Westworld : Les bienfaits des retards pour la série

Date : 09 / 10 / 2016 à 15h00
Sources :

Collider


Créée pour la télévision par Jonathan Nolan et Lisa Joy, la série télé Westworld est aussi ambitieuse qu’elle donne à réfléchir, explorant des thèmes aussi fascinants que l’humanité et l’intelligence humaine avec une distribution qui n’aurait pas pu être meilleure. C’est une odyssée sombre sur la conscience artificielle, dans un monde où chaque appétit humain, qu’il soit noble ou dépravé, peut-être satisfait... si vous payez le prix. Anthony Hopkins, Ed Harris, Evan Rachel Wood, Jeffrey Wright, James Marsden, Thandie Newton, Jimmi Simpson, Ben Barnes et Rodrigo Santoro, parmi d’autres, sont à l’affiche de cette grosse production télévisuelle.

Jonathan Nolan et Lisa Joy, les showrunners de la série expliquent pourquoi ils voulaient explorer cette histoire, comment ils ont décidé des points de vue à explorer, comment ils ont assemblé leur distribution rêvée, réalisant qu’ils devaient faire un break dans la production, pour que l’écriture rattrape ce qu’ils étaient en train de tourner et réaliser ce que cela pouvait leur apporter pour les saisons à venir et rendre ce monde immersif et viscéral. Attention aux spoilers.

Pouvez-vous nous expliquer quel était l’attrait pour vous de raconter et d’explorer Westworld, d’une manière très nouvelle et très différente ?

Jonathan Nolan : Lorsque J.J. Abrams nous a appelé Lisa et moi, il nous a raconté cette idée de ce qui se passerait si on retournait la structure et que nous débutions avec les hôtes. Pour nous, cela nous donnait la possibilité de jouer avec tout ce qui nous intéressait, tout d’un coup. C’est le terrain de jeu ultime pour nous parce que nous parlons de l’intelligence artificielle, qui est quelque chose qui me fascine depuis longtemps, mais aussi de l’intelligence humaine ou du manque de celle-ci, des comportements humains et surtout d’une histoire immersive et interactive. C’était comme être dans un magasin de bonbons. J’avais vu le film lorsque j’étais gosse et j’ai vraiment adoré. Mais notre vision de la chose nous permet d’aller vraiment au plus profond de toutes ces questions. Nous voulions aussi explorer ce monde où vivent les techniciens et leurs conflits avec ces créatures avec qui ils interagissent et qu’ils contrôlent. Mais l’idée centrale de traiter l’intelligence artificielle comme nous le faisons ne pouvait pas se refuser.

Lisa Joy : C’était le moment opportun d’explorer l’évolution de la conscience et de l’intelligence artificielle parce que ça n’a plus l’air de science-fiction à ce niveau-là. C’est comme examiner des événements actuels. Mais en plus de ça, pour moi, c’est une chance d’approcher 2 genres différents, en terme de western et de science-fiction, à partir de points de vues improbables avec qui je sens que je pourrais avoir une connexion plus visuelle. L’histoire du vieil ouest est souvent racontée par les yeux d’hommes rugueux qui sont là pour conquérir. Bien évidemment, nous avons pléthore d’incroyables acteurs jouant des personnages uniques mais le focus n’est pas fait uniquement sur l’expérience mâle de l’ouest. Ce sont aussi les femmes et il y a tout un éco-système qui est prêt à être exploré.

Quand avez-vous décidé non seulement des personnages que vous souhaitiez suivre tout le long de l’histoire mais aussi de ces points de vues que vous vouliez utiliser pour explorer l’histoire ?

Nolan : La première chose que nous avons faite est de poser l’entière structure sociétaire du parc. Cela débute par la hiérarchie du parc elle-même. On s’est dit qu’il y aurait le département de la narration, celui des scénaristes. Le département des comportements, qui sont les programmeurs des comportements de base, des détails et filigrane, mais aussi le cœur du fonctionnement en terme de psyché des hôtes. Vous avez aussi un département d’assurance qualité, où ils s’assurent qu’il n’existe aucun bug ni choses étranges pour que les invités puissent jouir d’une expérience parfaite. Vous avez aussi le département sécurité. Nous avons donc établi les structures de la société, puis nous avons choisi nos personnages là-dedans, ceux qui auraient le plus de conflits ou ceux qui interagissent le plus avec les hôtes et les autres personnes des autres départements. Puis nous avons construit la narration à l’intérieur du parc, après avoir joué à plein de jeux vidéo et vu plein de western. Nous sommes partis de la question, non pas de savoir qui sont les héros puisque les invités doivent être les héros, et non de qui sont les méchants, parce que les invités doivent aussi être les méchants, mais de qui sont ces personnages périphériques. Nous mettions en place nos personnages non-joueurs de notre jeu, en insistant sur qui seraient ces personnages dans un jeu de rôle immersif au temps du western. Il y a cette sympathique fille d’éleveur qui sera votre guide en quelque sorte. Il y a le cow-boy chasseur de prime au chapeau gris. Il y a ces hôtes irresponsables qui vous accompagneront dans leurs bêtises. Il y a cette Madame avec ses filles et garçons dans l’hôtel/bordel, qui vous accueillera immédiatement. Nous voulions aussi que l’échelle du parc soit gigantesque. Le film d’origine se déroule dans un petit endroit clos. Lorsque Michael Crichton a créé tout cela, le jeu vidéo à la pointe à l’époque était Pong. Maintenant, nous vivons dans une ère post-GTA, il nous fallait donc une immersion qui soit suffisamment grande pour que vous ne puissiez pas en voir la fin. Il doit y avoir des douzaines, ou même des centaines d’histoires dans lesquelles vous pouvez participer, ce qui vous permet d’avoir toujours des expériences différentes. C’est très différent du film original. Avec la série, les héros et héroïnes sont sortis de ce groupe de personnages périphériques qui sont supposés ne pas avoir d’aventures. Ils sont supposés tout faire pour que les invités se sentent bien ou attirant et les aider à y arriver.

Joy : Je pense qu’il y a une double lecture concernant ces attentes subversives avec ces points de vues. Nous montrons l’Ouest via les yeux de personnes qui sont normalement des personnages secondaires, la demoiselle en détresse, celui qui va donner un coup de main, et la madame qui va lancer quelques mots culottés aux gens qui traversent la ville. Là, il n’y a pas de personnages périphériques. Ils sont leurs propres héros. Chacun d’eux a son libre arbitre et sa propre histoire, ses rêves et ses peurs. Ce que l’on voit en premier est leurs points de vues. Puis, dans un niveau plus large, on voit tout le parc du point de vue des robots, que nous appelons les hôtes. C’est une situation à plusieurs niveaux de points de vues.

En ce qui concerne le casting, avez-vous toujours souhaité avoir des gens non seulement très talentueux mais aussi des gens très connus et reconnaissable qui seraient le choix rêvé de tout le monde ou avez vous juste réalisé que vous aviez un groupe de rôles qui séduiraient des acteurs qui n’auraient sans doute jamais été intéressés par une série télé ?

Nolan : Pour le casting, nous avons fait ça à l’ancienne. Nous avons pensé aux acteurs que nous aimerions voir dans ces rôles et les acteurs avec qui nous aimerions travailler mais nous avons écrit le scénario en premier. Je trouve, que penser à des acteurs spécifiques lorsque vous écrivez, est une distraction mais c’est vrai que nous avons pensé à Anthony Hopkins en amont. Nous avons pensé que si nous pouvions faire ce personnage de la manière dont nous voulions le faire, il nous faudrait un grand acteur. Et ça s’est passé comme ça pour tous les rôles mais si on devait trouver quelqu’un pour jouer Dieu, il nous fallait quelqu’un d’impressionnant. Nous avons pensé nos rôles en fonction de ce qui serait notre distribution de rêve. Nous leur avons envoyé le scénario et ils ont tous dit oui. C’était une première pour moi.

Joy : Nous avons eu de la chance. Ce sont des acteurs incroyablement talentueux. Ils ont donné vie à l’écran avec une toute nouvelle dimension à ce que nous avons tenté de coucher sur papier. Nous sommes chanceux, chacun d’eux est une gemme et c’est personnellement un plaisir de travailler avec eux.

Il y a eu beaucoup de discussions et de spéculations concernant le hiatus que vous avez décidé de prendre pendant la production et vous avez été très clairs sur le fait que vous aviez besoin de plus de temps pour écrire plus avant de tourner à nouveau. A quel moment avez-vous réalisé que cela allait être quelque chose que vous allier avoir besoin de faire ? Et est-ce que HBO a tout de suite adhéré à cette idée de prendre le temps que vous pensiez qu’il fallait prendre ?

Nolan : Oui, nous avons la chance de travailler pour une chaine incroyable dotée d’un héritage de série tout aussi incroyable et qui soutient ses scénaristes et ses producteurs. Ils se sont assurés que ne manquions de rien tout le long de chaque étapes pour que nous puissions faire la série la plus ambitieuse possible. Une des choses sur laquelle nous n’avions pas compté était la complexité de la production. J’ai déjà travaillé pour la télé auparavant et normalement vous pouvez écrire et tourner en même temps. Là c’était un petit peu plus compliqué. Nous avons débuté le tournage très tôt dans le procédé et cette série est un monstre mais un monstre glorieux. Nous avons eu une équipe technique incroyable et des acteurs incroyablement patients et qui nous ont apporté leur support. Tout le monde allait dans la même direction, en essayant d’en faire une série aussi ambitieuse et complète que possible.

Joy : Cette série est tellement géante avec tellement de gens et de choses à gérer. Vous ne créez pas seulement un monde entier de western mais vous créer aussi un monde contemporain technologique. C’est comme de faire 2 séries ambitieuses en même temps. Nous sommes chanceux d’avoir pu travailler avec les gens avec qui nous avons travaillés. Tout le monde a travaillé très dur dans le bon sens, le même sens.

Après avoir eu la chance de pouvoir vous avancer un peu dans l’écriture, avez-vous eu besoin de revenir pour retourner certaines scènes des épisodes que vous aviez déjà tourné ?

Nolan : Je crois que nous avons eu besoin de 2 ou trois petites choses mais dans une production telle que celle-ci, vous tournez les épisodes en même temps et vous tentez de le faire de manière la plus efficace possible. Nous sommes allé dans l’Utah pour tourner le pilote, et nous y sommes ensuite revenu pour tourner des morceaux de tous les épisodes. On a rattrapé quelques trucs qui nous manquaient puis nous avons pu avancer avec les épisodes restants.

Après avoir réalisé combien l’histoire était ambitieuse et avoir le luxe de pouvoir prendre le temps de rattraper l’écriture doit avoir eu une influence sur les saison futures ? Est-ce que cela vous a donné une perspective différente de ce dont vous allez avoir besoin pour avancer ?

Nolan : Pour nous c’est assez différent. Lorsque vous faites un film, vous écrivez le scénario en premier et ensuite vous allez faire le film. Un film qui est écrit pendant le tournage ne fonctionne jamais bien. A la télévision, vous écrivez et produisez en même temps. En vérité il y a quelque chose entre les 2. Alors pour la seconde saison, nous allons en écrire tout ce que nous pouvons et ensuite nous entamerons la production. Nous aurons tous les scénarios et nous pourrons ainsi tourner, ce qui sera très important pour nous. Nous avons tourné beaucoup en décor naturel et nous espérons retourner encore plus dans l’Utah pour la seconde saison si nous sommes chanceux.

Dans les 4 premiers épisodes, on ne voit pas vraiment le monde extérieur ou on ne sait pas encore qui sont vraiment les invités ou les gens qui travaillent en coulisse en dehors de leur rapport avec Westworld. Est-ce intentionnel ? Et qu’espérez-vous atteindre dans ce cas là ?

Joy : Oui c’est intentionnel. A travers cela, la recherche de points de vue a été très importante pour nous, de la manière dont nous avons construit la série. La plupart du temps, et plus spécialement pour les hôtes, nous avons tenté de limiter notre compréhension du monde et par cela j’entends, la compréhension des téléspectateurs de ce monde, tout comme les hôtes appréhendent le monde. On essaie de ne pas trop s’éloigner des créatures que nous suivons à l’écran. De cette manière, les révélations arrivent simultanément pour nous, tout comme c’est le cas pour les personnages que nous décrivons. C’est plus le choix conscient d’un effet de style. Lorsque vous traitez de l’intelligence artificielle et de la robotique humaine, vous devez être très prudents, et plus particulièrement dans notre série où ils sont déjà les protagonistes, pour créer une connexion avec le public, pour que celui-ci n’écarte pas cela et perde l’empathie et la connexion viscérale avec ces personnages. Pour nous il s’agissait d’être très précis dans notre description. Manipuler les points de vue pour avoir l’impression d’être dans la même réalité.

La violence la série, qu’elle soit sexuelle ou physique est souvent terrifiante et horrible et elle permet de compatir pour les hôtes. Etait-ce important pour vous de ne pas trop mettre en valeur cet aspect de l’histoire ?

Nolan : Une partie de ce qui se joue ici est l’idée que chaque fois que cette histoire se déroule, Westworld est plus réel, plus immersif, plus sensuel et plus violent que dans le monde réel. Lorsque vous êtes là-bas, vous avez l’impression que c’est réel. Nous voulions donc dépeindre ces aspects là avec goût mais nous voulions aussi les rendre viscérals. Une partie de ce qui se déroule là-bas est traumatisant pour les hôtes et c’est une grande part de l’histoire. Nous voulions que les gens ressentent de la sympathie et non pas que ce soit un effet comique. C’est parfois traité de cette manière là mais la plupart du temps, il s’agit de compatir avec la détresse des hôtes. Ils n’ont pas choisi d’être là et ils ne comprennent pas qu’ils sont les dindons de la farce. Si vous jetez un oeil dans les jeux contemporains, c’est un cheminement similaire, pas seulement dans le niveau de gore et de réalisme, mais aussi en terme de niveau de sophistication des personnages non-joueurs. Chaque jeu à un moteur physique et un moteur graphique, mais il a aussi un moteur d’Intelligence Artificielle avec cette intelligence artificielle limitée qui dirige ces personnages non-joueurs. Ils ont des conversations, que le joueur soit là ou non pour les entendre. C’est bien évidement très limité mais ils vont dans ce sens là. Personne ne s’inquiète pour ces personnages là lorsqu’on éteint la console ou le PC le soir avant d’aller se coucher. Mais ça deviendra de plus en plus étrange dans les 10 à 20 ans à venir.

Joy : C’est amusant, je ne suis pas joueuse mais une grande partie de ce que nous avons fait pour préparer ça était, pour le plus grand bonheur de Jonah, de jouer à des jeux vidéo ensemble pour comprendre les règles et pour que je comprenne ces jeux. J’ai joué à Grand Theft Auto pour mes recherches et ce fut très étrange mais tandis que je jouais, je réalisais que j’étais une joueuse étrange pour ces trucs. Les individus sont très différents dans leur réaction à la violence à l’écran. Je respecte les règles et les lois de la rue lorsque je joue à GTA (oui c’est plus court aussi). Je m’arrête au Stop et je n’écrase pas les gens. Je suis une très mauvaise joueuse dans ce sens. Je prends juste du plaisir à rouler dans ces rues et à regarder les buildings mais je sais que ce n’est pas l’objectif du jeu. Mais lorsque vous y jouez vraiment, vous n’avez pas à vous sentir mal d’écraser 400 piétons. Tout ce que vous devez faire c’est profiter de tout ce que vous pouvez faire et on vous encourage à le faire dans de nombreux jeux et dans différentes formes de divertissements. Avec cette série, dans laquelle nous méditons sur un nouveau genre de jeu, une chose que nous voulions absolument faire c’est ne pas donner au public la même aise de ne pas avoir de doutes quant à la moralité ou de définir clairement le rôle des joueurs. Nous voulions tendre un miroir aux joueurs en leur demandant si c’était vraiment ce que nous devons faire et ce que cela signifie si on joue de cette manière.

D’après les crédits, vous avez écrit un épisode avec Ed Brubaker, qui est un scénariste de comic book plus connu pour avoir créé le personnage du Soldat de l’Hiver et un arc pour Captain America. Comment s’est-il retrouvé impliqué dans la série et comment était-ce qu’avoir quelqu’un comme lui dans la salle des scénaristes ?

Nolan : Ed faisait partie de l’équipe pour la première partie de la saison et c’est un gars génial. Nous avions adoré son travail sur les comics mais il n’avait jamais travaillé pour la télévision par le passé. C’était très amusant de collaborer avec lui, c’est un scénariste très imaginatif.


Westworld est Copyright © Warner Bros et Jerry Weintraub Productions Tous droits réservés. Westworld, ses personnages et photos de production sont la propriété de Warner Bros et Jerry Weintraub Productions.



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