Les saisons : La rencontre avec l’équipe du film

Date : 27 / 01 / 2016 à 09h00
Sources :

Unification


A l’issue de la projection du film Les saisons, le réalisateur et co-scénariste Jacques Perrin, les conseillers scientifiques Gilbert Cochet et Stéphane Durant (aussi co-scénariste) et le producteur exécutif Olli Barbé sont venus répondre aux questions du public.

Voici la retranscription des échanges qui ont eu lieu. Vous pouvez aussi en visualiser la vidéo en fin d’article.

Jacques Perrin présente le film qui n’a demandé que 2 ans pour être réalisé. Il avait une grande envie de revenir en Europe après ses derniers films. Les saisons se base à la fois sur les saisons mais aussi sur les animaux.

Où a été tourné le film ?

Olli Barbé : En Norvège, en Pologne, dans une forêt jamais exploitée depuis 1 000 ans, qui n’a jamais été coupée et n’a pas d’espèce invasive. On a tourné en Roumanie pour les ours, en Suisse et beaucoup en France. On a tourné dans beaucoup de lieux différents. Ainsi qu’en Écosse et en Hollande car dans ce pays il y a un programme de ré-ensauvagement notamment celui des chevaux sauvages.

Gilbert Cochet : le ré-ensauvagement est un mouvement très récent. On fait souvent la comparaison avec les anciens monuments. Si ils sont détruits, il faut les reconstruire. Pour la forêt, cela prend du temps
Le ré-ensauvagement, c’est laisser certains habitats revenir d’eux-mêmes et les aider un peu en remettant certaines espèces qui ont disparu.
Par exemple, dans la région Rhône-Alpes, il y a 4 espèces de vautours qui ont été réintroduites.
Nous avons fait le tour de France des avant-premières et lancé cette idée de ré-ensauvagement.
En Roumanie, il y a maintenant 6 000 ours, et 0 dans les Alpes, donc nous avons soumis l’idée de la réintroduction de l’ours.
La nature elle-même se porte très bien. L’homme reste contemplatif.
Et ce qui nous manque le plus dans notre monde c’est l’audace. Par exemple le bison a été réintroduit en Allemagne (20 animaux sauvages) dans un lieu où il y a 600 habitants au km2 et cela se passe très bien.
La forêt d’Orléans fait 50 000 hectares. Ce serait bien de remettre des bisons…

En ce qui concerne la séquence avec les petits animaux, est-ce que la prise de son est réelle ou recréée ?

Stéphane Durant : les prises de son sont naturelles. Elles ne sont pas faites à partir des micros des caméras mais par une équipe d’ingénieurs du son qui se déplace parallèlement, avant ou après, les prises de vue. Ils ont passé des mois pour capter les sons les plus ténus.

Comment ont été tournées certaines prises de vues comme les combats d’animaux ou le vol du scarabée ?

Stéphane Durant : les combats sont tous authentiques. Il faut être patient et être là au bon moment, comme pour le combat des ours. C’est extraordinaire à vivre même si cela fait beaucoup de bruit.

Jacques Perrin : : on peut s’approcher des animaux. C’est impressionnant. C’est véritablement une nature sauvage, mais pas forcément méchante. Parfois, il faut se méfier. Mais il faut se méfier encore plus de l’homme.
Nous avons eu deux types de tournage. Celui qui concernait les animaux sauvages. Ils sont filmés grâce au talent de l’opérateur qui s’approche et attend à l’affut. Et celui concernant d’autres animaux comme les loups qui sont emblématiques de la nature sauvage. Nous avons tourné avec des animaux imprégnés qui connaissaient les personnes humaines qui les accompagnaient pendant le tournage.
Pour utiliser ce procédé, on prend des animaux tout petits dans des petits sanctuaires. On a donc des petits loups, renards, mais qui ne sont pas sauvages et on devient leurs parents de substitution. Ils ne sont pas dressés, mais aiment bien notre présence, donc on navigue avec eux. On peut courir à toute vitesse avec eux. Nous avons donc élaboré une machine pour les suivre quand ils foncent à toute vitesse dans la forêt.

Stéphane Durant : on aurait aimé filmer des loups et des lynx sauvages, mais cela n’est pas possible car ils sont peu nombreux et se méfient de l’homme. Si on prend l’exemple de la scène de course des loups avec les chevaux, nous sommes passés par l’artifice de l’imprégnation. Les animaux n’ont pas peur. C’est différent en Afrique où souvent les animaux n’ont pas peur des humains.
Cette technique permet accompagner au plus près le mouvement des animaux et de les envisager comme de vrais personnages. Le Loup court à toute vitesse. Nous avons mis au point un scooter électrique pour éviter tout bruit. Il est étroit et agile pour slalomer entre arbres et a 4 roues. Il transporte devant ou derrière un caméraman avec une steadycam. Un seul caméraman dans notre équipe a été accepté par les loups et c’est lui qui les a filmés.
Nous n’avons pas eu de blessé à déplorer pendant le tournage.

Jacques Perrin : : pour le scarabée, on prévoit le trajet de son déplacement. Cet insecte vole 3-4 jours par an pendant la période de reproduction. Il vole alors avec une grande force, toujours à la même hauteur.
Il faut connaître le déplacement et le rythme des animaux pour pouvoir les filmer au mieux.
On a fait Le peuple migrateur et c’était la première fois de l’humanité que l’on pouvait voler avec des oiseaux.
Avec Océans on a ressenti la sensation de profondeur avec les dauphins.
Dans Les saisons, quand on voit le rideau d’arbres et tous ces gros animaux qui y pénètrent à toute vitesse, il faut connaître la problématique. C’est un bonheur d’avoir cette chance d’épouser ce mouvement.
On est les premiers spectateurs à vivre cela.
On a des bonheurs qui ne sont pas que du labeur. On a de la chance d’être à côté du mouvement des animaux, de vivre cela d’aussi prêt et de le faire vivre au spectateur à travers le film.

Y a-t-il eu des animaux qui sont morts pendant le tournage ?

Stéphane Durant : Dans les vrais combats sauvages c’est toujours ritualisé. Les animaux ne vont jamais jusqu’à la mort et aux blessures graves. Le moins fort s’en rend vite compte et abandonne le terrain.
En ce qui concerne l’attaque du hérisson, il s’agissait d’un de nos hérissons imprégnés car nous avions besoin de mettre la caméra à un centimètre du sol très près d’eux pour les filmer à hauteur. Nous avons donc utilisé un artifice de cinéma avec l’attaque du hibou car nous n’allions pas sacrifier un de nos hérissons !
C’est la même chose avec les loups sur lesquels on tire. On leur à apprit une cascade quand ils sont « touchés » par une balle. Mais c’est l’art du montage que de faire croire qu’ils sont morts.
C’est la même chose pour le sanglier poursuivi par les loups. Il n’est pas véritablement mort. C’est notre sanglier imprégné qui court dans cette scène.
En ce qui concerne la course des loups chassant les chevaux, à notre surprise, les animaux ont accepté de courir ensemble. Mais si un loup était trop près, le cheval ruait et le loup ne se rapprochait plus.

Olli Barbé : Dans cette course, les loups ont eu plus peur des chevaux que l’inverse. Si ils prenaient un coup, ils ne recommençaient plus à s’approcher. Dans la vie réelle, un cheval peut facilement tuer un loup.

Jacques Perrin : pour l’anecdote, on disait aux techniciens « surtout ne faites pas peur aux loups ! ». C’est pour vous montrer à quel point ils pouvaient être dangereux.

Comme avez-vous fait la scène de chasse à courre ?

Olli Barbé : nous avons filmé une vraie chasse à courre. On a travaillé avec un véritable équipage de chien. C’est un paradoxe, car dans nos films, nous avons souvent travaillé avec gens qui chassent à courre ou sont des chasseurs. Cela ne les dérange pas d’être dans des films de Galatée.

Est-ce que le cerf est mort à la fin ?

Jacques Perrin : Le cerf Noeinoeil n’a pas été tué. Il accepte encore plus la présence des hommes maintenant, car je l’ai revu dans un reportage que nous avons fait il y a peu de temps. C’est moi qui devais faire attention à ses bois pour ne pas me blesser.

Le message anti-chasse qui porte vos films ne dérange pas les chasseurs ?

Jacques Perrin : nous avons eu une grande réunion avec des chasseurs. Cela s’est très bien passé au contraire du peuple migrateur. Lors du passage au dessus de l’étang, des chasseurs qui étaient au courant du tournage nous ont tiré dessus.

Est-ce que vous travaillez avec des associations de protection de la nature ?

Gilbert Cochet : Nous avons travaillé avec l’ASPAS (Association de protection des animaux sauvages) pour l’inauguration d’une deuxième réserve sauvage. Lors de l’avant-première du film à Valence, deux amis chasseurs sont venus me voir à l’issue de la projection et m’ont dit « après un film comme cela, on dépose les fusils ». On y va doucement, chacun à son rythme. Il y a beaucoup de chasseurs qui se lamentent de la perte de biodiversité.

Monsieur Perrin, êtes-vous végétarien ?

Jacques Perrin : Non. Lors d’un travail au Canada, nous avons été dans un restaurant de viande. Tout le monde a pris de gros steaks comme ils les font là-bas. Paul Watson (militant écologiste et antispéciste canadien) a aussi commandé un steak. C’est à chacun de voir. On peut aimer la nature et aimer manger de la viande. On ne doit pas jeter l’opprobre sur ceux qui font des choix différents. Je ne suis pas végétarien, mais je ne mange pas trop de viande.

Gilbert Cochet : il y a toujours eu une certaine proximité des hommes avec les animaux. Les dessins dans les grottes de Chauvet ou de Lascaux sont réalisés avec beaucoup de précision. En France, les loutres ont quasiment disparues. Puis elles ont fait un retour nocturne et depuis quelques mois, on trouve de plus en plus de photos de loutres prises de jour.

Avez-vous utilisé des Zoom Angénieux ?

Olli Barbé : C’est le cas. Ils sont faits à Saint Étienne par le groupe Thalès. Nous avions la dernière génération de zoom pour pouvoir filmer d’assez loin. C’est d’ailleurs les meilleurs zooms que l’on peut trouver même sur le marché international.

Avez-vous un avis sur les zoos et les parcs zoologiques en général ?

Stéphane Durant : je suis un scientifique de formation. J’ai passé beaucoup de temps dans les musées à observer les squelettes et les animaux empaillés. Mais le contact avec les animaux vivants sur le terrain est irremplaçable.
Ces films documentaires ne peuvent pas être faits sans des scientifiques. Il y a une énorme documentation derrière et les scientifiques nous accompagnent sur le terrain. Cela leur permet aussi d’approcher les animaux de très près. Avec Le peuple migrateur, ils ont pu partir avec les oiseaux et les étudier in situ en plein air à 2 000 mètres d’altitude.
L’un des ornithologues qui avait 70 ans, a qui on a permis de voler avec les oiseaux, a redécouvert le monde des oiseaux. Les capteurs que nous avons utilisés sur le film ont permis d’étudier la physiologie du vol des oiseaux.
Sur Océan, il y a une publication scientifique qui vient de sortir et qui porte sur une étude faite sur les sardines grâce aux rushs du film. Les scientifiques ont pu étudier le comportement des oiseaux sous l’eau et la façon dont ils capturent les sardines. L’article est paru la semaine dernière.
Les scientifiques sont ravis de nous accompagner et d’étudier les animaux sur le terrain. C’est différent des muséums et cela fait faire un bond dans le travail scientifique.

Jacques Perrin : on a ouvert les portes du zoo ces dernières années. C’est difficile de voir des animaux en prison. On met des animaux dans des réserves, de vastes territoires et on peut observer les animaux. L’observation d’animaux encagés est une mauvaise observation.
Dans la nature on a une meilleure perception de l’animal que dans un musée. Il existe en fonction de son milieu, sinon c’est une observation morte. C’est d’ailleurs pour cela qu’on fait ce genre de film. Peut-être qu’une coexistence est possible si on respecte la forme de vie des animaux.

Gilbert Cochet : les zoos ont comprit cette nouvelle approche et participent à ces programmes de réintroduction. Je vais vous donner deux exemples. Les bisons sauvages ont disparu. A partir d’une quinzaine d’individus dans divers zoo on a permis leur réintroduction. Il existe maintenant 5 000 individus, 2 000 dans des réserves et 3 000 libres en Allemagne et dans les Carpates.
Au Zoo de Villard de Lans, il y a eu la réintroduction de l’ibis chauve. C’est un animal disparu depuis le moyen âge. On les a fait se reproduire dans le zoo puis on les a relâchés dans la nature.
On espère ensuite que tout fonctionne tout seul sans les humains.

Votre film, c’est aussi un vaisseau pour approcher les politiques. Comment toucher le public de non professionnel. Les saisons n’est pas vraiment explicatif. Avez-vous mis en place une plate-forme qui permet d’obtenir plus de renseignements, ou préférez-vous la démarche de laisser le public se faire un avis par lui-même sur ce qu’il voit ?

Thomas Thevenin : (Directeur marketing nouveaux Médias chez Pathé) Les équipes de Galatée et de Pathé ont travaillé avec Small Bang sur le développement d’une plate-forme web qui permet de voir en détail les transformations des saisons et des animaux. Et nous avons créé en plus une application gratuite : Morphosis les saisons qui est un outil pédagogique permettant de voir les interactions homme-nature, et l’impact de ce dernier sur leur évolution.

Stéphane Durant : il y a aussi un énorme travail pédagogique pour les enseignants du primaire et du secondaire. Les documents sont disponibles gratuitement sur le site et ont été envoyés aux professeurs. Et nous avons fait un beau livre sur film ainsi que 3 livres pour enfants et un cahier d’activité.
Nous avons pris conscience progressivement que ce genre de film suscite beaucoup de questionnements et n’apporte pas de réponse, donc nous travaillons autour. Pour Les saisons, dès le départ nous avons créé un site internet et une application. Quand on rencontre le public, on se rend compte de leurs questionnements.

Quelle est la place de la fiction dans le film ?

Jacques Perrin : pour filmer des animaux libres, on ne peut pas le faire avec des animaux sauvages. Ce n’est pas possible à 40 km/heure de gérer le parcours de ces derniers. Nous incitons donc nos animaux imprégnés à se déplacer sur un parcours légèrement balisé. Il ne s’agit pas de dressage. Ils vivent leur vie, à côté de nous. Nous avons un respect mutuel et ils n’ont pas peur de la présence humaine.

Est-ce que votre film comble un vide historique ?

Stéphane Durant : on voulait raconter l’histoire des saisons. A la fin de l’âge de glace, le climat change naturellement. Mais ces derniers 10 000 ans c’est l’homme le principal facteur de changement. Il faut qu’on le voie donc dans des scènes de fiction, à travers des traces humaines, l’utilisation d’une voie romaine, une ombre dans la forêt... L’homme a sa place dans le film. Mais nous voulions que l’homme soit un simple figurant et que ce soit l’animal, l’acteur de premier plan.
On voulait raconter l’histoire humaine du côté des animaux.

Où sont vos animaux ?

Olli Barbé : Ils ne sont pas chez Pathé. Les chevaux sont dans un parc dans les Pyrénées. Les loups sont autour de Toulouse. Les oiseaux sont repartis dans le grand parc de Villard de Lans. Il n’y en a aucun dans des zoos ou des cirques. On a fait très attention au placement de ceux qu’on avait imprégné. Mais la plupart des animaux du film ne sont pas imprégnés.

Un grand merci à Pathé d’avoir organisé cette projection spéciale et cette formidable rencontre avec des personnes passionnées qui nous ont fait passer une heure merveilleuse d’échanges captivants.

Les saisons est un très beau film. Vous pouvez en retrouver la critique ICI.

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VIDÉOS

Rencontre avec avec l’équipe du film :


Bande annonce :


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Les saison la rencontre



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