Dans la forêt : La rencontre avec Jérémie Elkaïm et Gilles Marchand

Date : 14 / 02 / 2017 à 08h30
Sources :

Unification


À l’issue de la projection du film Dans la forêt, l’acteur Jérémie Elkaïm et le réalisateur Gilles Marchand sont venus répondre aux questions du public.

Voici la retranscription des échanges qui ont eu lieu. Vous pouvez aussi en visualiser la vidéo en fin d’article.

Attention ! Un certain nombre de spoilers, y compris sur la fin du film, se trouvent dans les échanges.

Quelle est la genèse du film ?

Gilles Marchand : On est parti avec Dominik Moll, le co-scénariste, de ma situation quand enfant, j’avais été voir mon père en vacances alors qu’il travaillait à l’étranger.
Cela m’intéressait de me servir de cette situation pour essayer de faire un film du point de vue d’un enfant de 8 ans dans un monde où le côté rationnel ne classe pas encore les choses.
J’ai utilisé cela avec une trame minimaliste en y mettant des impressions fortes.
Jérémie Elkaïm et Valérie Donzelli qui produisent leurs films m’ont demandé de lire le scénario et ils ont voulu le produire. Il a fallu du temps pour trouver de l’argent, mais cela s’est fait amicalement.
Assez vite avec Jérémy, on a été faire des repérages en Suède pour voir comment cela se passait et si ce qu’on avait écrit marchait là-bas.
On avait envie de faire les choses à fond.

Jérémie Elkaïm : Notre collaboration n’était pas très difficile. Le montage financier s’est fait de façon naturelle. Cela s’est fait joyeusement, avec plaisir.

Gilles Marchand : Quand j’écrivais, je voyais un père plus âgé, parce que je le suis. Et puis, j’ai pensé que prendre un père plus jeune serait intéressant. J’ai vu des acteurs, et j’ai fait passer un casting à Jérémie qui a des enfants du même âge. Je trouvais intéressent de changer son genre, car c’est un homme plutôt urbain sympathique.
Cela le changeait qu’il soit plus antipathique. Même si je n’éprouve pas que de l’antipathie pour le personnage. Cela le rend ambivalent.

Jérémie Elkaïm : J’aimais bien l’idée que le personnage soit entre inquiétant et pas rassurant, mais il ne fait pas pour autant de choses vraiment inquiétantes. Il a une fragilité mêlée à son côté toxique.

Pourquoi faire du père ce personnage inquiétant ?

Gilles Marchand : C’était cette menace qui m’intéressait : que la personne sensée protéger les enfants ne le fasse pas, voire les menace. Je n’aurais pas pu faire un film s’il était devenu extrêmement violent comme dans Shining. Ce qui m’intéressait, c’est ce qui se passait dans la tête de l’enfant. Et que le spectateur ne sache pas si c’est vrai ou non.

Jérémie Elkaïm : Je trouvais intéressant de jouer le personnage, car il a malgré tout un désir de transmettre des choses à ses enfants. Mais quand on les fait de façon trop intrusive et autoritaire, cela devient toxique. Il leur propose quelque chose pour de vrai, le dénuement des lieux.

Comment on peut interpréter un tel personnage ?

Jérémie Elkaïm : Ce que j’essaye de faire, c’est de trouver les ponts, même si le personnage est très loin de moi. J’ai essayé de voir ce que j’ai en commun avec. C’est extrapolé. C’est comme de l’onirisme qui permet de reconnaître des choses dans la vie. Cela me libérait.

Gilles Marchand : Il y avait cette idée que le personnage est très intense et Jérémie amène cela de façon très forte. Et puis, il y a la mise en scène pleine d’ellipses que le spectateur essaye de compléter, tout comme l’enfant. Le rôle du grand frère est important, car il amène une forme de normalité alors que le petit, qui a un côté craintif, est le plus courageux des deux. Il va accompagner son père le plus loin vers ce voyage au fond de la forêt.

Avec Jérémie, l’interprétation, c’était des choses très simples. Par exemple, préférer le petit, cela parait bête, mais ce n’est pas évident à jouer, car on a envie de rendre son personnage plus sympathique. On voulait un peu de noirceur et on a été très loin dans la prise de risque. Et les deux gamins étaient géniaux. Ils étaient très joueurs. On s’amusait sur le plateau. Le petit adorait les scènes où il avait peur. La seule où il a dit qu’il a vraiment eu peur, c’est celle avec la lampe électrique et son grand frère. C’était un plaisir pour lui de jouer.

Jérémie Elkaïm : Moi, j’avais du plaisir à jouer avec eux, notamment Timothé Vom Dorp. On s’appuyait les uns sur les autres, il y avait une vraie écoute. Il ne lâchait jamais le rôle, même dans les grands plans séquences. Il prenait le temps de me répondre dans le rôle du personnage.

Gilles Marchand : Au moment des essais, j’avais vu une centaine d’enfants, mais Timothé s’est vite imposé. Quand je voyais les autres, je me disais : « il faudrait que je coupe ce type de scène », « dans cette situation, il est moins bien »... Timothé rend les choses très concrètes. On aurait pu monter le film que sur lui. Dès la première prise, cela marché. L’autre enfant, Théo Van de Voorde, avait besoin que cela monte et de faire plusieurs scènes.

Est-ce que vous vouliez faire de l’analyse grâce à la symbolique des symboles ?

Gilles Marchand : J’essayais d’être le plus intuitif. J’aime beaucoup l’idée que cela puisse être analysé, mais je ne suis pas quelqu’un qui passe par l’idée, « ça, c’est le symbole de cela ». Peut-être qu’en épurant l’intrigue, au sein de cette forêt, on va vers une sorte de dessin qui peut être symbolique, mais ce n’est pas mon but.

Jérémie Elkaïm : Je suis plus que Gilles sur l’analyse. Le chemin contient des vérités que l’on peut reconnaître. Mais il y a possibilité à réfléchir sur la nature humaine…

Gilles Marchand : J’ai eu une question lors d’une autre projection sur le non-dit, sur la métaphore, mais je ne savais pas quoi répondre.

Le « diable », Mika Zimmerman, était aussi le coach des enfants, pourquoi avez-vous fait ce choix ?

Gilles Marchand : Je ne voulais pas qu’un comédien arrive avec du maquillage sur le tournage et soit confronté à des enfants. J’aimais son regard et je savais qu’il avait un truc de contact avec les enfants. J’avais pensé à lui pour qu’il joue avec eux toute la journée, qu’il s’occupe d’eux et les entraîne sur leurs textes ? Et quand il devenait l’homme défiguré, cela le transformait.

Est-ce que le personnage du « diable » est dans la tête de l’enfant, ou est-ce une allégorie du mal qui ronge son père ?

Gilles Marchand : J’aime vous entendre dire vos hypothèses, mais je ne peux pas dire mieux que ce que montre le film. Cela m’intéressait que le monstre ne soit vu que par l’enfant, même si le père veut le voir et cela renforce l’impression qu’il provient du cerveau de l’enfant. Mais il y a des plans où on voit l’homme défiguré quand l’enfant ne le voit pas et que seul le spectateur le découvre et cela contredit qu’il n’existe que dans la tête de l’enfant. Cela existe dans l’écriture du scénario et dans le montage. Cela me fait plus peur, ou m’émeut plus, quand c’est comme cela. Cela relève plus de l’intuition que si je me demande ce qu’on doit en penser.

Jérémie Elkaïm : Ce que je trouve très beau, c’est le fait qu’il lui ouvre les bras alors qu’il en a très peur. C’est plus comme si on regardait le côté positif. Il ouvre les bras à quelque chose qui lui fait peur.

Gilles Marchand : Cela me touche que les gens pensent qu’il s’agisse du père. Dans mon premier film Qui a tué Bambi, le personnage du médecin a un accident de voiture. Quand on avait tourné cette séquence, le maquillage était dément et tout le monde sur le plateau avaient du mal à regarder l’acteur et à lui parler tellement il avait l’air de souffrir. Et je me suis dit que c’était intéressant cette sensation. Si on arrive à le regarder dans les yeux, on n’a plus peur et c’est ce que fait l’enfant. Je sentais intuitivement que dans ce mouvement, il y avait quelque chose qui me plaisait. Et pendant longtemps sur cette séquence de face-à-face, je me suis posé beaucoup de questions, mais cela a fini par faire quelque chose qui m’a plut.

Jérémie Elkaïm : C’est pas mal de se dire que les monstres ont quelque chose d’humain.

Gilles Marchand : À la fin, il y a quelque chose qui se libère chez l’enfant.

Comment avez-vous travaillé sur la peur ?

Gilles Marchand : Je sais que pour moi, il y a un rapport entre imaginaire et peur. Il y a quelque chose de constitutif. Il y a un pont entre la peur et les histoires. Quand cela devient quelque chose, cela ouvre des portes vers des choses qui ne sont pas que de la peur. Les choses corrompues et noires sont aussi liées à la pureté. J’ai été très inspiré par David Lynch, notamment son Eraserhead.

Vous pouvez retrouver la critique du film ICI.

- SITE OFFICIEL

VIDÉOS

Rencontre avec l’acteur Jérémie Elkaïm et le réalisateur Gilles Marchand :


Bande annonce :



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