EXCLU UNIF - Art of Anime : L’histoire de l’animation japonaise en exposition

Date : 19 / 01 / 2017 à 11h00
Sources :

Unification


Unification a eu la chance de rencontrer Benoît Spacher l’organisateur de Art of Anime, les expositions relatant l’histoire de l’animation japonaise grâce à des celluloïds originaux.

Benoît Spacher, pouvez-vous vous présenter ?

Je suis collectionneur et expert en mangas et animation japonaise auprès des maisons de vente aux enchères.
Pour mon parcours, je viens du dessin technique. J’ai commencé dans l’industrie et au fil de mon parcours j’ai eu des opportunités dans le commerce du monde de l’art et je suis allé de plus en plus vers cette connaissance. A un moment de ma carrière, on m’a demandé de développer de nouveaux marchés et j’ai proposé ce qui se fait dans sillage de la bande dessinée et de la bande dessinée américaine, c’est-à-dire de développer la bande dessinée japonaise. De fil en aiguille, j’ai fait grandir un nouveau marché qui était inexistant.

Comment est venu votre intérêt pour l’animation japonaise ?

L’animation, comme beaucoup de monde j’ai grandie avec. Je pense que le déclic majeur est arrivé au milieu des années 90 quand il y a eu les premières OAV qui commençaient à être diffusées. Je me souviens tout particulièrement de Gunnm, qui m’avait marqué. C’était se dire qu’il y avait au-delà de ce que je voyais à la télévision dans le Club Dorothée, des dessins animés japonais qui avaient une profondeur, une noirceur, une épaisseur scénaristique forte et ça m’a ouvert vraiment à d’autres genres que ce que je voyais sur le petit écran. Maintenant j’en reste pas moins attaché à la télévision en tant que patrimoine, car je considère que cela fait partie de la vie de millions de gens au quatre coin du globe et c’est ça que j’essaie de recréer, des émotions, du ressenti par des choix artistiques en partageant la collection avec le plus grand nombre.

D’où vient l’idée de cette exposition ?

Le véritable déclencheur, c’est qu’aujourd’hui le Japon a une politique de préservation de son patrimoine manga et il considère que l’animation c’est un sous-média, un dérivé de la bande dessinée japonaise, et donc il n’y prête pas une considération particulière. A contrario en Europe, ou en occident plus généralement, on a d’abord eu les dessins animés avant d’avoir les mangas. D’ailleurs les dessins animés ont été catégorisés manga. On a un terme un peu valise en France à la différence d’autres pays et c’est ce qui a fait que je réfléchis à ce projet en me disant qu’il n’y a rien qui existe aujourd’hui et il faut faire quelque chose, car si la réponse ne vient pas de l’Europe, elle ne viendra pas du Japon. Le but a été de préserver, de constituer un fond de collection au fil du temps et de le préserver suivant les règles des musées nationaux français pour qu’on puisse disposer d’un fond culturel privé qui soit en mesure de véhiculer ce message que le Japon aujourd’hui ne fait malheureusement pas.

Que peut-on trouver dans l’exposition Art of Anime ?

Pour Monaco par exemple fin fevrier 2016, on avait une exposition à l’occasion du MAGIC, qui présentait une sélection de documents originaux japonais qui ont servi dans la fabrication traditionnelle des dessins animés. C’est une sélection par rapport à un fond culturelle qui représente un peu plus d’une centaine d’œuvres emblématiques et qu’on fait voyager au gré des opportunités qui peuvent se présenter, d’évènement culturels ou alors à la demande d’établissements publics, de conférences…

Quelles difficultés avez-vous rencontrées pour récupérer ces objets ?

Tout projet, toute collection, cela a un coût, mais ce n’est pas tellement ça le plus difficile. Le plus compliquer c’est de trouver des objets de qualité. Trouver un dessin de qualité, quand on sait qu’il faut plusieurs milliers de dessin pour faire un épisode, c’est difficile.Un Albator de quelques millimètres de dos dans le noir, n’aura pas la même valeur qu’un personnage bien centré en pleine page et qui va pouvoir véhiculer une émotion. La difficulté c’est plus de trouver de beaux objets et qu’ensuite soit de les acquérir en gré à gré avec des marchands, des collectionneurs avec des gens qui ont côtoyé des auteurs ou alors le marché des enchères. Les ventes aux enchères publiques sont aussi un moyen de trouver ces biens. Moi j’ai eu la chance d’être le pionnier des ventes aux enchères en France et plus largement en Europe de documents originaux japonais. Cela a été de gros succès au niveau des plus grosses maisons de ventes françaises et donc cela me permettait d’avoir accès avant la mise en vente à des biens et de pouvoir monter cette collection sans forcément avoir à lutter contre des gens qui auraient voulu les acquérir.
Après cela va être aussi de se créer un réseau dans le milieu de l’animation, du Japon, des japonisants. C’est un milieu qui, malgré la taille des évènements, reste petit où les gens se côtoient, se croisent facilement, Ainsi au fil des échanges, des discussions, cela permet d’avoir des possibilités d’acquisition dans le cadre de ce grand projet.

Quelles sont alors les difficultés pour mettre en place une telle exposition ?
Y a-t-il eu d’autres difficultés particulières ?

C’est plus en terme de logistique. Pour exposer, il faut un lieu et pour avoir un lieu c’est soit une location de salle, soit c’est quelque chose qui se négocie avec les pouvoirs publics, donc de rencontrer des élus, de les convaincre sur la pertinence d’un projet, de leur expliquer qu’aujourd’hui l’animation japonaise c’est pas que du sang, de la fureur et du sexe, c’est aussi de la culture, c’est aussi une reconnaissance, c’est aussi un patrimoine, plus particulièrement quand on regarde le patrimoine animé on va penser à tout le travail de Nippon Animation dans les adaptations des grands classiques de la littérature, chose que nous européens, on a été infoutu de faire, donc derrière c’est se dire, il y a un potentiel, il y a un public et il faut aujourd’hui répondre le plus largement possible en véhiculant ce patrimoine et cette culture. C’est d’ailleurs pour cela que les expositions soient gratuites au grand public afin que le maximum de personnes puissent découvrir ou redécourvrir ce patrimoine.

Combien y a t-il de pièces dans l’exposition et comment les avez-vous sélectionnées ?

L’exposition compte plus d’une centaine de pièces de très haute gamme, d’une qualité muséale, qui sont encadrées, prêtes à voyager en fonction des opportunités et des lieux d’accueil. Par exemple sur Monaco, il y a eu une sélection d’une vingtaine de documents pour couvrir un quinze mètres linéaires et qui sont représentatives chacune de leur époque.

La sélection a été faite en ce sens ?

Pour la participation au MAGIC par exemple, il y a évidemment une pensée pour Astro. Il fallait qu’on présente du Astro Boy. L’accent a été mis en entame de l’exposition sur des mangas d’époque des années 50 et 60 et sur un celluloïd original des années 60 de la première série d’Astro en noir et blanc pour justement mettre en avant tout ce patrimoine culturel qu’est Osamu Tezuka. Après derrière, on va cheminer dans les années 70, 80 et 90 avec les séries les plus représentatives et quelques signatures moins connues mais qui sont quand même prestigieuses pour répondre à des demandes d’amateurs éclairés ou de spécialistes qui chercherait des signatures plus particulières.

Le public visé n’est pas uniquement le geek connaisseur ?

Il faut parler à tout le monde. Ce n’est pas une exposition qui est montée pour un public de puristes. Il va retrouver des signatures plus emblématiques, moins connues du grand public, qui vont répondre à ces groupes ayant une connaissance plus affinée, mais en même temps on ne doit pas se couper du fait que le Club Dorothée quand c’était diffusé à la télévision, il y avait 1,5 millions de téléspectateurs et sur ces personnes, quand on regarde les fréquentations des grandes conventions japonaises, on n’est pas à 1,5 millions de visiteurs, donc il y a des gens qui ne vont pas dans les conventions, mais qui vont dans les expositions et inversement. L’idée était de proposer un projet à la croisée des chemins qui soit ouvert à tous, aux jeunes comme aux moins jeunes pour qu’on puisse s’émerveiller sur trois générations de téléspectateurs en allant des années 60 jusqu’au années 2000. C’est d’ailleurs pour cela que les expositions sont gratuites au grand public afin que le maximum de personnes puissent découvrir ou redécourvrir ce patrimoine.

Vous avez fait une expo à Paris. Quelle a été la réaction du public ?

La réaction du public a été excellente et d’un public de tous les âges, c’est-à-dire qu’en fonction des jours et des horaires d’ouverture, on avait des parents qui venaient avec leurs enfants en journée ou en fin de journée, les soirées privatives ou vernissages, on avait des jeunes adultes qui venaient seuls en couple ou avec des amis pour passer un bon moment devant des documents qui en premier lieu leur rappellent leur enfance mais surtout qui vont leur permettre d’échanger. C’est un vivier d’échange. Les gens discutent entre eux, et il y a même des échanges transgénérationnelles. Et d’une génération à l’autre, on voit des points d’accroche similaires que ce soit sur l’esthétique, que ce soit sur la technique ou que ce soit sur une émotion ou un souvenir personnel.

Quel avenir pour l’exposition ?

Il y a eu une conférence en mars de l’année dernière avec la Sorbonne. Ainsi qu’une exposition sur laquelle on a été sollicité en consultant aux Emirats à Abou Dabi. C’est une grande première. L’idée c’était de s’appuyer sur notre expertise pour déployer des projets similaires aux quatre coins du globe. Il faut savoir qu’aux Emirats, ils ont eu quasiment les mêmes séries qu’en France, donc ils connaissent les mêmes classiques. Simplement, le fait d’avoir ces mêmes références, cela nous a permis d’avancer ensemble, sur des projets. Pour la Sorbonne, c’était quelque chose qui est un peu plus intéressant car on a eu des chercheurs en Université qui ont ensemble réfléchi lors d’une table ronde à laquelle j’étais invité autour de Goldorak et le monde de l’art. C’est un beau pied de nez à l’Histoire surtout au années 90 et à certains personnages politiques qui se sont un peu acharnés sur ce qu’on a considéré comme étant une sous culture et qui au même titre que le street art aujourd’hui on se rend compte que l’on voit dans les ministères ou les établissement publics trôner des toiles d’artistes grapheurs qui étaient considérés comme des sous produits, il y a 10 ans en arrière. J’ai bon espoir de me dire que ces initiatives démontrent que au-delà d’un contenu qui se voulait être destiné à un jeune public, on a finalement une vraie culture et une multiplicité de typologies de cultures, et plus on aura d’évènements de ce type, plus nous on sera enclin à y participer.

D’autres projets ?

Actuellement nous présentons une exposition sur les travaux préliminaires de Hayao Miyazaki pour sa première création au poste de réalisateur avec "Conan le Fils du Futur" (1978) à travers la présentation d’un important travail de restauration numérique d’archives de bobines de films et de supports photographiques d’époque. Elle se déroule au Pavillon les Canaux du 6 au 31 janvier 2017. Et nous gardons la même démarche c’est-à-dire que c’est pour tout public et gratuit.

Et nous serons, pour la seconde fois, présents au salon MAGIC à Monaco le 18 février 2017.


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