La belle saison : La critique
La belle saison est un film sur les années 70 en France, sur le mouvement de libération des femmes (MLF) et surtout c’est une magnifique ode aux femmes.
Contrairement à ce que laisse penser le résumé, c’est la campagne qui est, plus que Paris, mise à l’honneur. Et cette dernière est merveilleusement montrée, rehaussée par une lumière superbe et une magnifique photographie. Cette campagne sert aussi à montrer le grand écueil entre la capitale et la province dans laquelle les femmes ont moins de velléité de rébellion et nettement moins d’estime d’elles-mêmes.
Mais c’est bien dans la capitale que se joue les prémices de la révolte des femmes contre leur statut et leurs revendications : salaire identique aux hommes, droit de posséder leur propre corps, avoir une parole libérée qui aurait le même poids que celui d’un homme. Force est malheureusement de constater que 40 ans plus tard, ces points restent tristement d’actualité.
Outre un volet historique très documenté qui m’a fait froid dans le dos en tant que femme, il n’est en effet pas inutile de rappeler la condition féminine en France à une époque pas si lointaine que cela, le film se focalise sur la femme. Pas uniquement l’individu, mais son corps, son estime de soi, l’acceptation de ce qu’elle est et son désir.
Si la réalisatrice, et co-scénariste, Catherine Corsini avoue s’être fait plaisir à travers la magnifique histoire d’amour qu’elle nous conte, ce sont aussi de merveilleux portraits de femmes qu’elle nous livre, interprétés avec grâce par deux actrices lumineuses et passionnées.
Ne cherchez pas dans le film de scènes vulgaires ou racoleuses, vous en serez pour vos frais. Entre un scénario réaliste et touchant et une mise en scène qui ne met jamais mal à l’aise, même lors des scènes plus intimes, on ne peut qu’être happé par tant d’énergie, de passion et de réalisme.
C’est sans masque que le casting évolue et avec le cœur que donne une belle histoire à laquelle chacun souhaite donner le meilleur de soi.
À la très terrienne Izïa Higelin qui interprète avec brio une jeune femme forte qui décide de prendre sa vie en main, répond l’éclatante Cécile de France en femme convaincue par ses idées qui dresse le portait tout en délicatesse d’une femme amoureuse. Deux très belles actrices dont l’alchimie crève l’écran.
Noémie Lvovsky campe une merveilleuse paysanne, mère de l’« héroïne ». Un rôle bien délicat à interpréter, entre ombre et lumière, mais qui offre une image d’un grand réalisme de la femme paysanne corvéable à merci et qui ne souhaite pas de salaire puisque son mari en a un.
La belle saison est un très beau film sur la femme, mais ce n’est aucunement un film contre les hommes. Ces derniers sont bien présents tout au long de l’histoire et ont des rôles qui les mettent eux aussi en valeur. Il n’y a qu’à citer le rôle ingrat du petit ami joué avec une grande délicatesse par Benjamin Bellecour et celui de l’ami d’enfance interprété avec pudeur par Kévin Azaïs pour en être convaincu.
La belle saison allie à un scénario à la fois historique et romantique un splendide hommage aux femmes, celles qui se sont battues pour que nous puissions bénéficier de la société dans laquelle nous vivons, et celles qui réussissent à s’accepter telles qu’elles sont et décident d’aller de l’avant. C’est d’ailleurs en hommage aux premières que Catherine Corsini à décider d’appeler ses personnages principaux Carole et Delphine.
En effet Carole Roussopoulos est la première vidéaste à avoir filmé les luttes des femmes ainsi que le premier défilé homosexuel en marge du rassemblement du 1er Mai 1970, et Delphine Seyrig qui a coréalisé avec elle des films militants.
Avec une photographie lumineuse, un montage très réussi, une mise en scène sans heurt, une très belle histoire et des acteurs formidables dont Cécile de France et Izïa Higelin sont tout simplement éclatantes, La belle saison est un film qu’il serait dommage de manquer. D’autant que l’amour ne fait pas oublier que la lutte ne doit jamais s’arrêter car avec tous les événements qui ont eu lieu ces dernières années, les droits des femmes (et d’une certaine façon ceux des hommes) n’est ni acquis pour l’éternité ni un objectif encore atteint.
Ensoleillé, touchant, délicat : un beau moment d’émotion, n’en déplaise aux esprits étriqués.
SYNOPSIS
1971. Delphine, fille de paysans, monte à Paris pour s’émanciper du carcan familial et gagner son indépendance financière. Carole est parisienne. En couple avec Manuel, elle vit activement les débuts du féminisme. Lorsque Delphine et Carole se rencontrent, leur histoire d’amour fait basculer leurs vies.
BANDE ANNONCE
FICHE TECHNIQUE
Durée du film : 1 h 45
Titre original : La belle saison
Date de sortie : 19/08/2015
Réalisateur : Catherine Corsini
Scénariste : Catherine Corsini, Laurette Polmanss
Interprètes : Cécile de France, Izïa Higelin, Noémie Lvovsky, Kévin Azaïs, Laetitia Dosch, Benjamin Bellecour, Sarah Suco, Nathalie Beder
Photographie : Jeanne Lapoirie
Montage : Frédéric Baillehaiche
Musique : Grégoire Hetzel
Costumes : Jürgen Doering
Décors : Anna Falguères
Producteur : Elisabeth Perez pour Chaz Productions, France 3 Cinéma, Artémis Productions
Distributeur : Pyramide Distribution
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