter jusqu’à la sortie (donc il admet implicitement qu’il faut bien en sortir). Bien sûr, calculer une téléportation depuis l’USS Discovery vers une navette en pleine distorsion temporelle étonne Tilly, mais Stamets lui répond que grâce à ses capacités génétiquement supérieures, ce n’est pas pour lui une distorsion temporelle mais une anomalie temporelle (intéressant, car même au 24ème siècle, cette distinction entre méronyme et holonyme n’avait rien d’actée).
Mais alors… s’il est possible de se téléporter à un moment et à endroit précis dans la navette, il devrait être tout aussi possible d’en téléporter Pike et Tyler (la téléportation a toujours été dans Star Trek une technologie symétrique ou commutative, si cela marche dans un sens, cela marche aussi dans l’autre). Car l’objectif est ici de sauver le capitaine et l’agent de liaison de la Section 31, et non la navette n°5. Mais apparemment, profiter de cette fenêtre spatiotemporelle connue à l’avance pour directement téléporter à bord les deux portés-disparus ne traverse l’esprit de personne (la question aurait de même pu être évoquée le temps d’une ligne de dialogue).
Bref, le temps presse, car dans une minute, la navette "sort de la zone de triangulation", pas le temps de téléporter un PADD (au passage, le PADD était le nom des tablettes au 24ème siècle pas au 23ème), Stamets doit héroïquement y aller lui-même. Et tandis que Sylvia lance la téléportation à contrecœur et avec beaucoup de perplexité, l’ingénieur lui délivre une leçon de sagesse et de flagornerie essentielle : « croyez les maths », « croyez en vous », et « je ne voudrais que personne d’autre me téléporte dans le temps » (ok, donc désormais, les personnages de la série considèrent qu’ils ont les moyens de voyager dans le temps).
De son côté, Tyler découvre que le châssis de la sonde upgradée dispose de matériaux inconnus (absents du tableau périodique des éléments), tandis que son noyau a vieilli de 500 ans (vraiment très performants les senseurs de la navette). Pike en déduit qu’elle revient du futur (un raisonnement un peu rapide, d’autant plus que cela signifierait que soit elle a mis 500 ans pour faire ce voyage par le chemin temporel le plus long, soit elle a séjourné un demi-millénaire dans le futur…). Cette sonde "améliorée" se révèle désormais dotée d’une intention propre (ou du moins d’un programme très agressif), et elle dispose même de multiples bras extensibles articulés (façon cyber-poulpe) qui convoque tout l’imaginaire collectif cauchemardesque des squidbots Sentinels de Matrix. Une nouvelle fois (on ne les compte désormais plus), l’épisode s’approprie sans aucun complexe des ressorts des opus TOS 02x08 The Changeling (la sonde Nomad) et Star Trek The Motion Picture (la sonde V’Ger) qui reviennent considérablement "augmentées" chez leurs expéditeurs respectifs. Mais en y appliquant le procédé copyrighté Kelvin… c’est-à-dire en beaucoup plus rapide, en beaucoup plus superficiel, et en beaucoup moins crédible. Et du coup, les aventures vécues par les personnages de TOS prennent un coup de vieux, devenant rétrospectivement banales voire quelconques.
Afin de s’en protéger, Pike active des external shielding, à savoir de véritables volets matériels qui se déploient sur la coque de la navette, un procédé ressemblant beaucoup à une technologie qui n’existait même pas nativement au 24ème siècle et que l’amirale Janeway aura rapporté du 25ème siècle (2404) dans VOY 07x25+07x26 Endgame.
Mais rien à faire, la sonde prend d’assaut la navette, s’amarre à elle, et réussissant à transpercer la coque, Ash sauve la vie du capitaine qui allait être scié en deux. Mais une des tentacules de la "Sentinel" s’empare de Tyler et s’apprête à l’étrangler. Conformément à la scène dont il fut témoin en écho précog (au moment d’entrer dans la faille), Pike sauve la vie de son subordonné en tirant au phaser sur l’agresseur mécanisé… qui alors lâche sa proie… pour se planter dans le tableau de bord de la navette et en télécharger les données. Une opération que nul ne réussit à interrompre.
Téléporté à bord de la navette dix minutes dans le futur (il s’agit donc bien de téléportation temporelle, quelque chose qui ne sera accessible qu’à partir du 24ème siècle dans DS9 03x11+03x12 Past Tense), trouvant les deux rescapés un peu grogs, Stamets prend la direction des opérations, annonçant qui va les sortir de la faille, la réseau mycélien étant sa roadmap.
En à peine trois secondes à l’écran, l’astromycologue sort la navette de l’anomalie. Pratique ce mycelial network, véritable couteau suisse multi-usages, qui n’est désormais plus le MacGuffin de la première saison, mais qui tient maintenant de la baguette magique, permettant de changer d’univers, de voyager entre les dimensions, de sauter instantanément vers n’importe quel point de l’univers, de ressusciter les uns, d’offrir de super-pouvoirs aux autres, et même de mieux maîtriser la mécanique temporelle et le voyage dans le temps... qu’un siècle après sa découverte ! Reste-t-il encore quelque chose du "paradigme SF" devant une forme de magie aussi extensible ?
Au passage il faut noter une autre incohérence patente : si Stamets a mis à profit la localisation spatiotemporelle du troisième et dernier embrasement de plasma (sis dans le futur immédiat pour l’USS Discovery mais dans le passé pour la navette) pour se téléporter, c’est avant (et non après) l’attaque de la sonde que l’ingénieur aurait dû se matérialiser. Exactement le type de corollaire d’une mécanique temporelle bien comprise que jamais les épisodes historiques de Star Trek ne négligeaient. Mais n’est pas Brannon Braga qui veut…
Bref, aussitôt sortis de l’anomalie, mais toujours sous la prise de la sonde tentaculaire téléchargeant les données de la navette (mais aussi à distance celles du vaisseau-mère…), Stamets demande à l’USS Discovery de la détruire. Difficile, d’autant plus que celle-ci drague de nouveau la navette vers la faille…
Impossible non plus de lancer la téléportation depuis l’USS Discovery (en raison des perturbations et de l’éloignement). Mais il suffit que Pike lance sous quelques secondes l’autodestruction de la navette pour que Stamets calcule les coordonnées relatives par rapport au vaisseau et que finalement les trois équipiers soient rapatriés in extremis en téléporteur. La mort est un bel aiguillon, et la volonté suffit.
La sonde upgradée est détruite en même temps que la navette… au moment même où elle pénétrait le cerveau d’Airiam… confirmant sa nature au moins partiellement synthétique ou "androïdienne"… quitte à représenter une entorse de plus à la sociologie de TOS voire de TNG (par rapport aux Bynars de TNG 01x15 11001001 matérialisant un concept transhumaniste nouveau au 24ème siècle).
La destruction de la navette provoque néanmoins un tsunami temporel selon Sylvia. On ne sait pas ce que ça veut dire ni ce que ça implique (un concept jamais rencontré aux époques trekkiennes où le voyage dans le temps était inventé), mais les protagonistes semblent avoir les moyens techniques de détecter et de comprendre le phénomène. Suffisamment en tout cas pour se barrer sans demander leur reste en distorsion maximale… et sans même chercher à prévenir les Ba’uls (alors que ce phénomène intervient tout de même en orbite de Kaminar). Alors que dans les dernières images de la scène, le tsunami temporel atteint directement Kaminar, nul ne se soucie du sort des Kelpiens, pas même Saru…
Une illustration du degré d’inconséquence et d’amoralité d’une série qui se proclame pourtant hautement sérialisée (au point de culpabiliser les spectateurs qui osent porter un jugement individuel sur les épisodes…).
L’essentiel aux yeux des showrunners est que la proposition exclusivement soapy soit vérifiée. Ainsi, l’expérience commune au feu rapprochera un peu Pike et Tyler, chacun concédant à l’autre quelques torts (« vous aviez raison sur mes motivations » contre « vous aviez raison pour le plasma »). L’essentiel, quoi.
Au motif que la sonde upgradée a clairement révélé ses intentions hostiles (voire létales) et qu’elle est supposé venir du futur… comme le Red Angel (d’après la lecture oculaire de Saru), Pike en déduit par une curieuse transitivité que ce dernier pourrait également être malveillant (nonobstant toutes les vies sauvées jusqu’à maintenant).
Pike et Tyler en déduisent que quel soit le rôle joué par le Red Angel, les protagonistes sont désormais plongés dans un "combat pour le futur" (sic). Ambitieux...
Mais cette dernière remarque perdrait son ironie si d’aventure les showrunners de DIS préparaient une exhumation de la fascinante Temporal Cold War de la série Enterprise (l’Ange rouge serait-il alors une nouvelle faction ?).
Rembobinons, et revenons au début de l’épisode pour en explorer l’autre composante. Peu avant l’apparition de l’anomalie temporelle, Burnham obtient de Pike l’autorisation de partir sur Vulcain en navette. Aussitôt dit, aussitôt fait, c’est littéralement un déplacement instantané qui sied bien à un micro-univers. À l’instar d’Amanda qui visite sa fille sur l’USS Discovery dans DIS 02x03 Point Of Light) à peine le vaisseau revenu de 50 000 AL (suite à DIS 02x02 New Eden).
Visuellement, Vulcain est identique à la représentation de Star Trek 2009. Très high tech, un petit côté Coruscant… mais avec des arbres rouges. Aussitôt qu’elle met les pieds dans le domicile familial, entre la déco nordique minimaliste lagom (façon Ikéa) et le sémiotique 3D chess (de TOS), s’invitent des réminiscences mémorielles de son enfance (lors de sa première arrivée chez les Sarek). Mais contrairement aux flash-backs de la première saison, le jeune Spock y apparaît ici accueillant et bienveillant envers Michael.
Amanda accueille sa fille… tandis que Sarek est plongé en plein Tok’mar depuis qu’il a appris la situation de Spock, un rituel télépathique vulcain que Michael n’avait jamais vu son père pratiquer, et qui est destiné à "garder les âmes perdues".
Mais parce que Sarek est supposé posséder l’esprit le plus discipliné et logique, son échec à retrouver son fils impliquerait qu’Amanda saurait où celui-ci se trouve d’après Burnham ! La relation causale est à peu près digne du Kamoulox.
Mais finalement, il ne faudra pas grande insistance pour que Michael arrache la vérité à sa mère (au motif que comme elle lui a toujours dit la vérité, elle saurait immédiatement lorsqu’elle lui ment). Quoique refusant de livrer Spock aux autorités afin qu’il ne soit pas jugé pour un meurtre qu’il n’a pas commis, Amanda mène sa fille adoptive à la cachette. « Spock n’est pas comme tu l’as connu » prévient Amanda.
Elles arrivent toutes deux dans un temple rupestre, grotte décorée en façade et aménagée dans la montagne, où il apparaît que Spock psalmodie en boucle les First Doctrines of Logic (incluant tous les poncifs sur les raisonnements déductifs… et autres harmoniques des "bourrages de crânes" sorties des alcôves d’apprentissage de ST 2009). Ce qu’Amanda perçoit comme une bonne chose, signe que Spock "se restructurerait" selon elle. Michael est désemparée, Spock ne lui parle pas et ne la reconnait pas, tant il est enfermé dans une boucle mentale circulaire. Naturellement, elle réclame à cor et à cri un médecin, la nécessité de le conduire à l’hôpital. Spock dessine et grave dans la pierre des anges et des dragons, tout en répétant le nombre 841947 (qui demeure cryptique et inintelligible). L’ombre de la série Lost s’invite de plus en plus…
Amanda déclare que si Spock avait été entièrement vulcain, ces émotions l’auraient rendu fou ! Ah bon, les Vulcains sont-ils désormais plus fragiles que les humains ? Le Star Trek historique avait au contraire montré (et notamment VOY) que les Vulcains sont conduits à affronter et maitriser des violences émotionnelles biens supérieures à celles des humains...
Amanda : « je ne le livrerai jamais aux Lois de la Fédération, car en tant qu’épouse d’ambassadeur, j’invoquerai mon immunité diplomatique pour le protéger de l’extradition ».
« Sauf si l’ambassadeur objecte ». Comme dans un vieux vaudeville des familles, c’est bien sûr à ce moment-là que Sarek entre en scène, ayant subrepticement suivi Amanda, pour dévoiler le fin mot : Amanda a caché Spock dans une "crypte sacrée" remplie de katra stones… qui bloquent les contacts télépathiques, expliquant donc que le Tok’mar de Sarek se soit révélé inefficace. Mais ce qui semble si bien s’assembler une seconde durant… se désagrège aussi sec : car cela n’explique pas comment Amanda a réussi à trouver par ses propres moyens Spock, alors que celui-ci avait pris la fuite dans le cosmos en semant aussi bien l’USS Discovery que toutes les ressources de la Section 31, et comment elle a ensuite réussi à échapper au "radar télépathique" de Sarek qui s’était plongé en état de Tok’mar depuis qu’il a appris la fuite de Spock de la Starbase 5 (c’est-à-dire au moins au même moment que sa femme qui est alors allé rejoindre l’USS Discovery dans DIS 02x03 Point Of Light). Une fois de plus, la logique des relations de causes à effets et du déroulé des événements se tient dans Discovery... à la seule condition de ne surtout pas réfléchir un quart de seconde à ce que l’on nous montre.
Et c’est alors que débute l’un des plus médiocres psychodrames que la télévision ait mis en scène depuis le revival de Dynasty. Amanda, raille par anticipation le célèbre motto vulcain quant au "besoin du plus grand nombre"... En retour, Sarek reproche à sa femme son comportement impulsif et irréfléchi. Puis sa femme lui balance le couplet de l’épouse narcissique et de la mère incomprise de l’upper class US : « J’ai accepté cette vie par amour pour toi, et maintenant Spock en paie le prix, comme toujours », « j’ai tout sacrifié pour notre famille »…. On en rirait si l’épisode ne venait pas ainsi fouler aux pieds et sacrifier sur l’autel de la transposition la plus vulgaire tout ce qui pouvait rester d’exotique et d’alien dans la société vulcaine après le passage du rouleau compresseur Kelvin.
Mais la déchéance ne s’arrête pas en si mauvais chemin : Amanda révèle même que Spock souffrait dans son enfance de L’Tak Terai… que dans le suite de l’épisode le capitaine Leland rapprochera de la version vulcaine de la dyslexie humaine (contredisant au passage l’incipit d’Amanda qui présentait le syndrome comme une difficulté humaine et non vulcaine de lire et d’écrire). Considéré par Sarek comme un trouble temporaire vite corrigé au centre de formation, Amanda prétendra à l’inverse que les autorités n’ont jamais cherché à aider un demi-Vulcain pour le trouble d’apprentissage hérité de sa mère humaine… et c’est seulement en lui lisant (comme à Michael) Alice au pays des merveilles (car supposé valoriser des héros réussissant à survivre dans un monde Upside Down) qu’elle aurait réussi à guérir (?) son fils ! Et Amanda d’ajouter que Sarek n’a jamais respecté l’humanité, et que même s’il a épousé une Terrienne, jamais il n’aurait quitté Vulcain pour elle…
Cette scène de ménage ponctuée de nombreuses larmes (y compris du côté vulcain puisqu’on sait bien que depuis 2009 les Vulcains sont justes des humains comme les autres) laisse transparaître un festival d’inconséquences. D’une part, prétendre que l’on peut guérir un dyslexique seulement en lui lisant le plus célèbre roman de Lewis Caroll est une insulte envers ceux qui souffrent de ce TSA cognitif dans le monde réel (puisque DIS prétend asséner aux spectateurs de pesantes transpositions, elle mérite alors d’être jugée à l’aune de leur charge éthique). D’autre part, il n’est pas cohérent de tenter de faire croire rétrospectivement que le plus célèbre polymathe de TOS ait été un dyslexique. De tierce part, cette révélation d’Amanda est particulièrement incriminante envers les Vulcains, car cela pose une société encore plus raciste qu’au début de la série ENT, 110 ans plus tôt. En outre, une fois de plus, les auteurs semblent avoir oublié Sybok (Sarek avait bien épousé en premier lieu une Vulcaine, et après sa mort, ce demi-frère de Spock avait été élevé à ses côtés). Et enfin, l’obsession de Discovery à se placer sous l’égide emblématique d’Alice’s Adventures In Wonderland (que Sarek qualifie avec mépris de "book of chaos") est révélatrice de la façon bien peu science-fictionnelle dont les showrunners appréhendent Star Trek (et du peu d’estime qu’ils accordent à la culture vulcaine).
La dyslexie de Spock ? Un artifice inutile et invraisemblable juste destiné à créer du pathos.
Et allez, une dernière couleuvre pour la route. Avec la finesse d’un bulldozer et l’indifférence d’une IA, Sarek reproche mécaniquement à Amanda d’abriter un fugitif. Et tout en faisant grief à Michael de lui avoir caché que Spock avait un lien avec ces Anges rouges sur lesquels la Fédération enquête, il révèle la seconde suivante en savoir autant qu’elle puisqu’il exige que Spock soit immédiatement livré au capitaine Leland, prétendant que nul n’est plus motivé à guérir Spock que la Section 31 ! « Autant le livrer aux loups » proteste Michael. C’est alors que son père adoptif sort l’un de ses sophismes dont Discovery a le secret : « Ta carrière dans Starfleet sera de nouveau menacée si tu manques à tes engagements. Et je ne suis pas prêt à perdre mes deux enfants le même jour. » Wow !
La phrase conclusive de Sarek sonne tel un couperet… de théâtre. Car si réellement, des ambassadeurs peuvent échapper aux lois de la Fédération (comme affirmé juste avant dans l’épisode)… alors dans ce cas, il suffisait à Sarek de rester solidaire des intentions de sa femme et refuser de livrer Spock. Ce qui aurait totalement exonéré Burnham de toute responsabilité, et lui aurait évité de subir une nouvelle fois l’injustice d’une cour martiale stalinienne. Ainsi, cette dernière aurait rapporté officiellement sa découverte, aurait donc été félicitée d’avoir mené à bien une investigation où Starfleet et la Section 31 se sont révélés incompétents, mais sans être tenu pour responsable de ne pas violer l’immunité dont dispose les ambassadeurs de la Fédération. Et cette option n’aurait de toute façon pas privé Starfleet des bénéfices d’une investigation (mais dès lors uniquement intra-vulcaine) sur les connaissances que Spock pouvait détenir sur les Anges rouges…
Mais le comble de l’incohérence, c’est que c’est justement pour protéger sa fille que Sarek prétend livrer Spock ! Et non pas seulement à la justice de l’UFP ou à Starfleet, mais carrément à la Section 31… qui dans cette réalité-là a pignon sur rue, telle une bande de barbouzes mafieux bénéficiant de tous les passe-droits (ce que Sarek ne peut ignorer, pas plus qu’il n’ignore la provenance miroir de la plus proche collaboratrice de Leland). Alors, quitte à flirter avec le point Godwin, c’est un peu comme si – sans même être personnellement menacé ni légalement contraint – Sarek décidait de livrer de bonne grâce son fils à la Gestapo. Tellement trekkien.
En outre les opus TOS 02x15 Journey to Babel, ST IV The Voyage Home, TNG 03x23 Sarek avaient souligné toute la défiance de Sarek envers Sarfleet (et cela depuis l’enrôlement de Spock). Comment alors expliquer que l’ambassadeur offre si naturellement son fils en pature à l’antithèse dystopique, amorale, et belliqueuse de Starfleet ?
Mais dans un univers qui courbe à volonté ses lois naturelles, Sarek ne pouvait que remporter sa plaidoirie d’illogisme. Et Michael convoie elle-même Spock jusqu’au NCIA93, le vaisseau furtif de Leland.
Mirror-Georgiou se délecte que Michael ait manipulé sa mère pour mettre la main sur Spock (en faisant un parallèle avec sa propre mère qui serait morte assassinée trop tôt pour connaître une semblable humiliation). Les auteurs tentent ainsi d’offrir aux spectateurs de l’ironie à très bon marché au moyen d’un parallèle totalement sophistique… en escamotant le rôle inconséquent de Sarek dans cette issue, mais également l’invraisemblance de "Super-Amanda" qui avait réussi à trouver Spock par ses propre moyens, à le soustraire au nez et à la barbe de tous les cadors de l’UFP (y compris son télépathe de mari)… pour finalement tout révéler à la première supplique (pas même manipulatoire) de Michael.
Visiblement, la Fédération crypto-dystopique de Discovery est un magnifique terrain pour toutes les perversions de l’impératrice Terran Philippa Georgiou Augustus Iaponius Centarius, qui s’y sent de plus en plus comme chez elle. Kiffant pour les trekkers, il faut croire.
Leland déclare avoir promis à Sarek comme il promet à Burnham de ne pas faire de mal à Spock alors qu’il lance une opération sous anesthésie pour "corriger son activité neuronale", assurant que Control (qui pour la Section 31 de Discovery est un peu l’équivalent le M dans James Bond ou de Mother dans The Avengers) n’autoriserait jamais d’intervention risquée pour le demi-Vulcain. On est tout de suite rassuré.
Davantage encore lorsque le capitaine du vaisseau furtif annonce à Michael qu’elle ne peut pas l’accompagner dans les bases secrètes de la Section 31 si peu secrète, et qu’elle sera déposée sur la Starbase 23 à proximité.
Lorsque laissé un moment seul avec Spock inanimé, serrant le corps anesthésié de son frère, l’épisode assène de nouveau un de ses flash-backs tire-larmes, floculeux et mielleux... pour mieux exhiber les yeux de merlan frits de Mary-Sue. La série d’Alex Kurtzman confondant visiblement de plus en plus empathie et mélo.
Euréka, le mystérieux nombre 841947 devait être en fait inversé. La clef est en fait 749178. Oui, soudain tout s’éclaire… à la façon de Lost.
Surprise, Mirror-Georgiou intercepte Burnham dans une coursive et la prend en aparté dans un angle mort (après avoir désactivé les caméras durant 60 secondes) pour l’informer que l’engin que compte utiliser Leland sur Spock est un "extracteur de souvenirs" qui détruit au passage le cerveau. En premier lieu, Burnham est incrédule. Mais il suffira que l’ex-impératrice affirme qu’elle n’agit pas par "bonté de cœur" personnelle mais au nom la "bonté du cœur" de Michael (ajoutant la connaître mieux qu’elle ne l’imagine)… pour que Michael finisse par y croire. Non sans dissimuler un marché win win un peu plus réaliste : Michael y gagne Spock et Mirror-Philippa y gagne le discrédit de Leland. C’est tout de même le comble que la psychopathe à la tête du Terran Empire s’érige désormais en gardienne de la morale face aux agissements d’une division de Starfleet... même s’il s’agit peut-être à la base d’une manipulation (rien ne prouve que Leland s’apprêtait vraiment à lobotomiser Spock)... et même s’il est évident que Burnham se ment à elle-même (elle voit toujours en l’ex-impératrice un "reflet déformé" de sa mentor maternelle défunte, et réciproquement Cruella est affectivement attachée à Michael).
Pour crédibiliser l’opération, Burnham est supposé faire mine d’attaquer Mirror-Georgiou… Mais alors qu’il ne reste plus que dix secondes avant que les caméras ne se réactivent, l’épisode inflige une interminable et inutile chorégraphie de kung-fu, histoire d’exploiter ostentatoirement l’image de Michelle Yeoh, star de films d’action hongkongais… et quitte à sacrifier davantage une évasion déjà improbable.
Suite à quoi, telle une Lara Croft de Tomb Raider, Burnham dézingue à elle toute seule tout le personnel du vaisseau le plus high-tech de la Section 31, libère Spock après l’avoir vaguement ranimé, s’embarque sur une navette et prend la fuite… sans être inquiétée ni immédiatement poursuivie. Convainquant.
Il est évident qu’à chacune de ses apparitions, les showrunners tentent progressivement d’humaniser – ou du moins de normaliser au sens de la Section 31 – l’ex-impératrice pan-génocidaire du Terran Empire… en prévision du lancement du spin-off consacré à la Section 31 dont elle sera probablement l’une des vedettes. L’ennui, c’est que le procédé demeure une manipulation indécente pour qui possède un minimum de mémoire. Car cela revient littéralement à promouvoir un super-Hitler galactique… en tentant de faire progressivement oublier ses inexpiables crimes passés.
DIS 02x07 Light And Shadows s’achève par l’un de ces twists artificiels de fins d’épisodes que cultivait la série Alias, lorsque les "méchants" venaient se prévaloir entre eux d’avoir entubé les héros tout en ouvrant une nouvelle poupée gigogne. En l’occurrence ici, Mirror-Georgiou prend un peu plus l’ascendant sur Leland. Celui-ci dépité constate son impuissance à rattraper Burnham et Spock, tandis que l’impératrice lui montre qu’elle le tient par la barbichette (de super-vilain) en conservant par-devers elle ses petits secrets inavouables, empêchant notamment Burnham de découvrir qu’il est responsable de la mort de ses parents ! Un twist gratuit et cartoonesque… dans un micro-univers où tout tourne toujours autour des mêmes VIP.
Une flotte de vaisseaux de la Section 31 traque Burnham, mais la navette de celle-ci demeure dissimulée derrière un astéroïde. Tandis qu’elle déclame des vers prétentieux à un Spock toujours aussi nébuleux, l’ordinateur de bord décrypte la séquence 749178. Il s’agit des coordonnées de Talos IV, la "planète interdite" où s’est déroulée trois ans avant (en 2254) l’épisode TOS 00x01 The Cage et dix ans après (en 2267) TOS 01x15+01x16 The Menagerie.
Mais interdite ou pas, c’est bien sur la planète mère des Talosiens que Burnham met aussitôt le cap sans une seule seconde d’hésitation… au mépris du General Order 7 (qui condamne à la peine de mort quiconque s’y rend).
En terme de showrunning, il ne pouvait pas y avoir meilleure tactique pour faire le buzz. Les réseaux sociaux s’enflamment déjà...
Il ne se trouve plus un seul opus de DIS qui ne vient pas démolir – l’air de rien – des prérogatives et les inhérences de TOS. Tantôt, c’est la causalité des découvertes cybernétiques qui est violée (TOS 02x12 I, Mudd) par Short Treks 04 The Escape Artist. Tantôt, c’est tout le sens d’un épisode qui vole en éclat (TOS 01x19 Arena) pour une réplique fun de DIS 02x05 Saints Of Imperfection. Ici, c’est l’exploit d’un personnage principal de TOS 01x13 Galileo Seven… qui apparaît rétroactivement n’être qu’une norme, pratiquée par tous et même enseignée aux cadets de Starfleet ! Encore ici, c’est le concept de la sonde revenue modifiée (TOS 02x08 The Changeling)… qui perd rétrospectivement tout son caractère inédit. Et plus que jamais, c’est le voyage dans le temps... sur lequel Starfleet en sait bien davantage en 2257 que Scotty en 2266 lorsqu’il le découvre dans TOS 01x06 The Naked Time... et même que la plupart des héros du 24ème siècle trekkien !
DIS 02x07 Light And Shadows est par bien des côtés à l’image du précédent épisode DIS 02x06 The Sounds Of Thunder, où l’issue d’un fil rouge artificiellement teasé (et étiré) depuis des mois/années… se révèle saboté et ridiculisé durant son accouchement maïeutique.
Kaminar et les Kelpiens représentaient l’un des rares vrais sujets de fond depuis le pilote de la série DIS 01x01 The Vulcan Hello, or force est de constater que l’épisode précédent n’a eu aucune vergogne à réduire ce grand thème sociologique à une pirouette !
De même, la "recherche de Spock" s’étend depuis le début de la seconde saison, mais après avoir organisé une chasse à l’homme à travers la galaxie... c’est benoîtement sur Vulcain – quasiment chez sa maman – que le fugitif est retrouvé, qui plus est à l’état semi-végétatif !
La forme est meilleure que dans les trois opus précédents, bénéficiant d’une mise en scène plus structurée pour réussir à faire tenir en seulement quarante minutes autant de morceaux d’intrigues disjointes, gagnant dès lors chacune en lisibilité.
Malheureusement, comme le plus souvent, l’écriture demeure un facteur limitant. Et sur ce terrain malheureusement, l’épisode est une collection non-stop d’absurdités et de WTF...
Sans même chercher à respecter le Trekverse (qui est désormais une cause perdue), la série Discovery réussira-t-elle à être un jour simplement cohérente envers elle-même ? Réussira-t-elle également à se construire une véritable identité ?
Voila donc le parangon du filler episode, mais dans sa forme la plus dégénérée ou décomplexée, i.e. une systémique de transition perpétuelle. Car il réussit le tour de force de ne traiter d’aucun sujet, pour se contenter de repousser (et reporter) davantage tous ceux qu’il annonce ou tease. Tel un entrelacement embrouillé de jeux de pistes, ne se suffisant jamais à eux-mêmes, mais capitalisant exclusivement sur de sempiternelles espérances en devenir... et reposant sur l’amnésie de spectateurs à qui chaque nouvelle promesse toujours plus alléchante fera oublier les précédentes non tenues. Les amateurs de la série Lost seront probablement comblés, car c’est par ce type de procédés à la fois zappeurs, "allumeurs", et manipulatoires que celle-ci aura réussi à tenir en haleine ses fans durant six saisons. En somme, une bulle spéculative de crédit qui, à défaut d’offrir de la substance, augmente la mise et surenchérit un peu plus à chaque fois... Mais attention, la chute n’en est que plus douloureuse.
1/5 (Très faible certes, mais contrairement aux apparences, ce n’est pas la note la plus basse possible.)
YR
EPISODE
Episode : 2.07
Titres : Light and Shadows
Date de première diffusion : 28/02/2019 (CBS All Access) - 01/03/2019 (Netflix)
Réalisateur : Marta Cunningham
Scénariste : Ted Sullivan & Vaun Wilmott
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