14 - 18 : La critique du tome 4

Date : 28 / 12 / 2016 à 08h00

Par : Christophe Dasse

Sources :

Unification France

14 - 18 Tome 04
La Tranchée perdue (avril 1915)

Editeur : Éditions Delcourt
Scénario : Corbeyran
Dessin : Étienne Le Roux
Décors et couleurs : Jérôme Brizard
Série : 14 - 18
Collection : Histoire & Histoires
Date de sortie : 7 octobre 2015
Format : 31,6 x 23,6 cm
Nombre de pages : 48
ISBN : 978-2-7560-4156-8
Prix : 14.50 €

De retour d’une escapade, à la recherche du « repos du guerrier », Arsène et Jacques dépassent leurs lignes et tombent par hasard sur la tranchée ennemie faisant face à la leur. À leur grand étonnement, elle est déserte. Prévenu, le commandement ordonne une incursion par voie de tunnel. Pierre et Jules, désignés pour cette mission, découvrent au cours de leur progression un étrange objet cylindrique.

Décryptage
Avril 1915, la mort rode sur le champ de bataille. Coincés au fond de leurs tranchées du secteur Belge, les français, étonnés du calme leur faisant face, décident de creuser un tunnel pour se rapprocher des lignes ennemies, qu’ils pensent désertées. En chemin ils vont tomber sur une bonbonne de gaz qui pourrait être une arme secrète de l’ennemi. Alerté, le commandement décide de ne pas tenir compte de cette menace et ce sont les hommes qui en payeront le prix fort.

La guerre des tranchées a commencé, guerre des nerfs, guerre d’usure et surtout guerre où seront utilisés des gaz pourtant interdits par la convention de La Haye signée en 1899 par les nations aujourd’hui en guerre. Les hommes sont fatigués, las, désabusés, ils ont besoin de se changer les idées et le feront tant bien que mal. Ce n’est pas que physiquement que ces hommes seront marqués, ce sera aussi psychologiquement et ces blessures, comme les autres infligés dans leurs chairs seront tatouées en eux à jamais.

Des dessins se détachent une force incroyable. Ils nous plongent en plein conflit. La lettre de Maurice est un petit chef-d’œuvre d’émotion au début et à la fin de l’histoire, où l’ignominie de la guerre est montrée avec une certaine poésie qui rend silencieuses ces pages chargées d’abominations, normalement bruyantes. Sur écran, cette scène serait joué sans aucun son que celui du narrateur. La lettre guide la narration, c’est le narrateur que l’on entend uniquement sur d’horribles images. "Aucun talent artistique, même le plus développé, ne sera à même de traduire ce qui se passe ici … pas plus qu’aucune imagination humaine ne sera capable de le comprendre. Ceux qui ne l’ont pas vécu ne sauront jamais réellement ce qui s’est passé ici," explique Maurice.

On ne sort pas indemne de la guerre c’est une évidence et c’est le sujet de cet épisode mais on n’en sort pas non plus de sa lecture. C’est aux tripes que s’attaquent les auteurs et c’est là qu’ils nous touchent par la violence des propos et des situations. Une bonne claque que ce 4^ème tome. "Toute cette sauvagerie... Ça nous a complètement transformée. Plus rien ne sera jamais comme avant," c’est une phrase terrible qui résume bien les dégâts tant physiques que psychologiques entrainés par la guerre. D’autant plus qu’elle est prononcée par une femme restée en arrière mais qui est victime des conséquences directes et indirectes de cette guerre.

Sublime épisode par sa portée émotionnelle, sa narration maitrisée, ses dessins toujours aussi habiles et bien réalisés qui nous plongent dans la boue et le cauchemar de la guerre.