FFAST 2016 : Le bilan

Date : 27 / 10 / 2016 à 09h15
Sources :

Unification


Le FFAST, seul festival français sur des films indiens parallèles, s’est achevé après une semaine sur la cérémonie de remise des prix et le film de clôture.

Le festival a mis à l’honneur cette année le Bangladesh avec un focus dédié. Un autre focus sur la migration était présenté alors que les amateurs de films boolywoodiens n’étaient pas oubliés grâce à la nuit Shahrukh Khan, le célèbre acteur indien.

La cérémonie de clôture a permis de remettre 4 prix. Ainsi seul le très bon Psycho Raman repart sans rien. Une œuvre sombre, violente et dérangeante qui a sans doute dû diviser un public pas forcément connaisseur de film de genre, ainsi que les deux jurys.

  • Prix du public : Song of Lahore de Sharmeen Obaid-Chinoy, Andy Schocken (Pakistan) Un prix qui fait plaisir, d’autant qu’il n’est pas toujours facile pour un documentaire de ressortir au niveau d’une sélection de films. Il s’agit d’ailleurs du premier documentaire en sélection de l’histoire du FFAST. Le prix est sponsorisé par Anju.
  • Prix du jury étudiant : Kothanodi de Bhaskar Hazarika (Inde) 5 étudiants sont venus remettre le prix qu’ils ont attribué au premier film d’une jeune réalisatrice.
  • Grand Prix FFAST : Aligarh de Hansal Mehta (Inde) et Under construction de Rubaiyat Hossain (Bangladesh) Les discussions du jury ont été serrées, aussi ce dernier a décidé de remettre un prix ex-æquo. Bien que les deux films choisis soient d’une grande actualité, ce n’est pas pour cette raison qu’ils ont été retenus, mais bien pour leurs qualités intrinsèques. Je n’ai malheureusement pas eu l’occasion de les voir, mais on m’en a dit grand bien, surtout pour Under construction.

C’est donc un festival bien sympathique qui s’achève. Il faut remercier l’organisation d’avoir proposé au public français des films si divers et de belle facture qui auront malheureusement peu de chance de trouver la voie des grands écrans en France. Aussi, ne boudez pas votre plaisir si vous avez l’occasion de les voir.

Psycho Raman et Joker sortiront en salle en 2017 et vous pourrez alors en trouver une critique complète sur Unification.

Vous pouvez aussi avoir mon avis rapide sur les films que j’ai vu dans la suite de l’article. Ces derniers sont classés par ordre alphabétique.

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JOKER

Raju Murugan (2h57, Inde)

Synopsis : Mannar, un villageois, qui se déclare lui-même comme président indien, proteste contre les absurdités du gouvernement. Lors d’un procès, il révèle son passé. Quand tout le monde le voit comme le Joker, le public est interpellé.

Avis : Un homme s’élève contre la corruption et l’absurdité du système indien. Aidé par un avocat dévoué à la cause depuis 20 ans et d’une jeune femme adepte des réseaux sociaux. S’autoproclamant Président de l’Inde, promulguant des décrets, essayant de faire respecter la justice et enchaînant les manifestations et les actes médiatiques, ce dernier essaye de changer la mentalité locale.

Le film plutôt drôle et enjoué dans sa première partie révèle toute la profondeur de son propos dans un second acte dramatique mettant en exergue les dysfonctionnements de la société indienne.

Joker, c’est une histoire de gens pauvres mais fiers, de toilettes et d’accès à la propreté. En effet, dans un pays de plus d’un milliard d’habitants dans lequel presque tout le monde possède un téléphone portable, aller au cabinet peut s’avérer très difficile dans certaines régions.

Édifiant et émouvant. Un Don Quichotte indien qui interpelle et ne laisse pas indifférent.

KOTHANODI

Bhaskar Hazarika (2h00, Inde)

Synopsis : Tejimola a été assassinée par sa belle-mère avec un « dheki » (moulin à riz). Champabati a été mariée à un serpent. Une jeune femme accouche d’un fruit… Le Film Kothanodi nous raconte quatre contes populaires de l’Assam ré-imaginés comme un récit sur quatre mères, qui font chacune face à leurs propres démons.

Avis : 4 contes traditionnels imbriqués dans le premier long métrage d’une jeune réalisatrice prometteuse.

4 histoires donneuses de morale qui ne s’avèrent pas si différentes de nos propres contes locaux.

Une belle-mère essaye de se débarrasser de sa belle-fille dans un conte dans lequel les 7 nains sont vraiment absents.

Un père tue ses enfants pour obéir à son oncle. Le final est surprenant et met en valeur la sagesse des anciens.

Une jeune femme accouche d’un fruit et réussit à en faire sortir son enfant dans une variante de La petite Poussette quand celle-ci n’était encore qu’une graine.

Une belle-mère, attirée par l’argent, pousse sa fille unique à épouser un python.

Plus qu’un film à sketches, la réalisatrice Bhaskar Hazarika livre une histoire dans laquelle les univers des 4 contes s’entremêlent et se complètent.

Un beau film et des leçons de vie à méditer.

Sombre et poignant.


MAMMO

Shyam Benegal (2h10, Inde)

Synopsis : Mammo vit à Bombay avec sa sœur Fayyuzi et avec Rivaz, le petit fils de cette dernière. Mammo est née à Panipat (Haryana), à l’époque du Raj britannique, mais elle fait partie des milliers de musulmans qui ont quitté l’Inde pour s’installer au Pakistan après la Partition. N’ayant pas d’enfant, elle est jetée hors de sa maison par sa belle famille après la mort de son mari. Elle vient alors vivre avec sa sœur à Bombay jusqu’à qu’elle soit prise pour une migrante, arrêtée et renvoyée de force au Pakistan. Fayyuzi et Rivaz perdent alors sa trace.
Mammo a remporté le « National Film Award » du meilleur film en hindi en 1995 et Farida Jalal a remporté « Filmfare Critics Award » pour la meilleure performance.

Avis : Très beau film sur les conséquences de la séparation de l’Inde et du Pakistan, Mammo parle d’une femme indienne vivant au Pakistan essayant de retourner vivre chez sa seule famille restante en Inde.

Un retour contrarié par l’administration lui demandant de rentrer à la fin de son visa.

Le film parle de la famille et des liens qui se tissent entre deux sœurs et le petit-fils de l’une d’entre elles qu’elle élève. Une étrange famille non-traditionnelle mais dont l’amour et la joie essayent de perdurer malgré des conditions difficiles.

Mammo parle de ces individus déracinés qui tentent de retrouver leurs origines à travers l’affrontement de deux pays se détestant cordialement.

Mais c’est aussi une image intéressante de la jeunesse, de la vieillesse et de leurs aspirations divergentes.

Si la religion et la place de la femme sont finement observées, l’œuvre et touchante et n’hésite pas à aborder des sujets qui fâchent sans compromission.

Puissant et attachant.


PSYCHO RAMAN

Anurag Kashyap (2h07, Inde)

Synopsis : À Mumbai un psychopathe rôde, convaincu d’être le successeur d’un célèbre tueur en série des années 1960. Sa folie l’amène à croiser, au gré des dédales sombres et humides de la mégalopole, la route d’un jeune inspecteur aussi brillant qu’instable. Entre les deux hommes, chat et souris, s’installe un jeu de miroir troublant.
Le dernier film d’Anurag Kashyap (Gangs of Wasseypur, Dev D., Ugly) a été présenté à la Quinzaine des Réalisateurs lors du dernier festival de Cannes.

Avis : Après un autre polar très noir Ugly, Anurag Kashyap livre un fascinant jeu du chat et de la souris entre un sérial killer insensible souhaitant détrôner le tueur en série dont il a pris le nom et un inspecteur corrompu adepte de drogues.

Une histoire noire, souvent sordide et d’une grande violence, tant visuelle que psychologique qui peut choquer les âmes sensibles.

Le film est très réussi et le réalisateur montre la maestria de ses talents de metteur en scène et de connaisseur des codes du thriller.

L’interprétation est tout aussi impeccable et l’intrigue réserve de nombreuses surprises ainsi qu’une très intéressante étude de la psyché de deux hommes appartenant à des camps opposés, mais pas si différents l’un de l’autre.

Passionnant et percutant.


SONG OF LAHORE

Sharmeen Obaid-Chinoy, Andy Schocken (1h22, Pakistan)

Synopsis : Lahore a longtemps compté parmi les villes les plus artistiques au monde. Mais la charia de 1977 changea la donne lorsque la musique fut considérée comme un péché. Les musiciens étaient alors marginalisés et la musique uniquement autorisée dans les milieux privés. Plusieurs années après, la situation politique a changé, et grâce à un enregistrement du classique Take Five, des musiciens pakistanais sont invités par Wynton Marsalis pour jouer avec son orchestre au Lincoln Center. Le film Song of Lahore ne raconte pas l’histoire politique du Pakistan, mais celle de son peuple et de la puissance de la musique qui unit les gens malgré leurs différences culturelles.

Avis : C’est un bien beau documentaire que ce Song of Lahore parlant de la musique au Pakistan. En effet, sous un régime musulman fort depuis les années 70, la musique traditionnelle est interdite et les musiciens célèbres de cette ancienne capitale de la culture musicale d’Asie ont sombré dans l’oubli et parfois la misère.

Suite à un assouplissement des interdictions, la musique populaire essaye de se reconstruire, mais les goûts ayant changé et les traditions périclitées, c’est vers le jazz que l’ensemble de Sachal Studios, fondé en 2004 par Izzat Majeed, se tourne pour renaître de ses cendres.

Et suite au succès mondial de leur reprise de Take Five, c’est à New York qu’ils sont invités à donner un concert dans l’antre du jazz, au Lincoln Center Orchestra, en compagnie de musiciens américains. Un périple passionnant à suivre et d’une grande tension devant le travail à accomplir pour être à la hauteur des enjeux.

Le documentaire est incroyable et parle magnifiquement de musique, de liberté et de passion. Ainsi que de la volonté inaltérable des hommes à créer de l’art plutôt que de prendre des vies.

Superbe, un vrai moment de bonheur.


TELEVISION

Mostofa Sarwar Farooki (1h46, Bangladesh)

Synopsis : Amin, leader politique et autorité religieuse d’un village du Bangladesh, mène un combat contre l’imagination de ses ouailles. Écrans, téléphones portables et photographies sont interdits au sein de la communauté, garantie d’une paix sociale factice qui repose sur le respect des bonnes mœurs. Tout va changer le jour où une télévision va y être introduite…

Avis : Film sur l’opposition entre la modernité et la religion rigoriste, Television utilise le biais de cet objet pour brosser le portrait d’un village isolé soumis aux volontés de son maire musulman.

Ce dernier souhaite empêcher des objets impies de contaminer les jeunes et de modifier la façon de vivre traditionnelle des villageois.

Une pensée qui se heurte aux volontés des uns et des autres, notamment celle de son fils amoureux d’une villageoise.

Car, en plus que le traitement humoristique et acerbe de cette situation, le film s’avère un délicat triangle amoureux qui a un fort impact sur le développement de l’intrigue.

Le long métrage évoque aussi les escrocs qui arnaquent les honnêtes croyants en leur faisant miroiter un voyage à La Mecque.

Un film riche et complexe, internationalement couvert de prix.


GALERIE PHOTOS

FFAST 2016 : La clôture



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