Downsizing : La rencontre avec Alexander Payne

Date : 11 / 01 / 2018 à 09h00
Sources :

Unification


À l’issue de la projection du film Downsizing, le réalisateur Alexander Payne est venu répondre aux questions du public.

Voici la retranscription des échanges qui ont eu lieu. Vous pouvez aussi en visualiser la vidéo en fin d’article.

Attention, l’article ci-dessous contient quelques spoilers mineurs sur le film !

Downsizing, c’est vraiment un projet qui vous a passionné pendant plus de 10 ans. Qu’est-ce qui a déclenché chez vous cette solution tellement originale pour la surpopulation et le changement climatique ? Pourquoi pensez-vous que ce film est resté si longtemps dans votre esprit ?

D’abord, laissez-moi vous parler des projets passionnels. Je suis fatigué des projets passionnels. Cela m’a pris 11 ans pour faire ce film, entre la conception et l’exécution. J’y ai tellement pensé et ça a pris tellement de temps et tellement d’efforts, mais ça ne veut pas vraiment pas dire que le résultat est meilleur qu’un film sur lequel je n’aurais passé une année, que j’aurais fait plus rapidement. Les films sont vraiment drôles dans le sens où vous ne savez jamais à l’avance ce que cela va donner.

Qu’est-ce qui a suscité cette idée ?

Mon co-scénariste, Jim Taylor, a un frère complètement dingue qui s’appelle Doug, et Doug Taylor nous a dit « Vous savez, vous devriez faire un film sur des gens qui seraient comme ça, petits, et vous auriez de grandes maisons, pas tellement de dépenses alimentaires, et peut-être même qu’il y aurait un conflit entre les grands et les petits. Alexander, qu’est-ce que tu en penses ? ».

Je ne savais pas très bien quoi en penser, ça me semblait un peu bête. En 2006, j’étais en avion et, subitement, j’ai repensé à leur idée, et je me suis dit « qu’est-ce qu’il se passerait vraiment, comment est-ce qu’on pourrait encrer ça dans la réalité ? », et j’ai pensé « peut-être que les scientifiques scandinaves en rêveraient », comme une panacée pour la surpopulation, c’est comme ça que l’idée est venue.

Avec Jim Taylor avez-vous travaillé avec des scientifiques ou avez-vous décidé d’être vos propres scientifiques ?

Un peu les deux, plutôt la dernière solution. En fait, on a surtout inventé, on a essayé de deviner un peu ce qu’il pouvait se passer. On a un peu discuté avec un biologiste au sujet de quelles seraient vraiment les lois physiques si on devait être aussi petits et vivre petits comme ça. Plus tard, quand j’ai réalisé le film et quand je travaillais sur les effets visuels, avec le directeur des effets visuels, il fallait que je parle un peu plus des lois physiques de cet état. Mais on ne s’est pas tellement concertés… Qui s’en fout de la réalité ?

Le ton du film, le vôtre… C’est vraiment un ton très grave, et en même temps un ton plein d’humour, et drôle. Quelle était vraiment la recherche d’un équilibre très subtil qui fait partie de votre ADN ?

On m’a souvent posé la question « Comment obtenez-vous l’équilibre entre l’humour et le drame ? ». Il n’y a pas vraiment une manière de faire, je ne peux pas vraiment le décrire. C’est comme ça vient. Il n’y a pas de méthode.

Mais quand vous travaillez, ce processus de l’écriture, comment vous l’échangez entre vous ? Vous vous dites « tiens, on va aller dans ce sens ou dans cette direction » ?

D’abord, ça a été un processus très très long d’écriture, le scénario de ce film… Il y a eu 6 ans entre Sideways et The descendants, et c’était un peu pour cette raison, parce que je voulais que ce film soit mon nouveau long métrage après Sideways. Mais le scénario a pris tellement de temps. Et après on a eu beaucoup de mal aussi à trouver des financements, c’était presque impossible d’en trouver.

Sur un scénario, on ne se dit pas « Tiens, comment va-t-on faire ça ? ». Avec la distance, je peux vous dire « on a fait de telle ou telle manière », mais vraiment, c’est comme cela vient. La seule chose que je peux dire, et ce n’est pas une réponse complète à votre question, c’est que l’humour pour nous vient du fait de prendre un point de départ tout à fait absurde et de le traiter de manière très sérieuse. Et plus on est sérieux là-dessus, plus c’est drôle. Mais ce n’est pas une sorte d’humour qui vous fait éclater de rire, c’est un humour très intellectuel.

En fait, le film est assez dingue. Quels étaient les effets techniques et artistiques ? Vous pouvez nous parler des effets visuels auxquels vous avez fait face ? Parce que c’est la première fois pour vous que vous êtes face à des effets visuels de ce type.

Oui, merci pour l’adjectif brillant, car vraiment, je trouve ça brillant. C’est la première fois que je fais un film avec des effets visuels. C’est vraiment la première fois que j’utilise des effets visuels dans mon film. Ce que j’en ai appris, ce n’est pas que ce soit difficile, c’est simplement que ça prend énormément de temps. C’est très chronophage.

En tant que réalisateur, vous avez besoin d’un directeur pour les effets visuels, et moi, je lui ai dit « Explique-moi, apprends-moi à comprendre et fais-moi croire que je suis en train de faire un vrai film, c’est-à-dire sans effets visuels. ». Parce que la première chose qui souffre dans ces films, c’est la performance des acteurs et l’histoire. Et ça je ne voulais pas du tout que cela arrive pour mon film.

En ce qui concerne le processus des effets visuels, il y a 750 effets visuels dans le film… Un grand nombre a été fait autour de mon désir que les acteurs soient vraiment protégés. Et je voulais que les effets soient très bien et qu’ils soient crédibles à en devenir banals. Je voulais que le film ait l’air d’avoir été fait en 1978.

Autre chose par rapport aux effets visuels, au contraire des films d’action, ici, le plan séquentiel est assez long, et le public a le temps de détecter les imperfections, donc ça, c’était un défi de plus.

Je ne sais pas pour vous, mais une des images qui m’ont vraiment frappée, c’est cet espace où on rétrécissait les gens. Est-ce que vous avez donné des instructions à votre décorateur ?

Oui, j’ai dit qu’il fallait que ça ressemble à un grand four à micro-ondes.

C’est votre idée d’un four à micro-ondes ?

Et dans l’endroit où on les rase, on a construit tout le décor. Ça, c’est ma séquence favorite. Ce n’est pas une séquence d’effets visuels, c’est vraiment une séquence de décor, tout a été construit. Par la suite, quand on leur a arraché les dents, on a filmé ça dans une école de dentistes, à Toronto, au Canada.

Quand le film a été lancé au festival du film de Venise, on a dit que c’était une satire politique, un film de science-fiction, comment désigneriez-vous votre film ? Qu’avez-vous voulu explorer ?

Pour moi, c’est un film… Je ne fais pas de comédie ou de drame, je fais un film. C’est vrai, ce n’est pas à moi de mettre une étiquette sur mon film.

Si vous me posez la question, pour moi, tous mes films, même The Descendants qui est un peu déprimant, pour moi ce sont tous des comédies. Je suis à la recherche de l’humour et de l’absurde. D’autres personnes disent « Vous dites que c’est une comédie, mais ce n’est pas tellement drôle, c’est comme un drame un peu drôle. ». Cela m’est égal.

Ce que j’essaye de faire, c’est de diriger ce que je fais. J’aime les films qui sont charmants, et j’aime les films qui sont drôles. Souvent, je vois des films contemporains et on me dit « Qu’est-ce que vous en pensez ? C’est quoi pour vous ? ». Je dis : « C’était bien, mais il n’y a pas de blagues. » Je n’aime pas les films où il n’y a pas d’humour.

Vos films en ont, c’est sûr. Au travers du prisme de ce film, qu’avez-vous voulu personnellement explorer ?

Il ne s’agit pas « d’explorer ». Après Sideways, j’avais vraiment le besoin de faire quelque chose de plus ambitieux que ce que j’avais fait jusque-là, avec un peu de conscience politique. Comme c’était le cas dans mes deux premiers films, L’Arriviste et Citizen Ruth. Donc c’était ça que je voulais faire.

Donc, c’est comme ça que je le vois, vous appelleriez ça une histoire d’amour ?

Ça évolue d’une histoire d’amour durant la dernière heure pour devenir une histoire improbable. Au tout début, le personnage principal a deux relations qui sont fausses : avec sa femme, puis avec l’autre femme avec laquelle il sort. Vous savez, c’est vraiment la relation ridicule après un divorce.

Finalement, la troisième fois, il trouve la bonne personne sans la rechercher. Ça, c’est l’histoire d’amour qui nous a surpris. Même pendant qu’on écrivait le scénario, on n’y a pas pensé. Cette relation s’est imposée. Elle est apparue. Dans Sideways il y avait aussi une sorte d’histoire d’amour. C’est vraiment la première fois que j’ai vraiment tourné une histoire d’amour, et j’ai vraiment aimé ça.

Et vous avez créé un couple tout à fait improbable. Lui a vraiment voulu être rétréci, et la militante vietnamienne a été réduite contre son gré et amputée…

C’est une comédie.

Bien sûr, nous avons des acteurs que nous connaissons : Matt Damon, Christoph Waltz, Kristen Wig… Ce sont des acteurs internationaux, mais la Vietnamienne… Qu’est-ce qui vous a décidé à la caster comme étant la personne parfaite ?

À nous de trouver le bon acteur, et les dieux du casting m’ont envoyé Hong Chau. Qui est Hong Chau ? Elle est vietnamienne, née en Thaïlande de parents vietnamiens réfugiés. Ils ont émigré aux États-Unis quand elle était une petite fille et se sont installés dans l’état de Louisiane parce qu’il y a là beaucoup de Vietnamiens. Il y a là-bas une industrie de crevette, donc ils ont été à l’endroit où il y avait la même sorte d’industrie que celle dont ils avaient l’habitude.

Ses parents n’étaient pas pêcheurs de crevettes, mais ils tenaient une sorte d’épicerie où on trouve tout. Elle était la première de sa famille à aller à l’université. Elle a fait des études de cinéma, et aimait plus le cinéma que d’être actrice. En étant étudiante, elle jouait dans les films de ses amis. On lui a dit « Tu es vraiment très bonne ». Elle se disait « Ah bon ? ». Et après l’université, elle est allée à New York. Elle a pris des cours d’actrice, a travaillé un peu et la voici.

Je l’avais vue dans un film de Paul Thomas Anderson, Inherent Vice. Elle a un petit, mais mémorable rôle de prostituée dans ce film. Et puis, elle apparaissait dans des séries américaines que je n’avais pas vraiment vues, comme Big Little Lies.

Vous dites qu’elle vole vedette à Matt Damon ? Et c’est vrai

C’est le film de Matt Damon, mais Hong Chau arrive et on se dit « Qui est Matt ? ». C’est elle qu’on regarde !

Je pense aussi que celui qui vole la vedette à Matt Damon, c’est aussi Christoph Waltz !

Ma femme est ici dans le public. Quand elle a vu les premières images du film, elle a dit « Les gens vont adorer Christoph Waltz. S’il y a d’autres scènes, il faudrait les garder avec lui ! »

Dans une interview que j’ai lue et qu’il a donné, il a dit qu’il percevait son rôle comme celui d’un mentor. C’est comme ça que vous le conceviez aussi ?

Il a eu cette idée parce qu’il est plus âgé que Matt Damon. Avant de le rencontrer, j’avais rencontré des acteurs plus jeunes pour ce rôle. Mais, il n’aurait pas eu ce même point de vue. En fait, un acteur doit faire un choix une fois qu’il est casté : « Quel va être mon point de vue ? ». Et Christoph a décidé d’être le mentor de ce personnage. L’acteur fait des choix, il se dit « Je vais faire ça comme ça ! ». Et moi si cela me va bien, pourquoi pas. C’est une belle dynamique. Une fois que vous choisissez un acteur en particulier, vous le voulez pour la manière dont il va apparaître dans ce film.

Pendant l’écriture, est-ce que vous écrivez en ayant en tête un acteur ou une actrice, et est-ce que vous pensez à eux sans que ce soient ceux que vous allez finalement avoir dans votre film ? Ici, pour ce film, qui aviez-vous en tête quand vous écoutiez les voix de vos personnages ?

Pour Matt Damon, pour son personnage, je pensais à Paul Giamatti et Jack Lemmon. Pour Christoph Waltz à un ami serbe. Pour Ngoc Lan, je pensais à Gong Li, et le travail qu’elle faisait pendant les années 80. Mais ce n’est pas tout le temps comme ça. Parfois, quand vous écrivez un film, si vous avez du mal quelquefois, cela vous aide de penser à quelqu’un que vous connaissez, ou à un acteur, même s’il n’est plus en vie, parce qu’on se dit « Qu’est-ce que cette personne aurait fait, qu’est-ce qu’elle dirait ? ».

Vous avez aussi dit avoir toujours aspiré à faire un film de Robert Altman. Diriez-vous que ce film est celui qui se rapproche le plus à cause de sa structure ? Quel réalisateur vous a inspiré, quelle a été votre source d’inspiration ?

Celui-ci a été inhabituel. Pendant qu’on écrivait ce scénario, nous avions l’impression d’innover. On n’arrivait pas à comparer… Je ne suis pas en train de me complimenter, j’aurais bien voulu penser à un film.

En termes de structure, on ne voulait pas comparer ce film à d’autres grands films. Un des films qui m’a un peu aidé, parce que le scénario devenait tellement dingue, c’est l’un des premiers de Fellini, Huit et demi (La Dolce Vita), où on suit un seul personnage dans une série d’épisodes qui peuvent être très différents. Et le public peut se dire « Pourquoi je me retrouve là, qui sont ces nouveaux personnages que je rencontre et avec qui je dois aussi avoir une certaine relation ? », jusqu’au moment où, à la fin, il y a une sorte de révélation et il y a un focus sur le personnage, et là, on a un peu la sensation que c’est toute l’expérience accumulée pendant le film qui défile devant nos yeux.

Il y a une sorte de fil narratif qui devient très clair et très tendu. Là aussi, je ne suis pas en train de comparer mon film à ces films extraordinaires de Fellini, mais j’y puise beaucoup d’inspiration. Vous savez, moi, je m’ennuie… je n’ai pas besoin d’une structure avec trois acteurs. Fellini nous apprend, et Martin Scorcese aussi, qu’il ne faut pas réfléchir en tant que trois acteurs, un trio, mais en termes de séquences. C’est ce qu’on appelle la vie.

Je suis sûre que vous avez discuté de ce film avec vos acteurs, avant et pendant le tournage. Vous avez peut-être partagé avec eux des rêves ou des cauchemars. Est-ce que vous ou d’autres seriez contents d’être réduit à la taille d’une tablette de chocolat ?

Tout au début de mes interviews, on me demande « Est-ce que vous, vous rétréciriez ? », et moi, je suis là à réfléchir à une réponse intelligente, et je n’y arrive pas. Je ne sais pas, si j’aimerais.

C’est vrai que vos films, et celui-ci n’est pas une exception, sont toujours un peu curieux sur le plan émotionnel. Quelle est la scène qui vous a demandé le plus intellectuellement, ou celle qui vous a touché le plus, que ce soit pendant le tournage ou pendant le montage ?

Il y a une prise de Ngoc Lan, quand elle dit « Je vais aller en Norvège avec vous ». Ça, c’est vrai pour n’importe quel réalisateur au moment de terminer un film. Je l’ai vu des milliers de fois et n’ai pas besoin de le revoir pour le restant de ma vie. Mais cette scène, où on a capté sa performance quand la caméra se rapproche de son visage, elle l’a fait dès la première prise.

Chaque fois que je la vois, je me dis « Dieu merci, on l’a eue celle-ci ! ». Si le film n’existe que pour soutenir cette prise, ça me va très bien. Mais ça, c’est moi, peut-être que vous aimez autre chose dans le film. C’est un moment tellement excitant, tellement génial quand on a une performance extraordinaire.

Cela reflète tout le travail qui a été fait pour le tournage, tout le planning, le scénario, le casting, tout a été réfléchi pendant si longtemps, et quand ça arrive ça a l’air d’être tellement spontané !

Et on a l’impression que ça arrive pour la première fois, et c’est ce qu’on veut faire. J’ai dîné il y a un mois à Londres avec Ken Loach, le grand Ken Loach. Et il parlait de l’excitation du cinéma par opposition au théâtre. C’est de pouvoir… attraper des acteurs, des êtres humains qui réagissent à quelque chose pour la première fois et qu’on puisse le capter à jamais.

Il disait que c’est plus difficile quand on fait un film de fiction, quand on a répété et planifié les choses. C’est plus facile quand il n’y a pas de répétition, avec des acteurs qui ne sont pas des professionnels, ou avec un acteur qui improvise ses dialogues.

Et moi, je respecte Monsieur Loach, mais c’est aussi possible dans les films de fiction, si vous avez un acteur extraordinaire, et si vous arrivez à capter une des premières prises, et si le réalisateur ne s’en mêle pas trop. Vous savez, on dit que « le réalisateur doit toujours coacher l’acteur ». Non, en fait, le réalisateur doit choisir le bon acteur.

C’est le vieux cliché disant que 95 % du travail de la réalisation, c’est le casting. Et dans ce cas-là, moi, les dieux m’ont envoyé la bonne actrice. Dès la première prise, je ne lui avais rien dit avant cette prise, et elle était parfaite. Moi, je n’aurais jamais pu faire ça avec l’éclairage et la caméra, pouvoir livrer quelque chose, non pas qui avait l’air, mais qui était authentiquement spontanée, bien que ça avait été très répété.

Tout comme vous, Paul n’a jamais quitté le Nebraska et Omaha, là où vous avez grandi. Vous êtes toujours à Omaha, Nebraska, mais pour la première fois vous avez choisi des acteurs très internationaux. Est-ce que c’était très important pour vous ? Comment cela a alimenté votre vision ?

Oui, oui, je suis d’accord ! Le film commence petit et évolue, évolue, évolue beaucoup, prend beaucoup d’ampleur. Et pour moi, personnellement, vous l’avez dit, c’était important de pouvoir l’ancrer dans quelque chose de familier. Et ce qui, pour moi, c’était de tourner à Omaha. Je ne veux pas que tous mes films soient ainsi, mais d’une manière ce film est très lié à mes 6 films précédents.

Tous vos personnages sont sur le point de mourir, que ce soit dans Citizen Ruth, dans Monsieur Schmidt, dans The Descendants… Il y a beaucoup de morts physiques ou de morts sociales qui en fait vont lancer l’histoire ou l’intrigue, et là, c’est la même chose.

Monsieur Schmidt, The Descendants, Nebraska et ce film-ci ont cet élément. C’est une sorte de conscience de la proximité de la mort. Cette conscience vous fait réfléchir et cette réflexion lance aussi l’action. Le succès de cette action est une autre paire de manches. C’est un vieux cliché, mais c’est vrai. Si vous savez que vous allez mourir demain, vous comporteriez-vous différemment ? En fait, on va tous mourir demain, mais c’est peut-être demain dans deux ou trois ans.

Qui est George ?

George était un frère à moi qui est mort il y a deux ans, et vous n’avez pas vu ce film.

Est-ce que dans ce film, le plus difficile a été de rendre les humains petits, en tout cas donner l’impression que les humains étaient petits, ou donner l’impression que le monde était plus grand ?

Est-ce que vous êtes en train de parler sur le plan intellectuel ou sur le plan d’effets visuels ?

Le directeur des effets visuels, le directeur de la photo et moi-même avons discuté longuement s’il fallait utiliser des grosses caméras ou des petites. Comment tourner des gens petits.

Jusqu’au moment où le personnage de Matt Damon avait rétréci, on a filmé les hommes petits comme s’ils avaient existé, et que nous avions des caméras normales. Et quand on fait un focus, le champ de vision est très superficiel, ou alors vous avez une lentille macro avec laquelle vous pouvez vous approcher énormément et c’est très large.

Le film fait une transition dans une seule prise, là où on voit des nurses jamaïcaines et trinidadiennes qui attendent l’arrivée des petits, vous ne le savez pas au début puis vous voyez les grandes nurses et vous le réalisez. Avec Matt Damon, on se dit « Tiens, on est avec les petits. »

Ça aussi, c’est une transition optique, où on prétend que les caméras petites existent aujourd’hui dans ce monde petit. Jusqu’à la fin du film, chaque fois qu’on voit le grand monde, les gens qui sont grands sont montrés du point de vue d’une petite caméra.

Au début du film, quand Matt Damon parle avec sa mère. Elle lui dit qu’elle a très mal, il lui dit que les gens souffrent de mille façons différentes. Je voulais savoir si vous essayez d’expliquer cette idée dans le reste du film, la douleur des gens ?

Pour ce personnage, je pense que c’est bien qu’il soit conscient de la douleur des autres, même s’il semble très passif dans ce film. On ne sent pas trop son moteur intérieur qui le porte… C’est peut-être un peu un défaut dans le scénario. Normalement, le protagoniste a un but, il essaye d’y parvenir et il surmonte, ou pas, les défis durant l’histoire.

Son personnage, lui, a des visées assez silencieuses et très subtiles, mais nous savons qu’il est conscient de la douleur des autres, et qu’il veut aider les autres. On le voit aider sa mère, puis dans son travail, et par la suite, il s’occupe de sa femme.

Il est un peu perdu dans ce monde matérialiste, et puis cette femme dingue vietnamienne le prend par la nuque et elle l’oblige à revenir à lui-même. Ce dialogue ce n’est pas vraiment un thème du film, mais ça en dit long sur la conscience qu’il a.

Le comportement du personnage vietnamien est vraiment crédible. Je voulais savoir : avez-vous été conseillé par des Vietnamiens ?

Non. C’est elle-même qui l’a fait. Le vietnamien est sa langue maternelle. Elle m’a dit qu’elle rendait hommage à ses parents en faisant ce film. Elle respecte le rythme, la comédie, le pathos et la manière dont les dialogues sont écrits, mais c’est aussi pour elle rendre hommage à ses parents, parce qu’ils parlent de cette manière-là.

Le film parle beaucoup d’écologie et le fait que le downsizing soit fait justement pour sauver l’espèce humaine. On voit à la fin que, finalement, c’est un peu plus compliqué que ça. Vouliez-vous que le film soit pessimiste à ce sujet ou alors qu’il y ait malgré tout une lueur d’espoir sur ce sujet, qui nous concerne tous aujourd’hui de manière très urgente ?

Je pense que ce n’est pas le fait d’être optimiste ou pessimiste, c’est simplement le fait d’être réaliste. Ce que les journaux nous disent tous les jours, c’est qu’il y a énormément de problèmes et que c’est peut-être déjà trop tard, et que nous avons déjà peut-être que 200 ou 800 ans encore à vivre. Mais qui sait. Là, en tout cas, le monde va dans une mauvaise direction.

Est-ce que vous pensez vraiment que rétrécir les gens c’est pour sauver la planète ou sauver le budget de la famille ?

Que voulez-vous dire par le budget, le fait d’avoir plus d’argent ? Ça, c’est le génie de cette idée. Christoph Waltz le dit d’ailleurs. L’altruisme est à la recherche de l’égoïsme. La seule manière d’amener les gens à faire la chose qu’il faut faire est de faire appel à leur intérêt personnel.

Puisque ce sont les Hommes qui détruisent la terre, et considérant la fin de votre film, est-ce que vous pensez que sauver l’espèce humaine est important ?

C’est une question tout à fait juste. Je pense que c’est vraiment la question que le film pose. Asbjørnsen, le scientifique, dit, l’homme est bien trop beau, pas toujours, mais est très improbable. C’est une forme de vie tellement improbable, qu’il n’a pas le droit de disparaître pour toujours. Nous savons que nous ne sommes pas seuls dans l’univers, on ne sait pas qui il y a d’autres, on ne le saura jamais, les choses sont trop lointaines.

Je pense qu’il faut sauver les éléphants.

Je sais que vous connaissez bien Paris, vous avez tourné Paris je t’aime dans le 14ème, et vous avez choisi un casting très international. Mais pourquoi vous n’avez pas inclus un de nos acteurs dans votre film. Pourquoi vous n’avez pas essayé de rétrécir Gérard Depardieu ou Catherine Deneuve ? Pourquoi ne pas avoir choisi un acteur ou une actrice français(e) ?

C’est un peu dur de rétrécir Depardieu aujourd’hui… Désolé !

Mais quand même ! Pourquoi ne pas avoir d’acteurs français dans votre film ? Votre casting est vraiment international.

En fait, j’aimerais beaucoup, vraiment beaucoup travailler avec Marion Cotillard un jour. Je pense que c’est une grande star. Tout le monde n’est pas d’accord. Je le sais. Je le comprends, mais quand elle est à son meilleur, elle est très bien. Chacun a ses goûts, moi, je l’aime. Elle me plaît.

Vous venez de parler de Marion Cotillard. Je crois qu’elle est très impliquée dans l’écologie, la défense de l’environnement, etc. Je voulais savoir à quel point vous êtes militant dans ce domaine-là, parce que vous avez dit que votre film est une comédie, mais c’est quand même beaucoup plus que ça. Vous traitez de thèmes très forts et sérieux. Je voulais savoir à quel point vous êtes militant et engagé sur ces sujets-là ?

Je ne le suis pas. Bien sûr, je le ressens et je suis très concerné, mais l’aspect environnemental du film était vraiment une porte d’entrée. On s’est dit « Si les hommes pouvaient être rétrécis, qu’est-ce qu’on ferait de cette idée ? » et je me suis posé la question de « Comment cela se produirait dans la réalité ? ».

C’est certainement un scientifique complètement dingue qui rêverait de ça comme une panacée pour la surpopulation et le changement climatique. Et de toutes les questions qui se posent sur terre, comme les armes nucléaires, il y a vraiment celle sur le climat qui est importante.

Peut-être que c’est déjà trop tard. Pour ne pas prendre votre question littéralement, je ne suis pas militant, mais je pense que c’est bien d’ajouter cet aspect dans le bon côté de notre processus. Ce film comporte cette idée de différentes manières.

Ce qui est terrible, c’est que la question de ce changement climatique est devenue tellement politisée. Ça, c’est la chose la plus idiote que j’aie jamais entendue. Donc je suis désolé. Le film a d’autres éléments politiques aussi. Et ce n’est pas un film militant, nous faisons des comédies, mais au moins le film nous montre une prise de conscience et reconnaît tel et tel problème, et nous dit « Regardez, regardez ! ». C’est une comédie douce, gentille.

Qu’avez-vous déjà dans votre tête ? Y a-t-il quelque chose dans votre esprit au sujet de ce que sera votre prochain film dans quelques années ?

Non, je ne sais pas quel sera mon prochain film, mais j’espère faire un jour un western.

Downsizing est un film amusant et intelligent posant d’une façon originale des questions importante et mettant en scène un Matt Damon à contre-courant. Vous pouvez en retrouver la critique ICI.

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